Chapitre 25
Derek était soucieux. Ce que venait de lui apprendre Jordan Parrish par message ne lui plaisait pas du tout. Le policier avait longtemps hésité mais avait fini par lui révéler quelques informations particulièrement... Piquantes. Son regard dériva alors vers Stiles, quelques mètres plus loin, qui somnolait sur le canapé, la petite Amelia dormant dans ses bras.
Ils formaient un beau tableau, à eux deux. Deux âmes peu épargnées par la vie qui se réparaient progressivement sans s'en rendre compte. Deux êtres qui ne se connaissaient pas encore beaucoup, mais qui tenaient déjà précieusement l'un à l'autre. Deux humains qui se ressemblaient sans le savoir.
Voir Stiles aussi protecteur envers elle malgré ses peurs faisait plaisir à Derek. L'hyperactif campait toujours sur ses positions énoncées deux jours plus tôt et n'en démordait pas. Néanmoins, il faisait des efforts pour essayer de se prouver qu'il n'était pas mauvais et qu'Amelia ne craignait rien avec lui. Parce qu'il avait la volonté d'avancer, ne serait-ce que pour la petite qui, à son tour, avait subi.
C'était Stiles qui avait décidé de lui dire pour sa mère, la veille. Ça n'avait pas été facile mais Derek avait été d'accord avec lui sur un point : plus ils attendraient, plus elle réagirait mal. En un sens, ils avaient limité les dégâts et c'était déjà ça.
Bien sûr, Amelia ne ferait pas son deuil tout de suite et elle avait eu bien du mal à accepter le fait que sa mère ne reviendrait plus. Cette jeune femme, si jeune et si belle était partie bien trop tôt. Malgré ses appréhensions, Stiles avait su trouver les mots et avait fait preuve d'un étonnant courage puisqu'il n'avait pas craqué une seule fois devant la petite. Il avait voulu rester fort, pour elle.
« Tu sais Mel, ta maman est peut-être au ciel, mais elle te voit de là-haut. Elle veille sur toi et elle sait que tu es courageuse, elle l'a toujours su. C'est ton ange gardien et elle sera toujours là pour toi. »
C'était bateau mais c'était tout ce que Stiles avait trouvé et Derek n'ayant pas été consolé quand il avait perdu ses parents n'avait aucun exemple à donner. Ces mots simples avaient toutefois fait leur effet, puisqu'ils avaient endigué les pleurs d'Amelia et un peu aidé à accepter la chose.
« Elle me voit là ? »
« Elle te voit toujours. »
Depuis, elle n'avait plus lâché Stiles. Néanmoins, malgré son choc, l'enfant avait su se montrer courageuse et assez extraordinaire. De toute façon, Derek avait toujours remarqué qu'elle avait une étincelle spéciale en elle, un peu du même genre que Stiles. Ce truc un peu à part qui semblait les relier et les faire tenir malgré l'adversité. Cette chose qu'il devait protéger coûte que coûte.
Protéger de cet homme toujours dans la nature.
C'était malheureusement la réalité, non seulement parce qu'il le savait, mais également parce que Jordan Parrish avait fini par lui apprendre de la pire des manières... En lui apprenant qu'il était obligé de faire équipe avec l'homme dont le nom était mentionné dans le dossier de Stiles. Ça avait au moins un avantage : le policier pouvait garder autant que possible un œil sur cette pourriture. Néanmoins, il était dans l'incapacité de surveiller les moindres de ses faits et gestes. Pour l'instant, il se tenait à carreau, mais nul doute qu'il repasserait à l'action un jour.
Ce qui déplaisait le plus à Derek n'était pas tant ce fait que de savoir, toujours par l'intermédiaire de Parrish, qu'il demandait plus ou moins régulièrement au shérif quand Stiles comptait rentrer. Une chose était sûre, le loup ne laisserait pas son humain retourner chez lui tant que cet homme serait là. Il était hors de question qu'il continue de souffrir à cause de lui.
Il fallait être fort pour se retenir d'aller trancher la gorge de cet individu qui le répugnait. Ce n'était pourtant pas l'envie qui manquait à Derek : pourtant, il se contenait. Pour Stiles et Amelia, parce qu'il voulait être là pour les protéger et aussi parce qu'on n'atteignait pas un membre des forces de l'ordre aussi facilement. Les répercussions seraient terribles et les recherches du meurtrier, d'autant plus draconiennes. Il fallait un plan et une excellente organisation.
Un autre élément qui faisait peur à Derek, c'était cette affaire sordide de tueur en série. C'était Stiles, l'ancien Stiles, qui avait parlé de la première victime à la meute. Un peu plus tard, dans cet hôtel où il avait passé plusieurs nuits, il avait touché un mot à Derek concernant la seconde.
Le loup savait depuis quelques jours que Meadow était morte, mais Stiles ne lui avait pas dit qu'il s'agissait de la troisième victime. Encore une fois, c'était Parrish qui le lui avait appris. Et ça lui foutait les jetons. Elle était très jeune, comme les deux autres et surtout... Elle connaissait Stiles. Alors, tout naturellement, Derek se demandait si tout ceci avait un rapport et avait même fini par se demander si Stiles était sur la liste des sept victimes prédéfinies par le tueur en série. C'était peut-être un peu tiré par les cheveux mais à force, le loup se disait que tout était possible.
Alors il était heureux de savoir que Stiles n'était pas allé en cours aujourd'hui. Parce qu'au moins il était là, en sécurité au loft, avec lui. Ça l'arrangeait aussi puisque depuis l'annonce du décès de sa mère, Amelia ne cessait de réclamer Stiles, de quémander du temps avec lui. Elle l'adorait et il l'apaisait. Cette nuit, elle avait d'ailleurs fait quelque chose d'inédit. Ce matin, Derek et Stiles avaient eu la surprise de se réveiller et de découvrir un petit corps entre eux. Elle dormait encore quand ils avaient ouvert les yeux et Derek se souviendrait toujours de ce moment.
Ils s'étaient regardés et Stiles lui avait souri. La douceur et la plénitude dans son regard avaient fait naître une impression en lui, aussi agréable qu'espérée. Stiles guérissait doucement et ce regard, peut-être qu'il l'aurait plus souvent dans le futur. C'était le souhait le plus cher de Derek.
C'était en repensant à ce moment que le loup s'assit sur un des fauteuils en face du canapé. Il vit un petit livre coloré sur la table basse et sa nature curieuse reprit le dessus. Il le prit alors et le feuilleta. Il esquissa sincèrement un petit sourire en voyant les petites images enfantines agrémentées de quelques petits paragraphes. Son regard dériva à nouveau sur les deux endormis et une bouffée de tendresse l'envahit alors qu'il imaginait Stiles lire l'une des histoires de ce bouquin à Amelia. Il faisait des progrès, c'était certain et prenait peut-être enfin conscience du fait qu'il n'était pas mauvais pour elle. Au vu de son attitude protectrice et du temps qu'il passait à nouveau avec elle, Stiles avait forcément réfléchi et fait un point avec lui-même.
Une vibration au niveau de la poche du loup l'obligea à stopper sa contemplation. Il dégaina son téléphone et soupira presque de soulagement en constatant qu'il ne s'agissait pas de Parrish. Derek avait assez de choses à penser, il n'avait pas besoin de mauvaises nouvelles supplémentaires. Alors le fait que le message soit de Lydia le rendait léger. Elle n'aurait rien de mauvais à lui à prendre, à part peut-être un mort, et encore. Par chance, ce n'était pas le cas.
[De : La Banshee] / 16h08
Je suis en bas avec Isaac et Jackson. On peut monter ?
[A : La Banshee] / 16h08
Allez-y, mais faites pas de bruit.
Sa réponse était aussi claire que concise. Tranquillement, il reposa le livre pour enfants sur la table basse et alla déverrouiller par avance la lourde porte du loft. Ainsi, ils pourraient entrer facilement sans avoir à sonner et il le notifia à la banshee en lui envoyant un autre message. Il se rassit à sa place et se demanda vaguement ce que les adolescents voulaient avant de passer outre, puisqu'ils lui diraient la raison de leur venue lorsqu'ils seraient là.
Deux pauvres minutes plus tard, la porte se mit à coulisser dans un grincement qui fit grimacer Derek. Il jeta un œil du côté de ses deux protégés et constata avec soulagement que le bruit inévitable ne les avait pas réveillés. Une aubaine. Lydia, Isaac et Jackson apparurent alors dans l'encadrement de la porte que la première referma aussi doucement que possible. Le maître des lieux leur fit signe d'aller dans la cuisine. C'est alors que les trois adolescents remarquèrent le doux tableau formé par Stiles et Amelia, dormant tous deux sur le canapé. Ils étaient mignons tous les deux. La petite était contre le torse de Stiles qui l'entourait de ses bras... Recouverts de semblants de cicatrices rondes. Isaac n'était pas vraiment surpris, il savait mais le voir, c'était autre chose. Jackson et Lydia eurent réellement l'air choqués. La banshee ouvrit la bouche comme pour dire quelque chose mais Derek se leva et lui fit signe de se taire avant de leur indiquer à tous la cuisine. Ayant vu leurs regards, il alla ouvrir un placard dans le fond, en sortit un plaid et alla l'étaler avec délicatesse sur les deux endormis. Sa main s'attarda un peu dans les doux cheveux de Stiles. Ce dernier gigota un peu et Derek sentit son rythme cardiaque changer. Il se réveillait.
Stiles était vraiment mignon, quand il y repensait. Son visage retrouvait peu à peu des couleurs mais sa peau claire continuait de contraster avec ses grains de beauté qui le parsemaient avec un hasard harmonieux. Ses pommettes étaient hautes et son petit nez retroussé était tout simplement adorable. Il adoucissait ce visage régulièrement défait par les émotions. Le regard de Derek ne put alors s'empêcher de descendre vers ses lèvres, qu'il aimait tant embrasser. Fines et charnues à la fois, elles l'attiraient sans arrêt. Stiles collectionnait les paradoxes mais c'est ce qui faisait son charme. Accroupi devant le canapé, Derek reporta son attention sur la petite qui ne quittait pas les bras de son humain. Elle aussi avait un adorable petit nez retroussé, ainsi que son lot de grains de beauté. Derek fronça alors légèrement les sourcils. Il s'était déjà fait la réflexion qu'il y avait un air de ressemblance entre elle et Stiles mais c'était seulement à cet instant qu'il en prenait réellement conscience. Par prévention, il vérifierait quelque chose plus tard.
Les yeux de Stiles papillonnèrent doucement le temps qu'ils s'habituent à la lumière ambiante du salon. Le doré dans son regard apparut progressivement et la douceur qui l'habitait calma instantanément Derek, dont la main s'amusait toujours avec ses cheveux châtains. En voyant son loup près de lui, l'hyperactif sourit doucement.
- Je t'ai réveillé ? Chuchota Derek pour ne pas perturber le sommeil d'Amelia.
- Non, t'inquiète pas, c'est pas toi, répondit Stiles sur le même ton.
Derek vit alors la main fine de Stiles s'amuser à son tour avec les longs cheveux d'Amelia qui dormait si bien dans ses bras qu'elle semblait s'accrocher à lui. Comme si, dans son sommeil, elle avait peur qu'on la sépare de « Tonton Stiles ». Le loup scruta le visage de son humain et, ne décelant pas le doute sur son visage, fut soulagé. Il prenait effectivement confiance en lui, peu à peu et de toute manière, il le fallait.
- Tu veux que je vous amène en haut ? Lui demanda Derek d'un ton toujours aussi bas.
- Non pas la peine, on est bien là.
Il bailla et ses yeux furent brillants : il avait encore sommeil.
- Alors rendors-toi, lui dit doucement le lycan.
- A tes ordres, Sourwolf, répondit Stiles en souriant.
Par mimétisme ou par simple envie, Derek esquissa un léger sourire à son tour avant de se pencher et de déposer avec la plus grande délicatesse qui soit ses lèvres sur celles, si belles et tentatrices, de son humain. Le baiser fut court et chaste, mais apporta son lot de sérénité aux de parties. Derek se releva et Stiles ferma les yeux. Nul doute qu'il ne mettrait que peu de temps à se rendormir. Le loup se détourna et sentit le cœur de Stiles se poser sur le rythme le plus régulier qui soit, presque calqué sur celui d'Amelia. Alors, il rejoignit la cuisine et lorsqu'il eut fermé la porte, il remarqua les trois paires d'yeux curieux qui le fixaient. Oh, ils n'avaient rien vu, simplement... Peut-être le loup et le kanima avaient-ils entendu le léger bruit qu'avaient fait leurs lèvres en rentrant en contact. Sans doute avaient-ils écouté plus ou moins sans le vouloir leur semblant de conversation. En tout cas, ils semblaient à la fois perplexes et curieux. Autant Isaac se doutait fortement du fait qu'il se passait quelque chose entre eux, autant en avoir la preuve auditive, c'était quelque chose. Jamais il n'avait entendu son ancien alpha parler avec une telle douceur à quelqu'un. Même s'il avait toujours été gentil avec lui, comme le grand-frère qu'il n'avait jamais eu, jamais ladite douceur avait atteint ce niveau. Jackson, de son côté, avait une tête de merlan frit. Lui qui avait toujours connu le Hale comme un loup loyal mais froid et un tantinet porté sur la bagarre et la violence... C'était un spectacle étonnant qu'il lui offrait là. Son côté protecteur envers Stiles était franchement surprenant, parce qu'on ne parlait pas de n'importe qui : on parlait de cet hyperactif qui, parfois, parlait au point de rendre amorphe son entourage. Un hyperactif plus calme que jamais et il ne savait finalement pas si c'était bon signe. La seule chose qui semblait positive dans cette situation, c'était son entente avec la petite fille qu'il avait vue lovée dans ses bras. Combien de temps allait-elle rester là, d'ailleurs ? Un souvenir lui revint toutefois : il revit instantanément les traces rondes sur ses bras.
Lydia, de son côté, semblait un peu plus détendue qu'à son arrivée. Comme si voir que Stiles allait bien lui suffisait. De plus, Isaac lui avait répété brièvement la conversation et la jeune femme n'avait rien dit, mais elle avait eu envie de fondre. Elle ne fut même pas étonnée de penser que Stiles et Derek formeraient un beau couple.
Derek enfila un masque de neutralité même s'il sentait clairement les odeurs des trois adolescents et que l'expression de leur visage parlait pour eux.
- Alors, qu'est-ce qui vous amène ? S'enquit-il en croisant ses bras sur sa poitrine.
- Stiles n'est pas venu en cours aujourd'hui alors on s'inquiétait, répondit Isaac. Il ne nous a envoyé aucun message.
C'était donc ça.
- Il valait mieux qu'il reste avec la petite, elle n'allait pas très bien, répondit laconiquement le loup.
Les informer de la mort de la jeune femme qui l'avait amenée ici n'était pas sa priorité. Ça viendrait, mais pas tout de suite.
- C'était quoi, sur ses bras ? Demanda Jackson de but en blanc, sans se soucier du reste.
Derek manqua de soupirer. Bien sûr, les trois adolescents n'étaient pas aveugles et il avait vu leurs regards lorsqu'ils avaient aperçu l'hyperactif endormi. Un instant, le loup se demanda ce qu'il devrait dire mais opta très vite pour jouer la carte de l'honnêteté : puisque Stiles avait décidé de retourner en cours le lendemain, mieux valait les mettre au courant pour qu'ils le protègent au cas-où.
- Des brûlures de cigarettes, répondit-il soudainement.
Isaac savait. Par conséquent, son expression ne changea pas. Néanmoins, si Jackson sembla troublé, Lydia eut l'air complètement bouleversée. Jackson passa un bras autour d'elle pour lui permettre de garder l'équilibre. Elle avait beau être son ex petite-amie, ils gardaient une excellente amitié. Derek leur expliqua alors dans les grandes lignes ce qu'ils avaient besoin de savoir : Stiles fuyait un homme qui lui voulait du mal. Il n'entra pas dans les détails car après tout, le reste ne les regardait pas et Lydia, comme Jackson et Isaac, n'avait pas besoin de connaître les traumatismes de Stiles. C'était privé, c'était son histoire qu'il devait apprendre à gérer. Avant, il s'efforçait de faire ça seul. Maintenant, il avait Derek pour le soutenir et c'était suffisant, il n'avait probablement pas envie que quelqu'un d'autre soit au courant. Bien sûr, les trois adolescents étaient surpris par la confession du loup et hochèrent la tête lorsqu'il leur demanda de faire attention à Stiles au lycée. Par la suite, Lydia, que la nouvelle avait bien déboussolée, ouvrit son sac et en sortit les cours qu'elle avait pris pour Stiles. Isaac s'enquit de l'état de Stiles et Jackson écouta le tout religieusement. Les quatre êtres surnaturels discutèrent un moment puis le kanima osa poser la question qui le taraudait :
- La gamine, vous la gardez combien de temps ?
- Le temps qu'il faudra, répondit Derek de manière évasive.
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Le soleil commençait à se coucher et l'explosion de couleurs dans le ciel se reflétait dans le regard de Stiles. Il aimait ce qu'il voyait. C'était apaisant et permettait à son cœur de garder un rythme régulier.
Ses trois camarades étaient partis deux heures plus tôt et cela faisait tout juste une demi-heure qu'il était debout. Amelia était partie goûter en compagnie de Peter, qu'Isaac avait croisé sur le chemin en rentrant chez lui. Et lui, il restait là, devant l'énorme fenêtre quadrillée. Son visage baigné par la lumière lui donnait l'impression étrange d'être réchauffé et il se plaisait à regarder l'explosion flamboyante se nuancer. Avec sa mère, il adorait se lever aux aurores pour regarder le lever du soleil. Il s'asseyait à côté d'elle dans le jardin, ses fesses sur l'herbe fraîche, légèrement humidifiée par la rosée. Elle passait un bras autour de lui et pointait le ciel du doigt. Ils restaient là un moment : trente minutes, peut-être quarante-cinq puis Noah les rejoignaient et la famille était réunie. Ils discutaient, riaient en regardant les couleurs s'affronter, les deux parents étreignant leur fils avec amour.
A cette époque-là, il avait neuf ans et la maladie n'avait pas encore emporté Claudia. Quelques mois plus tard, la maman devenait un ange aux aurores.
Maintenant qu'elle n'était plus là, Stiles préférait admirer le crépuscule. C'était autre chose, la palette de couleurs s'inversait par endroits. Ça lui évitait de se souvenir avec trop de précision de ces moments qu'il aurait dû chérir avec davantage de vigueur. Mais c'était un enfant à l'époque, il n'avait pas pleinement conscience des choses. Sa vie était belle, avant. Harmonieuse, rassurante, avec une routine qu'il appréciait beaucoup. Claudia était morte au moment où le soleil se levait. Stiles préférait désormais le voir se coucher.
Surmonter sa perte avait été extrêmement difficile. Elle était son monde, celle qui continuait de graviter autour de lui, toujours là quand il en avait besoin. Son père l'assistait, dans l'ombre, un sourire sans cesse scotché aux lèvres. Et puis elle était partie, emportant la gaieté de Noah avec elle. Par la suite, Stiles avait dû s'accrocher à Noah pour s'en remettre et se relever de cette épreuve si difficile.
Et il avait plus ou moins réussi.
Mais tout avait basculé deux ans plus tard quand cet homme s'était glissé dans son lit un soir de novembre durant lequel le shérif était d'astreinte au poste.
Stiles, malgré son jeune âge, avait rapidement compris que sa vie ne serait plus jamais pareille, que son enfance avait été détruite. Adieu l'innocence, enfance, période d'insouciance. Bonjour le silence, il fallait sauver les apparences. A côté, le surnaturel, c'était merveilleux, même s'il avait manqué de mourir à plusieurs reprises.
En soupirant, Stiles s'éloigna et partit en quête de son loup préféré. Il avait besoin de lui, sa présence le rassurait tout autant qu'elle lui faisait du bien. Il savait que Derek ferait disparaître chez lui cette fébrilité qui faisait frissonner son corps, qui lui donnait l'impression que ses jambes pouvaient céder à tout moment. L'ayant vu monter à l'étage un peu plus tôt, l'hyperactif décida de ne pas perdre de temps et d'aller le retrouver. Il ouvrit la porte de la chambre qu'ils partageaient et le trouva assis au bureau à côté de son lit. Derek semblait concentré sur des papiers et photographies, à tel point qu'il n'avait même pas fait attention à Stiles. Une première. Ses sourcils étaient froncés et son regard, fixé sur les documents. Ses traits tendus témoignaient également de sa concentration. Stiles, curieux, se rapprocha et se mit derrière son loup. Son cœur rata un battement lorsqu'il vit les photos des deux victimes, plus celle de Meadow, ainsi que des résumés de tout ce qu'il savait. Stiles frissonna : voir des cadavres d'inconnus, ça allait. Son amie, en revanche... La blessure n'était pas encore refermée. Il allait mieux, mais ce n'était pas encore ça. Il essayait simplement de ne pas trop y penser et ça marchait selon les moments. Il aurait besoin de temps.
- Qu'est-ce que tu fais ? Demanda-t-il timidement au loup.
Derek manqua de sursauter mais se retint juste à temps. Il sentit Stiles poser ses mains sur ses épaules et tenter d'y dénouer les nœuds qu'il sentait en s'essayant au massage. Le loup était tendu.
- Je vérifiais simplement quelque chose, répondit-il laconiquement.
C'est alors qu'il rassembla tous les documents et les rangea dans le premier tiroir à sa portée. Stiles avait vu les photos et il sentait l'anxiété dans son odeur. De plus, la mort de son amie étant récente, il valait mieux le ménager, même s'il s'en sortait plutôt bien. Sa décision sur ce qu'il allait faire fut vite prise.
- Tu semblais intéressé par les meurtres... Tu as trouvé quelque chose ? S'enquit sincèrement Stiles.
- Non, je cherchais simplement à voir comment relier ces meurtres, à essayer de comprendre ce qui les relie, pourquoi le meurtrier a ciblé ces personnes-là et pas d'autres. Je patauge, j'ai rien de nouveau.
Derek se releva alors et se retourna vers Stiles qui avait ramené ses mains vers lui. Le lycan le toisa un instant avant de se rapprocher de lui. Il se pencha et embrassa Stiles sans attendre tout en le serrant contre lui. Et l'adolescent se laissa embarquer dans un baiser empressé mais tendre. Pourtant, Derek l'embrassait sans être réellement à fond, parce qu'il était préoccupé et qu'il ne voulait pas l'inquiéter pour l'instant. Son objectif premier était d'aider son humain à penser à autre chose et c'était ce qu'il comptait faire, peu importe si ça le rongeait lui.
Parce qu'il avait effectivement trouvé quelque chose qui lui faisait froid dans le dos. Ce n'était pas grand-chose, juste une constatation comme une autre. Une découverte qu'il aurait dû faire bien plus tôt. C'était un détail que la meute entière aurait dû remarquer mais auquel personne n'avait fait attention, pas même Stiles lui-même.
Il resserra d'autant plus son étreinte sur le plus jeune, comme pour s'assurer qu'il était toujours là, dans ses bras. Bien vivant. Serrant le tissu de son haut entre ses longs doigts fins. Il fut également presque heureux de savoir qu'il n'était pas un loup, qu'il ne pouvait pas capter ses émotions au travers de son odeur. La peur. L'angoisse.
Alors peut-être que Derek se laissait un peu emporter par ce qui semblerait être, au premier abord, une crise de paranoïa. Mais ce n'était pas sa faute.
Il tenait trop à Stiles pour ne serait-ce qu'imaginer le perdre. Alors il l'embrassa longuement et le souffle erratique de son humain le détendit peu à peu, sans pour autant le calmer complètement. Mais ce n'était pas grave.
Stiles n'était pas le seul à savoir faire semblant.
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