Chapitre 19


- Il lui faut du Nutella, elle adore le Nutella !

Stiles tournait en rond les sourcils froncés. Décidément, malgré les courses faites à chaque fois par Peter, ce dernier avait oublié l'élément le plus important pour la petite Amelia : cette fameuse pâte à tartiner qu'elle prenait un malin plaisir à étaler sur d'immenses tranches de pain le matin. En enfant modèle, Amelia ne l'avait pas réclamée, mais Stiles s'était rappelé de la liste faite par la mère de la petite et il était hors de question de passer à côté, cette fois.

- Tout le monde adore le Nutella, lui fit remarquer Derek, assis sur le canapé, la fillette dans les bras.

Le petit ange qu'elle était lisait à sa guise un livre avec quelques images. Pour son âge, elle était plutôt douée et on voyait qu'elle aimait ça.

- Oui mais elle, c'est ma princesse, fit Stiles le plus naturellement du monde. Le Nutella, tu adores ça, hein ma chérie ?

La petite releva la tête et la hocha, simplement, un doux sourire sur les lèvres.

- Tu vois ? Je te l'avais dit ! S'exclama Stiles, triomphant.

Derek sourit légèrement, amusé. Voir Stiles comme ça lui permettait de respirer à nouveau, c'était... Plaisant. Ses yeux étaient encore un peu rouges et gonflés, son dodo de quarante-cinq minutes seulement n'avait pas suffi à effacer complètement les traces de chagrin sur son visage mais c'était déjà ça. Il y avait toujours cette ombre dans son regard mais elle était mineure par rapport au moment où ils avaient discuté. Le loup pouvait également constater un autre changement qui lui faisait plaisir : Stiles semblait moins crispé, plus détendu. Sa confidence était très récente et pourtant, elle semblait déjà avoir un effet positif pour lui. Derek n'allait pas s'en plaindre, bien au contraire. Tout ce qu'il voulait, c'était le bonheur de Stiles et autant dire qu'il ferait tout pour qu'il l'atteigne.

- Je... Faut que je prévienne Peter, il faut en acheter ! Et promis, quand tout ça sera terminé, je te rembourserai. A moins que tu préfères que je te règle déjà quelques petits trucs maintenant ? S'enquit l'hyperactif.

Bon, rembourser sans argent n'était pas chose aisée mais il trouverait bien une solution. Derek l'accueillait déjà depuis tellement de temps, Stiles ne pouvait pas continuer de le faire dépenser pour des choses de ce style alors qu'il n'avait rien à y gagner. Pour être honnête, l'hyperactif avait un peu l'impression de profiter de la situation et trouvait donc normal de payer certaines choses. S'il restait, autant qu'il participe un minimum.

- Stiles, soupira Derek, t'es à sec.

- Alors... Oui, peut-être, concéda Stiles, un poil gêné. Mais je pourrais emprunter un peu à mon père...

- Hors de question que tu « empruntes » à ton père, le coupa le loup, sachant parfaitement qu'emprunter signifiait subtiliser, chez Stiles.

- Tu prends soin de moi et je suis sûr qu'il serait ravi de voir que tu ne m'as pas buté et que tu fais tout pour que je sois bien, fit l'adolescent, l'air complètement innocent.

Derek haussa un sourcil. Stiles avait certes raison, mais là n'était pas la question.

- Il pense toujours que t'es chez Scott, lui fit-il remarquer.

- Tu marques un point, concéda une nouvelle fois l'hyperactif. Bon, bah plus qu'à me trouver un taf.

Nouveau soupir de la part de Derek, qui caressait les cheveux de la petite, concentrée sur son livre malgré les bavardages des deux hommes.

- Concentre-toi sur tes cours. Retourne d'abord au lycée et après, on reparlera de tout ça si tu veux, fit Derek, l'air faussement excédé.

Non, définitivement, Stiles n'arrivait plus à l'agacer, sauf lorsqu'il disait des choses idiotes, ce qui n'arrivait pas vraiment. En ce moment, l'adolescent lui remuait plus le cœur qu'autre chose. Le jeune homme en question capitula.

Lorsque Peter finit par rentrer quelques minutes plus tard, il se fit littéralement harponner par Stiles qui lui expliqua le problème ou plutôt le drame. L'air exaspéré au possible, le plus vieux des Hale sortit un pot en verre de la grande poche de courses. Stiles reconnut sans mal le graal. Ni une ni deux, il l'attrapa et alla le ranger dans la cuisine avant de remercier Peter.

- Tu es mon psychopathe préféré, lui dit le jeune homme d'un air sérieux.

Puis, il s'en alla retrouver la petite Amelia, toujours aussi bien calée dans les bras de Derek. Peter resta un instant interdit, assez dubitatif. Cessant d'essayer de comprendre le garçon car c'était une pure perte de temps, il finit par accepter ses propos comme un genre de compliment. Parce qu'il ne savait pas comment le prendre, sinon. Finalement, vu l'énergumène, il préférait ne pas savoir.

Stiles s'installa tranquillement, assis à côté de Derek. Sa cuisse touchait clairement celle du loup, qui passa un bras autour de ses épaules pour le rapprocher un peu plus de lui dans un geste... Complètement naturel. L'adolescent esquissa un petit sourire faible mais doux à l'attention de cet homme aux yeux bleu-vert avec un fond de rouille. Cet homme qui faisait battre son cœur sans pour autant qu'il mette de mots sur ce sentiment. Cet homme qui l'avait écouté et n'était pas parti. Cet homme qui l'avait aidé à parler, et même si ça n'effaçait en rien ce qu'il avait vécu, Stiles commençait à se détendre, à ressentir un début de soulagement. Les choses qu'il ressentaient étaient encore fraîches et c'était un peu le désordre dans sa tête mais ça allait. Peut-être que c'était la présence et l'écoute de Derek qui lui faisaient cet effet. Même s'il n'arrivait pas encore à démêler tous ces nœuds dans sa tête, ce n'était pas grave. Parce qu'il n'était pas seul. Derek n'était pas comme son père : il l'écoutait, le croyait, lui laissait la chance de penser que sa version était réelle. Après, la situation n'était pas la même puisque le loup n'avait aucun lien avec celui qui lui avait volé son enfance, néanmoins, il était persuadé que ça aurait été différent. De par sa nature lupine, Derek aurait su si un ami à lui abusait d'une personne proche de lui. Noah Stilinski avait été et était toujours aveuglé par l'image qu'il avait de son meilleur ami, Emile Chabrier. Et rien ne changerait tant qu'on ne lui mettait pas de preuve sous le nez. Mais comment prouver quelque chose de ce genre ? Quelque chose qui remontait à tant d'années ? Avant, ça aurait été possible. Néanmoins, Noah, complètement fermé à l'idée, avait refusé que l'on fasse subir des examens médicaux et psychologiques à son enfant. Parce que Stiles avait menti pour attirer l'attention. Stiles secoua la tête intérieurement. Hors de question de penser à ça maintenant, il avait assez donné, assez pleuré dans les bras du loup qui fixait Amelia assez différemment de ce qu'il avait pu faire jusque-là.

Il la couvait du regard comme si elle était précieuse à ses yeux. Il la connaissait à peine, ne l'avait jamais vue avant que Meadow ne l'amène et pourtant, Stiles sentait qu'il ferait tout pour la protéger, mais pas juste par devoir. Il avait le regard de celui qui savait, qui était conscient des choses. Lui qui avait eut une belle enfance commençait à réellement comprendre la valeur de l'innocence. C'était à l'adolescence que sa vie avait basculé mais ça, c'était une autre histoire.

Stiles posa sa tête sur l'épaule de celui qu'il commençait à considérer comme son loup. Il n'avait pas peur, contre Derek. Il avait une entière confiance en lui. Il fallait dire que le lycan lui avait prouvé à de très nombreuses reprises qu'il ne lui ferait pas de mal, bien au contraire. Pas une seule fois Derek n'avait cherché à profiter de lui, d'aucune manière et de tout temps. Alors oui, il avait ses défauts et était autrefois bien loin de l'ange aux yeux de Stiles : il le plaquait contre des murs, le frappait parfois, le rabaissait un peu, mais ce n'était jamais rien de grave. Malgré son précédent tempérament de feu – parce qu'il s'était bien assagi par la suite – Derek avait toujours eu des principes et savait quand s'arrêter. Ne pas dépasser les limites. Bien vite, Stiles était remonté dans son estime et il avait bien diminué toutes ces démonstrations de violence à son égard.

Aujourd'hui, Derek le protégeait. Il le soignait, cherchait à guérir ses maux, qu'ils soient physiques ou de l'ordre du psychique, sans faire de différence. Il le logeait, pansait ses blessures, le nourrissait... Il prenait soin de lui comme personne ne l'avait fait jusque-là et sans rien demander en retour à par son honnêteté. En même temps, Stiles n'avait jamais eu de relation de ce genre avec quiconque. Même Malia ne faisait pas autant de choses de ce genre. Leur relation était ce qu'elle était, pseudo-amoureuse et ça s'arrêtait là. Ils s'embrassaient – et Stiles avait toujours été mal à l'aise sur ce sujet-là, Malia avait eu envie qu'il lui fasse l'amour, Stiles avait toujours refusé le moindre attouchement et c'était tout. Il n'y avait rien eu de plus. Avec Derek, c'était différent à tous les niveaux. Stiles aimait l'embrasser. C'était agréable, doux et il en redemandait. En fait, avec Derek, il ne ressentait ni gêne, ni peur, ni malaise. Bien sûr, il ne songeait absolument pas à tenter le diable pour l'instant. Dépasser son traumatisme n'était pas à l'ordre du jour. En ce moment, Stiles avait besoin de calme le temps d'assimiler tout ce qui lui arrivait et surtout ce début de relation avec Derek car c'en était bel et bien une et l'ignorer serait complètement idiot. Comme pour confirmer ses pensées, le loup déposa un doux baiser sur sa tempe, l'air de rien. Stiles sourit une nouvelle fois et, tout en se collant un peu plus contre lui, il interrogea Amelia sur sa lecture avant de la prendre dans ses bras et de la câliner comme s'il s'agissait de sa petite sœur. Puis, la fillette s'amusa avec ses cheveux, encore. Et Derek les regardait tous les deux de ce regard qui ne trompait pas. L'odeur de Stiles sentait encore la tristesse mais elle s'amenuisait, lentement et les étincelles dans les yeux d'Amelia menaçaient gentiment de se copier dans les siens.

Peter fit la grimace devant tant de mièvrerie. Il ne savait pas son neveu si... Niais. Et le pire, c'était qu'il n'avait cette attitude que lorsque Stiles se trouvait à ses côtés. Il n'était pas naïf, il savait qu'ils s'étaient au moins déjà embrassés, ça se sentait dans leurs odeurs respectives qui commençaient à se mêler entre elles. C'était lent mais présent.

Le signe d'une relation qui commençait.

Et Peter ne voulait pas continuer à voir tant de mièvrerie, cela ne lui rappelait que trop bien son célibat. Frustré, lui ? Tout à fait. En y repensant, il se demanda quand est-ce que boucle d'or repasserait au loft. Sa compagnie – plutôt divertissante, il fallait l'avouer – lui manquait... Surtout quand il se retrouvait seul avec deux amoureux qui ne se l'étaient même pas encore dit et qui s'occupait d'une gosse comme si c'était leur fille. Si ça continuait, il allait passer de la frustration à la jalousie.

xxx

- Demain, je retourne en cours, fit Stiles.

Derek colla le dernier pansement sur sa peau et releva la tête vers lui. Les yeux bleu-vert s'ancrèrent dans ceux de son vis-à-vis. Sa main s'attarda sur la peau de son torse, jusqu'à côté de son pansement, dans une caresse légère et distraite.

- Tu te sens prêt ? Lui demanda le loup, l'air soucieux.

Leur conversation était récente, ne datait que de quelques heures et il pourrait aisément comprendre si Stiles ne se sentait pas apte à retourner au lycée. S'il voulait prendre du temps pour se remettre de leur discussion et de cette première confession réussie, Derek le soutiendrait.

Le regard de l'adolescent se voila.

- Il faut bien que j'y retourne un jour où l'autre, soupira Stiles. Je peux pas rester là indéfiniment à ne rien faire. Et puis je me dis que ça peut peut-être... Me changer les idées.

- Dans ce cas, commença Derek, je pense que...

- Par contre, le coupa Stiles sans s'en rendre compte, tu t'occupes bien d'Amelia, d'accord ? Je veux pas rentrer et savoir qu'elle a manqué de quoi que ce soit.

Cette dernière phrase eut un étrange écho dans la poitrine de Derek. Rentrer. Comme si Stiles parlait de son foyer. Ce n'était sans doute pas ce qu'il avait voulu dire ou signifier, alors le loup cacha son trouble, parce qu'il fallait avouer que cette possibilité lui faisait tout drôle. Cela faisait déjà plusieurs jours que Stiles logeait chez lui et semblait bien s'y plaire. Derek pouvait comprendre : concrètement, c'était le seul endroit où il était sûr d'être en sécurité. Et puis... Il y avait cette attraction entre eux, qu'il savait être réciproque. Il le sentait dans son odeur tout autant qu'il entendait les battements de son cœur. Loin de lui faire peur, ça le rassurait. Malgré toutes les relations catastrophiques qu'il avait pu avoir, il savait que , c'était différent. Stiles ne lui voulait pas de mal, bien au contraire.

- Elle ne manquera de rien, lui assura le loup en retirant finalement sa main.

Voyant que le lycan avait terminé de le soigner, Stiles renfila son t-shirt et sa veste propre, puisqu'il s'était douché peu de temps avant et qu'il avait déjà couvert le bas de son corps avant que Derek ne vienne pour s'occuper de lui. A la phrase du Hale qui sonnait comme une promesse, Stiles sourit doucement et lui dit :

- On va se coucher ?

Pour toute réponse, Derek lui prit la main et l'emmena dans sa chambre. Il lâcha l'adolescent et se déshabilla lentement, évitant tout geste brusque qui pourrait pousser Stiles à se faire de fausses idées. C'est ainsi qu'il se retrouva en boxer, dans le lit et qu'il concentra son regard sur son téléphone pendant que Stiles enlevait le surplus de vêtements. Comme toujours l'adolescent garda son t-shirt et le rejoignit, se glissant rapidement sous les draps. Derek comprenait mieux maintenant ce besoin qu'il avait de montrer son corps le moins possible. C'était subtil mais il avait fini par remarquer toutes ces petites choses que Stiles faisait. Alors dès que son petit corps fut à l'abri sous la couette, Stiles sembla se détendre et Derek se rapprocha de lui après avoir posé son téléphone éteint sur la table de nuit. Stiles le regarda, attentif à ses gestes. Il ne le craignait pas, il se demandait simplement ce qu'il comptait faire.

Et la réponse ne se fit pas attendre.

Derek se pencha lentement sur lui, posa sa main calleuse sur sa joue si douce et la caressa doucement du pouce. Le regard de Stiles, ancré dans le sien, semblait... Calme. Bien. Pour en être sûr, Derek s'autorisa à tricher un peu en réactivant ses sens olfactifs surdéveloppés. La tristesse était toujours là, tapie dans l'ombre à côté de la souffrance, toujours là. Néanmoins, par-dessus tout ça, il sentait la joie, la tranquillité. Pas de peur à l'horizon. Stiles était bien avec lui, il ne le craignait pas. Mieux, Derek sentait autre chose poindre en même temps qu'il le vit.

L'adolescent avait baissé son regard sur ses lèvres et les lorgnait avec une timide envie. Puis, il reporta ses yeux dans ceux du loup, l'air un peu perdu, comme s'il lui demandait silencieusement la permission. De sa joue, sa main descendit, jusqu'à se glisser sur la nuque de l'adolescent. Avec lenteur, Derek se rapprocha et scella leur lèvre d'un doux baiser qui le fit frissonner. Stiles y répondit timidement mais il le fit et ce simple fait fit s'emballer le cœur de Derek. Il passa son autre bras autour de l'hyperactif et le rapprocha de lui, jusqu'à ce qu'ils se retrouvent collés. Stiles s'accrocha au loup et fit durer le baiser aussi longtemps que possible tant il aimait ce contact. Une main sur la joue râpeuse de son lycan barbu préféré, Stiles garda les yeux fermés en se collant encore plus contre lui, si c'était possible. Il oubliait tout. Seul comptait Derek, avec les baisers qu'ils s'échangeaient actuellement. Et même si un début d'excitation montait en lui, il l'ignora complètement, le balayant d'un revers de pensée. Une boule de chaleur gonfla agréablement dans son ventre et il réalisa que Derek faisait naître tellement de sentiments en lui que c'en était affolant. Mais il s'en foutait, parce que ça ne l'affolait justement pas le moins du monde.

Et même si Stiles avait soudainement envie de dire plein de choses à Derek, il ne le fit pas. Même s'il désirait exprimer ce qu'il ressentait, il garda le silence.

Derek mit fin au baiser, se recula un peu et le dévora du regard, à tel point que cette attention surprit l'adolescent dont les joues rougissaient de manière adorable. A cet instant, il se sentit spécial, précieux aux yeux de Derek. Et Stiles songea que le loup lui était également précieux, à un point qu'il n'imaginait même pas. Un diamant brut, une perle rare. Le lycan lui sourit, se retourna et éteignit la lampe de chevet, seule lumière de la chambre. Il se remit dans sa position initiale et sentit l'hyperactif se blottir contre lui. Une bouffée de chaleur l'envahit et il entoura instinctivement Stiles de ses bras, l'enfermant dans une étreinte protectrice, un cocon sécurisant. Il ferma les yeux et fut étonné de sentir l'adolescent bouger, gigoter. Une seconde, il imagina que Stiles se sentait mal, un peu trop à l'étroit alors, automatiquement, il desserra son étreinte pour lui laisser plus de liberté. Cependant, l'odeur du jeune homme dans ses bras n'était pas en accord avec ce qu'il pensait. Parce qu'en fait, Stiles gigotait pour se remonter dans les bras de Derek et pouvoir se retrouver au niveau de son visage, pas juste à celui de son torse. Parce qu'il n'avait pas fini de l'embrasser et ça, Derek finit enfin par le comprendre. Et même si Stiles ne le vit pas, il sentit le sourire mutin de son loup alors qu'il posait ses lèvres contre les siennes avec un peu moins de timidité qu'auparavant.

C'est ainsi que de nombreux baisers furent échangés dans le noir de la chambre de Derek.

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