Chapitre 47
Une larme solitaire roula sur sa joue et celle-ci réchauffa sa peau froide. Elle porta ses mains glacées à sa bouche pour les réchauffer et s'éloigna au ralenti, afin de graver en mémoire ce moment à la fois éprouvant et rempli d'émotions. Le cœur toutefois comblé, elle quitta le cimetière et sans but précis, avança sur le trottoir silencieux où seuls les craquements de ses pas sous la neige pouvaient s'entendre. Elle s'entoura de ses bras et poussa la grille du parc pour y entrer. Il était vide, les balançoires étaient couvertes de neige. Pourtant, d'une main tremblante de froid elle épousseta le manteau blanc pour s'y asseoir. Un bruit de métal abîmé accompagnait les mouvements de la balançoire. Kate esquissa un sourire, exhala un soupir qui laissa échapper quelques nuages de fumées. Depuis la mort de Paolo, dix mois venaient de s'écouler. La profonde plaie qu'elle portait au cœur était désormais refermée. Grâce à Nazir, les souvenirs les plus difficiles commençaient lentement à s'estomper. Elle célébrait la vie et venait de le promettre à sa mère.
En effet, après des relations diplomatiques compliquées, les États-Unis avait enfin consenti à reconnaître leur erreurs passées. De plus, la tentative d'assassinat qui avait été porté sur elle et l'incapacité de la sécurité des Etats-Unis à arrêter ce groupe d'hommes au passé douteux avaient été critiqué par de nombreuses personnalités politique très proche de Nazir.
Cette réconciliation lui avait permis d'être là aujourd'hui.
Nazir avait consenti à se rendre à New York pour rencontrer de nombreux dirigeants mais ce n'était pas sans difficultés. Le cheikh vouait encore une rancune farouche contre certaines personnes. Seulement pour elle, Nazir avait concédé à mettre de côtés les rancœurs pour lui permettre de parler à sa mère.
- Je te colle quatre gardes armés et tu es quand même parvenue à en se semer deux sur quatre.
Kate releva les yeux vers cet homme vêtu d'un long manteau noir. Ses cheveux de jais étaient parsemés de flocons de neige, mais ces derniers ne mettaient pas longtemps à fondre comme si la chaleur du désert d'Hamza se diffusait partout en lui.
Kate sourit en posant un pied à terre pour stopper le mouvement de la balançoire.
- Mais pas toi, lui dit-elle en rougissant alors que le lion s'approchait.
Son cœur se mit à battre à mesure qu'il avançait dans ce style très londonien qui lui offrait un port de tête presque aristocratique.
- En effet tu ne peux pas m'échapper mon ange, je suis partout et nulle part à la fois.
Il agrippa les cordes de la balançoire de ses mains enfermées dans un cuir noir pour la dominer de toute sa hauteur.
- Tu m'as suivi ? Je pensais que tu avais une réunion importante.
- J'en avais une en effet, mais dès que mes gardes m'ont averti que ma femme se rendait à l'endroit qui est à l'origine de ce voyage, j'ai jugé bon de la rejoindre.
Ses yeux noirs se plissèrent ensuite.
- Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu étais prête à y aller ?
- Parce que je voulais le faire seule et j'avais tellement de choses à lui raconter.
Le cheikh dressa un sourire.
- J'espère que tu as passé le moment où je t'enferme en prison ?
- Non, car c'est probablement la partie qui a plus de sens pour moi. Après tout il s'agissait d'une erreur de jugement qui a conduit à la mort que tu as trompé pour me sauver.
Il serra les mâchoires tout en passant une main sous son menton.
- Merci d'avoir accepté de venir pour moi.
- Et je le ferais autant de fois qu'il sera nécessaire de le faire.
Elle se retint de pleurer alors qu'il posait déjà ses lèvres sur les siennes.
Elles étaient si chaudes qu'elle se mit à rire.
- Il fait zéro degrés et tu es chaud comme le réveil d'un volcan.
Il esquissa un sourire diabolique en serrant sa taille pour l'aider à descendre de la balançoire.
- J'ai le sang chaud habibti, précisa le cheikh en passant sa main dans ses cheveux.
Elle lui sourit en retour et prit les pans de son manteau noir en fixant son torse.
- Est-ce que tout va bien tu es sûre ?
- Oui, je vais bien, c'est juste que...je suis un peu troublée par ce voyage. Jamais je n'aurai pensé un jour retourner ici, à New York. Tu sais la nuit dernière j'ai fait un cauchemar dans lequel tu me laissais ici. Tu n'arrêtais pas de répéter que c'était fini entre nous et que...
Il posa son pouce sur ses lèvres pour l'empêcher de continuer.
- Je te rassure c'était juste un cauchemars, car je serais incapable de te laisser ici. Le simple fait d'y penser me fait bouillonner le sang.
Il prit sa main pour l'entraîner hors du parc.
- Depuis que l'on est ensemble, nous n'avons jamais eu une seule dispute, reprit-il l'air amusé. Peut-être que ton subconscient avait besoin d'en imaginer une.
Kate émit un petit rire puis esquissa je grimace.
- À quoi ça ressemble ?
- Tu étais très en colère et moi, je n'arrêtais pas de te suivre mais chaque fois que...enfin...j'avais l'impression que quelque chose m'empêchait d'avancer.
- Alors il s'agissait bel et bien d'un cauchemar car c'est moi normalement qui n'arrête pas de te suivre.
En effet, songea-t-elle en souriant intérieurement.
Pendant ces longs mois, Kate avait repris les cours avec l'approbation de son mari. Se remettre à niveau avait été essentiel à sa survie car elle avait toujours eu l'impression d'être en retard sur le monde qui lui, avait continué d'avancer sans elle.
Désormais elle pouvait se concentrer sur des associations dans le besoin et épauler Nazir dans son devoir. Sa vie commençait à avoir enfin un sens et chaque moment était précieux.
- Est-ce que tu as dit à ta mère que tu étais marié à un homme austère, impitoyable et possessif ? Le même genre d'hommes qu'elle t'avait formellement déconseillé, lança-t-il alors qu'ils marchaient sur le trottoir enneigé et silencieux.
- Eh bien je lui ai révélé pire que ça.
- Ah oui ? S'enquit-il avec son accent chaud en fronçant des sourcils.
- Oui, confirma-t-elle en se mordant les lèvres sans le regarder. Je lui ai confié que j'allais avoir un bébé avec cet homme austère, impitoyable et possessif...
Kate sentit son cœur frapper ses tempes. Une pression sur sa main l'obligea à s'arrêter et à confronter le regard du cheikh. Elle rejeta la tête en arrière pour affronter sa paire d'yeux aiguisé qui était en train de la dévisager avec une émotion au fond du regard.
Lui, cet homme si impassible, était dérouté, semblait attendre qu'elle lui donne d'autres explications pour assimiler l'information.
- Qu'est-ce que tu as dit ?
- Je t'en prie Nazir ne te fâche pas je...
- Je ne suis pas fâché, la coupa-t-il avec empressement. Je veux savoir quand ? comment ? Es-tu certaine ?
- Oui j'en suis certaine, lui dit-elle en esquissant un faible sourire. Raya m'a aidé. Je crois que j'ai dû oublier de prendre la pilule quand nous sommes retourné dans le désert d'Hamza.
Il fronça des sourcils comme si son cerveau marchait à pleine vitesse.
- Mais c'était il y a trois mois, tu es enceinte depuis trois mois ? S'exclama-t-il en embrassant sa silhouette d'un regard inquiet.
- Je l'ai su que récemment, Raya m'a donné de quoi le vérifier mais j'étais tellement paniqué que j'ai préféré attendre de...je t'ai menti quand je t'ai dit que je voulais me rendre à l'hôpital pour le visiter. En réalité Raya m'a emmené voir une gynécologue pour confirmer le test de grossesse.
Kate se mordit la lèvre presque à sang.
- Je suis enceinte depuis trois mois et deux semaines. Je voulais attendre notre retour au palais pour te le dire parce que j'avais peur.
Il tiqua en prenant son visage en coupe comme si ce qu'elle disait n'avait aucun sens logique pour lui.
- Peur de quoi ?
- Peur que tu me laisses ici.
Un éclair mécontent passa dans ses yeux.
- Je peux savoir ce qui t'a laissé entendre que je ferais une chose aussi stupide ?
- Eh bien je...nous n'avons jamais réellement discuté d'avoir des enfants Nazir. Tu n'as jamais abordé le sujet, et puis tu n'étais pas pour te marier alors je me suis bêtement dit que...un bébé n'était pas dans tes projets.
- Oh oui bêtement ! Je te le confirme ! Gronda-t-il sans élever la voix avant d'écraser ses lèvres sur les siennes.
- Tu aurais dû m'en parler Kate, et alors je t'aurai expliqué à quel point je désire plus que tout avoir des enfants avec toi mais que j'ai suffisamment été égoïste pour envisager de te brusquer alors que tu voulais finir tes études.
Des larmes de joie coururent alors sur ses joues.
- Pardon, murmura-t-elle en posant son menton sur son torse. Tu es content alors ?
- Je serais heureux quand tu seras en sécurité au palais, de préférence au lit, alitée avec une armée d'infirmières à ton chevet, dit-il avec un sérieux en baissant les yeux sur son ventre.
- Nazir tu n'es pas sérieux ?
- Oh que si, confirma-t-il en la soulevant.
Kate hoqueta en s'accrochant à ses épaules.
- Ça sera ta punition pour m'avoir laissé dans l'ignorance, reprit-il en approchant son visage du sien.
Kate ne put s'empêcher de sourire alors même que le cheikh lui, continuait d'afficher le sérieux impitoyable d'un guerrier.
- Dans ce cas, je l'accepte, murmura-t-elle trop heureuse pour l'affronter...
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