Chapitre 6 : Ilona


 Je fixais Mila sans un mot. J'étais totalement abasourdie, je n'arrivais pas à croire ce que j'avais pourtant sous les yeux.

Mila ne pouvait pas être avec mes kidnappeurs. Impossible.

-Mila ?! Qu'est-ce que tu fous là ? Ils vont te faire du mal ! Dégage !

Ses yeux s'arrondirent. Elle était sans doute surprise que je crois encore à son innocence. Moi aussi à vrai dire, et je devais avoir l'air d'une idiote naïve, mais je m'en fichais. Je ne pouvais croire que Mila m'avait à ce point.

Le visage de mon amie s'emplit alors d'une profonde tristesse.

-I-Ilona, bredouilla-t-elle. Ils... Ils ne me feront aucun mal. Je suis avec eux.

Ma tête retomba en arrière, tandis que sa voix résonnait dans mon crâne. « Je suis avec eux ». Tant de déception, de colère, de peine, de tristesse, de rage, de dégoût provoqués par cette phrase...

Mon silence exprimait mieux que n'importe quels mots l'ouragan d'émotions qui détruisaient mon cœur.

Elle déglutit, et la tristesse évacua mon esprit, ne laissant place qu'à la colère.

Si je n'avais pas été attachée à un lit, à cause d'elle, d'ailleurs, je me serais levée et je l'aurais frappée.

Puis je pensais à Léa et Raphaël, et l'appréhension remplaça la colère.

-Et... Et Léa et Raphaël ? Ils... demandai-je d'une voix tremblante.

Je n'osais pas prononcer ces mots, qui me feraient perdre absolument tous mes amis.

-Non, me rassura Mila. Eux, ce sont les meilleurs amis qu'on puisse avoir...

Elle sourit tristement et compléta :

-Avec toi.

-Je n'ai jamais été ton amie, hein ? demandai-je, autant pour moi que pour elle.

-Si. Bien sûr que si. Tout ce qu'on a vécu ensemble, ça comte pour moi, Ilona. Beaucoup. Au départ, je n'étais venue à ta rencontre que pour t'espionner, c'est vrai, mais au fil du temps je suis vraiment devenue ton amie.

Je restai choquée qu'elle m'avoue de but en blanc qu'elle ne s'était rapprochée de moi que pour m'espionner, mais je ripostai vite :

-Mon amie, tu parles ! Tu m'as menti pendant toutes ces années !

À côté de moi, le « Boss » observait la scène d'un air amusé, mais je l'ignorai :

-Tu m'as MENTI, Mila ! C'est vraiment ça l'amitié pour toi ? Me mentir pendant quatre ans, puis aider à mon kidnapping, c'est ta démonstration d'amitié ?! Je m'en serai bien passée, merci ! Putain, mais tu te rends compte de ce que tu me dis ?!

Elle se mit à pleurer. Oui oui, à pleurer. Elle pleurait alors que c'était moi qui avait été trahie, qui était attachée à une table chirurgicale, qui ne savait pas ce qu'il allait se passer pour elle.

Elle pleurait avec beaucoup beaucoup d'égoïsme.

-Arrête.

Mon ton était glacial, j'aurais presque pu l'assassiner avec.

Elle se tut aussitôt, et releva la tête d'un air surpris.

Ce fut à mon tour d'avoir les larmes aux yeux.

-S'il te plaît, ne fais pas comme si tu ne t'y attendais, fis-je, d'un ton désormais plus triste qu'en colère.

Elle se mit à trembler, et moi à éviter son regard. Nous étions deux filles qui s'aimaient tant et qui s'étaient mutuellement brisées.

-Écoute, me dit-elle. Je t'adore, Ilona, je me déteste de devoir te faire subir ça, mais toi et Layla, vous détenez, involontairement, les réponses à toutes les questions auxquelles personne ne peut répondre. Mais si nous pouvions résoudre ces mystères, l'humanité en sortirai grandie ! Nous ne savons pas exactement tout ce que nous pourrions faire, mais ce serait grandiose ! Peut être... Peut être que mes parents pourront être ramenés à la vie.

-Attends, attends. Quoi ?! Tes parents sont morts ?!

-Pas mes parents adoptifs, que je t'ai présenté, et qui font parti de notre groupe...

Leur groupe : leur secte bizarre.

-... mais mes parents biologiques oui.

-Oh... écoute, Mila, je suis désolée pour tes parents, mais tu te rends compte de ce que tu dis ? Ramener les morts à la vie ? Mais t'es folle, ma parole ! Complètement ! Tu te rends compte de la catastrophe que ça ferait ?! Tout le monde ramènerait les siens, et auraient une vie éternelle, on va mourir de faim, mais sans pouvoir mourir, jusqu'à ce que la Terre explose à cause des humains ! Tu t'en rends compte, quand même !?

Elle me fixa, puis dit d'un ton sec :

-T'inquiètes, on a tout prévu. Par contre, si tu t'oppose à nos projets comme ça, tu seras sans doute plus là pour le voir.

Et elle tourna tourna les talons et partit en fermant la porte derrière elle.

J'écarquillai les yeux, choquée par ses derniers mots.

Le Boss se leva, me sourit et me dit :

-Bien, je vais y aller aussi. Alessio va venir, n'hésite pas à lui dire si tu as besoin de quoique ce soit.

Il quitta lui aussi la pièce, me laissant seule avec tout ça.

Je me mis à pleurer.

Une dizaine de minutes plus tard, la porte s'ouvrit nouveau sur Alessio.

J'étais toujours en pleurs, mais, surtout, je n'en pouvais plus d'être allongée sans pouvoir bouger. J'avais un besoin fou de me dégourdir les jambes, de faire circuler le sang dans mes veines, de me gratter le bras, d'essuyer mes yeux et mon nez qui coulaient.

Je vis Alessio qui me regardait d'un air gêné, sans savoir quoi faire, et je le supplia :

-Alessio, s'il te plaît, détache moi, j'ai besoin de bouger.

Il hésita, avant de secouer la tête :

-Je peux pas, désolé.

Je me mis à pleurer de plus belle, ayant toutefois encore assez d'honneur pour insister.

Il serra les dents, observa mes larmes qui redoublaient, se dirigea vers la porte, la ferma à clé, mis la clé dans la poche de son jean, se rapprocha de moi, sortit un trousseau d'autre clé de la poche de son sweat cette fois, et commença à ouvrir mes menottes. Mon poignet droit, que je commençai aussitôt à remuer quand il fut libre, mon poignet gauche, et je m'assis pour enfin bouger le haut de mon corps, et ce fut le tour de mes chevilles.

Je me levai aussitôt, vacillante au début, mais je retrouvais vite mon équilibre. Je regardais le jeune homme avec moi, hésitant entre l'attaquer et le remercier. Toutefois, j'éliminai la première option, car il était méfiant et aux aguets, et bien plus musclé que moi. S'il devait y avoir confrontation, je serai perdante. Je le détaillai alors un moment, avant de dire d'une voix à peine audible :

-Merci.

Il esquissa un léger sourire, avant de pointer mes jambes du menton.

-T'as intérêt à bouger. Ce que je suis en train de faire, c'est interdit, et ma s... je pourrai avoir de graves ennuis. Ça va pas durer longtemps.

Je fronçai les sourcils en entendant son hésitation :

-Ta quoi ?

-Rien, répondit-il, agacé.

Je haussai les sourcils et me mit à faire le tour de la pièce pour me dégourdir les jambes.

Le silence uniquement entrecoupé par mes bruits de pas finit par devenir gênant.

-Alors, c'est qui cette Iris ? demandai-je d'un ton taquin.

Il haussa les sourcils :

-Je suis étonné que tu t'en souviennes. Avec la découverte que Mila est avec nous, tu devrais être en larmes et répéter : « ce n'est qu'un cauchemar, ce n'est qu'un cauchemar » en boucle.

-Pourquoi, vous enlever si souvent les gens ici que tu sais comment ils réagissent ?

Il se mordit la lèvre :

-Non, mais je sais qua c'est comme ça que réagissent les gens.

Je me tournai complètement vers lui :

-Tu le sais d'expérience ?

-Hein ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? Bien sûr que non !

Mais son ton était faux, ses paroles pas sincères. Il mentait.

Je relevai les yeux vers lui, le fixai pendant un moment, avant de demander d'une voix douce :

-Kidnappeur, ou kidnappé ?

-Mais arrête, je te dis ! cria-t-il. Tu sais rien de moi !!

Je le regardai pendant un long moment. Je savais que mes yeux perturbaient les gens, comme ceux de Layla. Peut être que si je le regardais longtemps...

-Pourquoi tu me regardes comme ça ? demanda-t-il, sur la défensive.

-Kidnappeur, ou kidnappé ? insistai-je.

C'est à ce moment là que c'est arrivé pour la première fois.

Je sentis mes yeux se révulser, et mes genoux lâcher. Quand à mon esprit, il partit bien loin.

J'étais dans la peau d'un jeune garçon, d'une douzaine d'année. Il courait dans un champ de coquelicots ensoleillé en riant. Derrière lui, la voix d'une petite fille, qui, j'en avais la certitude absolue, était sa sœur, qui lui criait de l'attendre. Et moi-le garçon- qui lui criait que le dernier arrivé au bout du champ serait une poule mouillée.

J'étais heureux. J'étais bien, réchauffé par les rayons du soleil, enivré par l'odeur des fleurs à mes pieds, avec la certitude qu'il nous restait une heure avant de rentrer à la maison, où Maman nous attendrait avec un bon repas...

Je me retournais pour narguer Amelia, ma sœur, je me délectai de son sourire rieur. Je l'aimais tellement.

Mais soudain, son sourire se transforma en grimace de peur, et elle hurla :

-ALESSIO !! Attention !

Je n'eus pas le temps de me retourner. Quelque chose heurta mon crâne, et je m'écroulai.

Tout était flou, mais j'entendis un hurlement-celui de ma sœur-, et le bruit d'un corps qui tombait à côté du mien. Puis des voix d'hommes, deux :

-Mais t'es fou, ma parole ! C'est un gamin !

-Justement ! Il a a peu près leur âge ! C'est parfait !

-Mais...

-Il n'y a pas de mais. Tu sais bien qu'on a besoin de monde pour nous aider.

-Ah ouais, et tu pense qu'un gosse va beaucoup nous aider ?

-On sait jamais !

Soupir, puis :

-Ok, mais, la fille ? Elle est trop jeune.

-On l'amène avec nous. On fera pression sur le gamin avec.

Je tentai de dire quelque chose. Mais la douleur était trop forte, et je m'évanouis.

Je reviens à moi avec une profonde inspiration. J'étais allongée par terre, Alessio était accroupi à mes côtés et me regardai d'un air inquiet :

-Ilona ! Ça va ?!

Je le regardais, les yeux écarquillés. J'en étais sûre, Alessio était le petit garçon de ma vision.



____________________________

Hey, c'est moi (non pas de commentaires méchants cette fois!)

Alors ? Que pensez vous de la trahison de Mila ?

Et surtout, de cette vision sur le possible passé d'Alessio ?

N'oubliez pas de voter et commenter si ça vous a plu !

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top