Mayssane essuie les larmes qui se sont échappées du barrage qu'elle avait érigé en même temps qu'elle s'était faite la promesse de ne plus jamais revenir ici. Depuis, elle s'est tellement battue... Elle a repris le contrôle de ses jambes mais jamais de son cœur. Il a toujours été brisé. Emma était le ciment qui le faisait tenir. Après son décès, les fissures se sont rouvertes et tout s'est effondré.

                D'elle deux c'était elle qui méritait le plus de vivre. Mais la vie ne fonctionne pas au mérite. Mayssane le sait, tout comme elle sait qu'elle portera à jamais la culpabilité d'avoir causé sa mort.

               En quelque sorte, l'océan lui a arraché la réponse à sa question. Emma était la réponse. Tout était simple avec elle. Une évidence.

              La Veilleuse de l'Océan admire le ciel, puis l'eau. Tout sauf la terre. Tout sauf ce qui lui rappelle qu'elle n'est plus entière, qu'un bout d'elle gît sous les coques des bateaux. Elle regarde Anwar. Il lui sourit.

              Elle se surprend à l'admirer, lui qui n'a même pas sourciller durant son récit. Il faut être quelqu'un de fort pour être capable d'entendre tout ce que les gens ont sur le cœur. On ne se confie pas à ceux qui ont peur de la douleur, ni à ceux qui ne l'ont jamais connu. On ne montre ses plaies qu'à ceux qui ont su guérir les leurs en les acceptant.

Anwar est différent, c'est une force tranquille. Une de celles qui lit entre les vagues.

-Moi je sais qui tu es.

               Mayssane entrouvre la bouche, elle sent son cœur s'accélérer, battre plus fort qu'il ne l'a fait ces dernières années. Elle est pendue aux lèvres de son ami. Car oui il n'a fallu que quelques jours pour qu'elle le considère comme un ami. Certains moments intenses vous rapprochent plus qu'une longue amitié et certains gestes marquent votre existence car ils l'ont tout simplement sauvé.

Finalement, elle et lui, c'est... C'est tellement évident.

Évident. Comme avec Emma.

-Tu es la Veilleuse de l'Océan.

            Une larme unique se détache de ses cils pour tracer un sillon différent des autres sur ses pommettes. Un sillon de soulagement. Et de bonheur.

-Anwar, je crois que c'est toi ma réponse...

Et elle sourit, d'un sourire si beau que même l'océanle lui rend...

FIN.