❁ Chapitre 20 : Rapiécés ❁

Samedi 6 février, fin de matinée

Point de vue d'Heidi :

Encore sur mon nuage depuis la veille, je reviens des courses le cœur plus léger. Le décès de Brita me chamboule toujours autant mais je commence à entrevoir la lumière au bout du tunnel grâce à l'agréable soirée passée avec Viktor. Sa présence a le don de m'apaiser.

Sans le savoir, il m'aide à penser à des choses plus gaies, me permet de me changer les idées. Et ça n'a pas de prix, surtout en une période aussi difficile.

Mon souhait de rester positive à toute épreuve se retrouve toutefois bien vite avorté. À peine ai-je fait un pas dans la pièce de vie que je me jette en arrière et hurle de terreur.

Un mannequin rapiécé macabre pend du plafond et se balance de gauche à droite comme si trois minutes top chrono s'étaient écoulées après qu'il y ait été accroché.

Les yeux exorbités de Brita me fixent, les bras et les jambes désarticulés d'Andreas me poussent à reculer encore. Les coutures grossières laissées sur le corps ne laissent place à aucun doute. Emily doit compléter le terrible tableau avec son tronc.

Les sacs remplis de victuailles m'échappent des mains. Ma respiration se bloque dans ma gorge. Il me faut sortir immédiatement d'ici. Et tout de suite.

Je ne suis plus en sécurité dans mon propre logement.

Lorsque je tente de prendre mes jambes à mon cou, elles ne répondent plus. Je reste mortifiée. Il est peut-être toujours ici, là à m'attendre, à m'observer depuis sa cachette. Mes pieds sont ancrés au sol et y restent comme si j'avais marché dans du béton. La tête me tourne, je ne parviens pas à fuir malgré toute ma volonté pour quitter mon domicile sur le champ.

Les battements de mon cœur se font si violents que mon organe vital pourrait à tout moment me fausser compagnie en s'extrayant sans la moindre difficulté de ma cage thoracique. Parcourue par d'effroyables tremblements incontrôlables, je lutte de tout mon être pour ne pas vomir mon petit-déjeuner également sur le parquet.

C'est à cet instant que mon regard horrifié accroche une feuille volante scotchée sur le placard de l'entrée. Les lettres peinent à s'aligner correctement tant je suis secouée. Je dois clore les yeux du plus fort que je le peux et les rouvrir après m'être pincée pour m'assurer que c'est la réalité et que ce n'est de ce fait pas un cauchemar.

Les mots tapés sur un logiciel de traitement de texte se forment à mon plus grand désarroi.

« Je t'avais dit que je te retrouverai. Quel jeu d'enfant pour entrer chez toi. Petit cadeau rien que pour toi, mon ange. Avec tout mon amour. »

C'en est trop pour moi. Ma vision devient floue. Je tombe à la renverse.

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Aux environs de quatorze heures, je reprends mes esprits. Complètement désorientée, je tâtonne le revêtement dur et froid à la recherche d'objets rassurants près de moi. Je me suis évanouie.

Ce malade aurait pu saisir l'occasion pour m'enlever sans que je m'en rende compte.

Furieuse contre moi, je me relève brusquement. J'époussette mes vêtements et sors aussitôt mon portable dissimulé dans la poche intérieure de mon manteau.

Sans réfléchir, je compose le numéro de Viktor. Sa voix grave qui retentit dès la deuxième tonalité me rassure. Si je dois me battre contre le meurtrier, je n'aurai pas longtemps à attendre et à faire illusion.

— Heidi ? répète-t-il, inquiet de ne pas m'entendre lui répondre.

— Viktor, chuchoté-je, je crois qu'il est là. À quelle heure ton collègue a pris sa pause ?

— Nous ne bougeons pas de la voiture lorsque nous surveillons ton domicile, mon ange.

— En m'approchant du véhicule, il n'y avait personne. Je peux te le jurer. Viens vite. J'ai peur.

— J'arrive tout de suite. Tu restes en ligne, d'accord ?

— Oui, promis. Qu'est-ce-que je dois faire ?

Le silence qui plane au bout du fil ne me dit rien qui vaille. Pourvu qu'il ne soit pas en danger. J'ai vraiment trop la trouille. Et s'il se faisait attaquer par ma faute ? Je retiens mon souffle. Comment parvenir à se regarder dans un miroir après ça si l'on est rongé par la culpabilité ?

— Il faut que tu sortes de ton bâtiment. Et surtout, quand tu es dans la rue, reste bien en vue. Il y a du passage, il n'osera pas passer à l'acte si des gens peuvent témoigner et te venir en aide. Dis-moi lorsque tu vas dehors.

Sans me faire prier, je laisse mes sacs par terre - de toute manière ils ne pourront pas tomber plus bas - et me précipite dans la cage d'escalier puis à l'extérieur.

Pour mon plus grand soulagement, le policier surveille à nouveau mon bâtiment de l'habitacle qui doit être chauffé à bloc pour qu'il ne se transforme pas en glaçon. En confiance, je traverse et me plante près de la fenêtre côté passager.

Malmenée par le froid, la batterie de mon portable choisit ce moment pour me lâcher.

— Vous souhaitez monter ? me propose-t-il, la gentillesse se lisant sur le visage. Ne restez pas là ! Vous risquez d'attraper du mal.

Sûre de son intégrité et de sa bonne foi, j'ouvre la portière et prends place sur le siège en tissu.


Mots de l'auteure :

Coucou tout le monde ! J'espère que vous allez bien ?

Aujourd'hui, je vous ai publié un chapitre que j'ai adoré écrire, qu'en avez-vous pensé ? Quelles sont vos hypothèses pour la suite ? Qui se cache derrière la personne qui traque Heidi ? J'ai hâte de vous lire !

Gros bisous et à bientôt pour le prochain épisode ♥️


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