❁ Chapitre 14 : Andreas Johansen ❁
Jeudi 28 janvier, après-midi
Point de vue d'Heidi :
La sonnerie stridente du téléphone qui retentit soudain à côté de moi m'arrache un sursaut. Dans un temps record, je retire mes lunettes de vue d'un geste vif, quitte l'écran de mon ordinateur des yeux à contre cœur puis décroche. Si elle me contacte, c'est que c'est important.
— Oui, Freyja ?
La respiration saccadée de celle qui gère l'accueil m'alarme. Et s'il y avait une prise d'otage ? Bien que cela soit peu probable, je ne peux m'empêcher de m'inquiéter. Mon corps tout entier se tend et attend qu'elle reprenne la parole. Je suis prête à intervenir ou à contacter la police.
— Madame Endresen, l'inspecteur Fredriksen souhaite vous rencontrer. Il dit qu'il y a du nouveau. Pourriez-vous descendre si vous êtes disponible, s'il vous plaît, et le recevoir dans votre bureau ?
Stupéfaite, je fronce les sourcils. Je n'aurais jamais imaginé que l'enquête pour élucider ce qui est arrivé à Emylia irait si vite mais tant mieux. Le meurtrier aura été arrêté sans faire d'autres victimes. Suite à cette bonne nouvelle, mes épaules s'affaissent de soulagement. Je n'avais pas de quoi me faire du mouron tout compte fait ! Tout est bien qui finit bien.
— Peut-être peux-tu lui proposer un café en attendant ? J'arrive bientôt.
— C'est déjà fait, Madame. À tout de suite.
Le combiné reste contre mon oreille une poignée de secondes, le temps que j'assimile tout ce qui vient de se passer. Comme dans un état second, je raccroche, range un peu les dossiers éparpillés sur la surface en bois clair qui m'aidaient pour rédiger un document important et file aux toilettes.
Puis, les mains lavées et séchées, je me dirige d'une démarche déterminée vers l'ascenseur.
Mes talons hauts retentissent contre le carrelage crème du couloir, troublant le silence y régnant. Il ne me faut toutefois pas longtemps pour parcourir la distance qui me sépare de la cage. Ceux qui travaillent à l'étage n'auront donc pas trop été dérangés par le bruit. Du moins, je l'espère.
Comme si je m'étais brûlée, je retire mon doigt aussitôt après avoir appuyé sur le bouton.
Quelques instants plus tard, les portes métalliques s'ouvrent face à moi puis se referment dès lors que je m'engouffre à l'intérieur et que j'ai indiqué que je vais au rez-de-chaussée. J'ai à peine le temps de réciter mon introduction dans ma tête, je m'extirpe hors de l'espace contigu et pars à la rencontre de l'inspecteur qui s'est levé du fauteuil en m'apercevant.
Monsieur Fredriksen se dresse de toute sa hauteur devant moi, les traits crispés. Il force un sourire lorsque je l'invite à me suivre dans les escaliers et se contente de répondre du bout des lèvres aux questions posées. Il y a définitivement quelque chose qui cloche. Je le sens. Mon intuition ne m'a jamais joué de tours jusqu'ici. Que se passe-t-il ? Et surtout, que fait-il sans son collègue Viktor qui l'accompagne toujours habituellement ?
En passant près du bureau d'Emylia, mon cœur se serre. Nous devrons la remplacer mais je ne me vois pas capable de m'en occuper dans l'immédiat. C'est trop tôt. Je refuse que quelqu'un puisse prendre sa place. Je refuse de l'oublier. Elle avait encore tant à accomplir. Les larmes me montent aux yeux à cette simple pensée.
Avec pudeur, je détourne le regard le temps de reprendre mes esprits. Tout en discrétion, j'essuie une perle salée s'étant fait la malle sans me demander mon avis.
— C'est ici, annoncé-je d'une voix plate.
Tandis qu'il bifurque et s'installe sur une chaise aubergine, je referme derrière nous, contourne les obstacles qui se présentent à moi et m'assois à mon tour sur mon fauteuil en cuir. La mine sombre qu'il arbore m'angoisse. J'en déduis que l'enquête ne doit pas être clôturée.
— Que puis-je faire pour vous, inspecteur ?
— Madame Endresen, quel plaisir de vous revoir. Jamais deux sans trois, n'est-ce pas ?
Surprise, je me redresse et hausse un sourcil. Son ton est dur. Cassant.
— Vous avez compté le nombre de fois où nous nous sommes retrouvés dans la même pièce ?
— Non. Nous en sommes maintenant au deuxième meurtre. Quand surviendra le prochain ?
La mâchoire m'en tombe. Comment peut-il dire cela dans le plus grand des calmes ?
— Vous connaissiez également la victime. Un certain Andreas Johansen. Votre ex-compagnon si je ne m'abuse ? susurre-t-il entre ses dents, plein d'animosité. Ne trouvez-vous pas étonnant que les personnes assassinées soient toutes, sans exception, dans votre carnet d'adresses ?
Ses insinuations douteuses, perfides, me font blêmir.
Le sang a dû se retirer de mon visage à la vitesse de l'éclair tant je peine à accuser le coup. Je n'ai rien à me reprocher, je suis innocente. Pourtant, ce qu'il me dit me rend malade. Je dois tellement paraître coupable maintenant. Une goutte de sueur glisse le long de ma colonne vertébrale.
Je suis foutue.
— Il a été retrouvé démembré dans un parking. Il manque ses bras et ses jambes. Son corps a été découpé avec un couperet de boucher. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, nous avons pu l'identifier grâce à sa tête et à son tronc embrochés sur des panneaux de signalisation. explique-t-il de but en blanc.
Horrifiée, j'arrondis les yeux. Comme pour me provoquer, il se penche vers moi et laisse glisser un cliché de l'assassinat. Je haïssais Andreas pour ce qu'il m'avait fait mais quelle horreur ! La mise en scène est toute aussi morbide que pour Emylia. Sinon plus. Il ne méritait pas ça. Je n'imagine pas la peur qu'il a dû ressentir en se retrouvant face à ce fou. Et je ne parle même pas de la douleur !
Rien que d'y songer, je défaille.
Comment ai-je pu croire ne serait-ce qu'un seul instant que la police avait déjà remonté une piste probante, la menant d'une pierre deux coups à l'auteur de ces crimes abjects ?
— Avez-vous des indices qui vous font déjà soupçonner quelqu'un ? le sondé-je.
— Rien de concluant pour le moment. Les preuves sont en train d'être analysées. Nous établirons sans l'ombre d'un doute un profil incessamment sous peu. murmure-t-il en me fixant.
Mais à quoi joue-t-il au juste ? À me déstabiliser ?
Bien décidée à ne pas lui faciliter la tâche, je reprends du poil de la bête.
— Et pensez-vous que je pourrais être la prochaine victime ?
— À ce stade, rien n'est laissé au hasard. Tout est envisagé. Vous pouvez aussi bien être visée que passer à travers les mailles du filet. Nous ne pouvons pas prévoir ce qu'il, ou elle, fera.
Avec difficulté, j'avale ma salive. Je serrerai dans mes bras Jonas plus tôt que prévu si ça se trouve ! Mes oreilles commencent à se boucher et mes jambes se mettent à trembler. Ma vue se trouble.
Je ne veux pas mourir. Pas maintenant.
Mon estomac est noué. Ma respiration se bloque dans ma gorge.
— Je ne vais pas abuser de votre temps, Madame Endresen. Je vous remercie de m'avoir reçu.
— Si je peux vous aider d'une façon ou d'une autre, vous être utile, n'hésitez pas.
— Je n'y manquerai pas. À bientôt.
— À bientôt, inspecteur.
Dès la porte refermée, mes émotions prennent le dessus. J'éclate en sanglots. Pour ne pas alerter qui que ce soit, je place rapidement une main devant ma bouche. Tandis que mes épaules se sont affaissées sans crier gare, un torrent de larmes dévale mes joues creusées par les soucis. Je suis à bout. Je n'en peux plus.
Quand ce cauchemar finira-t-il ? Pas par mon assassinat, j'espère...
Notes de l'auteure :
Bonjour tout le monde, me voici avec un nouveau chapitre plus tôt que prévu ! Je n'ai pas pu résister tant j'attends votre avis avec impatience ! Qu'en avez-vous pensé ?
Un suspect de moins sur la liste ! Mais qui donc se cache derrière tout ça et quelles sont ses motivations ?
Bisous et à la semaine prochaine ♥️
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