01
Je ne comprenais pas les filles.
Du haut de mes dix-sept années d'existence, je persistais toujours à croire qu'elles faisaient tout pour être compliquées. Par exemple, il m'était impossible de comprendre comment Drew St-John faisait pour supporter mon meilleur ami encore et encore. En deux mois, ils avaient rompu plus de sept fois et chaque rupture avait duré quelques jours, voire quelques heures. Drew le jetait à chaque fois, mais c'était toujours elle qui le reprenait. À croire qu'elle ne pouvait se passer de Lawrence Martin, l'idiot me servant de meilleur ami.
Lorsque j'avais fait part de mon incompréhension à Olivia, elle avait manqué de me gifler. Ça ne m'avait pas trop étonné, car cette fille était vraiment du genre à me faire peur. C'était le genre de fille au caractère de dur à cuire, mais qui ne pouvait s'empêcher de pleurer à la fin de Nos étoiles contraires.
Enfin, Olivia n'était pas d'accord avec moi au sujet de ma théorie sur les filles. Elle avait toujours été convaincue du contraire. Selon elle, c'était les garçons qui étaient compliqués. Elle prétextait même que c'était pour cette raison qu'elle ne leur trouvait rien d'attirant. Elle préférait davantage sortir avec des filles comme Alison. Je voulais bien la croire, seulement son opinion était légèrement biaisée. Après tout, elle ne traînait qu'avec trois garçons (si on excluait son père et tous les membres masculins de sa famille) : Lawrence Martin, Carter White et moi, Logan Campbell (oui, comme la soupe). Ce n'était qu'un minuscule échantillon de la population masculine.
— Elle m'a encore jeté ! s'est exclamé Lawrence, une bière à la main.
— Sans blague.
Les filles ont éclaté de rire et mon meilleur ami s'est mis à ronchonner. Lawrence était le genre de garçon qui se vexait assez facilement. Il était réputé pour avoir un énorme ego, si bien qu'il détestait qu'on se moque de lui. Ce qu'il n'avait toujours pas compris, c'était que son ego nous encourageait à le taquiner.
Je me suis penché vers l'avant pour attraper une canette de soda sur la table basse. Nous étions dans le sous-sol de Carter, un type plutôt silencieux, mais bien gentil, pour célébrer le Nouvel An. Les parents de mon ami étant absents, nous avions quasiment vandalisé le dépanneur du coin pour y dénicher de l'alcool. Nous nous étions tous débrouillés pour sortir une excuse bidon à nos parents qui pourrait permettre d'expliquer notre absence. Il s'agissait de notre dernier nouvel an tous les cinq ensemble et nous voulions à tout prix le célébrer de la bonne manière. Qui sait où nous serions l'année prochaine ? Entre Olivia qui avait été admise au SFU en Colombie-Britannique et Lawrence qui attendait toujours des nouvelles de sa bourse d'études, je ne savais plus trop où me mettre. Et puis, c'était sans parler de mes parents qui me voyaient déjà admis à l'Université de Toronto. J'essayais de ne pas trop penser à mon avenir, mais tout le monde ne cessait de me rappeler que dans moins de six mois, nous allions tous devenir des adultes et que nous allions devoir nous comporter comme tels. Cette idée m'effrayait plus que je n'osais l'admettre.
— Logan, tu as l'air un peu tendu. T'es certain que tout va bien ? m'a fait remarquer Alison, l'air inquiète.
J'ai hoché la tête, mais ça n'a pas semblé convaincre mon amie. Au moment où elle s'apprêtait à ajouter quelque chose, Lawrence s'est remis à pleurnicher.
— Vous savez quoi, les mecs ? Je vais me trouver une autre petite amie. C'est fini pour de bon cette fois. Que Drew aille se faire foutre !
— Si tu pars à la recherche d'une copine, amène Logan avec toi. Il est célibataire depuis deux ans, lui a dit Olivia.
— Et moi je suis célibataire depuis toujours, a fait remarquer Carter.
Olivia a roulé des yeux, peu impressionnée par la remarque pourtant bien placée de mon ami. Cependant, Carter n'était pas la première personne à qui on pourrait se fier à ce sujet. Ce n'était pas comme si aucune fille (ou gars, puisqu'on y est) ne s'intéressait à lui. Au contraire, il y en avait des tonnes et cela pour la simple et bonne raison que Carter avait quelques tatouages et une allure de mauvais garçon.
Encore une fois, il s'agissait d'un truc que je n'avais jamais compris chez les filles. Pourquoi préférer un garçon mauvais qui vous prendra pour sa propriété et qui vous brisera le coeur à la moindre occasion à un garçon qui ne vous voudra que du bien ? Si la majorité des filles ne trouvait pas les mauvais garçons attirants, je ne serais probablement pas célibataire à l'heure qu'il est.
Pour en revenir à Carter, j'ai toujours pensé qu'il appréciait simplement le fait d'être seul.
— Vous vous souvenez de Pénélope Brown, les mecs ? nous a demandé Olivia.
— Et comment ! Elle a brisé le coeur de notre petit Logan avant de monter au sommet de la hiérarchie sociale. Logan était inconsolable, a confié mon meilleur ami.
— Je suis toujours là, je vous signale. Dans la même pièce que vous.
— Maintenant, c'est une salope écervelée qui traîne avec d'autres salopes écervelées.
— C'est un bon résumé, a commenté Lawrence.
— Pénélope n'est pas une salope.
Lawrence et Olivia ont roulé des yeux simultanément, tandis que Carter a étouffé un petit rire. J'ai tenté d'avoir un peu de soutien de la part d'Alison, mais elle s'est contenté de détourner le regard.
— Ne le prends pas mal, mais... a-t-elle commencé avant d'être interrompue.
— Logan, tu es beaucoup trop gentil.
J'ai bougé inconfortablement sur le canapé où j'étais assis. Mes amis me regardaient tous avec insistance. J'ai soupiré, m'avouant vaincu.
— D'accord, c'est une salope.
Ils ont éclaté de rire et je n'ai pu m'empêcher de faire de même. C'était tout ce que je pouvais faire pour l'instant. Après tout, nous serions tous dispersés l'année prochaine. Autant en profiter maintenant.
Ça m'a fait mal de penser à cela. C'était moi qui avait formé cette petite bande. Je connaissais Olivia depuis que j'étais gamin et puis, j'avais rencontré Lawrence en entrant à la Middle School. Ça avait tout de suite cliqué entre nous. Quelques années plus tard, j'avais fait la connaissance d'Alison, alors qu'elle suivait le même cours de biologie que moi. Je l'avais présentée à Olivia et quelques mois plus tard, elles s'étaient mises à sortir ensemble. Leur relation avait alors clarifié quelques questionnements que j'avais au sujet d'Olivia. Quant à Carter, c'était le dernier à être arrivé dans la bande. Je l'avais rencontré à l'arrière de l'école, alors qu'il fumait. Il séchait les cours, tandis que j'avais une heure de temps libre. Nous avions discuté pendant un moment et avions réalisé que nous avions plusieurs trucs en commun. Ça m'avait probablement autant surpris que lui.
Nous étions tous très différents et pourtant, notre amitié était solide comme du fer. J'aimais être en compagnie de ces gens uniques aux fortes personnalités. Même si parfois ils se montraient énervants et détestables, il s'agissait de mes amis.
— Peut-être que je devrais appeler Drew pour m'excuser et pour...
— Hors de question que tu fasses ça ! me suis-je exclamé en m'emparant de son téléphone portable.
— Tu vas oublier Drew, d'accord ? Tourne la page, a suggéré Olivia.
— Facile à dire. J'ai perdu ma virginité avec cette fille...
Carter a recraché sa bière dans le contenant en plastique, tandis que j'ai manqué de m'étouffer avec mon soda. Olivia et sa petite amie ont simplement écarquillé les yeux, abasourdies.
— Tu as quoi ?!
— J'ai...
Lawrence n'a pas eu le temps de finir sa phrase, puisque la porte du sous-sol s'est ouverte en grand fracas. Nous avons tourné la tête vers l'entrée pour n'apercevoir qu'une silhouette féminine à peine visible dans le noir et dans la tempête hivernale. La silhouette a fait quelques pas dans notre direction, avant de se retourner pour fermer la porte. C'est alors que nous avons remarqué de qui il s'agissait: la seule et unique Sacha Macleod. Ses cheveux blonds encadraient son visage et ses joues prenaient une légère teinte rosée, probablement en raison du froid qu'il faisait à l'extérieur.
Nous l'avons tous dévisagée, probablement parce qu'il était extrêmement rare qu'une personne aussi élevée dans la hiérarchie de notre école viennent à notre rencontre. C'était stupide, mais c'était comme ça que les choses marchaient dans notre coin. Lorsque Olivia parlait de Pénélope, elle faisait également référence aux amies de celle-ci qui se trouvaient en apparence tout aussi salopes et écervelées qu'elle. Sacha faisait probablement partie du lot puisqu'elle était la meilleure amie de Pénélope Brown.
De mon côté, je trouvais juste de ne pas juger Sacha Macleod trop vite, surtout quand je ne la connaissais que de vue. La seule certitude que je pouvais avoir à son sujet, c'était qu'elle n'avait rien à faire ici.
Nous avons tous échangé un regard sceptique, avant de nous tourner vers Sacha qui était restée immobile pendant tout ce temps, près de la porte. Finalement, Olivia a pris la parole.
— Qu'est-ce que tu viens foutre ici ?
Olivia avait le don d'y aller tout en délicatesse. Ça faisait partie de son charme.
— Ma meilleure amie m'a laissée tomber pour la soirée. J'ai vu de la lumière et puisque je sais que Carter habite ici, je me suis dit... Je me suis dit que je pouvais venir voir ce qui s'y passait.
— Comment tu sais que Carter habite ici ? s'est exclamé Lawrence, choqué.
— Tu t'es dit que tu pouvais passer la soirée avec des gens plus ou moins sympas qui voudraient bien de toi, puis les ignorer à nouveau dès le lendemain. C'est bien ce que je comprends ? a demandé Olivia en ignorant la remarque de mon meilleur ami.
Sacha est restée muette et à cet instant, j'ai eu pitié pour elle. Elle n'y était pour rien si nous étions des ratés de la vie. C'était une chose qu'Olivia ne comprenait pas et qui faisait en sorte qu'elle détestait tous les gens qui pouvaient avoir une certaine notoriété au sein de notre école. C'était probablement très puérile, mais Olivia ne pouvait s'en empêcher.
Voyant que la blonde était restée silencieuse et que personne ne semblait prêt à prendre sa défense, j'ai décidé de m'y mettre. Personne ne semblait avoir remarqué qu'elle était au bord des larmes et qu'elle tremblait de partout. J'étais bien décidé à éviter qu'elle s'humilie.
— Sacha peut rester.
Toutes les têtes se sont tournées vers moi, la surprise se lisant dans chaque visage. Sacha a semblé surprise elle aussi, mais elle s'est vite ressaisie et m'a adressé un merci silencieux. Si la gratitude de Sacha me donnait l'impression d'être un héros, le regard qu'Olivia m'a adressé me donnait plutôt froid dans le dos.
Lawrence et Alison ont retenu leur souffle.
— Tu plaisantes, pas vrai ?
Je n'ai pas répondu, mais mon regard lui a suffi pour comprendre que j'étais très sérieux à ce sujet. La bouche d'Olivia s'est entrouverte comme si elle s'apprêtait à me lancer toutes les vacheries qui lui passaient par la tête, mais avant même qu'elle en soit capable, Lawrence a pris la parole.
— Et si on demandait au propriétaire de la maison ce qu'il en pense ? a-t-il suggéré.
Carter a adressé un regard assassin à mon ami. Il s'est enfoncé dans son siège, les yeux rivés sur le sol, alors que nous attendions tous une réponse de sa part.
— Logan est celui qui a le moins bu, alors je me fis à son jugement. Sacha peut bien rester pour la soirée.
— C'est pas vrai ! a protesté Olivia, mais tout le monde avait déjà cessé de l'écouter.
Au lieu de quoi, nous regardions tous Sacha Macleod se dévêtir de son manteau et faire quelques pas dans notre direction. Elle nous a regardé un à un, comme si elle soupesait les choix qu'elle avait. Son regard s'est posé sur moi et quelques secondes plus tard, elle se trouvait assise à mes côtés sur le canapé rouge. Olivia lui a lancé un regard mauvais.
Nous connaissions tous Sacha Macleod de vue. C'était la jolie blonde qui traînait avec Pénélope et sa bande de « salopes écervelées ». Elle sortait également avec une étoile montante de notre équipe de hockey : Cole Stevens. Ce gars était peut-être bien foutu, mais il n'en restait pas moins stupide. Tellement stupide qu'il n'avait toujours pas remarqué que sa petite amie l'avait déjà trompé de nombreuses fois, alors que toute l'école devait être au courant. Pourtant, ce couple faisait du sens aux yeux de mes camarades d'école. Sacha était plutôt jolie et Cole pouvait très bien passer pour un mannequin de Calvin Klein.
Lawrence s'est raclé la gorge, décidément prêt à mettre fin à ce malaise. Il nous a présenté un à un et Sacha s'est présentée à son tour. Olivia n'a pas pu s'empêcher de rire. Une fille comme Sacha Macleod n'avait pas besoin de se présenter : tout le monde la connaissait déjà.
— De quoi parlions-nous déjà ? Ah oui, de ma virginité ! s'est exclamé Lawrence.
Carter a fait semblant de vomir, tandis que Sacha a levé un sourcil perplexe. Je me suis penché à son oreille, alors que Lawrence poursuivait son récit, et lui ai fait un bref récapitulatif de ce qui s'était passé avant qu'elle ne débarque à l'improviste. Elle a rigolé lorsque je lui ai dit que Drew avait jeté mon meilleur ami pour la huitième fois en deux mois.
— ... et que Logan devrait se trouver une copine.
J'ai écarquillé les yeux, ayant perdu le fils de la réalité. Cinq paires d'yeux me fixaient.
— Pour la énième fois, je n'ai pas besoin de me trouver un copine. Je suis très bien célibataire.
— C'est ce que tout le monde dit, a blagué Sacha en me faisant un rapide clin d'oeil.
— Ne me dis pas que tu veux finir vieux garçon, Logan. Pitié, n'imite pas Carter, s'est moqué Lawrence.
Carter lui a adressé un doigt d'honneur.
— Ouais, je vais finir seul. J'irai vivre dans un trou perdu en Alberta et j'élèverai le bison. C'est exactement le futur que je m'imagine. Merci de m'avoir éclairé, Lawrence, ai-je blagué.
— Y'a pas de quoi.
— Peut-être que tu es gay ? a suggéré Alison.
J'ai haussé les sourcils, surpris. Lawrence et Carter m'ont dévisagé, très vite imitée par Olivia. Sacha n'a pu s'empêcher de rire devant notre confusion totale.
— Je le savais ! s'est écrié Lawrence. Tu es follement amoureux de moi, mais tu n'oses pas l'admettre parce que notre amour est impossible. Malheureusement pour toi, je préfère les filles. Désolé, mon gars !
— Sans vouloir blesser ton amour propre, Lawrence, tu ne m'intéresses pas du tout. Et si j'étais gay, ce qui n'est pas le cas, il y aurait une dizaine d'autres mecs à qui je penserais avant toi. On peut changer de sujet maintenant, s'il-vous-plaît ?
Olivia s'est mise à parler de son « idiot de frère qui n'est pas capable de se trouver un fichu emploi » et les autres ont rigolé. Désintéressé par la conversation, je me suis tourné vers Sacha.
— Si tu veux un conseil, mieux vaut éviter d'entrer sans prévenir.
— Ouais, je m'en doute.
— Tu aurais dû frapper avant d'entrer, lui ai-je conseillé.
— J'aurais dû.
Un étincelle de malice a fait briller ses yeux. À bien y penser, je n'avais jamais vu d'aussi beaux yeux. On aurait dit que les yeux de Sacha Macleod renfermaient un océan, voire un univers tout entier. Je me suis demandé comment c'était possible d'avoir tout un monde en soit, toute une vie enfermée dans deux iris bleus, sans pour autant avoir vécu.
— Tu sais, frapper avant d'entrer fait partie des règles de notre société.
— J'aime bien briser les règles, Logan.
J'ai souri.
— Je n'en doute pas.
Elle a souri à son tour, mais n'a rien répondu. Je me suis simplement contenté de la dévisager pendant un moment, comme si j'essayais de percer le mystère qu'était Sacha Macleod. Parce que oui, il y avait quelque chose chez cette fille qui m'incitait à m'interroger. Qui était-elle au juste ?
— Tu veux quelque chose à boire ? Une bière, peut-être ?
— Cela fait aussi partie de tes règles de société, je suppose ? Bien traiter ses invités ?
— En fait, ce n'est pas moi le propriétaire de cette maison, donc j'enfreins un peu les règles en ce moment, ai-je rétorqué.
Elle a ri.
— Non, merci. Je ne bois pas, m'a-t-elle répondu.
— Un soda, alors ?
Elle a accepté mon offre. Ses doigts au vernis violacé se sont posés sur la goupille de la canette. D'un geste brusque, elle l'a ouverte et un bruit a fendu l'air. Puis, Sacha a porté la canette à ses lèvres. Je n'ai pas pu m'empêcher de l'observer durant tout le processus, fasciné. Elle me faisait penser à Pénélope Brown qui traînait beaucoup avec notre petite bande il y avait de cela quelques années. Elle était toujours dans les parages et participaient à des soirées comme celle-ci. Et puis, un jour, on lui avait retiré son appareil dentaire et elle s'était mise à prendre des médicaments contre l'acné. Elle traînait de plus en plus avec la bande de « salope écervelée ». Pénélope avait alors décidé de rompre avec moi, probablement parce que je n'allais plus très bien avec l'image qu'elle commençait à se bâtir. L'année suivante, elle se trouvait au sommet de la hiérarchie et ce, simplement parce qu'elle suivait le courant, qu'elle se maquillait, s'habillait en fonction de la mode et qu'elle suivait religieusement la pathétique émission Keeping Up With the Kardashians. Aussi avait-elle commencé à sortir avec des sportifs et à fréquenter des soirées où l'alcool coulait à flot. La plupart des gens ignoraient que j'étais sorti avec cette fille. Correction : la plupart des gens ignoraient que j'existais.
— Alors, euh, Pénélope t'a laissée tomber pour la soirée ? Comment ça se fait ?
— À la dernière minute elle m'a appelé pour me dire qu'elle avait finalement décidé de passer la soirée avec Kev.
Voyant que je ne replaçais pas le prénommé Kev, Sacha s'est empressée de reprendre.
— Oh, pardon ! Kev c'est... l'ami de Pénélope. Il a dix-neuf ans et il étudie à l'Université de Toronto.
— L'ami ? ai-je demandé, sceptique.
— Disons qu'il s'agit plutôt d'un ami avec avantages. Si tu vois ce que je veux dire.
Devant mon expression horrifié, Sacha a éclaté de rire. Seule Olivia a semblé remarquer que je discutais avec Sacha. J'ai senti son regard pesé sur moi, mais je n'ai pas relevé.
— Si tu veux savoir, je trouve votre compagnie beaucoup plus agréable que celle de Pénélope et de ses amis. Ils sont parfois... idiots, m'a avoué Sacha.
— Tu ne le penses pas vraiment.
— Bien sûr que si !
Elle m'a adressé un sourire malicieux, ayant une étrange lueur de les yeux. J'avais vraiment beaucoup de mal à cerner Sacha Macleod. Elle devait avoir des milliers d'amis, alors pourquoi décider de venir ici ? Sacha n'avait rien à faire avec nous.
— Ce n'est pas tous les jours qu'une fille comme toi vient faire la fête avec nous, ai-je marmonné.
Elle a froncé les sourcils.
— Une fille comme moi ? Qu'est-ce que c'est supposé vouloir dire ?
— Eh bien, disons que tu fais partie des gens cool. Tu traînes avec des gens cool et tu sors avec des gens cool. Crois-moi, notre bande a beau être adorable, elle est loin d'être... euh, cool.
— C'est tout à fait subjectif, a-t-elle protesté. Crois-tu vraiment que faire partie des « cool » m'apportera quelque chose dans la vie ? Lorsque nous aurons notre diplôme, aucune de ces étiquettes n'aura de l'importance. Garde ça en tête, Logan.
Elle a parlé d'une voix douce, mais j'y suis arrivé à y déceler une certaine impatience comme si elle s'était toujours efforcée de sortir ce genre de discours à tout ceux qu'elle rencontrait. Et c'était loin d'être une réflexion de « salope écervelée ». Cette fille avait des idées et ça, même Olivia ne pouvait le nier.
— Logan, n'oublie pas que je suis un être humain avant tout, a-t-elle murmuré d'une voix à peine audible.
Je me suis penché pour lui répondre, mais Lawrence s'est levé brusquement. Nous l'avons tous regardé, intrigués. Il a passé une main dans ses boucles blondes, avant de s'expliquer.
— Il est minuit, les mecs. C'est donc officiellement la nouvelle année !
Carter a tapé dans ses mains, alors que les filles ont hurlé. Je suis resté muet, réfléchissant à ce que m'avait dit Sacha. Cette-dernière m'a donné un coup de coude amical dans les côtes, histoire de me ramener à la réalité. Je lui ai souri faiblement avant de lever ma canette dans les airs pour participer au toast d'Olivia.
— C'est une nouvelle année qui commence, les amis ! J'aimerais porter un toast pour célébrer une nouvelle année et...
— Abrège, Olivia ! s'est plaint Lawrence.
Ce-dernier s'est vu recevoir un regard noir de la part d'Olivia.
— Pour cette belle année qui commence, je souhaite à Lawrence de développer un cancer, a-t-elle commencé en adressant un regard sadique au concerné. Plus sérieusement, je souhaite à Lawrence de tourner la page sur Drew et de recevoir sa bourse d'étude, je souhaite à Carter d'être heureux...
— T'aurais pas pu trouver mieux, hein ? s'est exclamé Carter en levant les yeux au ciel.
— Je souhaite à Carter d'être heureux et de faire plein de découvertes. C'est mieux comme ça ?
— On dirait que tu lis la carte de voeux de ma grand-mère.
— Je souhaite à Logan de mettre fin à son célibat et d'être admis à l'Université de Toronto, a poursuivi Olivia en ignorant la remarque de mon ami.
— Amen ! a plaisanté Lawrence.
Olivia s'est tournée vers sa petite amie, Alison.
— Je te souhaite d'intégrer cette école d'art et de rencontrer ce célèbre peintre dont j'ai oublié le nom, malheureusement.
Alison a levé les yeux au ciel, alors que nous avons tous éclaté de rire. Sacha essayait de se fondre dans le canapé, comme si elle venait tout juste de réaliser qu'elle n'avait pas vraiment sa place au sein de la bande. Seulement, personne n'arrivait à échapper à Olivia.
— Et je souhaite à Sacha d'être bien plus que ce qu'elle semble être, a ajouté Olivia en fixant la blonde qui se tenait à ma droite.
J'ai lancé un regard à Lawrence. Nous savions tous les deux qu'elle s'était retenue de dire « salope écervelée ». Un peu plus et cette soirée serait partie en couilles. Pardonnez l'expression.
Sacha s'est tendue, mais n'a pas relevé la remarque. Au lieu de quoi, elle a souri et a levé son verre.
— Bonne année !
J'ai avalé une gorgée de mon soda, essayant de chasser le goût amer que j'avais dans la bouche. C'était une nouvelle année qui commençait. L'année prochaine, je serai ailleurs avec des gens différents. L'année prochaine, je fêterai comme un adulte. Rien ne sera plus pareil, l'année prochaine.
Je me suis donc forcé à sourire.
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