Chapitre 44
Nous poussâmes un soupir de soulagement lorsque nous reconnûmes Alexandre. Il sourit et descendit les marches. Il avait apporté de quoi rallumer une bougie. Nous fûmes à nouveau éclairés.
- Vous en fait, une de ces têtes...
Je lui tapai le bras lorsqu'il fut à notre hauteur. Tandis qu'Aaron grognait en plissant les yeux.
- Regarde-toi, avant de critiquer. Tu es couvert de suie, le taquinai-je. D'ailleurs, comment ton apprentissage se passe-t-il ?
Il sourit de toutes ses dents.
- C'est génial. Mon maître me dit que j'apprends vite. Je ne pensais pas que mes mains pouvaient créer de si beaux objets.
J'étais ravie que son nouveau métier lui plaise. Nous discutâmes tous les deux pendant un moment. Aaron était un peu à l'écart, mais écoutait. Il savait que cela me faisait du bien de converser avec mon meilleur ami.
- Au fait, quelle heure est-il ? finis-je par demander.
J'avais hâte de revoir mes frères. Je passais mes bras autour de mes genoux et posai le menton dessus.
- Plus de vingt-heures. J'habite au dessus de la forge normalement, mais j'ai préféré vous rejoindre. Je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir profiter de ta présence.
Il eut un sourire triste qui me fendit le cœur. Je baissai les yeux, nerveuse. Nous parlions bas, afin de n'interpeler personne. Les heures qui suivirent furent accompagnées de rires étouffés et de discussions intéressantes. Nous nous racontions ce que nous avions vécu ces derniers mois, et nous remémorions les anecdotes de notre enfance. Lorsqu'Aaron écouta les milles et une manières dont je m'étais ridiculisée lors de ma jeunesse, un sourire flottait au coin de ses lèvres. Il finit par se joindre à nous, et c'est avec soulagement que je me rendis compte que les deux hommes s'entendaient plutôt bien. Une heure après minuit, Alexandre finit par se lever et nous annonça qu'il partait chercher Jason.
Je tapai vivement dans mes mains, échouant pitoyablement lorsque je tentais de contrôler ma joie. Aaron me jeta un coup d'œil amusé, mais ne dit rien. Mon cœur battait rapidement. J'avais peur que quelque chose ne dérape. Alexandre nous dit d'attendre, un peu avant deux heures devant la porte qui se trouvait à l'arrière, pour que Marcus sache où nous étions. Il partit, nous promettant d'être bientôt de retour.
L'heure qui suivit fut la plus longue de ma vie. J'avais du mal à réfréner mon excitation, ce qui fit beaucoup rire Aaron qui était on ne peut plus détendu. Enfin, il fut temps pour nous d'attendre à l'endroit que nous avait indiqué Alexandre. L'attente était insoutenable. J'avais envie d'ouvrir la porte et de me ruer à l'extérieur pour partir à la rencontre de mes frères. Aaron m'entoura ma main de la sienne, comprenant mes intentions.
Soudain, la porte grinça et mon cœur s'arrêta. Une tête brune apparut prudemment derrière l'encadrement. Des yeux marron aux tons chaleureux, captèrent immédiatement mon regard. Ils se remplirent de larmes. Mon frère avait été sur le point de pleurer lorsqu'il m'aperçut. Je n'y tins plus, dans un faible sanglot, je courus jusqu'à me jeter dans ses bras. Il inspira brusquement et me serra de toutes ses forces.
- Je n'y croyais pas....
Sa voix fut comme un souffle dans mon oreille. Lorsqu'il s'éloigna et referma doucement la porte, je vis toutes sortes d'émotions défiler sur son visage. Le soulagement, la joie, la peine, la colère, puis à nouveau le soulagement. Finalement, il soupira.
- Tu es vivante.
- Je t'avais promis que je reviendrais.
Il sourit faiblement avant de se tourner vers Aaron et de l'observer longuement.
- Tu as intérêt à t'être bien occupé d'elle, grinça-t-il, ses yeux lançant des éclairs.
- Elle a juste failli mourir deux ou trois fois, ironisa Aaron, rien de grave.
Je levai les yeux au ciel, tandis que mon frère contractait sa mâchoire. Il finit par se détourner de lui et fronça les sourcils en étudiant mon corps.
- Tu as maigri.
- Toi aussi, contrai-je en regardant son corps à mon tour.
Mon ventre se noua. Même dans l'obscurité, on pouvait voir les marques bleutées qui parsemaient ses bras et ses jambes. Il baissa la tête. Nous partîmes nous asseoir. Malgré la fraicheur de la nuit, il régnait une perpétuelle chaleur, presque étouffante, dans cette pièce. Marcus ne pouvait s'empêcher de lancer des regards à la dérobée vers Aaron qui finit par lever un sourcil.
- Ne crois pas que je vais faire la causette avec toi, dit-il froidement. C'est à cause de toi que je n'ai pas eu de nouvelles de ma sœur pendant des mois. Et c'est aussi par ta faute, que je me suis fait doublement frapper, car Sébastien était furieux suite au mariage avorté et qu'il avait besoin de se défouler sur quelqu'un.
Un cri étranglé sorti de ma gorge lorsque j'appris ce qu'il subissait. Aaron répliqua instantanément, tandis que sa main se serrait contre la mienne.
- Je suis navré pour les coups que tu reçois par ma faute. Mais je suis certain que tu es heureux du choix qu'a pris Daphnée. Tu sais très bien qu'elle n'aurait pas voulu de cette vie-là.
Mon grand frère soupira et se frotta les yeux.
- J'en ai conscience. C'est pour cette raison que je ne t'ai pas suivi pour t'étriper.
Aaron eut un rire sans joie. Marcus finit par se tourner vers moi et reprit.
- Je ne t'en veux pas d'être partie. Je savais que tu finirais par trouver le moyen de revenir. Tu as le droit de connaître le bonheur après tout ce que tu as vécu.
- Toi aussi... murmurai-je pitoyablement en observant ses hématomes.
Il sourit tristement. La situation était injuste. J'aurais tant voulu voir ce vieillard mourir pour qu'il arrête de faire souffrir des personnes innocentes. Je ne voulais pas que nos retrouvailles se passent dans la tristesse, aussi je décidais de lui changer les idées en lui racontant toutes les expériences que j'avais vécu. Son moral remonta, lorsque je lui appris que je savais désormais nager. Il savait à quel point cela comptait pour moi. Finalement, Aaron finit par poser la question que nous redoutions tous.
- Que s'est-il passé, lorsque nous sommes partis ? appréhenda-t-il d'une voix grave.
Alexandre se tut, un instant. Visiblement, il cherchait ses mots. Il observa longuement ses mains, avant de nous raconter.
- Au début, personne n'a compris. Rosa pensait que tu avais décidé de partir seul à Rome, puisqu'il n'y avait plus les affaires dans l'entrée, et personne ne se souciait de Daphnée, ce n'était qu'une esclave, après tout.
Je déglutis.
- Et puis, Julius a remarqué que les chevaux avaient disparu. Il ne pensait sincèrement pas que c'était vous, et est immédiatement parti prévenir ton père, Aaron. Il y a eu beaucoup d'éclats de voix, mais personne n'avait encore compris. Jusqu'au moment où Julius a raconté l'histoire à Eulalie qui était avec moi dans la cuisine. Je l'ai senti blêmir et écarquiller les yeux. Et là, j'ai saisi. C'était vous. J'ai sauté de ma chaise et me suis rué dans ta chambre, pour démentir mes propos. J'espérais encore te trouver allongée sur ton lit. C'est là que j'ai vu les lettres. Elles étaient posées sous ton oreiller, mais une des deux a glissé, lorsque je me suis assis sur le matelas, complètement démuni.
Sa gorge se serra et il m'observa, droit dans les yeux, avant de les fermer.
- Je... C'était dur, Daphnée. Vraiment. Je n'arrivais pas à croire que tu étais partie. Sur le moment, je n'ai pas réalisé toutes les conséquences que votre départ entrainait. C'est seulement lorsque la nuit est tombée et que tout le monde a été appelé, que cela a été le chaos. Aaron était parti depuis des heures et on avait fini par remarquer ton absence, à cause d'Auguste qui l'avait signalée. C'est là que Carmen s'est mise à hurler. Elle avait comprit. Nous ne pouvions entendre qu'elle. « Je le savais ! Je le savais !». Elle s'est mise à te maudire et à diffamer Aaron. Elle le qualifiait de fils indigne.
Je sentis Aaron se crisper, à côté de moi, et je lui pressai la main.
- Rosa s'est mise à pleurer. Elle ne s'arrêtait plus. C'était horrible.
Aaron pencha la tête. Malgré tout, il s'en voulait de lui avoir fait subir cela. Elle ne le méritait en rien. Lorsqu'il entendit la dernière phrase de mon frère, il haussa les sourcils. Je ne lui avais jamais parlé des sentiments que Marcus entretenait pour son ex-fiancée.
- Julien et Silène étaient sous le choc. Ils ne parlaient pas. A vrai dire, ils n'y croyaient pas encore. Puis, Sébastien est arrivé. Lorsqu'il a appris la nouvelle, il était encore plus furieux que Carmen. Il s'est mis à menacer les Aquilii si nous ne vous retrouvions pas. Il voulait à tout prix de ce mariage. Il ne souhaitait pas que Rosa soit encore une fois couverte de honte, cela aurait pu entacher le nom de sa famille.
Il parla ironiquement, les yeux fixés au sol, plongé dans ses souvenirs.
- Alors, reprit-il, ils ont conclus un pacte, cette nuit-là. La pauvre Rosa était complètement démunie. Sébastien a fait jurer à ta famille, ainsi qu'à tous les esclaves, de ne pas rompre le serment. Il allait répandre la nouvelle qu'Aaron était parti en voyage pour le commerce. Il espérait encore secrètement, qu'il soit de retour. Si au bout de six mois, il ne réapparaissait pas, on annoncerait qu'il était mort en mer. La réputation de Rosa serait d'avantage sauvée si on pensait à une fin tragique, plutôt qu'à un mari qui l'abandonnait. De plus, cela arrangeait également les Aquilii qui ne passaient pas pour une famille bafouée.
- Tu veux dire que pour encore deux mois, tout Rome pensera que je suis en voyage et que je suis toujours fiancé ? s'étonna Aaron.
Marcus acquiesça gravement.
- Et Daphnée ?
- On pense qu'elle s'est enfuie. Si quelqu'un la reconnait et qu'il la dénonce...
Il ne poursuivit pas sa phrase car sa gorge se serra. Pour ma part, mon cœur battait à tout rompre. C'est à ce moment là que le battant de la porte s'ouvrit à nouveau.
- Il y a vraiment Daphnée et Marcus ? entendis-je demander la voix fluette de Jason.
Nous fûmes sur pieds en un rien de temps et nous précipitâmes vers notre petit frère pour le serrer dans nos bras. Il poussa un gloussement de joie et nous sauta dessus. Lorsque nous nous détachâmes, nous pûmes observer cette petite tête blonde souriante. Il avait de petits yeux, encore remplis de sommeil. C'était attendrissant.
- Vous faîtes souvent des réunions en pleins milieu de la nuit, sans moi ? nous accusa-t-il en croisant ses bras sur son petit torse.
Nous rîmes.
- Seulement, parce que tu es insupportable, petit frère, le taquina Marcus en lui ébouriffant les cheveux.
Jason lui répondit par un tirage de langue et des sourcils froncés. Je lançai un regard discret à Marcus, lui demandant implicitement si Jason était au courant de ma fuite. Il secoua la tête. Mon petit frère détourna la tête et observa un point derrière lui. Il finit par le pointer du doigt.
- C'est qui, lui ?
Visiblement, il ne se rappelait pas du visage de mon ancien maître, qu'il avait croisé à deux reprises.
- Je te présente Aaron.
Celui s'avança et lui sourit gentiment.
- Salut, toi.
Il passa un bras autour de ma taille et Jason écarquilla les yeux.
- Daphnée, c'est ton amoureux ?
Je hochai la tête en souriant, ce qui me valut une grimace de la part de mon petit frère.
- Berk, c'est dégoutant.
J'entendis Marcus ricaner derrière lui et je l'assassinais du regard. Il leva les yeux au ciel. Alexandre et Aaron, eux, continuaient de fixer mon petit frère, visiblement amusés.
- Pourquoi je ne te vois jamais au marché, Daphnée ? demanda Jason en faisant la moue. Marcus je le vois des fois, lui.
Je dansais d'un pied sur l'autre.
- Je suis très occupée à la villa, mon cœur, mentis-je.
Il fit la moue, visiblement déçu, avant de bailler bruyamment.
- Pourquoi on ne se retrouve pas la nuit plus souvent, comme ça ? poursuivit-il de sa petite voix ensommeillée.
- Pour éviter que tu t'endormes en plein milieu de ta phrase, répondit Marcus visiblement joueur.
Jason n'eut même pas le courage de répondre et partit s'asseoir dans un coin, avant de se rouler en boule pour dormir. Visiblement, son interrogatoire avait assez duré. Je souris. Je partis le rejoindre et le soulevais. De cette façon il était recroquevillé sur moi. Je sentais son souffle léger au creux de mon cou et sa joue rebondie était appuyée sur mon épaule. Je me mis à lui caresser les cheveux en le berçant. Quand je tournais la tête, je vis que les trois jeunes hommes nous regardaient d'un air attendri.
- T'as vu ? murmurai-je à l'oreille de mon petit frère. On est vraiment trop beaux. Ils ne peuvent pas s'empêcher de nous regarder.
Jason me répondit de la plus gentille des façons, plongé dans son sommeil.
- Chut... grogna-t-il de sa voix enfantine. Tu m'déranges.
Il accompagna sa parole par un coup dans le nez, je reculais surprise et ma tête cogna contre le mur, derrière moi.
Les trois autres idiots se mirent à rire de la situation, tandis que je me frottai le crâne en gémissant.
- Je vois que tu es toujours aussi adroite, se moqua Alexandre.
J'aurais bien voulu lui lancer un objet à la figure, mais la seule chose que je pouvais attraper à proximité, était mon frère. Nous allions éviter. Au lieu de cela, je levai les yeux au ciel.
Les heures qui suivirent furent riches en émotions. C'était la première fois que tous les hommes de ma vie étaient réunis en un seul et même endroit, en même temps. Nous discutâmes beaucoup. Aaron n'hésitait pas à parler et Alexandre et Marcus finirent par ne plus lui répondre désagréablement. Pour ma part, je continuais à parler, Jason endormie contre moi. Sentir sa présence me faisait revenir plusieurs mois en arrière, lorsque nous étions encore en Gaulle.
Finalement, nous sûmes que la séparation était proche, lorsque l'aube ne tarda pas à poindre. Je secouais doucement Jason, afin de le réveiller. Il gesticula légèrement avant que ses paupières ne papillonnent. Lorsqu'il ouvrit les yeux et me vit. Il sursauta violemment et cria. Je ris.
- Ma tête fait si peur que cela ?
- C'est la réaction que j'ai tous les matins, quand je me réveille à côté de toi... soupira Aaron.
Je me levai et le frappai à la tête. Il rit et m'attrapa par le bras avant de me faire tourner sur moi-même, pour me ramener jusqu'à lui. Ses yeux pétillèrent et il déposa un léger baiser sur mes lèvres avant de se redresser, avec un petit sourire.
Je rosis de plaisir et tournai la tête. Jason qui avait fini par reprendre ses repères, grimaça en voyant la scène, tout comme mon grand frère et mon meilleur ami. Je roulai des yeux.
Malheureusement, il était temps d'y aller. Marcus devait se dépêcher s'il ne voulait pas être surpris par ses maîtres, tout comme Jason, même s'il avait plus de temps devant lui, et sûrement pas la même sentence. Mon grand frère me serra longuement dans ses bras.
- Tu prends soin de toi, d'accord ? murmura-t-il.
Il savait que je ne reviendrais pas tout de suite. Ma gorge se serra et j'acquiesçai. Il recula, me sourit et partit dire en revoir à Jason de la même manière. Enfin, il salua Alexandre et revint vers Aaron. Il l'observa un instant avant de dire :
- J'ai vu comment tu la regardais. Je suis content qu'elle t'ait trouvé. Veille sur ma sœur.
Aaron hocha gravement la tête. Mon frère fit demi-tour, et passa la porte. Ce fut au tour de Jason. Lui dire au revoir à nouveau, était plus dur que ce que j'avais imaginé. Je m'agenouillai, afin d'être à sa hauteur. Ses yeux verts, si semblables aux miens, étaient gorgés de larmes.
- On va se revoir dans longtemps, n'est-ce pas ? demanda-t-il, tout penaud.
Je n'eus pas la force de lui répondre et acquiesçai. Ma gorge me brûlait. Une larme dégoulina le long de ma joue. Il la rattrapa et l'essuya doucement, le regard triste.
- Je t'aime, Jason. Tu vas rester fort, d'accord ?
Ma voix tremblait et il finit par éclater en sanglot, avant de se coller contre ma poitrine.
- Je t'aime aussi.
M'arracher à son étreinte était trop dure, mais je me forçai, malgré tout. Il s'accrocha désespérément à moi et je lançai un regard suppliant à Alexandre. Celui-ci, compatissant, décrocha mon frère de ma tunique. Je fermai les yeux. Je me relevai et embrassai mon meilleur ami sur la joue.
- File, le priai-je.
Il savait qu'à son retour, nous ne serions plus là. Il s'approcha et m'embrassa le sommet du crâne, Jason toujours dans ses bras.
- Profite.
C'est dans un dernier regard plein de promesses, qu'il disparut à son tour, accompagné de mon frère. Je reculai, jusqu'à m'effondrer dans les bras d'Aaron, mon seul pilier. Nous restâmes un moment ainsi, tandis qu'il me soutenait. Malheureusement, nous n'avions pas de temps à perdre. Il fallait que nous traversions Rome avant que la foule ne commence à déambuler.
- Partons.
J'avais énoncé cela d'une voix claire. Il m'observa, inquiet. Il savait que j'étais bouleversée. Je lui rappelais qu'il avait besoin de voir sa famille, aussi, il approuva et nous nous mîmes en route. Nous évitions les rues principales et passions dans les petites ruelles. Chaque fois que l'on croisait une personne, nous détournions notre visage, pour ne pas être reconnus. Nous finîmes par atteindre la pente qui nous menait à la villa, aux premiers rayons de soleil. Le ciel était tinté de rosé. C'était magnifique. Nous remontâmes, évitant tout contact, au cas où.
C'est alors que je la vis. Eulalie, qui descendait doucement, perdue dans ses pensées. Elle avait un regard triste et mélancolique. Elle devait être en train de descendre aux thermes. Sans m'en rendre compte, je m'étais arrêtée. Je la regardai et un grand sourire étira mes lèvres. Je n'avais pas espérer la voir. Aaron qui était quelques pas devant, car il n'avait pas remarqué que je ne marchais plus, fit volte face quand il la reconnut. Il comprit à mon expression que je voulais lui parler. Il sourit et acquiesça.
Eulalie, qui dû percevoir du mouvement, releva la tête et écarquilla les yeux. Elle poussa un petit cri surpris en nous remarquant. Nous nous mîmes à marcher rapidement, l'une vers l'autre, jusqu'à nous serrer dans les bras.
- Comment vas-tu ? demanda-t-elle, émue, alors que je la serrais plus fort.
- Je suis heureuse, avouai-je. Pardonne-moi de ne pas t'avoir prévenu.
Elle secoua la tête.
- Cela n'a plus aucune importance.
Nous nous reculâmes et elle inclina poliment la tête, afin de saluer Aaron. Celui-ci lui fit un signe.
- Et toi, comment vas-tu ? m'enquis-je. Et Julius ? Et Stella ?
- Nous allons tous bien, rassure-toi.
Son sourire se fit rayonnant, puis elle finit par déclarer, on ne peut plus excitée.
- Daphnée, Julius et moi attendons un enfant.
Le choc me coupa le souffle et mon regard se dirigea vers son ventre, pour le moment assez plat.
- Nom de Jupiter ! Je... félicitations ! Je suis si contente pour vous...
Elle rit à gorge déployée, si épanouie, avant de me remercier. La revoir avait été comme une dose de fraîcheur. Sa présence semblait toujours si agréable... Malheureusement, je savais que nous devions nous dépêcher. Je jetais un coup d'œil vers Aaron, qui attendait patiemment. Eulalie intercepta cet échange et comprit.
- Vous y allez, n'est-ce pas ?
Nous hochâmes la tête. Elle me prit à nouveau dans ses bras.
- Je suis contente de t'avoir revu, Daphnée. Soyez heureux.
- Moi aussi, sincèrement. Fonde la famille que tu as perdue.
Elle hocha la tête en souriant, et nous nous séparâmes. J'étais épuisée moralement. Je revoyais tous les êtres à qui je tenais, avant de les quitter à nouveau simultanément.
Aaron m'attrapa la main, après avoir dit au revoir à Eulalie, et nous repartîmes en direction de la villa. Quand je l'aperçus, je retins mon souffle. La demeure n'avait pas changé. La seule différence résidait dans les arbres qui commençaient à perdre leurs feuilles jaunissantes. Aaron s'arrêta un instant pour l'observer, visiblement touché. Comme prévu, nous nous cachâmes en haut d'un arbre, à hauteur du jardin, vers la chambre de ses parents.
C'est alors que des éclats de voix se firent entendre. Aaron se crispa. Ses parents se disputaient violemment.
- Et comment voulais-tu que je réagisse ? rugit Carmen.
- Calme-toi, je t'en prie, laisse-moi t'expliquer, tenta Julien.
- Que je me calme ? explosa-t-elle en ricanant. Je viens de découvrir que mon mari me trompe depuis plus de vingt ans et tu souhaites que je me calme ?
Les muscles d'Aaron se tendirent et il inspira brusquement, écoutant attentivement.
- Catherine était une erreur... expliqua calmement Julien.
Aaron écarquilla les yeux. Il semblait connaitre cette femme.
- Une erreur ? Une erreur ! fulmina Carmen. Et le fils que tu lui à donné, c'était une erreur ?
- L'enfant n'était pas voulu. C'est pour cette raison qu'elle a fait croire que Sirius était le fils d'Octave.
On entendit un violente gifle.
- C'est impardonnable ! Tu n'es qu'un animal !
Des pas précipités retentirent et une porte claqua. J'avais dorénavant, moi aussi, les yeux écarquillés et le souffle accéléré. Je rencontrai le regard d'Aaron et il secoua la tête.
- Non. Non, non.... Ce n'est pas possible. J'ai dû mal entendre.
- Aaron...
- Non !
Il avait crié et je tressaillis. Il sauta à terre et se mit à faire les cent pas. Il était apparemment peu soucieux qu'on le repère à ce moment là.
- Je viens d'apprendre que mon demi-frère est l'homme que je hais le plus au monde !
Il tournait en rond, fulminant.
- Aaron je...
- Tais-toi !
Il avait hurlé, le regard furieux. Je sursautais violemment, il ne m'avait jamais parlé ainsi. Il fallait que je le calme.
- Mais...
- Je t'ai dit de te taire !
Il était hors de lui, et je me mis à trembler sans le vouloir. A cet instant, il me fit peur. Je secouais la tête avant de faire demi-tour. Je souhaitais oublier ce que je venais d'entendre. Je me mis à courir.
- Daphnée, attends !
Je ne l'écoutais pas et continuais ma route. J'avais besoin d'être seule un moment. Je venais de tourner au coin d'une rue, quand une voix grave me tétanisa.
- Salut ma jolie.
Je n'eus pas le temps de me retourner. Quelque chose percuta mon crâne. Tout devint noir.
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Commentez, ça me fait plaisir ! :)
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