Jour 4 - Au mauvais endroit au mauvais moment
Thème : Contre le destin
Tout autour de lui n'était que douleur. Chaque mouvement lui coûtait. Chaque respiration le brûlait. Chaque pensée lui transperçait le crâne. Il savait qu'il devait tenir, tenir jusqu'à l'arrivée des renforts. Et si les renforts n'arrivaient pas, il tiendrait aussi longtemps que possible pour la protéger. Il le devait.
Malgré son entêtement et sa volonté à tenir, ce fut la dernière pensée qu'il eut avant de sombrer dans un profond comas.
Abel ne se réveilla que plusieurs semaines plus tard. La première chose qu'il sentit au réveil, fut le froid intense. Il était gelé jusqu'aux os. Il sentit ensuite l'odeur l'odeur aseptisée des lieux. De même qu'il entendit le bip incessant des machines qui le maintenaient encore en vie quelques jours plus tôt. Il ne se réveilla pas d'un coup, il lui fallut plusieurs tentatives espacées de plusieurs heures avant de finalement réussir à ouvrir les yeux.
La lumière l'aveugla dans un premier temps. Il dû refermer ses yeux et attendre de longues minutes avant de s'y habituer. Bien qu'il n'avait pas soif, il avait la gorge extrêmement sèche. Ce fut donc pour cette raison qu'il se motiva à ouvrir ses yeux, ignorant la lumière aveuglante. Le blanc de la chambre d'hôpital le renvoya à sa plus tendre enfance, quand il habitait dans la petite chambre blanche avec Lili.
Lili, le nom le fit réagir et les souvenirs revinrent en vague, le submergeant. Il se redressa rapidement, ou du moins, il essaya. Une vive douleur dans tout son corps l'empêcha de bouger. La seule chose qu'il réussit à faire fut de pousser un gémissement de douleur étouffé. Ce ne fut qu'au moment où la personne dans la pièce se redressa de la chaise où elle était assise qu'il se rendit compte de sa présence. Malheureusement, les drogues contre la douleur encore présentes dans son organisme, il pu à peine bouger sa tête en direction de ladite personne.
- Tu devrais éviter le moindre mouvement 4831, tu viens de passer plusieurs semaines dans le comas. La voix, celle d'un homme, était douce et calme.
Abel reconnu de suite l'agent F et se détendit légèrement. Si il était là c'est que tout allait bien. Il prit le temps de déglutir, essayant d'humidifier un peu sa gorge avant de parler. Il essaya ensuite d'articuler vaguement quelques mots, mais la seule chose qu'il réussit à dire fut le nom de sa partenaire. Et encore, ce fut plus une plainte qu'autre chose.
- N'essaye pas de parler, reposes toi encore un peu. Encore une fois, la voix était calme. De toute façon, il n'avait pas la force de lutter. Ce fut donc assez rapidement qu'il sombra à nouveau dans l'inconscience.
Le garçon ne se réveilla à nouveau que plusieurs jours plus tard. Cette fois-ci, il ne ressentait plus de vive douleur dans tout le corps, ce qui était un bon début. Au bout de quelques minutes, il se risqua à ouvrir les yeux, tombant à nouveau sur le paysage blanc de la chambre. Il sentit à nouveau du mouvement près de lui. Heureusement, cette fois il était en état de reconnaître l'agent F auprès de lui.
- Bonjour 4831, comment te sens tu ? Demanda la voix d'homme qu'il connaissait bien. As-tu encore mal quelque part ?
Cette fois le garçon pu répondre plus clairement, même si sa gorge était encore sèche.
- Je n'ai plus mal. J'ai soif. Où est Lili ? Il ne perdait pas de vue son objectif, savoir comment allait sa partenaire. Il ne la sentait pas autour de lui, et ce fait l'inquiétait. Il n'eut pas besoin d'attendre que l'agent F réponde, il avait lu la réponse dans son regard, il avait toujours été bon pour lire les gens. F, où est Lili ? Il répéta à nouveau, sa voix tremblant légèrement. L'agent F le regarda un long moment avant de finalement parler, sa voix se voulant réconfortante.
- Je suis désolé Abel, Lili n'a pas survécu à la mission. Elle est morte avant l'arrivée des renforts. Lui qui n'utilisait jamais leurs noms, l'avait, par respect pour sa perte, pour un fois fait.
Ce fut comme si le monde s'écroulait pour lui, son monde s'écroulait. Sa vision se brouilla alors qu'il sentait la bile remonter dans sa gorge, il avait le cœur au bord des lèvres. Il avait envie de hurler de désespoir, mais tout ce qu'il réussit à faire fut de rester silencieux. Tellement silencieux qu'il n'entendait que le sang battre sur ses tempes. Mais ce bruit, il n'y faisait pas attention. S'il n'avait pas été allongé, nul doute qu'il se serait écroulé. Il se mit à trembler, de froid, ce froid qui ne le quittait pas depuis son premier réveil, de rage, il en voulait au monde entier, de tristesse, son cœur lui faisait si mal qu'il ne souhaitait qu'une chose, qu'il s'arrête.
L'agent F ne fit aucun geste pour essayer de le réconforter. Il savait que ça n'aurait fait qu'empirer les choses. Il savait qu'ils avaient été élevés loin de tout contact et que ça ne ferait qu'empirer sa crise. Il savait que la seule personne qui ne risquait pas la mort en s'approchant de lui actuellement, venait de décéder. Alors, il l'observait simplement, partageant, dans une moindre mesure, sa peine. Il souhaitait cependant que le garçon sache que ce n'était pas de sa faute, qu'il n'aurait pas pu la sauver. Il savait que s'il ne disait rien, il se laisserait sombrer, rongé par le remord.
- La mission n'aurait pas dû être aussi dangereuse. Vous avez tous les deux fait de votre mieux Abel. Rien n'aurait pu en changer la finalité. Vous étiez au mauvais endroit au mauvais moment. Personne ne peut aller contre le destin.
Abel ne réagit pas, il se demanda un instant s'il respirait toujours. Le mouvement répété des draps lui prouva que oui. Il patienta longuement à ses côtés. Si longuement que, malgré la douleur, Abel plongea dans un sommeil sans rêves. F vérifia la perfusion à son bras. Au moins, le garçon ne se laisserait pas mourir de faim. Sa vue se brouilla et les larmes commencèrent à ruisseler sur ses joues. Il savait qu'à 15 ans le jeune garçon allongé devant lui venait de perdre sa raison de vivre. Il savait qu'ils n'étaient désormais que tous les deux, et que personne ne pourrait jamais remplacer Lili.
Il ferma les yeux. Il n'avait pas le droit de pleurer, il se devait d'être fort pour ce garçon qu'il considérait comme son fils. D'ailleurs, il ne pleurerait plus pendant des années après cela. Il sentit un froid intense lui geler les os. Ce froid lui fit ouvrir les yeux. Il regarda à droite, puis à gauche, avant de regarder à nouveau Abel, murmurant pour lui-même, et peut-être un peu pour quelqu'un d'autre.
- Je veillerai sur lui Lili, je te le promet, tu peux reposer en paix. Il espérait sincèrement que son message serait entendu, pour le bien être de son fils, comme pour celui de sa fille.
Aiko ~
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