Chapitre 9

La porte ne tiendra plus longtemps, et nous sommes toujours dans la même situation critique.

Je tourne en rond ; je réfléchis vainement, rien ne me vient. J'ai beau évaluer toutes nos possibilités, la seule que je vois, c'est celle proposée par Neil : sacrifier l'un d'entre nous. Pourtant, il n'est pas question que je laisse quelqu'un mourir pour sauver les autres !

« Tu as une idée, Ava ? » me demande Tess, qui semble sur le point de pleurer.

Je secoue la tête et ferme les yeux. Comme si une réponse allait me venir comme ça... J'essaye d'imaginer Iris. Elle, elle saurait quoi faire.

Iris, pitié, aide-moi. Qu'est-ce que tu ferais à ma place ?

*

C'est la panique. Tout le monde s'agite dans la planque, mais Iris et moi, on ne sait pas pourquoi. Je ne m'inquiète pas, parce que je sais que tant qu'elle sera avec moi, tout ira bien, rien ne pourra m'arriver.

« Bonjour, je m'appelle Iris, et elle c'est Ava, explique ma meilleure amie précipitamment à une fille qui passe à côté de nous. On est arrivées hier après-midi. Qu'est-ce qui se passe, au juste ?

- Une brèche a été faite dans un tunnel, plus bas, celui qui mène à la salle radio. Une bestiole est entrée, à ce qu'il paraît. Quelqu'un a lancé l'alarme il y a quelques minutes. Suivez-moi, il faut se barricader dans le réfectoire. Vite ! »

Iris me jette un regard inquiet puis me prend par la main.

« Non, merci, on s'y rendra nous-mêmes. J'ai quelque chose à récupérer, avant.

- N'allez pas en bas, surtout. Il doit y avoir plein de bestioles ! »

Sur-ce, la fille s'éloigne et Iris m'entraîne dans le mauvais sens, celui qui mène justement à la brèche. Personne ne nous prête attention, et je commence à me demander ce qu'elle fabrique.

« Iris, où est-ce qu'on va ? Qu'est-ce que tu veux récupérer ?

- Rien. Je veux simplement voir ce que ça donne, une invasion de bestioles... »

Je m'arrête soudain, complètement abasourdie, et Adam nous rejoint en courant.

« Qu'est-ce que vous fabriquez ? Il faut se cacher, nous dit-il.

- Figure-toi que Mademoiselle Iris veut aller voir les zombies de plus près ! »

Adam nous fixe toutes les deux, comme si c'était mon idée, alors que je ne fais qu'essayer de l'empêcher d'aller se faire tuer.

« Adam ! On a un problème, s'époumone Neil en courant vers nous. Les bestioles ont... ont dévoré tout le monde, au service radio. On n'a plus la moindre communication avec le monde extérieur. On t'attend pour la réunion de crise. »

Neil s'appuie contre le mur pour reprendre sa respiration. Plus de communication ? Mais alors... on est tout seuls, maintenant ?

Ils s'éloignent tous deux dans la foule, et Iris reprend son chemin. La lumière diminue dans cette partie du tunnel, et voilà que nous sommes seules dans le noir. Des cris et des grognements se font entendre à quelques mètres.

« Arrête-toi, Iris ! Arrête, c'est flippant, reviens... »

Elle ne m'écoute pas. Elle sort sa lampe torche et s'éloigne. Je tremble de tous mes membres.

« Reviens... »

Mon murmure se perd dans l'obscurité, puis Iris pousse un cri strident. Je ne peux pas m'empêcher de courir vers elle, de vouloir la secourir.

Une bestiole... non. Deux, trois, cinq bestioles arrivent lentement vers Iris, les yeux pleins de haine. Pourquoi ne s'enfuit-elle pas ? Je vois sa jambe bloquée dans une sorte de corde emmêlée autour de son mollet, qui ne cesse de faire des noeuds à chacun de ses mouvements. Elle tire dessus, mais impossible de la défaire, et les bestioles ne sont plus qu'à un ou deux mètres.

Je ne veux pas la laisser là. Pourtant, ses yeux larmoyants se posent sur moi, et pour une fois, elle ne sourit pas pour me rassurer.

« Va-t-en. Vite. Il y en a encore d'autres qui arrivent. »

Sa voix tremble, la mienne aussi. J'ai peur que les bestioles m'entendent si je me mets à pleurer, alors je murmure, doucement, calmement.

« Iris... qu'est-ce que tu ferais, à ma place ? »

Elle inspire un grand coup avant de me prendre dans ses bras.

« Je ferais demi-tour, j'irais dans le réfectoire avec les autres, et après je demanderais aux cuisiniers de me préparer des pâtes à la bolognaise, comme celles quon mangeait chaque samedi quand on allait faire du shopping tout la journée. Tu te souviens ? Tu entrais dans la boutique de cosmétiques et tu essayais tous les vernis à ongles... Tu en achetais un nouveau toutes les semaines ! Je veux juste que tu te rappelles de ça. Et ensuite, ça ira.

- Iris... »

Je garde les yeux fermés. Elle recule et je sens ses ongles effleurer ma main. Je fais demi-tour, je cours, je ne sais pas combien de temps je me retiens de pleurer. Longtemps, je pense, car je me souviens d'avoir entendu un cri déchirant, quelques secondes après avoir tourné le dos à Iris. Était-ce elle qui succombait à la douleur, ou une bestiole qui me hurlait sa haine ?

Quand je rouvre les yeux, tout le monde tente de me réconforter. Neil a dit que les bestioles avaient été renvoyées d'où elles venaient, que la brèche était rebouchée, que tout était normal, mais qu'il ne fallait plus descendre à la salle radio avant que tout soit réparé. Je m'en fiche un peu. Le cri d'Iris tourne encore dans ma tête. Encore, et encore, et encore. Une plainte morbide qui ne me quittera plus jamais.

Iris qu'est-ce que tu ferais, à ma place ?

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