Chapitre 26
Nous avons tous choisi nos chambres, celle de Tess est entre la mienne et celle de Kim au cas où il se passe quelque chose.
Zoé a ramené énormément de nourriture, même si quelques trucs étaient périmés je ne m'attendais pas à ce que tant de produits soient encore comestibles. Nous nous sommes régalés, cela faisait plus de deux ans que je n'avais pas aussi bien mangé. Nous avons évidemment gardé de quoi survivre quelques jours dans un sac à dos rempli de pains de glace. Par chance, s'il y a bien quelque chose qu'il ne manque pas sur cette Terre, c'est l'eau. Nous avons deux packs de bouteilles pleines pour l'instant.
Quant à Kim, elle nous a apporté tout le matériel médical qui pourrait nous servir, et en plus tout rentre dans sa sacoche. Je sens que ses capacités en médecine vont être très utiles.
Nous avons passé l'après-midi à visiter le parc, à nous amuser un peu. Lucie a trouvé une peluche ; nous l'avons lavée pour être sûre qu'elle n'attrape pas une mauvaise maladie puis elle ne l'a pas lâchée de la journée.
Je suis paisiblement installée dans mon lit, j'ai perdu l'habitude d'être sur quelque chose d'aussi confortable. Je ne peux m'empêcher d'admirer les grandes fenêtres donnant sur la nuit étoilée, et de profiter de la joie d'avoir une pièce pour moi toute seule et un vaste lit dans lequel je peux bouger comme je le souhaite... Il y a trois ans, je me serais plainte du sifflement produit par le conduit d'aération. Aujourd'hui, c'est tout simplement la chose la plus agréable que j'aie entendue.
Alors que je commence à m'endormir, j'entends Tess remuer et grogner de l'autre côté du mur. Je sors de mon lit, guidée par le faisceau lumineux de ma lampe torche, et je marche sur la pointe des pieds jusqu'à la chambre voisine. Kim a eu le même réflexe que moi, j'en suis soulagée. J'ai un peu peur de me retrouver seule avec Tess.
Nous entrons doucement dans la chambre, ses grognements s'amplifient rapidement. Nous nous approchons d'elle pour la maintenir en place ; son corps est secoué de violents spasmes et elle se met à crier comme un animal.
Bien sûr, Matt et Zoé sont réveillés par le bruit et nous rejoignent rapidement. Je suis très inquiète, et les autres aussi. Nous savons tous que cette crise est l'un des symptômes de la bactérie qui vous transforme en bestiole.
« Matt, trouve de quoi l'attacher au lit ! Vite ! »
Mon équipier s'exécute et sort de la chambre en courant. À peine quelques secondes plus tard, il revient avec des colliers à serrage, ces cordons en plastique utilisés pour accrocher les objets à leur emballage dans les magasins. Je les serre autour des poignets de Tess avant de les attacher à la tête de lit afin qu'elle ne nous frappe pas. Elle continue de se secouer, de baver un peu aussi, de battre des jambes, de hurler de douleur et de frustration.
Les heures qui suivent sont les plus longues de notre vie. Tantôt épuisée, tantôt enragée, Tess poursuit sa crise sans aucun répit. Tour à tour, nous veillons à ce qu'elle ne se détache pas et nous attendons, guettant le moindre signe de mutation. Lorsque Kim prend le relais pour me laisser dormir, je m'écroule à même le sol, exténuée.
*
J'ouvre les yeux en entendant un murmure.
« Ava ? Debout, il est presque midi. »
Je sursaute subitement.
« Midi ? Pourquoi vous ne m'avez pas réveillée avant ?
- Tu avais l'air épuisée. Et puis Tess dort aussi alors ça ne servait à rien qu'on te réveille avant », explique Zoé, adossée à la porte de la salle de bains.
Je me met debout, un peu étourdie, puis le souvenir de la nuit dernière me revient. Tess est paisiblement endormie dans son lit, ses poignets sont même détachés et sa blessure, visible sous son bandage abîmé, a cicatrisé.
« Comment va-t-elle ? Demandai-je à Kim, la voix tremblante.
- Bien. Sa crise s'est arrêté d'un coup il y a environ trois heures. J'en ai profité pour désinfecter sa morsure, elle a eu un peu mal mais ensuite elle s'est endormie.
- Donc elle ne va pas se transformer ?
- Non, enfin du moins pas aujourd'hui. Elle a eu beaucoup de chance. Il faudra surveiller la plaie au cas où elle se réinfecte, si ça arrivait elle pourrait refaire une crise et cette fois il faudrait un miracle pour qu'elle s'en sorte. »
Ces dernières paroles me glacent le sang. Tandis que les autres passent l'un après l'autre à la douche, Matt regarde Tess dormir sans dire un mot et je m'assieds à côté de lui, bouleversée.
*
Nous avons quitté le parc vers 14h, Tess est encore fatiguée mais elle est en état de tenir debout. Je sens bien que Matt en a marre de porter sa sœur endormie, que Kim et Zoé sont lasses de marcher. Et comme si ça ne suffisait pas, le ciel commence à se voiler de gris et une goutte glacée tombe sur ma nuque.
Nous avons tout juste le temps de quitter Oakland et de rejoindre une autoroute déserte avant que l'averse ne se déclenche, mais bientôt nous nous retrouvons trempés et gelés. Vu comme le ciel s'est obscurci, je n'ose pas imaginer combien de bestioles nous auraient attaqués en plein cœur de la ville. Je ne parviens pas à rester positive une minute de plus, car Lucie se met à pleurer à cause de la pluie.
« Ce n'est plus possible, Ava ! hurle alors Kim en lâchant ses sacs. Soit on trouve une voiture pour le voyage, soit je rentre à la planque. On n'a même pas encore quitté la Californie et on n'en peut déjà plus ! »
Zoé, Matt et même Tess acquiescent et s'arrêtent eux aussi. Je suis bouche-bée. Qu'est-ce qu'ils croient ? Qu'on fait le trajet à pied pour le plaisir ? Aucune voiture par ici n'a encore la clé sur le contact, même en cassant une fenêtre pour les ouvrir on ne pourrait pas démarrer !
« J'ai commencé quelques cours de conduite, avant la guerre, dit faiblement Tess.
- Et j'ai déjà fait un peu de mécanique, alors je pourrais démarrer n'importe quel tas de ferrailles avec un peu de temps », ajoute Zoé.
Bien qu'ils soient ligués contre moi, les voir si soudés me rassure. Je cède, trop crevée pour leur résister.
« Ok, ok. On avance jusqu'à ce qu'on trouve une bagnole, et ensuite je vous laisserai faire ce que vous voulez. »
L'équipe a l'air satisfaite, nous nous collons les uns aux autres pour avoir moins froid et nous poursuivons notre route, silencieux.
Coucou !
Ce chapitre est moins palpitant que d'habitude, je sais, mais patience ! Ça va aller de péripéties en péripéties à partir de maintenant UwU
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