๛𝚅𝚘𝚞𝚜 𝚎̂𝚝𝚎𝚜 𝚝𝚘𝚖𝚋é𝚜 𝚜𝚞𝚛 𝚕𝚊 𝚝ê𝚝𝚎 𝚘𝚞 𝚚𝚞𝚘𝚒 !๛
Le sol craque sous mes pas, les nuages se retirent gentiment, tandis que j'avance dans le sous-bois. Je me penche vers le champignon à mes pieds collé à l'humus pour le ramasser. Depuis ce matin, j'ai pu faire une belle cueillette. J'ai terminé.
Je décide de tourner les talons, lorsqu'un corbeau surgit devant moi. Son croassement me fait dresser les poils sur les bras. Mon dieu ! Je l'ai évité de peu ! Mon panier a manqué de se renverser également sur le coup. Je retourne à la maison, tentant d'oublier cette frousse.
Je croise sur mon chemin Robin, un seau à la main. Je m'arrête pour le laisser passer. Nos regards se croisent.... je ressens un sentiment d'inquiétude dans ses yeux. Je ne sais quoi en penser. Cela dure quelques secondes avant que je ne le vois disparaître derrière la lourde porte de la porcherie.
En rentrant dans la maison, mamie est en train de faire la vaisselle.
Je pose délicatement le panier en osier sur la table, ne faisant aucun bruit.
— Tu rapportes quoi pour être essoufflé ainsi ? me fait-elle à l'autre bout de la pièce.
Je relève la tête.
— Des champignons. ça peut peut-être s'avérer utile pour ce midi.
— Ce midi ? Mais on ne mange pas là !
Si j'avais des oreilles d'animaux, elles se dresseraient droit sur ma tête.
— Comment ça « pas là » ? On va où alors ?
— Mais tu n'es pas au courant ? On va dîner chez Romain. Il nous a chaleureusement invités, en compagnie de sa femme.
— Non... Je ne le savais pas...
Je sors de la pièce, légèrement vexée. On ne peut pas m'en parler, plutôt que de faire des plans dans mon dos ?
* * *
— Je trouve le repas excellent, rajoute ma tante, radieuse.
Moi non.
La journée est gâchée d'avance. Robin est en face de moi, Liam à côté de lui, qui ne cessent de me fixer. C'est extrêmement dérangeant. Je sais que je suis belle, mais pas ce point là...
— Oh mais c'est tout à mon honneur ! répond Romain, un sourire aux lèvres, j'ai mis beaucoup de temps à concocter ce repas.
Vachement ! Un poulet, ça met une heure à cuire. Les patates aussi. Et la sauce, ça va avec le reste. Ça vient de la boucherie en plus.
Il se tourne vers nous.
— Sinon, l'école se passe bien ?
Tous les regards se braquent sur moi. C'est le bon moment, sachant que j'ai encore la fourchette dans la bouche, pleine soit-il.
— Moi ?
— Oui, toi. Qui veux-tu que ce soit d'autre ?
— Oh mais tout le monde ! Il n'y a pas que moi qui vais à l'école. Par exemple... euh... Maëlys ! Ou Nathan, Robin... Alors, votre scolarité ?
Comment dévier un sujet bien chiant vers une autre personne pour se faire oublier.
Ce dernier semble dépourvu de mot.
— Euh... bah...
Par la fenêtre, une silhouette passe, m'octroyant toute mon attention. C'était qui ? Sans doute un chat...
— Non, je te rassure, ce n'est pas moi.
Une voix retentit dans ma tête. Je balaie du regard la pièce, mais toutes les personnes ici présentes semblent occupées à discuter entre elles, m'ayant visiblement oublié.
Tout à coup, la forme noire retraverse devant le carreau transparent. Mes yeux n'ont pu s'habituer si vite pour arriver à l'apercevoir. Mais bon sang de bonsoir, qu'est-ce que c'était ?!
— Revenons à toi, Roxane, reprend le propriétaire des lieux, en croisant les bras contre sa poitrine.
J'allais répondre, lorsque la tête d'Oxorion apparaît dans mon champ de vision.
Sur le coup, je recrache le liquide, manquant de m'étouffer. Mes yeux s'arrondissent comme deux grosses soucoupes volantes. Nom d'une biscotte, mais qu'est-ce qu'il fout là ? S'il s'avère qu'on le voit ici, c'en est fichu pour moi.
En tournant la tête, un chat est assis sur la chaise au fond. Son pelage roux clair transparaît dans la lumière du soleil. J'ai même l'impression qu'il sourit.
Je demande prestement où se trouvent les toilettes et ne perd pas une seconde de plus. Je dois sortir par derrière. Mais comment ? Oh si je sais... là... ils vont me voir, c'est sûr ! Si je reste discrète, ils n'y verront que du feu !
Je passe par la fenêtre baie vitrée puis me retrouve devant une haie. Je fais le tour de la maison et les aperçois, tous les deux, en train se marrer. Je vais éviter de m'arracher les cheveux maintenant, histoire d'en garder un peu. Quand les deux compères m'aperçoivent, ils sourient. Certes, pas comme nous, humains, mais leur expression faciale est enjôleuse.
— Mais qu'est-ce que vous foutez ici ? Ce n'est pas un endroit pour vous !
C'est Félix qui rétorque le premier :
— Bah écoute, comme tu peux le constater, nous étions curieux de visiter les environs. Et rester ainsi enfermés dans un sombre lieu n'est pas très plaisant.
Par pure précaution, je tourne la tête de gauche à droite, pour m'assurer que personne ne nous ait suivis.
— Très bien. Le seul problème, c'est que les dragons ne sont pas censées exister. Encore, Oxorion ne présente aucune particularité physique hors du commun. C'est un cheval comme les autres. Mais toi, Félix... si quelqu'un venait à découvrir ton existence, on ne serait pas dans la mouise !
Le vent se fait très doux par rapport à ce matin. De ce fait, des pas se font entendre. Merde !
— Vite ! Partez ! Quelqu'un arrive !
Je fais de grands gestes pour leur faire peur. Ils s'éxécutent sans broncher, se cachant derrière le muret qui mène chez la maison de mes grands-parents et celle de Sarah.
Par tout hasard, Robin arrive, muni de son sweet blanc et son pantalon noir.
— Tu parles toute seule ?
— Tu ne le savais pas, depuis le temps ?
Mon innocence ainsi que mon répondant lui en bouchent un coin. Bien fait !
— Si... malheureusement... non sérieusement.
S'il croit que je vais lui dire que je parlais à un dragon et un cheval, il peut se mettre le doigt dans l'œil.
— J'ai pas le droit d'avoir des amis imaginaires ?
En partant, je me retourne pour lui adresser un clin d'œil. En guise de réponse, il fronce les sourcils. Je sais qu'il ne me croit pas, je le sais. C'est évident. Mais pour rien au monde, je ne lui révélerai. Même sous la torture. Surtout, que cachés derrière le muret, Oxorion et Félix n'ont pas raté une miette de notre discussion...
Après cette entrevue chargée en émotions, j'ai décidée de m'asseoir sur les marches, au seuil de la porte de chez mamie et attendre, perdue dans mes pensées. Félix et Oxorion finissent par me rejoindre au pas. Oxorion comprend très vite ce que je voulais dire... avant même que j'en place une.
— Si c'est ça qui t'inquiète, non, personne ne nous a vus. Et fort heureusement.
Je souffle de soulagement, mais également de désespoir.
— Robin a tout vu... je le sens.
Félix répond calmement :
— S'il te connait bien — ou du moins, il le pense — il sera loin de se douter de toute cette ménagerie.
— Je l'espère.
Le silence est d'or. Seul le bruissement des feuilles vient s'ajouter.
— Vous êtes inconscients ! À une minute près et vous auriez pu vous faire remarquer !
Je peux voir Oxorion lever les yeux au ciel.
— Tu nous prends pour des débutants ? On a un minimum d'expérience dans le domaine, ma chère Roxane. La discrétion, c'est mon fort. Ne t'en fais pas.
— Je l'espère bien..., Rajouté-je dans un souffle.
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