๛ 𝙻𝚎 𝚝𝚎𝚖𝚙𝚕𝚎 𝚍'𝚎𝚊𝚞 ๛
Lorsque j'ouvre les yeux, mes yeux peinent à s'habituer à l'obscurité et je me rends très vite compte qu'il fait froid. Normal, le feu est éteint. Je fronce les sourcils. Pourtant, il n'y a pas d'air qui s'engouffre ici...
À côté, Félix dort sur Oxorion. Je les trouve trop choux, et je n'ose pas les réveiller de suite. BOUM ! Un bruit retentit au fond de la caverne, comme un soubre-saut. Mon coeur palpite dans ma poitrine. Ça ne me rassure pas du tout, ça... Je vais devoir affronter ma peur pour aller voir. Quoique, c'est quelque peu dangereux. On ne sait pas ce qu'il se cache là-bas. Je ne vais pas me risquer à m'y rendre et me contente de regarder les branches mortes carbonisées sur la pierre froide. À ce que je pense entendre, la pluie a cessé d'en faire des siennes et l'orage l'a rejoint par la suite. Une difficulté de moins sur la liste. Reste à présent à continuer notre route. Si il y a encore la créature sans poil, je demande ma mise à mort.
Je ne retente plus l'expérience, ce fut bien trop traumatisant. Regardez la réaction d'Oxorion lorsque nous nous sommes arrêtés. Il s'est crispé. Le pauvre... il a dû avoir la peur de sa vie, et moi, par la même occasion. Va falloir prendre des précautions.
À contre coeur, je m'approche et déclare à voix basse :
— Il faut se réveiller.
Pour seule réaction, l'oreille du cheval bouge de droite à gauche. Pas de réponse. Je pose ma main sur son épaule et il sursaute, redressant sa tête comme s'il se sentait en danger. Lorsqu'il m'aperçoit, son expression se radoucit. Je soupire. Puis Félix, qui n'a pas de mal à ouvrir les yeux et s'étirer.
— Bien dormi ? je leur lance en souriant, afin de détendre l'atmosphère.
— Et bien, je dirais qu'Oxorion est très confortable, avec son pelage d'hiver.
Ce dernier secoue sa longue crinière pour s'ébrouer et se lève. Le claquement de ses puissants sabots résonnent dans les entrailles de la caverne.
— Alors... il me semble que nous... attendez avant ! Il faut se barbouiller de fleur de baie. C'est une nécessité.
Félix écarquille les yeux devant ma phrase, tandis qu'Oxorion ne semble pas rassurée. Une ombre traverse son regard.
— Pourquoi faire ?
— Il y a une créature qui vit dans ses cavernes et semble, visiblement, aveugle. Elle se repère seulement par son odorat. Si on masque notre odeur, elle ne nous sentira pas.
— Je crois savoir de quelle créature vous faites référence... et ne tardons pas, le temps est compté !
Après nous être bien barbouillés de cette substance, nous nous enfonçons dans la grotte. C'est sombre, mais lumineux à la fois. Des champignons translucides nous permettent de voir le chemin. De l'eau inonde les lieux, mais le plus étrange dans tout cela, c'est que cela semble sec. Ce monde est une oxymore.
J'ignore depuis combien de temps nous marchons. En revanche, je n'ai pas vu de créature malsaine. C'est un bon point. Derrière cet étrange lieu, se cache une aura magique. Je la perçois. Elle semble cachée. Pour quelle raison ? Il y a quelque chose qui ne va pas, là-dedans. Je m'absente une semaine, et voilà que c'est déjà la merde. Nous y voilà bien.
À force de marcher, encore et encore, nous finissons par atteindre un splendide endroit. Face à nous, un temple et autour, de l'eau. Translucide, bordée de nénuphars. Ça donne une ambiance féerique, presque.
En me penchant vers l'eau bleue, je peux voir des yeux me fixer au fond. Euh... ma première défense est de reculer, pour m'en éloigner. Des yeux turquoise qui me fixent, c'est très étrange. Je finis par y être habituée. Les yeux se rapprochent. De plus en plus. Puis une silhouette se dessine.
C'est alors que la tête d'une femme surgit de l'eau, brusquement. Moi, je tombe sur le cul tandis qu'Oxorion, pris de peur, cabre.
— Mince ! commence la femme. Je vous ai effrayés ? Ce n'est pas mon but...
Oxorion se calme et je me recule, méfiante. La femme possède une peau bleue, comme l'eau et des pierres précieuses collées sur des écailles, entourant de beaux yeux verts. Ses mains sont fines.
— Vous savez, je ne suis pas méchante... je suis loin d'être comme mes soeurs. De vraies garces ! Si vous tombez sur elles, faites gaffe, elles aiment jouer des tours aux visiteurs et les enchanter avec leurs voix.
Leurs voix ? Il n'y a que les sirènes qui...
— Vous êtes une sirène ?
— Oui, cela vous étonne ?
— Et bien, on n'en a jamais vus d'aussi près.
Elle passe un regard derrière son épaule puis se tourne vers moi.
— Cet endroit est sacré, dit-elle, sur le ton de la confidence. Personne ne s'est encore aventuré ici. Si vous êtes parvenus jusqu'ici, c'est que vous possédez des pouvoirs.
— En effet, je suis sorcière.
Derrière, mes alliés n'ont pas sorti un mot.
La femme poisson me dévisage, comme si elle m'analysait.
— Pas seulement. Vous avez quelque chose d'autre...
— Quoi ? Non, c'est impossible. Je ne suis qu'une simple sorcière banale.
En signe de désaccord, elle secoue la tête, faisant par la même occasion, voler ses cheveux blanc immaculés.
— Non... je perçois une aura plus profonde que ça. Je n'ai encore jamais croisé une personne possédant une aura aussi puissante. Sur les rares visiteurs que j'ai pu voir passer, et la plupart n'en sont pas ressortis, vous êtes la seule.
Je ne sais plus quoi dire. Elle m'a coupé l'herbe sous le pied. Une aura puissante ? Je l'ignorais. Je fais un pas en avant, et je perçois sa queue de poisson, de couleur verte. C'est fascinant. C'est vraiment incroyable, j'en reste subjugée.
— Si vous voulez vous rendre de l'autre côté de la rive, vous devez prendre une barque.
De ses doigts longs, elle nous désigne une barque en bois, clair, qui se situe au bord de l'eau.
Nous nous exécutons dans le silence total. Sous le poids d'Oxorion, la barque tangue de droite à gauche, dangereusement. C'est trop risqué de le mettre avec nous. On va tomber dans l'eau. Je serre les dents, inquiète. Comment allons-nous faire ?
Percevant mon trouble, la sirène nous approche la barque plus près.
— Allez-y, je m'occupe de votre ami.
Je la regarde droit dans les yeux, hésitante. Dois-je lui faire confiance ? Après tout, si elle aurait voulu nous noyer, elle aurait été très bien capable, trop vulnérables.
Puis je décide de monter dans la barque, Félix sur mon épaule. Je lance un dernier regard attendrissant à mon ami équin et nous nous engageons sur la rive, sous l'architecture immense qui borde ces lieux. On dirait vraiment un temple. Oxorion n'est plus qu'une minuscule silhouette dans la brume. L'endroit est calme, paisible. C'est comme si l'eau nous portait vers la rive suivante. Vivante. Tout est vivant ici, la flore comme la faune. Il faut faire gaffe.
Nous sommes secoués par la barque qui a atteint sa destination, nous réveillant de notre torpeur. Je descends, doucement et mets pied à terre. C'est bien un temple, en effet. Immense. Le soleil circule à travers les palissades. Je ne dis rien. Je préfère admirer, dans le silence.
En tournant la tête vers l'eau, j'aperçois Oxorion, sur une barque, s'approcher davantage. Il finit par nous rejoindre. La pression redescend petit à petit, et l'aventure ne fait que commencer.
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