X. Apatite Jaune

Apatite jaune : fraude, tromperie, perfidie

Il y avait peut-être un détail que Lumine n'avait pas pris en compte, dans toute cette histoire. Un menu petit détail, tout léger... Mais qui avant tout de même son importance ! Ce n'était que trois fois rien, mais bon. C'était quand même quelque chose.

Elle ne savait pas comment tuer un dragon.

Elle avait beau fouiller dans sa mémoire, le peu de souvenirs qu'il lui restait ne concernait aucun combat contre un dragon. Ni contre des chimères, des cerbères ou autre créature magique, fantastique ou merveilleuse... Donc trouver le moyen d'ôter la vie à une bête aussi imposante et féroce que Stormterror, en prenant en compte le fait que la seule fois où elle s'était retrouvée face à lui, la Voyageuse n'avait rien pu faire hormis espérer ne pas finir entre ses crocs... Cela semblait très compliqué d'avance.

Toujours assise sur son banc, Lumine soupira en continuant de jouer avec ses cheveux blonds. Décidément, plus elle trouvait de solutions à ses problèmes, plus la liste de ces derniers semblait s'allonger. Ca devenait un brin agaçant.

Devait-elle se glisser dans la cachette du dragon et tenter de le tuer dans son sommeil ? Encore pour ça fallait-il savoir où il se planquait et réussir à y pénétrer sans l'alerter. Sans compter qu'il suffisait qu'il se terre dans une grotte sans beaucoup d'issues et c'était la mort assurée. Stormterror devait sûrement connaître sa cachette sur le bout des doigts – ou des griffes... – et Lumine doutait qu'elle avait le temps de localiser cet endroit et d'y faire du repérage avant que la patience de la Tsarine n'arrive à son terme. La jeune femme blonde ignorait pourquoi, mais elle ne voyait pas du tout la souveraine de Snezhnaya comme une femme capable d'attendre pendant plusieurs mois.

Alors attendre le moment où il apparaît, patienter jusqu'à ce qu'il se pose sur la terre ferme et l'attaquer à ce moment-là ? L'effet de surprise serait une bonne idée, mais Lumine avait tout intérêt à abattre Stormterror dans la minute. Autrement, soit il combattrait et elle doutait de faire convenablement le poids, soit il s'envolerait et elle perdrait tout avantage d'une autre attaque surprise à l'avenir. Et si la jeune femme avait foi en ses capacités, elle doutait d'être capable de l'abattre en si peu de temps.

Quant à l'attaquer directement dans le ciel, c'était hors de question. Lumine ignorait encore l'étendue de ses nouveaux pouvoirs Anemo et quelque chose dans son esprit lui soufflait qu'elle n'avait que peu de talent à l'arc.

Relâchant finalement ses courtes mèches blondes, elle tendit ses mains vers le ciel, s'étirant en poussant un faible gémissement de frustration. Faire ça ne lui donnait pas plus d'idées pour la suite de ses projets. Elle ne faisait que ressasser encore et encore, en boucle, plusieurs idées qui, elle le savait, ne tiendraient pas la route. Cela ne lui faisait que des nœuds au cerveau et un mal de crâne de plus en plus désagréable et sournois à mesure que les minutes s'écoulaient. Lumine soupira une nouvelle fois, commençant à jouer cette fois avec ses doigts. Elle les tordait entre eux, les croisaient et les décroisaient, comme si faire cela allait enfin lui donner une idée. Elle fit courir son index droit sur les ongles de sa main gauche, s'arrêtant sur son auriculaire et ses yeux se focalisèrent sur la petite cicatrice qu'elle pouvait sentir sous le tissu de son gant. La plaie, une ligne pas très fine qui courait le long de son doigt, la fit légèrement sourire. Lumine ne savait pas d'où elle venait, signifiant qu'elle datait d'avant tout ça, d'avant leur affrontement avec cette déesse. Ce ne serait bientôt plus qu'un lointain souvenir, mais la sentir rassura légèrement la jeune femme blonde.

Cette dernière s'avachit complètement contre le dossier de son banc, ses yeux se perdant dans le vide. Elle était perdue, ignorant quoi faire, quelle idée abandonner, quelle autre poursuivre et quelle démarche suivre.

Et dire que si elle avait eu un peu plus de courage, elle aurait pu être aidée par les Fatui et que maintenant, c'était trop tard...

Et toi, qu'est-ce que tu penses de tout ça, Paimon ? demanda finalement la Voyageuse, bien que la petite pixie n'était toujours pas à ses côtés. "Oh mais c'est bien simple, Lumine ! La seule bonne solution, c'est de s'enfuir loin de la vilaine maléfique Tsarine et de ses méchants Fatui !"

Certaines passants lui accordèrent peut-être un regard interloqué en l'entendant parler avec cette voix fluette, suraiguë et agaçante qui en disait long sur son état de frustration de plus en plus croissant, mais Lumine ne s'en souciait pas vraiment, voire pas du tout. Au moins, elle pouvait affirmer en toute modestie qu'elle imitait parfaitement bien la voix de Paimon. Et comme cette dernière n'était pas là pour affirmer le contraire, c'était encore plus parfait.

Lumine rit d'elle-même, tout en continuant de tracer les contours de la petite cicatrice de son auriculaire. Elle continua de réfléchir plusieurs minutes. Enfin si par reflechir, on entendait " s'apitoyer sur son sort une fois sur trois tout en se disputant de se laisser aller et en menaçant de crier de frustration toutes les minutes". Après un court instant de considération, la jeune femme blonde jugea que c'était une excellente manière de réfléchir. Ce n'était peut-être pas efficace, mais c'était un détail. Un petit détail, minuscule.

En s'arrêtant une nouvelle fois sur un relief de sa cicatrice, une nouvelle idée germa dans son esprit. Elle savait combattre, c'était un fait qu'elle-même ne pouvait nier. Elle avait sûrement été une grande guerrière, bien qu'elle n'en était pas sûre. Mais c'était quelque chose que sa mémoire musculaire semblait lui souffler sans arrêt, à chaque fois qu'elle empoignait son épée, à chaque fois qu'elle se retrouvait face à des adversaires, que ce soit les brutocollinus, les brutoviandu ou les mages de l'abîme – pour le peu qu'elle avait croisé de ces sales bêtes-là. Et à bien y réfléchir, il n'avait fallu que deux brutocollinus, isolés et plutôt faibles, pour que les instincts de combattante de la Voyageuse ne ressurgissent des tréfonds de son esprit, au mépris de son amnésie encore bien présente.

Si un combat, si tant est que l'affrontement avec les deux petits monstres pouvait être qualifié de "combat", lui avait permis de renouer avec une part d'elle-même perdue dans l'abîme de l'oubli, un peu d'entraînement lui permettrait certainement de retrouver sa force, ses réflexes et son style de combat, n'est-ce pas ? Parfois, Lumine avait l'impression que tout cela n'attendait qu'un signal pour recommencer à lui coller comme une seconde peau.

C'était donc décidé ! Elle allait prendre une mission à la guilde des aventuriers pour se remettre en forme !

Et aussi pour retrouver un peu de mora, un problème qui était peut-être un peu plus présent et urgent que "comment tuer Stormterror" à l'heure actuelle.

Motivée, Lumine sauta sur ses deux jambes pour se lever, souriant d'un air renouvelé, confiant et plus sûre d'elle. Sans attendre de se remettre en question, un mal dont elle souffrait trop en ce moment et qui l'agaçait de plus en plus, elle se précipita jusqu'aux escaliers descendant les plus proches, pour rejoindre la place de la fontaine et la rue dans laquelle se trouvait le comptoir de Katheryne. Sa précipitation attira certains regards curieux, mais encore une fois, la Voyageuse n'y prêta pas attention. Son nouvel objectif était tout tracé et même s'il repoussait un peu l'échéance de sa véritable mission, il galvanisait la jeune femme.

La réceptionniste de la guilde ne cacha pas sa surprise sur son visage lisse et trop parfait lorsqu'elle vit arriver la Voyageuse. Toutefois, ses lèvres se parèrent directement d'un sourire figé, dissimulant rapidement son étonnement, alors que Lumine s'arrêta, respirant un grand coup comme si elle venait de courir un marathon, alors qu'elle avait juste franchi 500 mètres au pas de course. Katheryne ne dit rien pendant les premières secondes, attendant qu'elle se remette de ses émotions et qu'elle soit capable de respirer sans essoufflement.

Ad astra abyssosque, Voyageuse ! Que puis-je faire pour toi ? Désires-tu des renseignements ? Une bonne adresse à laquelle manger ? Ou bien–

– Une mission ! la coupa un peu brusquement son interlocutrice en plaquant le plat de sa main contre le comptoir de bois dans un son fort et plein. N'importe laquelle, tant qu'elle porte sur le combat.

Son empressement laissa l'étrange femme aux cheveux noirs assez circonspectes. Gardant ses mains sur le devant de son corps, Katheryne pencha la tête sur le côté, dans un mouvement saccadé particulier, comme si elle assimilait l'information. Puis elle remit sa tête droite, ferma les yeux et sourit dans une franche expression amicale, quoique toujours aussi particulièrement figée. Lumine n'en fit aucun commentaire. Elle commençait à se dire que c'était normal. En tout cas, elle s'y habituait.

Une mission d'affrontement contre des monstres ou d'entraînement au combat, donc ? Laisse moi regarder ce que je peux te proposer.

– Oui, oui, bien sûr, répondit la jeune femme en rougissant légèrement, un peu honteuse d'avoir fait preuve d'autant de hâte face à son interlocutrice toujours aussi calme et sereine.

Elle regarda la réceptionniste attraper un lourd cahier aux pages parcheminés, recouvertes pour la plupart d'une écriture fine, en pattes de mouche, à l'encre noire. En se penchant un peu pour regarder, Lumine remarqua que certaines des lignes étaient barrées d'un trait unique et propre, pendant que d'autres avaient des petites annotations sur la marge, comme des précisions concernant les missions dont elles parlaient. Pendant que Katheryne baladait son doigt entre les phrases non barrées, la Voyageuse en remarqua deux accompagnées d'un petit pictogramme semblant représenter un "attention". Des missions trop dangereuses et ne pouvant être confiées qu'à des aventuriers experts, peut-être ?

L'une d'elle concernait-elle le dragon ?

J'y suis, annonça calmement la réceptionniste alors que son doigt s'immobilisait sur une ligne en bas de page. Il y a, le long de la côte du Faucon, un groupe de Brutocollinus. D'après nos observations, ils sont en train de construire des tours ou quelque chose qui ressemble à un campement. Ta mission, si tu l'acceptes, Voyageuse, est de détruire ce campement. Libre à toi de décider ce que deviendront les Brutocollinus par la suite. Est-ce que cela te convient ?

Lumine n'y réfléchit que quelques poignées de secondes, si ce n'est moins. Son cœur semblait battre jusque dans ses oreilles et à un rythme bien plus rapide que d'ordinaire, tandis que l'adrénaline et un début d'anticipation commença à courir dans ses veines comme de la lave, l'incitant à se mettre en mouvement tout de suite. L'impatience la couvrait toute entière.

Un campement de Brutocollinus à détruire. Le long de la côte du Faucon, répéta-t-elle pour être certaine de ne faire aucune erreur. C'est parfait, c'est exactement ce qu'il me fallait.

– Merveilleux ! Désires-tu que je te marque l'emplacement sur ta carte ?

Cette fois, Lumine hésita. Quant à comment Katheryne savait qu'elle avait une carte lui passait au-dessus de la tête, cependant...

Je préfère que tu me l'indiques sur une autre carte, s'il te plait, finit-elle par demander, légèrement gênée. J'ai emprunté cette carte pour une durée... Indéterminée, mais j'aimerais la rendre en état.

Katheryne eut un petit rire, qui comme tout le reste de son éventail d'expressions, semblait un peu faux, un peu surjoué. Cette fois, la jeune femme aux cheveux blonds le releva à peine. Elle observa simplement la réceptionniste ouvrant un petit tiroir dans lequel se trouvaient des parchemins roulés. L'étrange femme aux cheveux noirs en saisit un, qu'elle déroula pour révéler une carte de Mondstadt sûrement bien plus récente que celle que Lumine avait chapardée – empruntée ! – à Zapolyarny. Elle traça un cercle à la plume sur une zone perdue dans le sud-ouest de la région, longeant les falaises, puis elle tendit finalement la carte à la Voyageuse. Cette dernière s'en saisit en remerciant son interlocutrice, enroulant à nouveau le parchemin avant de le glisser dans son espace de stockage.

Merci. Sincèrement merci. Je reviens te voir dans... Deux petites heures, peut-être trois.

– Prends tout ton temps, Voyageuse, rit doucement la réceptionniste. A tout à l'heure ! Je vais préparer ta récompense.

Lumine la salua joyeusement avant se remettre en marche, quittant la ville avec une certaine impatience. Elle remarqua à peine l'ombre qui voila délicatement le regard couleur océan de Katheryne, tandis que cette dernière soupira faiblement.

Si la jeune fille y avait prêté plus d'attention, peut-être aurait-elle compris que la tempête arrivait.

~*~

Elle aurait pfu te payer pluche, quand même, bougonna Paimon en terminant d'engloutir sa troisième pomme, petit déjeuner de luxe.

Paimon ! Ce n'est pas elle qui fixe le montant des récompenses. Et arrêtes de parler la bouche pleine, c'est répugnant.

La petite pixie émit un son légèrement hautain, ce qui surprit Lumine. La Voyageuse fixa sa compagne de voyage en penchant légèrement la tête sur le côté, voulant s'assurer qu'elle venait bien d'entendre ce qu'elle venait d'entendre. Comme Paimon l'ignora superbement, préférant essayer de piquer l'une des pommes servant de petit déjeuner à la jeune femme, cette dernière soupira faiblement et se décala de plusieurs centimètres, faisant comprendre le message à son amie. Laquelle croisa les bras sur sa minuscule poitrine, les traits de son visage se froissant en une grimace boudeuse. Lumine l'ignora alors.

Trois jours à Mondstadt, et deux nuits passées dans la nature. La mission proposée par Katheryne avait été un pur défouloir, ô combien agréable pour Lumine, mais les quelques centaines de mora qu'elle avait reçu en retour de la destruction de ce campement – toujours bouleversée par cet étrange sentiment, la Voyageuse ne parvenait pas à s'en prendre aux brutocollinus et avait simplement fuit après les avoir dépossédé de leurs deux tours – n'étaient pas suffisants pour payer un dîner, un petit déjeuner et une chambre dans une auberge, même pour une nuit. Lumine avait sacrifié une centaine de mora sur l'autel des brochettes de poulet et de champignons. Elle avait conservé le reste pour plus tard, et avait tenté de retrouver le petit coin calme dans lequel elle avait dormi la nuit d'avant. Malheureusement, elle ne l'avait récupéré et s'était donc couchée ailleurs.

Donc évidemment, pour le petit déjeuner, c'était pomme. Comme la veille.

A l'exception près que cette fois, Lumine ne mangeait pas seule. Elle avait à ses côtés une morfale qui tentait d'avaler toute la cueillette que la Voyageuse avait faite pour elles deux.

Elle savait que Paimon avait un certain appétit, mais à cet instant, cela frôlait l'excès à bien des égards.

Et sinon... Tu as réfléchi à ce que Paimon t'a dit, hier soir ? demanda la fée volante en léchant ses doigts pour récupérer le jus de pomme collant sur ses mains.

La Voyageuse sortit de sa réflexion, tournant un visage sans expression vers son amie. Cette dernière arrêta son activité, fixant la jeune femme de ses yeux bleus troublants en attendant sa réponse.

Tu parles... Du sermon que tu m'as fait quand je t'ai annoncé que j'avais l'intention de tuer Stormterror ?

– Oui ! approuva Paimon. Alors, tu as réfléchi et tu t'es rendu compte que c'était une très mauvaise idée ?

Lumine attendit une seconde. Puis deux.

Et bien, étant donné que j'ai arrêté de t'écouter quand tu es passée de "crier" à "hurler"... Non. Je n'ai pas réfléchi à ce que tu m'as dit.

Cette réponse lui valut une nouvelle salve de réponses indignées, lui rappelant le concert de reproches, de conseils, d'inquiétude et la longue liste de "pourquoi-la-tsarine-t'influences-et-c'est-très-mal" en X points – il semblait à Lumine que c'était au septième point qu'elle avait décroché – auquel elle avait eu le droit la veille. Sauf que cette fois, elle n'avait pas la patience de l'écouter. Elle termina sa dernière pomme et jeta le trognon sous une souche, comme elle l'avait fait la veille, puis se redressa. Sa soudaine mise en mouvement coupa Paimon en pleine déclamation, la fillette volante aux cheveux blancs perdant le fil de sa phrase. Visiblement ébahie, elle la regarda repartir en direction de la ville.

Mais... Hey, Lumine ! Où tu vas ?

La Voyageuse s'arrêta, déjà à une bonne dizaine de mètres de leur campement improvisé.

Prendre une nouvelle mission auprès de Katheryne. Tu viens ?

Paimon ne répondit même pas. A peine comprit-elle que sa compagne de voyage retournait en ville qu'elle disparut dans son monde à elle. Lumine n'en fut même pas surprise.

Il lui fallut une dizaine de minutes depuis son campement pour arriver en ville. Mais très rapidement, alors qu'elle venait juste de passer la porte permettant de pénétrer dans la cité, la Voyageuse sentit que quelque chose n'allait pas. Les gens la fixaient attentivement, d'une manière qui ne lui était pas familière. Les deux précédents jours, elle avait attiré les regards, mais pas de cette manière. Et pas autant. Les Mondstadtois l'avaient fixés avec curiosité, pas avec... Méfiance. Deux femmes se penchèrent sur l'étal d'une troisième, l'une d'elle l'observant avec ce qu'elle croyait être de la discrétion. Un peu plus loin, un couple la dévisagea et le père de famille rapprocha leur fille de sa hanche, une main protectrice sur les épaules de l'enfant. De l'autre côté de la rue, deux hommes discutèrent en la fixant et une petite fille derrière une étale de fleuriste la regardait avec ses grands yeux, sa bouche fermée et une étrange grimace tordant ses traits.

Ce n'était pas normal. Il se passait quelque chose.

Peut-être que les mondstadtois avaient subitement appris à se méfier des étrangers ou alors, plus probable, Stormterror avait encore frappé.

Toutefois, la Voyageuse ignorait pourquoi, mais quelque chose dans son instinct lui disait que c'était quelque chose de bien différent. D'autant que si le dragon destructeur avait fait quelque chose, personne ne l'aurait fixé de la sorte, comme si elle avait commis un crime odieux.

Ce constat mit la jeune femme blonde d'autant plus mal à l'aise, l'obligeant à presser le pas. La femme marchande se tenant de l'autre coté de la grande rue faite d'escaliers, presque en face du comptoir où Katheryne l'attendait, disparut immédiatement dans sa boutique en apercevant la jeune femme blonde. Et la réceptionniste elle-même semblait soucieuse et chagrinée en voyant Lumine apparaître devant ses yeux.

Oh, Voyageuse, que fais-tu ici ? demanda-t-elle au lieu de son "Ad astra abbyssosque" habituel.

Surprise, la jeune femme fronça les sourcils, tout en regardant autour d'elle. Son geste ne la rassura pas, puisqu'elle remarqua un groupe de passants qui s'étaient agglutinés autour d'un tableau d'affichage, échangeant des messes basses. L'un des hommes de ce groupe la remarqua, et il s'enfuit aussitôt, partant dans une rue annexe sans la moindre explication. Surprise, Lumine leva la tête vers le ciel, comme si ce dernier allait lui donner une réponse. La seule chose qu'elle vit fut l'énervant barde qu'elle avait croisé le premier jour. Pour une raison qu'elle ignorait, il était sur les toits et fixait les rues d'un air triste et résigné.

De plus en plus confuse, la Voyageuse se retourna vers Katheryne.

Comment ça ? Que veux-tu dire ? Que se passe-t-il ici ?

La réceptionniste la dévisagea de ses yeux gris et bleus, et si le malaise de la jeune femme n'avait pas déjà atteint son paroxysme, il aurait doublé sous le regard de l'étrange femme aux cheveux noirs. Lumine avait l'impression que cette dernière pouvait lire son âme.

Tu ne devrais pas être ici. Ils vont te soupçonner. Ils le font probablement déjà à l'heure actuelle. Ils cherchent le coupable et aux vues des rumeurs qui courent déjà partout, tu es la première sur la liste.

Lumine découvrit soudainement qu'elle détestait qu'on parle en énigme.

Je ne comprends pas. Soit plus claire, Katheryne, répondit-elle avec irritation et une certaine froideur.

Cette dernière soupira.

Ne sais-tu donc pas ce qui s'est passé cette nuit, à la cathédrale ? La lyre d'Himmel a été volée.

Un vol ? C'était donc une affaire plutôt grave, non ? Même si Lumine ne savait pas avec exactitude la nature de l'objet volé. Elle était presque sûre d'en avoir déjà entendu parlé, de Paimon ou des livres qu'elle avait lu sur Mondstadt, mais ne pouvait l'affirmer avec certitude. Et puis, quel était le rapport avec elle ? Cette lyre était mondstadtoise et le seul pays dont elle acceptait de se rattacher était Snezhnaya.

La lyre d'Himmel est l'objet le plus précieux et sacré de l'Église de Favonius, expliqua Katheryne, semblant remarquer sa confusion. Elle était utilisée par Barbatos lui-même et est chargée d'une puissante énergie Anemo. Par conséquent, elle est normalement gardée très précieusement mais cela n'a pas empêché son vol. Tu te demandes sûrement qu'est-ce que cette lyre a avoir avec toi. Et bien, laisse-moi t'expliquer.

Si Lumine se croyait prête pour la suite, elle se trompait lourdement.

Tu es celle qui l'a volée.

Il fallut quelques seconde à la jeune femme blonde pour comprendre ce que venait de dire la réceptionniste de la guilde.

Pardon ? s'insurgea-t-elle, révoltée d'une telle accusation. Mais jamais je n'aurais essayé de voler cet instrument de musique ! Je ne me souvenais même plus de son existence avant que tu ne l'évoques !

– Je sais, Voyageuse, je sais... soupira Katheryne. Mais les chevaliers de Favonius ont affirmé que le voleur avait été aperçu très rapidement, et qu'ils avaient juste eu le temps de distinguer une chevelure blonde et des habits blancs. Depuis, les rumeurs vont bon train et inutile de préciser que tout le monde a remarqué cette élégante jeune femme blonde à la robe blanche qui flâne dans la cité depuis plusieurs jours et qui se parle toute seule...

Bon. Peut-être que disputer Paimon quand cette dernière n'était même pas là pour l'entendre lui faire ses reproches, ce n'était pas une si bonne idée que ça.

Entre nous, continua la réceptionniste, nous savons que tu n'as rien fait. Mais pour les véritables concernés, tu es vite devenu... Un problème à régler rapidement. J'aurais bien essayé de prendre ta défense, mais personne n'écoute une simple réceptionniste.

Oh non.

Ils avaient vraiment fait ça.

Les Fatui avaient vraiment volé cette lyre de pacotille et avaient vraiment fait en sorte que Lumine soit accusée du crime.

Les traits lisses de Katheryne se tintèrent de compassion tandis qu'elle voyait la réalisation se former dans les yeux dorés de Lumine. Elle posa une main sur son comptoir, comme si elle voulait consoler la Voyageuse, mais qu'elle ne pouvait pas vraiment.

Je crois que tu devrais quitter la ville.

Comme pour confirmer ses propos, la jeune fille blonde remarqua un chevalier de Favonius la fixant, comme en transe ou comme un taureau de corrida sur le point de foncer sur sa cible. Ses yeux étaient presque noirs tant ils semblaient dilaté et il pivota d'un coup pour se tourner vers un collègue, non loin de là, occupé à parler ou flirter avec une passante.

Karl ! Préviens tout de suite le capitaine Kaeya que–

Lumine ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase. Elle s'enfuit de la cité comme si elle avait le diable à ses trousses, en quatrième vitesse, se précipitant si vite qu'elle en serait presque tombée en avant. Elle avait le cœur lourd, une envie irrépressible de crier et de pleurer mais tant qu'elle courait, elle parvenait à se retenir. Muée par un instinct de survie qu'elle n'aurait jamais soupçonné auparavant, elle continua de courir, encore et encore, au plus loin possible. Elle emprunta divers chemins, passant ensuite à travers les fourrées, à travers les arbres, passant par-dessus les rochers, coupant à travers la rivière, celle juste derrière l'immense arbre de Ventlevé, et continua de courir encore et encore et encore.

Bien vite, son besoin de pleurer et d'hurler ses émotions fut rejoint par une envie de vomir provoquée par la course précipitée et le choc de ce qu'elle avait compris en ville. Pourtant Lumine se força à continuer de galoper, plus vite et plus vivement. Jusqu'à finalement freiner dans les hauteurs, à des lieux de toute vie humaine, non loin des Monts Dosdragons. Le froid qu'elle ressentit à ce moment-là était léger, peut-être désagréable, mais familier. Il lui rappelait Snezhnaya.

Ce ne fut qu'à ce moment-là que Lumine s'autorisa à craquer, tandis que Paimon réapparaissait, probablement alertée par l'état de la jeune femme blonde.

Lumine ? appela la petite pixie.

Mais l'interpellée ne répondit pas.

C'était de sa faute. Complètement de sa faute. Elle aurait dû y penser. Elle aurait dû se douter que les deux Fatui de la veille, Mikhail et Lyudmila, ne l'avaient pas laissée partir sans prendre de précautions ultérieures. Elle aurait dû se douter qu'à être aussi hésitante, elle serait vue comme un problème, comme une fouineuse, une espionne. Elle aurait dû agir tout de suite, aller à leur rencontre dès son premier jour à Mondstadt. Peut-être que le résultat aurait été le même, peut-être qu'elle serait toujours là, à se tourner l'esprit avec des "et si" et des "j'aurai dû". Mais elle ne pouvait pas en être sûre. Au moins, elle était sûre d'une chose : agir comme elle l'avait fait, comme un volatile papillonnant autour des Fatui sans réussir à prendre de décisions, puis parler sans être parfaitement honnête, avait été la pire idée qu'elle aurait pu avoir.

C'était de sa faute. Tout était de sa faute.

Elle payait le prix de son indécision. De ses mauvais choix.

Tu vois ce que c'est, de faire confiance aux Fatui ? déclara Paimon comme si retourner le couteau dans la plaie était une bonne idée. Tu vois comment ils te remercient de ta confiance ?

– Tais-toi, Paimon.

Elle savait qu'elle aurait dû faire attention. Elle savait qu'elle aurait dû réfléchir, préparer ses réponses à l'avance. Elle savait aussi que très certainement, le projet de voler la lyre était de longue date et que cela, ce n'était pas de sa faute, mais elle savait également qu'en agissant comme elle l'avait fait, elle leur avait offert un bouc émissaire de choix à qui faire porter le chapeau. Elle savait qu'elle aurait dû être prudente. Elle le savait.

Et en même temps, Lumine ne savait rien.

Elle s'était lancée dans cette quête sans savoir, sans informations tenant la route.

Et aujourd'hui, elle en payait les frais.


~4399 mots~

Lumine tout le long de l'arc de Mondstadt : J'ai les idées, je sais juste pas comment les mettre en pratique.
En fait, c'est littéralement moi tous les jours de la vie-

Comme toujours, j'espère que vous avez aimé ce chapitre ! Il a été... Un peu pénible à faire (en même temps, je galère à gérer mon temps en ce moment) mais finalement, je l'aime beaucoup comme il est actuellement. N'hésitez pas à me confier vos avis et si les nouveaux problèmes de Lumine était prévisibles ou pas (oui, sûrement) 

En allant à Mondsadt sur le jeu, je me suis rendu compte que le Fatui qui garde l'entrée du Grand hôtel Goth s'appelle Luke, et non Erik... On va dire que y'a eu un tour de garde à ce moment-là !J'écoutais Phantom of the Opera au même moment, ça doit être pour ça

Sur ce ! 

A la prochaine ! 

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