Chapitre 1.7 : Alamo

Dans l'épisode précédent... après bien des péripéties, Lee et Kathleen se sont lancés dans la bataille pour le Texas à leur Alamo. Kat a rassemblé les troupes et tandis que son camarade fait des siennes, les choses sérieuses commencent.

Et à mon tour, je devais prendre ma place dans cette grande aventure.

J'abandonnai mon sac à côté de ceux que je supposai être ceux de mes compagnons.

Les vrais guerriers n'avaient besoin que de leur courage.

Et je me jetai dans la gueule du loup. 


On loue parfois le courage de ces quelques téméraires qui s'élancent hors de la pluie lors de l'averse, pour se tremper à recueillir pleurs du ciel, de ces fous attachants dont je connus l'un des plus resplendissants spécimens, qui préfèrent avoir l'eau et le froid tonitruant que la chaleur prudente.

Je ne ressentis pas autre chose.

Geronimo me lâcha dès les premières secondes, à nouveau geai moqueur :

— Va chercher Lee, m'ordonna-t-il.

Et il s'envola dans les airs. Je devinai qu'il allait chercher Hester, pour à nouveau former leur duo d'Enfer, mais je ne lui en voulus pas : cette fois-ci, nous ne serions pas les victimes, mais leurs complices, et je me réjouis même d'avance à l'idée des mauvais coups qu'ils tendraient aux autres dæmons. Nous ne serions pas loin l'un de l'autre – nous ne nous battrons peut-être pas côte à côte, mais nous cheminerons ensemble. Mon regard papillonna un instant, pour s'accrocher encore un peu à cette autre part de moi-même que je voyais briller dans les cimes ; mais à la guerre, le moindre instant est si précieux qu'on ne peut le gâcher.

Je ne dus ma survie qu'à la bêtise de mon ennemi. Un Nouveau-Français se précipita vers moi, la main tendue pour m'attraper. Mon instinct réagit plus vite que moi et actionna mes petites gambettes : je ne lui échappai qu'à un fil près, le souffle court. Je ne pouvais plus ni douter, ni réfléchir. Il n'y avait qu'à décider et à agir. Ces jeux d'enfants formèrent une bien étrange propédeutique à ma vie, et je me demande aujourd'hui quelles auraient été mes décisions si je n'avais pas profité de cet apprentissage si formateur.

Déjà, la petite Kathleen montra une capacité de fuite surprenante : j'eus si peur de voir le jeu s'arrêter là, d'être effacée de l'épopée que nous écrivions que je ne m'arrêtais plus de courir avant d'avoir rejoint le perchoir de mon énergumène favori. Dans le chaos ambiant, en tant que nouvelle venue, on se garda bien de prendre le risque de me courser. Si mes compagnons avaient probablement assigné mon minois à mon arrivée scoresbienne, tous les Nouveaux-Français ne m'avaient pas encore pris en chasse. L'identification de l'ennemi est parfois le plus long dans une guerre – j'en sais quelque chose.

Lorsque j'arrivai à le rejoindre, Lee finissait tout juste de dés-escalader son perchoir. Ses mains relâchèrent l'écorce et il retrouva le plancher des vaches avec nonchalance. Il s'offrit même le luxe d'épousseter ses vêtements.

— Pourquoi tu es allé te mettre là-haut ? m'enquis-je, sur le ton du reproche.

— Et toi, pourquoi tu n'y es pas allée ?

— Quoi ?

— Le drapeau !

Dans l'effervescence de la bataille, j'en avais oublié l'essentiel : la victoire. Cependant, je ne manquai pas d'être estomaquée par le toupet de Lee : il jouait aux acrobates des cieux, et osait ensuite me réprimander ? Si ce n'était pas un jeu, j'en aurais été vexée.

— C'était le plan ! insista-t-il.

— On n'avait pas de plan ! rétorquai-je.

Autour de nous, les cris résonnaient toujours, mais petit à petit, s'atténuaient : après la bataille, nous saurions que les plus futés de nos compatriotes avaient cherché à éloigner nos adversaires, afin de laisser le champ libre à ceux qui auraient l'idée de se saisir du drapeau. C'était, du moins, ce qu'ils raconteraient à qui voudrait l'entendre.

— Perdez pas plus de temps ! rouspéta un geai moqueur.

— Filez, on se charge d'eux ! renchérit mon cher et tendre colibri.

Et aussitôt, ils s'envolèrent. Nous les observâmes un bref instant, avec cette mélancolie qui submerge souvent les humains qui voient leurs dæmon s'absenter, fût-ce pour un bref instant, avant qu'un projectile ne nous ramène à la réalité.

C'était un bibelot doré. Il passa à un cheveu de nos visages respectifs, sous nos yeux ébahis, s'écrasa contre l'écorce, y laissa un accroc avant de tomber au sol dans un cliquetis métallique. Nous n'avions même pas conscience que nous courrions un danger mortel, et pourtant nous étions aussi surpris l'un que l'autre d'avoir survécu.

La violence des enfants est peut-être la plus terrible, parce qu'elle ne se rend pas compte de sa puissance.

Lee observa l'objet, hésita, puis le fourra dans sa poche, triomphant. Je lui attrapai le bras : nous jouions aux héros, pas aux escrocs.

Surtout, nous avions été tranquilles trop longtemps.

Et aussitôt, nous courûmes, esquivâmes les deux combats singuliers qui faisaient encore rage, sautâmes par-dessus les fourrés, évitâmes le vol de deux dæmons paniqués. Alors, nous tournâmes la tête, pour découvrir l'un des spectacles les plus comiques qu'il m'avait été donné de voir : non contents de se battre, nos dæmons avaient adopté la stratégie la plus burlesque qu'il soit.

Jamais je n'avais vu Geronimo aussi laid. Sous la forme de ce qui ressemblait à une espèce de rongeur, il avait abandonné sa belle fourrure. On voyait désormais son corps squelettique, et sa peau rose pâle toute ridée. Deux longues dents lui traversaient la moitié de son visage, tandis que ses yeux s'apparentaient à deux billes noires à peine visibles. S'il représentait une quelconque facette de moi, je ne voulais pas savoir laquelle. Rat-taupe nu, je le saurais plus tard : c'était le nom de l'animal dont il avait revêtu l'apparence, animal que j'avais croisé au détour de l'un des nombreux ouvrages de sciences naturelles dont me nourrissait mon père. Quant à Hester, son apparence n'était pas plus glorieuse : je la comparai à un lémurien sorti d'un roman d'épouvante, aux énormes oreilles et aux yeux rouge sang. Bien que ridicule, leur stratégie portait ses fruits : face à eux, les dæmons tremblaient d'effroi et tentaient de les imiter, mais nos boules de poils avaient eu le bénéfice de l'effet de surprise.

Grâce à leur coup d'éclat, nous parvînmes jusqu'aux murailles de la forteresse sans trop de difficultés : la peur des dæmons déstabilisaient leurs humains. Leurs mouvements étaient juste assez moins précis, juste assez tremblants, pour que nous leur filions entre les doigts. Nous étions Moïse, et la mer s'ouvrait devant nous. Nous ne devions cependant déboucher sur aucune terre promise, mais sur une montagne nébuleuse, la première de nos montagnes nébuleuses, à escalader.

Face au mur qui faisait deux fois notre taille, nous n'eûmes pas le temps d'hésiter. Profitant de l'élan de notre course effrénée, nous nous lançâmes à l'assaut de la muraille d'un bond. D'un accord silencieux, comme si le même plan de bataille s'étalait dans nos esprits, nous décollâmes du sol...

... j'étendis ma main le plus haut devant moi, la rabattis contre le rebord du mur, m'y cramponnai de toutes mes maigres forces, comme d'autres se cramponnent à la vie, remuai mes jambes en vain pour tenter de prendre appui sur le mur, mes pieds glissèrent, râpèrent, mes muscles craquèrent et je me réceptionnai tant bien que mal sur le sol...

... en même temps que mon partenaire.

Alors que je massai mes poignets douloureux, le regard de Lee demeurait, lui, accroché au sommet.

— Je vais te faire la courte-échelle, asséna-t-il, mains sur les hanches, général jusqu'au bout de la bataille.

— Quoi ?

Je distingue trois raisons à ma protestation d'enfant : la peur, la pudeur, la stupeur. Je craignais de blesser Lee et de l'écraser sous le poids de mon corps et de nos responsabilités, j'appréhendais de placer ma vie entre les paumes de ses mains, de n'être retenue que par sa simple bonne volonté et mes piètres capacités d'acrobate et surtout, je doutais de la validité de cette solution impulsive face à un casse-tête qui, assurément, aurait demandé un plus grand effort de réflexion.

­— Et moi, je t'en pose des questions ? Dépêche-toi !

Sa voix se brisa sous l'impératif de l'action. Je n'osai même pas répondre que la question, c'était lui qui venait de la poser. Nous n'avions plus le temps. Je n'hésitai plus.

Un instant, je songeai à enlever mes chaussures pour ne pas le blesser avec mes belles semelles. Je me souviens encore de cette question, de ce flottement imperceptible, parce qu'au milieu des cris et des exclamations, du bruit du sol que l'on foule et du drapeau qui palpite à quelques mètres au-dessus de nos têtes, je me souviens m'être demandée comment Harrelson aurait poétisé cet indicent ridicule...

... avant de penser qu'il ne l'aurait pas mentionné du tout parce qu'il n'aurait pas eu lieu.

Je me précipitai alors avec tellement d'ardeur sur les mains jointes de Lee qu'il en grimaça : il eut cependant la politesse de ne commenter ni ma délicatesse ni mon poids. À nouveau, je tentai de m'agripper au rebord du mur : si j'avais maintenant plus de stabilité pour l'escalader avec un temps un tant soit peu moins restreint que dans la fraction de seconde qu'avaient duré nos cabrioles, sous ma semelle, je sentais les mains de mon partenaire trembler. Il faudrait que je démène toute mon énergie pour réussir à me hisser à la hauteur.

J'appuyai alors de toutes mes forces sur mes coudes et me redressai sur la pointe des pieds. Malgré tous mes efforts pour ne pas le gêner, je savais que les plis de ma jupe traînaient vers le visage de Lee et l'empêchaient de surveiller les alentours – une chute serait mortelle, rien de moins, pour nous comme pour le Texas – et que la pointe de mes bottes d'exploratrice lui creusait les paumes. 

S'il y avait une chose pour laquelle Lee Scoresby était doué, c'était la douleur.

Il le dirait lui-même.

Et s'il y avait une chose que Kathleen Honermann détestait, c'était l'échec.

Je ravalai ma fierté et mes peurs pour, au prix d'un intense effort, décoller l'un de mes pieds de mon support de fortune.

J'aurais pu atteindre sans difficulté mon objectif, nous aurions pu vaincre sans péril si j'avais disposé de quelques instants supplémentaires pour rassembler mes forces et traîner mon buste sur ce qui m'apparaissait comme le toit du monde.

Tout aurait pu aller bien, aussi bien que les choses pussent aller pour le duo infernal dont nous jetions les bases.

Jusqu'à ce que le sol se dérobe sous mes pieds.

Lee hurla.

Aussitôt, j'hurlai aussi, sans trop savoir pourquoi, si ce n'était que mes deux jambes pendaient maintenant dangereusement dans le vide, et que mal assurée, je glissai déjà de mon support précaire. Alors que mes pieds râpaient contre la muraille et que j'avançai, paniquée, mes coudes sur le toit pour essayer de m'y hisser, je ne pus résister à la tentation de tourner la tête.

Ce que je découvris me coinça le cœur au fond de la gorge.

Lee avait beau se débattre comme une anguille mal lunée, on l'avait mis hors d'état de nuire. Profitant de sa concentration toute portée sur ma personne et mes piètres acrobaties, un Nouveau-Français en avait profité pour le capturer : il lui retenait maintenant les bras, et malgré toutes les tentatives de mon camarade pour s'en dégager, pour revenir m'empêcher de tomber et d'entraîner le Texas dans ma chute, l'ennemi le cramponnait fermement. C'était une si belle prise, pour eux qui le traquaient depuis des heures, ils ne le laisseraient pas filer aussi facilement.

On dit parfois que l'épée de Damoclès se suspend au-dessus de nos têtes dans ces moments où le destin d'une nation ne tient plus qu'à un fil, qu'elle se retient de trancher net. En l'occurrence, ma guillotine à moi ne tomberait pas du ciel, mais elle monterait de la terre. C'était tout le tragique des jeux d'enfant où le moindre faux pas conduirait à marcher dans la mare aux crocodiles.

L'illusion de notre ruse se brisa sec : j'apparus comme une ennemie, je devins l'ennemie à abattre. Une main effleura ma cheville, mais ma jambe se releva juste à temps pour lui échapper. D'ici quelques secondes, tous les Nouveaux-Français dans le coin rappliqueraient pour m'arracher à mon perchoir, et nous retomberions dans ce cercle infernal de course-poursuite. J'avais le Texas au bout des doigts, mais je n'arrivais pas à mettre la main dessus.

Mon sentiment d'impuissance m'arracha une larme de rage, ma vision se troubla une fraction de seconde, le temps que mes paupières clignent, le temps que mon regard ne se pose sur le drapeau en face de moi. Il ne me faudrait qu'un effort pour me hisser à sa hauteur et cueillir la victoire.

Mais je pouvais le faire.

De toute façon, je n'avais pas le choix. Comme l'avait dit Lee, nous n'avions qu'un seul essai, un devoir de réussite, et pas de droit à l'erreur. Je savais qu'il me regardait, je savais qu'il comptait sur moi. C'était plus qu'une pression sociale, c'était plus qu'un besoin de reconnaissance parmi les pairs : c'était, peut-être, le pacte tacite qui unit deux camarades. Il m'avait recrutée, il avait placé sa confiance en moi : le trahir, ça aurait été, aussi, me trahir moi-même.

J'aurais pu tomber, abandonner, déclarer que c'était trop dur et qu'après tout, je n'avais rien à faire de cette piètre reconstitution de Fort Alamo, qui ne respectait même pas l'épopée d'Harrelson. J'aurais pu refermer cette parenthèse enchantée avant même d'en écrire la fin, j'aurais pu jeter la plume que l'on m'avait, contre mon gré, placée entre les mains. J'aurais oublié.

C'est faux. On n'oublie pas. On perd l'habitude de se souvenir.

Dans cet instant où la petite Kathleen portait son destin à bout de bras, elle ne manqua pas de se souvenir. Aujourd'hui encore, je me souviens, parce que je perds l'habitude d'oublier.

Elle se souvint des légendes universitaires autour de son père, dont les bottes s'accrochaient aux falaises gelées du Nord, et je me souviens de mes pauvres bottes d'exploratrice qui tentaient de trouver un appui dans les fêlures lâchées là par le temps.

Elle se souvint de la voix de son grand-père, qui lui lisait des récits épiques avant de s'endormir, le soir, pour la faire voyager loin en toute sûreté dans ses rêves, et je me souviens de la voix de Lee, qui hurlait ses poumons, son cœur, et toute son énergie pour m'exhorter à ne pas le laisser tomber.

Elle se souvint de son cher Geronimo, qui avait trop souffert lors de son altercation avec Hester pour que toute cette peine ne se transmue que dans une piètre défaite, et je me souviens de mon vaillant dæmon rat-taupe nu qui avait si bien transformé sa peine en bonheur et qui me manque un peu plus à chaque instant.

Elle se souvint du pacte tissé avec son compatriote, et je me souviens de la seule promesse que Lee Scoresby n'a pas tenue, mais qui ne rend que plus beau chaque fragment du monde que nous avions pu révéler.

Et la petite Kathleen ne put pas se souvenir, parce qu'elle le vécut, mais elle devrait encore se souvenir très longtemps de son souffle qui se coupe, de son torse qui culbute sur le toit du monde, de ses jambes qui se relèvent en même temps qu'elles échappent à une nouvelle tentative de l'abîme de l'attirer à elle, de sa jupe qui se déchire alors qu'elle tente de se relever.

Et en effet, je me souviens si bien et trop fort, je n'ai qu'à fermer les yeux pour retrouver dans ma main le bois sec du manche, pour brandir à nouveau ce drapeau comme le roi Arthur a jadis sorti l'épée de son rocher, pour oublier toutes mes douleurs, mes courbatures et ma gêne d'enfant pudique. Par-delà les échos de ce monde abandonné, j'entends encore les hourras de mon camarade, les cris de victoire qui s'élevaient des buissons alors que nos compatriotes revenaient célébrer avec nous l'aube du Texas.

Et je me souviens de l'assurance maladroite avec laquelle il couvre mon retour au sol, de la main qu'il me tient pour m'aider à redescendre, que je saisis cette fois-ci sans hésitation. Je me souviens du mouvement de recul que j'esquisse à l'idée de serrer dans mes bras un inconnu que j'ai pourtant l'impression de connaître depuis des semaines.

Un sourire béat flottait sur ses lèvres, et débordait de tous les mots qu'il ne sait pas exprimer. Peut-être n'en avait-il d'ailleurs pas vraiment envie.

— On a réussi, conclut-il.

Geronimo et Hester nous rejoignirent, toujours sous leurs apparences cauchemardesques, mais la laideur ne m'avait rarement paru aussi belle. Une joie indicible me soulève le cœur. Ce n'est pas de la fierté. Ce que je ressens va bien au-delà de ça. C'est à la fois le sentiment du devoir accompli, la gratitude qui allège nos pas lorsque l'on revoit le soleil après une longue journée, mais aussi, paradoxalement, la profonde impression de nostalgie qui nous saisit face à l'horizon du couchant.

J'avais peut-être plus vécu pendant ces quelques heures que pendant mes onze premières années d'existence.

— On a réussi, répétai-je.

Le jeu se termine, mais ce n'est pas une fin.

C'est un commencement.

Lorsque je rentrai chez moi, plusieurs heures après mon départ, le soleil envoyait déjà des teintes violacées se promener dans le ciel.

Ma grand-mère m'attendait sur le pas de la porte. Elle s'inquiéta aussitôt des raisons de mon retard, des péripéties que j'avais affrontées sur la route, des mesures qu'elle devrait demander au Gouverneur pour en garantir la sûreté, et – saperlipopette ! – ce que j'avais bien dû fabriquer pour lui revenir dans un état aussi déplorable. Anderson, son dæmon-canari ne manqua pas de jauger avec une insistance que je ne lui connaissais pas mon Geronimo, ravissant rat-taupe nu. Il était si laid qu'il en avait maintenant du charme.

Moi, je ne parvenais qu'à sourire. Je n'aurais peut-être pas de tarte aux pommes au goûter pour les prochaines semaines, mais les aventures que j'avais vécues valaient toutes les tartes aux pommes du monde.

Mon grand-père, plus pragmatique, releva l'absence de mon sac. J'avais dû l'abandonner près du fort, mais en dépit de toute la valeur symbolique que je lui accordais, que représentait-il face aux récits d'Harrelson devenus réalité ? Pour m'amuser comme je m'étais amusée, j'aurais été prête à le perdre encore cent fois. 

Et les questions revinrent. Il faudrait bien que j'y réponde. Mais tant de mots se pressaient sur mes lèvres que je ne savais lequel choisir.

— Alamo, expliquai-je, rayonnante.

C'était évident. Il n'y avait rien à dire de plus.

J'y avais peut-être laissé mon sac et quelques plumes, mais je ramenais au fond de mon cœur quelque chose de bien plus précieux encore.

L'amitié.


Hello tout le monde, j'espère que ce chapitre vous a plu, tout d'abord ! Si vous avez la moindre chose à dire, que ce soit du positif, du négatif ou du neutre, que ce soit un commentaire constructif ou juste des impressions géniales, je suis preneuse. Je sais que ce n'est pas facile à suivre pour tout le monde et que le mot "fanfiction" fait parfois "peur" vis-à-vis de la compréhension, mais que vous connaissiez ou non l'univers, je serai ravie d'échanger avec vous ! Pareil, si certaines choses ne sont pas assez claires et distinctes, je réponds aux questions et y remédierai dans la suite.

Il y avait quelques éléments que je devais préciser à propos de ce premier chapitre. S'il est vraiment long, c'est parce que cette reconstitution de la bataille d'Alamo est la seule information canon sur l'enfance de Lee et qui, ceux qui ont lu les livres comprennent, compte finalement beaucoup plus que ce qu'on peut croire à première vue. Les prochains chapitres feront moins de sept parties, je vous rassure.

Ensuite, même si nous nous situons dans un monde parallèle au nôtre et qui le recoupe par bien des aspects, j'ai pris certaines libertés, à partir de ce que Pullman suggère. Par exemple, si Baudelaire a bien existé dans ce monde (ceux qui connaissent, je vous renvoie à La Communauté des Esprits où Lyra en parle), Clyde D. Harrelson, lui, sort de mon imagination, n'a jamais existé ou en tout cas, si quelqu'un porte ce nom, ce n'est pas lui dont je parle : comme chaque pays a plus ou moins son récit fondateur ou son poète fétiche, pourquoi le Texas, indépendant dans cette réalité, échapperait-il à ce constat ?

Niveau historique, on se situe à mi-chemin de l'uchronie.

Dans notre monde, la bataille de Fort Alamo s'est tenue en fin février-début mars 1836 et est un événement majeur de la Révolution texane. Auparavant, le Texas appartenait au Mexique, sauf que les tensions ont conduit les Texans à se révolter. La bataille de Fort Alamo a été un massacre pour les Texans, tous les défenseurs (y compris Davy Crockett) ont été tués et les rares qui se sont rendus ont été exécutés. Seul point positif, si on peut appeler ça un point positif : les actes des Mexicains ont poussé beaucoup de Texans à s'enrôler dans l'armée, et celle-ci a finalement remporté la bataille de San Jacinto en avril, qui met fin à la Révolution. (Pour ceux qui connaissent la Seconde Guerre Mondiale, l'enchaînement défaite/victoire rappelle un peu l'effet Bir Hakeim/El Alamein.) Ensuite, une brève République texane voit le jour, avant de se rattacher aux États-Unis en décembre 1845, ce qui déclenche ensuite la guerre entre le Mexique et les États-Unis, que ceux-ci gagnent en 1848.

Pour plus d'informations, la page Wikipédia française (de Fort Alamo) est la traduction de celle anglaise et donc plutôt bien faite et très complète. L'un des premiers épisodes de la série Timeless se situe précisément à Fort Alamo, et il me semble que plusieurs films ont été réalisés à ce sujet.

Dans À la Croisée des Mondes, les choses sont plus compliquées, parce que la traduction française gomme les quelques bribes d'informations à ce sujet (le tout tient sur une phrase) : au lieu de laisser "les Nouveaux-Danois et les Nouveaux-Français", le traducteur a écrit "les deux camps", ce qui ne m'a pas facilité la tâche. Pullman ne nous donne pas beaucoup d'informations sur l'Amérique mais d'après ce que j'ai compris, les États-Unis n'existent pas, et le Texas est resté indépendant. J'ai donc fait un mélange entre ces deux informations et la réalité.

Avec ces deux exemples, j'introduis en quelque sorte ce qui sera la règle pour la suite : le monde de Kat et Lee est similaire au nôtre dans ses éléments, mais pas dans la façon dont ils se sont assemblés. C'est, en tout cas, l'impression que les livres renvoient.

J'aurais aimé être plus longue sur Alamo, mais cette note de fin risque déjà d'allonger considérablement ce chapitre, alors je m'arrête là. Encore merci d'avoir lu, j'espère vraiment que ça vous plaît et vos commentaires me font en tout cas très plaisir

À très bientôt pour la suite des aventures de mes énergumènes,

Chloé ✍︎

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