Chapitre 53
PDV Abdoul
Je fais un passage au centre commercial pour acheter des "shoes"(chaussures) à Madjiguène comme je sais qu'elle les kiffe.
Sa mère m'a tellement bien payé que je ne sais pratiquement pas quoi faire de tout ce tune.
Pour être plus précis,je vais au magasin de chaussures où je bossais.Ce sera une occasion de revoir mon ancien patron.
Non pour me venter de la personne que je suis devenue parce que ce serait ridicule et immature de ma part mais pour le saluer et prendre de ses nouvelles.Il m'a souvent mal parlé et utilisait n'importe quel prétexte pour réduire mon maigre salaire, cependant,il a accepté de m'engager au moment où beaucoup refusaient parce que je n'avais que le bac.
Je m'arrête soudain devant une vitrine en admirant une paire de baskets noires qui m'auraient plutôt bien.
Je finis par entrer et les achète après les avoir essayées.
J'aperçois une paire de "boots"(bottes) que Fatou va adorer et je les ajoute à ma liste.
Dire qu'il y a une époque où je ne me serais jamais permis de franchir les magasins du prestigieux Radisson dans le but de m'offrir ne serait ce qu'une cravate tant elles coûtent chères.
Les choses ont bien changé et je le dois principalement à ma copine.
J'arrive enfin à mon ancien lieu de travail et suis aussitôt frappé par les changements.
En revanche,la nostalgie me submerge rapidement.Le travail était hardu et mon patron le rendait encore pire mais j'avais au moins de quoi nourrir ma famille même si c'était peu.
Je suis étonné de me faire accueillir par un homme qui a trois ou quatre ans de plus que moi.
Le vieux l'aurait-il emboché ?
-Bonjour monsieur,fis-je.
-Bonjour, comment puis-je vous aider,interroge-t-il gentiment.
-Dites moi, vous bossez pour Monsieur Maïssa Ndour,cherchè-je à savoir.
Il me regarda drôlement.
-Euh non,je suis mon propre boss, fait-il un peu amusé de ma question.
Je fus surpris.
-Pourtant c'est lui qui louait ce magasin,insistè-je.
-Oui mais ce n'est plus le cas.Il s'est ruiné et n'avait plus les moyens de payer la location et de remplir le magasin.Mais si vous voulez plus d'infos,allez interroger son fils qui taffe juste en face, fait-il.
Il me fallut cinq minutes pour me remettre de ce qu'il venait de me dire.
C'était incroyable pour moi qu'un homme aussi radin ait pu finir ainsi.
Il avait tellement le sens de l'économie et ses affaires marchaient tellement bien.
Je pris des paires pour Madjiguène puis partis dans la boutique en face.
Je reconnus sans souci El Hadj qui m'accueillit chaleureusement en me tchéckant.
Il venait souvent voir son père et nous filait un coup de main dans les ventes lorsque nous avions de nombreuses commandes.
Son père était aussi exigeant avec lui qu'il l'était avec moi.
Il m'arrivait même de me demander s'il s'agissait réellement de don fils.
-Hey mec quelle belle surprise ! J'imaginais jamais te revoir.Comment tu vas,lance-t-il.
-Je vais super bien El Hadj et toi ?
-Ça va OKLM.
-Cool mais dis moi qu'est ce qu'il s'est passé avec ton vieux?
On vient de m'apprendre qu'il louait plus le magasin pour faute de moyens,fis-je.
Il eut une expression plus sérieuse.
-C'est mon père mais il est sérieusement mauvais.Toi même tu en sais quelque chose.
J'hoche la tête.
-Sinon,tu pourrais m'indiquer sa maison,dis-je.
Il parut surpris puis dit en souriant :
-Si c'est pour aller te moquer de lui,sois sûr que je ne t'en empêcherai pas.Il l'a bien mérité.
-Mais non,qu'est ce que tu racontes ?Je veux simplement le voir et prendre de ses nouvelles.
Il rit.
-Toujours aussi gentil.Bref il habite à Pikine, rétorque-t-il admiratif.
J'ouvris de gros yeux.
OMG !Son cas est encore plus grave que je ne l'imaginais.
De SIPRES il a fini à Pikine !
Pauvre vieux.Lui qui est si maniaque.Je me demande comment est ce qu'il fait pour vivre dans ce "town"(quartier)?
-Ok merci frère,dis-je en faisant un tcheck à El Hadj.
-Je t'en prie vieux et reviens quand tu veux.Comme tu peux le constater,on a des articles de qualité.
-Ouais t'inquiète.
Je n'ai jamais été à Pikine donc j'ai dû souvent m'arrêter et demander le chemin aux gens.
Je suis enfin devant la maison qui n'est même pas peinte.
Je me tourne lamentablement la tête de gauche à droite.
Le pauvre vieux !Lui qui aime tant la perfection et le luxe.
Comment fait-il pour vivre ici ?
Ce doit être un réel cauchemar pour lui et le pire c'est qu'il ne peut même pas s'en réveiller.
Je gare ma voiture et en sors,ce qui attire pleins de regards sur moi.
Je vais vers une femme et lui demande si c'est bien là qu'habite Maïssa Ndour et elle acquiesce.
J'entre donc et passe le salem longtemps avant qu'un jeune garçon fit son apparition.
-Aleykounsalam, désolé j'étais aux toilettes.
-C'est pas grave.Est ce que Maïssa Ndour est là,demandè-je.
-Oui attends je l'appelle,lance-t-il.
Je vis une chaise et m'assis dessus.
Quelques minutes après,je vis le garçon réapparaître et derrière lui mon patron qui avait considérablement vieilli.
OMG !Je me demandais si c'était vraiment lui.
Il ne me vit pas d'abord.Mais dès que ce fut le cas,il ne me lâcha plus du regard et ouvrit la bouche.
-Abdoul Fall !Toi ici, s'étonne-t-il.
J'acquiesce simplement et me lève pour lui donner la main.
Il parut surpris puis hésita mais finit par la saisir.
Il s'installa ensuite sur une natte qu'il étendit d'abord malgré toutes mes insistances pour qu'il prenne ma chaise plutôt.
-Alors jeune homme, qu'est ce que tu fais ici,demande-t-il.
Je lui explique.
-Oh je vois.Tu peux toi même constater ce que je suis devenu.
Il continue plus amèrement :
-C'est étrange la vie.Quand je pense que j'avais tout et maintenant regarde moi,je ne ressemble à rien et regarde où je vis.
Il éclata de rire.
-Je ne comprends pas monsieur.Comment est ce que ça a pu arriver ? Vous êtes la personne la plus économe que je connaisse, fis-je.
-Eh bien je n'ai jamais voulu partager avec les autres et je ne payais pas à mes employés leur dû exact.Tu en sais quelque chose.Sans oublier comment je traitais les gens, me croyant au dessus d'eux.J'imagine que c'est mon karma.
Il regarda ensuite le jeune garçon qui était toujours là et nous observait curieusement à tour de rôle, dépendant de qui parlait.
Il paraissait perdu se demandant peut être qui j'étais et de quoi on parlait.
-Moulaye,va acheter une bouteille d'eau à Abdoul,lui lance monsieur Ndour.
Il me fixa ensuite d'un air désolé et gêné.
-Je t'aurais payé une bouteille de boisson mais je n'ai pas assez de pièces, s'excuse-t-il.
-Ce n'est pas la peine monsieur,fis-je.
Il sortit quand même une pièce de 100F et le petit garçon courrut accomplir sa mission.
-Sinon,qu'est ce tu deviens,interroge-t-il.
-J'ai repris mes études comme je vous l'avais dit le jour de ma démission et je bosse aussi pour une boîte, répondis-je.
-C'est bien.Tu as toujours été un grand travailleur.Pardon d'avoir toujours dit le contraire et pardon pour tout le reste également.Ce n'est pas grave si tu ne m'excuses pas parce que je me suis comporté comme le pire des salauds.C'est tellement rare de voir de nos jours un jeune homme aussi brave et honnête.Je ne me suis rendu compte de ta valeur que trop tard.Après ton départ,je n'ai jamais pu obtenir quelq'un d'aussi compétant que toi.De sorte que,je passais mon temps à renvoyer des gens et leur hurler dessus.Il arrivait aussi qu'ils prennent volontairement la porte ayant marre de mon sale caractère.
Il sortit un Malboro de la poche de son caftan puis un briquet et l'alluma.
La fumée me derangea mais je m'abstins de le dire.
-Je vous pardonne monsieur.C'est vrai, vous avez souvent été odieux avec moi et j'avais souvent voulu vous casser la gueule mais vous m'avez au moins accepté auprès de vous.Ce salaire petit qu'il soit m'a permis de subvenir aux besoins de ma famille.
Il fut oui de la tête et me sortit une cola rouge que je refuse poliment de prendre.
-Tu ne sais pas ce que tu rates,me dit-il pour ensuite en mordre une grosse part et l'avaler avec appétit.
Le petit vint avec ma bouteille d'eau qu'il me tendit.
Je le remercie puis la saisis.
J'avais pas soif mais je m'efforce de tout boire parce qu'il me l'a quand même payée.
Peut être que c'était la seule pièce qui lui restait.
Je sors ensuite mon chéquier et note un chiffre dessus.
Je détache ensuite le papier et le lui donne.
-Tenez ça.J'aurais aimé donner plus mais hélas pour le moment je ne suis qu'un étudiant et mon salaire n'est pas au top,fis-je.
Il fut figé longtemps.
-Mais non jeune homme, qu'est ce que tu racontes ?Tu ne me dois absolument rien.Au contraire, c'est à moi de m'excuser.Je ne peux pas accepter cet argent.Donne le à une fondation,une mosquée,je sais pas moi.
-J'insiste pourtant monsieur.Prenez le s'il vous plaît,dis-je.
Il bougea tragiquement la tête de gauche à droite.
-Jamais je n'aurais cru ça possible.
Il rit.
-Moi me faire adorer par un jeune homme que j'ai tellement maltraité, enchaîne-t-il choqué.
Il rit encore puis toussa très fort.
-Non c'est certainement une blague ou une caméra cachée.
Il se mit à regarder partout puis dit d'un ton assuré :
-Vous pouvez sortir messieurs.J'ai tout compris.
Il répéta la phrase une bonne dizaine de fois et moi je me contentais de l'examiner perplexe me demandant s'il n'avait pas perdu la tête.
Ce serait lamentable.
-Monsieur,prenez le s'il vous plaît.
Il le saisit enfin et regarda le papier longtemps puis il écarquilla les yeux.
-Tu es sûr de ne pas t'être trompé Abdoul ?Tu m'offres 200000F,questionne-t-il sous le choc.
-Oui monsieur et je le sous-estime vraiment parce que je sais que ça ne vous permettra pas de reprendre votre commerce,affirmè-je.
Il me regarda longuement comme s'il cherchait à lire en moi.
-Même si ça suffisait,je ne reprendrai pas le commerce,lance-t-il brusquement.
-Et pourquoi, questionne-je perdu.
-Je ne veux pas redevenir l'homme avare et cruel que j'étais.Cela ne signifie pas j'ai complétement changé maintenant mais je crois avoir diminué.Bref merci pour tout et que Dieu t'accorde tout ce que tu désires dans la vie, m'éclaire-t-il.
-Amine,fis-je.
Je me lève ensuite.
-Je vais y aller mais je reviendrai,dis-je.
-A an une fois que tu franchis cette porte,je veux plus que tu reviennes.Tu m'as compris Abdoul ?Je veux que tu dépenses rien de plus pour moi.On n'est pas parents c'est bien clair,me dit-il fermement.
-Mais monsieur, ça ne me dérange pas,tentè-je.
-J'ai dit niet et viens que je t'accompagne.
J'accepte à contre cœur.
En sortant de la maison,les gens nous sondent de leur regard.
Ils se demandent peut être ce que je fais ici et ça s'intensifie quand j'atteins ma voiture.
Mon ancien boss quant à lui,ouvrait les yeux et la bouche.
-Cette sublime voiture est à toi,interroge-t-il toujours émerveillé.
Je dis oui modestement.
-Travaille toujours dur jeune homme.Reste toujours tel que tu es généreux,bon,sage.Tu iras très loin inchallah.Sache que mes prières t'accompagnent et ne remets plus les pieds ici.
Il me pousse dans ma voiture que je venais tout juste d' ouvrir.
-Tu m'as compris,dit-il en appuyant mon bras.
Je n'imaginais pas qu'il avait autant de force.
J'opine et il lâche enfin la pression.
Je lui dis au revoir puis m'en vais.
Quel homme étrange !
Je crois que je ne le reverrai plus jamais.
Je reçois un appel de Madjiguène et suis pris d'envie de lui raconter ma journée.
Elle était très étonnée et m'annonce qu'elle était fière de moi.
-Merci mon bébé mais ce n'est absolument rien,je déclare.
-Ça c'est ce que tu crois chéri.Le pourcentage de personnes qui aurait agi exactement comme toi s'élève à 5% peut être 3,lance-t-elle.
-Tu exagères, fis-je incrédule.
-Je t'assure que si.Sinon quand tu passes me voir ?Tu me manques trop, fait-elle d'une petite voix.
Ce qui m'attendrit.
Elle est trop mignonne ma chérie.
Je jette un œil sur les chaussures puis dis :"Bientôt mon amour, bientôt."
-Oh j'ai si hâte baby.Je te dis à plus puisque tu conduis.
-Ouais à plus, bisous.
-Bisous.
Hey guys !
Comment ça va ?
Que pensez vous du chapitre ?
Perso,je l'ai trop aimé parce qu'il est plein de leçons de morale :
*Ne jamais maltraiter une personne sous prétexte qu'on soit plus riche qu'elle parce qu'on ignore tous où on va finir.
Ce monde n'a aucune logique.On peut être très riche aujourd'hui et finir si pauvre.
*Il faut toujours faire le bien même aux personnes qui nous font du mal en retour.Dieu se chargera d'eux.
Je sais que je suis l'auteur de cette histoire mais le comportement d'Abdoul m'étonne parce que je sais qu'à sa place, j'aurais fait tout le contraire.
J'aurais dit à mon bosse que c'était bien fait pour lui et que ça lui apprendra à être sadique.
Ma mère m'a déjà dit que si une personne te faisait du mal alors qu'elle t'a d'abord fait du bien,retiens ce bien et oublie le mal.
Bisous mes amours et ciao 👋✌️♥️♥️♥️♥️💋💋💋💋.
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