Chapitre 6

Après le repas, le petit groupe qui venait de se former décida de rejoindre la foule de visiteurs qui se déhanchaient sur de vieilles musiques.

Christian ne quittait plus Halse des yeux, et sous le regard effrayé d'Alison, ils s'esclaffaient tous les deux en dansant.

Ce ne fut que plus tard dans la soirée, quand Halse fut partie aux toilettes et que Constant et ses amis furent occupés à danser la macarena, qu'il en profita pour empoigner violemment le bras de son ancienne petite amie et de la trainer à l'extérieur du gîte.

— Lâche moi ! gémit la jeune femme, en vain.

Une fois parvenus derrière un large poteau à l'abri des regards, Christian posa fermement sa main contre sa bouche.

— Si je t'ai autorisé à rester ici, c'est pas pour que tu ailles la voir et lui parler de moi, c'est clair ? Tu veux que je te tue ?

Alison éclata en sanglots.

— Réponds, tu veux que je te tue ? répéta t-il, enragé.

— Non...pleurnicha t-elle.

Il sortit un couteau de la poche de son jean et le plaça sous sa gorge. Elle s'apprêtait à hurler, mais trop tard, de sa deuxième main il l'empêcha encore d'ouvrir la bouche.

Soudain, elle rassembla toutes ses forces pour lui donner un coup de genoux dans l'entrejambe, mais ce n'était toujours pas suffisant. Il avait trop de force pour qu'elle puisse prendre le dessus, cela avait juste contribué à l'enrager encore plus.

Hors de ses gonds, il effectua une pression sur la gorge d'Alison à l'aide de sa lame, ce qui provoqua l'écoulement de quelques gouttes de sang.

— Christian, arrête. S'il te plaît, supplia t-elle.

— Je t'avais prévenue, n'agis pas comme si j'étais le pire des monstres, souffla t-il en appuyant de plus en plus fort. Tu vas ruiner tous mes plans, putain.

Le visage de la jeune femme était trempé de larmes, luisant dans le sombre de la nuit.

— Mais quels plans ? Quels plans, Christian ? Tu veux la faire tomber amoureuse de toi, lui faire croire que vous avez un avenir ensemble, et la poignarder comme tu l'as fait avec moi ? Mais dans quel but, à quoi ça va te mener ? Je peux plus vivre comme ça, je peux plus la laisser tomber sous ton charme en pensant que t'es quelqu'un de bien, je peux plus. Qu'est ce que tu vas lui faire?

Elle s'effondra par terre, la lame du couteau se retrouvant dans le vide.

Christian soupira lourdement.

— T'es jalouse parce que tu m'aimais vraiment et que je t'ai laissée comme une merde, c'est ça ? C'est parce que tu supportes pas de me voir avec une autre fille sous tes yeux ?

— Pardon ? balbutia la jeune femme, impuissante.

— Tu m'as très bien entendu.

— Déjà, tu ne m'as pas laissée, tu as tenté de me tuer. Ensuite, tout ce que je ressens en te voyant c'est du dégoût, et même pire. Te voir me donne envie de vomir, Christian.

Elle avait insisté sur le mot vomir, car c'était réellement tout ce qu'elle éprouvait en le visualisant.

— Et même pire ? Vas y, défoule toi, l'encouragea Christian, amusé.

— De la peur. J'ai peur de toi, tu te rends compte ? J'ai peur en te voyant, parce que t'es un psychopathe. Et je pense que c'est aussi ce que Halse va ressentir quand elle aura découvert qui tu es vraiment. Si c'est vraiment la vie que tu veux mener, vas y. Un jour Halse aura peur de toi. Et le jour où ça arrivera, tu repenseras à ce moment où je l'avais prédit.

— Ça ne fait que deux petites semaines, mais Halse tient réellement à moi, crois moi. Elle n'aura pas peur de moi. Jamais.

— Ça ne durera pas. Je peux te l'assurer. Ton côté obscur ressort toujours un jour ou l'autre, Christian, tu le sais aussi bien que moi.

— Parce qu'on s'est côtoyés pendant deux ans, tu penses me connaître mieux que personne ?

— Côtoyés ? C'est ce à quoi se réduit notre histoire, maintenant ? Pourquoi pas colocataires ? T'es fou, ma parole !

Aucune réponse. Alison se releva, tremblante de froid. Elle planta ses yeux bleus dans les siens.

— Qu'est ce que tu comptes faire d'elle ?

Bien qu'elle n'eut aucune arme à disposition, elle avait enfin reprit le contrôle de la conversation.

— Mes plans restent mes plans, t'es bien naïve si tu penses que c'est à toi que je vais tout dire.

Elle tenta le tout pour le tout. Elle devait protéger la vie de l'adolescente à tout prix, si il venait à lui faire du mal, elle ne se le pardonnerait jamais. Si Christian était parvenu à la détruire, elle, femme accomplie indépendante, déterminée, à quel point pourrait t-il détruire la jeune femme qu'était Halse ?

Le bluff était sa dernière option.

— Christian, si un jour la police venait à découvrir ce que tu as fait, je serai aussitôt jugée comme complice. Donc s'il y a bien une personne à qui tu peux faire confiance ici, c'est moi, mentit t-elle.

Il s'esclaffa, et regagna position initiale, c'est à dire la lame tranchante du couteau sous le menton d'Alison. Un rictus inquiétant s'imprima sur ses lèvres.

— Tu tentes de lui reparler, je te tue. Tu lui envoies je ne sais quels signaux pour lui faire comprendre quoi que ce soit, je te tue. Tu laisses cette gamine tranquille, et moi avec. Je ne sais même pas pourquoi je ne met pas fin à tes jours maintenant, soit reconnaissante, lâcha t-il d'une traite.

C'est sur ces paroles qu'il s'en alla, après avoir jeté un dernier regard noir à la belle blonde.

Désespérée, celle ci s'écroula à nouveau sur le sol glacé, et posa ses fesses contre un tas de feuilles mortes.

Elle tâta son cou du bout des doigts et eut un léger frisson de douleur. Elle avait senti une entaille, et ses doigts étaient désormais tachés de sang. À la vue de toute cette hémoglobine, de puissants sanglots secouèrent l'entièreté de son corps.

Des pas se firent entendre, mais elle n'avait plus la force de bouger. Pétrifiée que ce soit de nouveau lui, elle coupa volontairement sa respiration. Une odeur de tabac s'infiltra dans ses narines malgré elle.

Christian fumait, c'était lui à coup sûr. Elle pivota légèrement son cou pour tenter de s'assurer de l'identité du fumeur.

À sa plus grande surprise, ce ne fut pas la carrure de Christian qui apparut dans son champ de vision, mais celle d'une petite adolescente.

La fumeuse ne l'avait pas encore remarquée, trop absorbée à consommer sa cigarette. Tant mieux.

Alison s'autorisa à respirer, mais visiblement trop fort : la jeune fille l'aperçut et poussa un petit cri.

Elle la connaissait ! C'était la petite blonde de tout à l'heure, elles avaient mangé à la même table.

Ornélis posa une main sur sa poitrine et reprit son souffle en rigolant.

— Putain tu m'as fait peur. On se connaît, non ? questionna cette dernière.

— Oui, on a mangé ensemble, je suis Alison, l'ex de...Christian, bafouilla la jeune femme, s'efforçant d'avoir l'air naturel.

Ornélis tira sur sa cigarette en hochant la tête. Elle n'avait pas vu le sang, elle était trop éloignée et l'éclairage n'était pas suffisant.

Tant mieux, se rassurait silencieusement Alison.

— Qu'est ce que tu fais assise toute seule par terre dans la nuit, meuf ? Si tu veux faire de la méditation, aller dans ta chambre c'est moins risqué. plaisanta t-elle en jetant un coup d'oeil à sa posture, dont elle n'apercevait pas grand chose dans le noir.

— J'avais besoin de réfléchir, improvisa Alison qui, décidément,
passait sa journée à mentir.

Ornélis balança son mégot de cigarette par terre et l'écrasa avec le talon de sa chaussure. Elle tendit gentiment sa main à la jeune femme.

— Pourquoi pas, mais ça reste dangereux. On sait pas qui traîne dans la forêt qui nous entoure. Allez viens, je t'aide à te relever.

— Non ! s'écria Alison.

Elle avait paniqué. C'était hors de question de lui montrer le sang qui ornait disgracieusement ses doigts. L'adolescente eut un d'abord mouvement de recul.

Puis elle s'approcha d'Alison, et elle vit. Elle vit cette affreuse entaille qui parcourait toute sa gorge, et le sang qui tachait une partie de son cou, ainsi que ses mains.

Ses yeux s'ouvrirent en grand, elle était pétrifiée.

— Mon dieu, je... La vache, qu'est ce qu'il s'est passé ? souffla t-elle.

Un silence pesant flottait autour d'elles.

— Écoute, Tu sais garder un secret ? lui murmura Alison, prise sur le fait.

Ornélis aquiesca d'un léger mouvement de tête.

— D'accord. Va me chercher des mouchoirs, s'il te plaît, et je vais tout te raconter.

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