Chapitre 40
Paniqués, ils se détachèrent aussitôt. Ornélis bondit de la commode, et, le cœur battant, se mit à chercher sa veste.
Elle n'allait pas se présenter comme ça, en sous vêtements, devant Halse, c'était insensé. Autant la regarder dans les yeux et lui dire "salut, on faisait des choses pas très catholiques, tu peux partir ?". Elle n'était même pas supposée se trouver ici, mais se reposer dans sa propre chambre.
Gaëtan recouvra ses abdominaux de son t-shirt, à la plus grande tristesse de la petite blonde, et se mit à l'aider à chercher sa veste. Il retourna sa couette et la secoua énergiquement, tandis qu'Halse patientait toujours derrière la porte.
— Putain, elle est où... maugréa t-il.
Ornélis se précipita vers la commode et vérifia la surface de celle ci, mais pas de veste en vue. Elle lança un regard affolé au grand métisse.
Si elle ne se rhabillait pas, ça allait être une catastrophe. Elle n'avait nulle part où se cacher, la chambre n'était pas assez grande pour ça.
Un nouveau toquement se fit entendre, qui fit violemment sursauter la blondinette.
— J'arrive ! tonna Gaëtan, tendu.
Puis, miraculeusement, lorsqu'elle se pencha pour regarder sous le lit, la veste apparut dans le champ de vision de la jeune fille. Elle l'enfila sans plus attendre, avec précipitation. Gaëtan prit une seconde pour souffler en s'accoudant contre le mur, soulagé. Il jeta ensuite un regard entendu à Ornélis, qui signifiait "j'ouvre ?" auquel elle répondit par un hochement de tête. Elle inspira profondément.
Puis, le jeune homme ouvrit finalement la porte, laissant apparaître une Halse à l'air curieux.
Elle le scruta. Puis, son regard se déposa sur Ornélis, postée un peu plus loin derrière lui. Un rictus s'imprima sur ses lèvres, et elle reporta son regard sur son ami.
— Je n'ai pas besoin de prévenir Ornélis, finalement, déduisit t-elle en pouffant.
Gaëtan, gêné, ne savait pas où se mettre. Cette situation obtenait une belle place dans tous les moments les plus malaisants de sa vie, et de loin.
— On arrive, fit t-il sans prêter attention à ses paroles.
Halse hocha la tête, et sa longue chevelure violette flotta dans les airs lorsqu'elle fit demi tour. Gaëtan ferma la porte en soupirant. Après un long silence, Ornélis ne put s'empêcher de pouffer de rire entre ses mains. Gaëtan lui lança un regard se voulant blasé.
— C'est pas drôle, souffla t-il, en souriant malgré lui.
Ornélis explosa de rire en se laissant tomber contre le lit, c'était bien trop drôle pour qu'elle ne se retienne. Son rire se déployait harmonieusement dans la pièce tandis qu'il la scrutait sans pouvoir réprimer un petit sourire.
— T'aurais vu ta tête ! s'écria t-elle en se tortillant contre le matelas, hilare.
— Tu m'énerves.
Ils se chamaillèrent encore pendant quelques minutes, avant de se décider à descendre rejoindre les autres.
— Ça va être super gênant, marmonna Gaëtan en verrouillant sa chambre.
— Mais non, je suis sûre qu'elle a déjà oublié.
Ils dévalèrent les escaliers en faisant la course comme deux enfants. Course que la petite blonde remporta avec succès, en ayant légèrement triché, en glissant sur la rambarde. Elle fixa Gaëtan d'un petit air satisfait, avant de traverser le tapis qui menait au self. Lorsqu'elle poussa la grande porte de celui ci, un brouhaha assourdissant envahit ses oreilles, provoquant une petite grimace sur son visage.
Gaëtan la suivait de près, juste derrière elle. Il balaya la grande pièce du regard, et reconnut aussitôt quelques amis. Il allait devoir leur expliquer son absence, ça s'annonçait compliqué. Tant pis, ça allait attendre.
Ils s'engagèrent dans la section dédiée aux plateaux, sans se décoller de plus de deux mètres, comme deux aimants. Leur relation avait vraiment évolué depuis le début du séjour, c'était flagrant. Leur petit duo inséparable avait vu le jour sans même qu'ils ne s'en rendent compte.
Dans le petit passage où ils devaient choisir leurs plats, une voix les interpella : c'était celle d'un des animateurs.
— Vous deux ! Je vous ai pas vus hier, vous respectez bien votre interdiction de sortir dites moi ! s'amusa t-il, en flanquant une tape sur le bras musclé de Gaëtan.
— C'est clair, répondit t-il d'un air faussement amusé.
— Comment va votre copine ? Celle qui gère le gîte, là. Cheveux violets.
— Bien. Sa mère avait des problèmes, donc elle s'est absentée, mais ça va mieux.
L'adolescent ne se contentait que de réponses très brèves, il ne supportait pas vraiment cet homme. C'était d'ailleurs celui qui leur avait fait la morale lors de l'accident de voiture.
Lorsqu'ils furent servis, ils s'attelèrent à la recherche de leurs deux amis, leurs plateaux à la main. Il ne fallut pas plus de quelques secondes pour que la main d'Halse fasse irruption dans leur champ de vision, un peu plus loin. D'un pas hésitant, ils s'avancèrent vers la table et y déposèrent leurs plateaux.
— Salut, fit Constant en levant ses orbes attentifs vers eux.
— Salut.
Un silence méditatif s'installa entre eux durant quelques secondes. Puis, Halse le brisa par quelque chose qui n'avait rien à voir, mais auxquels les deux adolescents s'attendaient fortement :
— Vous n'avez rien à nous dire ?
Gaëtan lâcha ses couverts et toussota doucement, avant d'ancrer ses pupilles noires dans les siennes.
— Non, pourquoi ?
La seconde gérante du gîte jeta un coup d'œil amusé à son cousin. Cette situation les amusait, visiblement.
— Je sais pas, vous dormez ensemble, vous restez encore ensemble même au gîte, dans la chambre de Gaëtan ?
Ornélis fusilla Halse du regard, mais rien n'y fit.
— Qu'est ce que vous voulez qu'on vous dise ? On a aucun compte à vous rendre, s'agaça t-elle, son naturel revenant au galop.
— Ne le prends pas mal, je dis juste que si vous êtes ensemble, on ne vous jugera pas. Vous pouvez arrêter de vous cacher, ça devient ridicule, expliqua Halse d'une voix douce.
L'utilisation de ce mot avait fait tilt dans leurs esprits. Être ensemble ? Ils n'avaient jamais abordé ce sujet. Le fameux sujet du couple. L'étaient t-ils, en couple ? Ils se lancèrent un regard paniqué. Cette conversation les gênait tous les deux, il fallait que cela cesse.
— On ne se cache pas, souffla Gaëtan en reportant son regard sur l'adolescente et aux cheveux violets, mal à l'aise.
— Un peu quand même, rétorqua Constant en enfournant une énorme portion de pâtes carbonara dans sa bouche.
Le poing de Gaëtan se contracta contre son plateau.
— Bref, fit t-il. On fait quoi, maintenant, pour Christian ? Il faut qu'on décide de la suite.
Visiblement, sa diversion avait fonctionné, car sa phrase semblait avoir provoqué de la réflexion chez les deux curieux qui l'assommaient de questions quelques minutes plus tôt.
— D'ailleurs, j'allais vous en parler, murmura Halse, le regard rivé sur sa nourriture.
Les regards de ses amis sur sa personne l'incitaient à continuer.
— Christian va revenir, je... je le sais. Je sais qu'il va revenir. Je le sens, il n'abandonnera pas comme ça. Il y a un coffre dans mon sous sol, où énormément d'argent est stocké, il le sait et il reviendra pour cet argent, j'en suis presque sûre.
— Je pense aussi, confirma Gaëtan. Il a tué deux personnes pour tenter d'arriver à ses fins, la moindre des choses maintenant c'est d'y parvenir.
— Donc... on fait quoi ?
— J'y réfléchirai cet après-midi, pendant que tu iras voir ta mère.
Elle approuva silencieusement, avant de se lever.
— Je vais la voir maintenant. Plus j'attendrai, plus je serai stressée, annonça t-elle, fébrile.
— T'inquiète, tout va bien se passer, tenta de la rassurer Ornélis, un peu maladroitement.
Elle s'échangèrent un sourire gratifiant. Puis, l'adolescente quitta la table, sous le regard attentif de ses amis. Lorsqu'elle fut partie pour de bon, Constant soupira en s'affalant contre le dossier de sa chaise.
— On va apprendre des trucs, quand elle va rentrer, je vous le dis.
— Sûrement, marmonna Gaëtan, concentré sur sa nourriture.
L'adolescent replaça sa capuche sur le haut de sa tête, avant de se pencher vers le duo, comme pour leur dire un secret que personne ne devait entendre. Son index effectua des gestes d'allers retours entre eux deux, tandis qu'il cherchait ses mots.
— Donc, vous deux...
— Putain, vous allez pas lâcher l'affaire ? s'agaça le grand métisse.
Constant se redressa aussitôt en élevant innocemment ses deux mains en l'air.
— Pardon, pardon.
Ornélis ne disait pas un mot. À quoi jouait t-il, ces derniers temps ? Il lui avait presque reproché de s'être rapprochée de Gaëtan, et voilà qu'il se montrait curieux et amical envers eux ? Elle ne parvenait plus à le cerner, à comprendre où sa pensée se situait exactement.
Ils terminèrent tous les trois leurs plats en abordant le sujet du gîte et de son avenir, de la fin du séjour, qui risquait sûrement d'être avancée à cause des événements récents...
En effet, le destin de la demeure ne tenait plus qu'à un fil ces derniers temps. Certes, la ville fournissait de l'aide à la mère d'Halse, mais ça n'allait pas durer éternellement. L'avenir était incertain, pour tous.
Une fois leur pause du midi terminée, ils remontèrent, toujours ensemble, discuter dans la chambre de Gaëtan en grignotant quelques bonbons.
Étendue sur le matelas, Ornélis contemplait Gaëtan. Elle observait sa mâchoire se contracter lors de ses paroles, et ses mains accompagner ses paroles. Il était beau, si beau.
Puis, elle ancra son regard sur le plafond. Ses pensées se dirigèrent vers Halse.
Elle qui ne l'affectionnait pas particulièrement au départ, elle espérait de tout cœur que la rencontre avec sa mère se passe bien. Ornélis voulait voir Halse heureuse, tout simplement.
Elle s'étonnait elle même.
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