Chapitre 32

Halse ne voyait plus vers où elle se dirigeait. Sa vue était brouillée par les larmes et ses pieds se posaient aléatoirement sur le gravier du trottoir.

Elle ne parvenait pas à effacer de sa mémoire les événements qui s'étaient déroulés sous ses yeux quelques minutes auparavant.

Niño était venu la sauver.

Il avait mis sa vie en danger pour elle. Elle ignorait comment, mais le supposé barman savait où elle se situait, et ce qu'il se passait. Halse ignorait d'où provenait toute cette organisation, avait-il quelqu'un à l'extérieur, un autre espion, qui la surveillait ?

Elle était simplement perdue.

Elle l'avait vu se ruer vers elle. Elle avait vu les boucles noires de Niño se balancer contre son front au rythme de ses grandes enjambées, ses yeux d'un noir profond et si déstabilisant s'ancrer dans ses pupilles. 

Et surtout, elle avait senti une lame de couteau détacher ses poignets de la corde qui la retenait de tout mouvement. Il l'avait libérée.

C'était fut à cet instant qu'elle avait compris qu'elle était enfin libre, mais la seconde d'après le feu de joie qui l'envahissait s'était brutalement réduit en cendres.

Christian avait violemment enfoncé un poignard dans les côtes de Niño, d'un regard froid sans émotion, d'un geste purement dénaturé d'humanité. Le barman s'était écroulé contre le sol froid, provoquant un soulèvement de poussières jaunâtres autour de lui.

Halse avait hurlé, puis, l'instant d'après, une sensation étrange avait envahi son être tout entier.

C'était comme si ses émotions s'étaient détachées de son corps, soudainement. Sans qu'elle n'eut l'impression de contrôler quoi que ce soit, elle avait rassemblé toutes ses forces pour se précipiter vers la sortie du hangar.

Tandis que son âme entière lui implorait de rester aux côtés de Niño, de le prendre dans ses bras, son corps, lui, avait décidé de s'enfuir. Et elle était incapable de lutter contre cela.

Peut être que Christian lui avait couru après, peut être qu'il avait hurlé son nom, mais Halse était bien trop impliquée dans sa fuite pour se retourner ou entendre quoi que ce soit. Ses pensées n'étaient obnubilées que par une chose : fuir.

Loin, et vite.

Cela faisait désormais une heure qu'elle courait sans relâche, sans regarder autour d'elle ou se retourner. Elle n'avait pas eu le temps de récupérer son téléphone, tout s'était déroulé à une vitesse hallucinante et elle n'avait eu le temps que de s'échapper. Elle ne possédait donc ni argent, ni vêtements de rechange, ni aucun moyen de contacter ses proches.

Elle commençait à avoir mal aux jambes, alors, pour la première fois depuis plus d'une heure maintenant, elle s'arrêta.

Halse avait l'affreuse impression que Christian la poursuivait et se trouvait constamment derrière elle, or c'était impossible : elle courait depuis bien trop longtemps, si il l'avait suivie des passants s'en seraient aperçu.

La gorge nouée et la respiration haletante, elle jeta un coup d'œil paniqué par dessus son épaule.

Lorsqu'elle constata que Christian n'était pas présent, la sensation de soulagement qui l'envahit fut telle que ses jambes lâchèrent soudainement et qu'elle dut prendre appui sur un banc qui se trouvait non loin de là.

Elle s'effondra et laissa son corps s'affaler sur le banc. Elle fut secouée de puissants sanglots pendant de longues minutes.

Comment allait-elle pouvoir reprendre une vie normale après tout ça ?

Cette pensée lui arracha un nouveau sanglot qui s'échappa cette fois de sa gorge en un petit cri impuissant.

Soudain, Halse se redressa. Elle venait de se rappeler qu'elle connaissait par cœur le numéro de sa mère. Il fallait qu'elle l'appelle de toute urgence.

Depuis qu'elle était toute petite, sa génitrice lui avait toujours dit de mémoriser son numéro de téléphone. Elle disait à Halse de ne jamais, jamais l'oublier.

L'idée qui se frayait doucement un chemin dans les pensées d'Halse fut aussitôt refoulée.

Elle dépensa quinze minutes à mendier un téléphone portable à des passants, qui refusaient tous poliment en prétextant qu'ils n'avaient plus de forfait, ou qu'ils n'avaient simplement pas de téléphone.

Finalement, une jeune fille de son âge lui jeta un coup d'œil méprisant avant de fouiller dans son petit sac.

— C'est bien parce que t'as l'air au bout de ta vie, marmonna sa sauveuse en lui tendant son téléphone portable.

Halse n'eut pas les mots pour la remercier comme elle l'aurait souhaité. Sa reconnaissance envers cette inconnue était infinie.

— Merci, vraiment, je...

— Passe ton coup de fil. Vite, abréga la jeune femme en allumant sa cigarette.

Halse s'exécuta. Elle composa le numéro de téléphone de sa mère en espérant de tout son cœur qu'elle allait décrocher. C'était son unique espoir.

Elle porta le téléphone à son oreille, et une vague d'émotion la submergea lorsque la douce voix de celle ci retentit au bout du fil. Elle eut envie de fondre en larmes à nouveau, mais se retint un minimum pour ne pas effrayer la généreuse jeune femme qui lui avait prêté son téléphone.

— Maman, je... peina à articuler Halse, ne sachant pas par où commencer.

Les battements de son cœur se stoppèrent lorsque sa mère prononça ces mots :

— Je suppose que Niño est mort...

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