Chapitre 31
Gaëtan tendit une main pleine d'espoir à Ornélis. Elle le scruta silencieusement. Ils se trouvaient dans la chambre de Gaëtan, devant la fenêtre grande ouverte qui donnait tout droit sur le toit de l'immense gîte.
Ornélis souffla doucement.
— C'est haut... Et on descend comment une fois sur le toit ? questionna t-elle, une boule de stress désagréable s'installant dans sa gorge.
— Il y a un escalier qui longe le mur, tu le verras si tu avances un peu plus, lui répondit Gaëtan. On l'emprunte, on arrive sur le parking du gîte, et on court.
Elle exécuta un hochement de tête fébrile en fermant les yeux.
— D'accord.
— N'aie pas peur. Tout va bien se passer, la rassura t-il d'une voix douce en posant doucement une main sur son épaule.
Elle lui jeta un dernier coup d'œil avant d'escalader le rebord de la fenêtre. Il fit de même, soutenant sur ses deux épaules le poids d'un gros sac à dos où se trouvaient leurs affaires. Ils prirent soin de fermer la fenêtre après leur passage et dévalèrent les marches de l'escalier une à une.
— Cours ! cria le grand métisse dès la seconde où leurs pieds furent entrés en contact avec la terre ferme.
Elle s'exécuta et, ensemble, ils coururent le plus vite possible jusqu'à se trouver loin du gîte, loin des animateurs, loin de Constant, et ils l'espéraient de tout cœur, plus près de la disparue. Ils détalèrent ainsi pendant dix bonnes minutes.
Ornélis, essoufflée, agrippa l'avant bras du jeune homme, le ralentissant dans sa course effrénée. Il prit appui sur ses genoux et calma sa respiration, à bout de souffle lui aussi.
— C'est...c'est bon. On est assez loin, ils nous retrouveront pas, parvint à articuler Ornélis entre deux grandes inspirations.
Ils avaient longé la route jusqu'à parvenir au centre ville du petit village. Ils ne savaient pas exactement où ils se situaient géographiquement, mais quelques magasins les entouraient, ils étaient presque certains qu'ils étaient suffisamment éloignés du gîte pour que personne ne les retrouve.
Ils s'aventurèrent aléatoirement dans les rues du centre ville, en se demandant tous les deux par où ils pourraient bien commencer.
— On interroge d'abord tous les commerçants en leur décrivant le physique de Christian et Halse ? proposa Gaëtan en jetant un coup d'œil aux quelques commerces autour de lui.
— Non, Christian ne serait jamais allé dans un magasin avec elle, il est pas débile, le contra Ornélis.
— Pas forcément dans un magasin, mais un homme qui traverse la rue avec un couteau et une fille paniquée sous le bras, ça se remarque, avait rétorqué le jeune homme en fronçant les sourcils.
— C'est une perte de temps, soupira t-elle en élevant ses mains à son visage, tendue.
Il s'apprêta à riposter quelque chose, mais au lieu de ça, Gaëtan se ravisa et fit pivoter son torse face à elle face à elle en tentant de capter son regard, en vain.
— Ornélis, si on commence à se disputer maintenant, on est morts.
— Tu veux toujours prendre les décisions, tout diriger. Laisse moi décider d'au moins une chose dans ce foutu plan. Je te rappelle que j'ai signé mon arrêt de mort face à mes parents en te suivant là dedans, s'agaça t-elle en plantant enfin ses pupilles défiantes dans les siennes.
Le regard qu'ils s'échangeaient était plein de tensions, ils pouvaient tous les deux le ressentir. Gaëtan écarquilla les yeux sans pouvoir réprimer un mouvement de recul.
— Tu ne pouvais pas exprimer ta haine contre moi avant ? Tu penses que c'est le bon moment, là maintenant ? s'énerva t-il, ne comprenant pas le comportement de son amie, qui était d'ailleurs un peu plus que son amie, mais pas non plus sa petite amie.
— Voilà. Tu recommences. Écoute moi au lieu de toujours rejeter ce qu'on te reproche ! lâcha Ornélis.
En prononçant ces mots, sa voix s'était brisée, et quelques passants curieux qui marchaient non loin de là s'étaient retournées vers elle. Elle décida de déverser tout ce qu'elle avait à dire maintenant, avant que leur mission ne débute réellement. Il fallait tout vider avant que les choses sérieuses ne commencent. Elle prit une profonde inspiration.
— Tu penses que tu es maître de la situation et que cette responsabilité de retrouver Halse t'appartient parce que tu en as pris l'initiative, mais c'est faux ! Tu m'as quasiment posé un dilemme et je n'ai pas eu le choix de te suivre, alors putain, écoute moi, prends au moins mon avis en considération même si on ne le suit pas !
Il la toisa d'un air neutre. Gaëtan ne savait pas comment réagir face à ses propos. Il fourra ses poings serrés dans ses poches.
— D'accord, déclara t-il posément. Dis moi ce que tu veux faire. Je te suivrai.
Un frisson de soulagement envahit Ornélis de la tête aux pieds. Enfin, elle s'était faite entendre.
— Ok, souffla t-elle. On ne fait pas tous les magasins, ça ne sert à rien. On va plutôt se séparer, et...
Gaëtan la coupa aussitôt en interposant sa grande main entre eux. Ses deux lèvres charnues s'étirèrent doucement en un sourire avant que celui ci ne s'évanouisse brutalement.
— Non, trancha t-il immédiatement.
Elle ne put réprimer un râle en penchant sa tête en arrière.
— Gaëtan, tu...
— Je ne me séparerai pas de toi.
La phrase qu'il venait de prononcer lui fit un drôle d'effet. D'un coup, elle ne se sentait plus énervée contre lui, une décharge électrique avait traversé son corps à l'entente de sa voix. Des picotements se répandirent le long de son estomac.
— Ornélis, continua t-il, on fait ce que tu juges le plus efficace, mais je ne me séparerai pas de toi, demande moi tout sauf ça. C'est trop dangereux. Tu compte dormir seule, dehors la nuit ? C'est non.
Elle capitula en soupirant. En effet, son idée n'était clairement pas réalisable. Se séparer l'un de l'autre allait être trop dangereux et épuisant émotionnellement. Son partenaire leva les yeux vers le ciel, qui commençait à se couvrir de sombres nuages.
— Rappelle d'abord Halse, pour vérifier si elle est toujours en mode avion, avisa finalement la petite blonde.
Il s'exécuta et porta son téléphone à son oreille après avoir appuyé sur le contact de la jeune fille. Il tomba immédiatement sur sa messagerie.
— Messagerie. Si le plan que j'ai mis au point avec elle fonctionne toujours, elle est dans les environs.
Ornélis enroula doucement ses doigts autour de son poignet. Elle le serra doucement, à la plus grande surprise de celui ci. Il lui jeta un regard curieux.
— On va fouiller toutes les zones industrielles aux alentours ensemble, d'accord ? Tous les endroits louches, un peu cachés, proposa t-elle.
— D'accord, murmura t-il en retour.
Elle se rapprocha de son corps, doucement.
Quelques gouttes de pluie commençaient à se déverser sur eux, tandis que quelques passants sortaient leur parapluie ou couraient se réfugier au sec.
Elle laissa tomber sa tête contre son torse. Ses cheveux blonds s'affinaient et s'allongeaient au fur et à mesure que la pluie les imprégnaient. Gaëtan n'eut d'autre réaction que d'observer tendrement le haut de sa tête.
— On va y arriver, chuchota t-elle presque imperceptiblement contre son torse.
Mais il avait entendu le timbre de sa petite voix à travers le bruit de l'averse qui se déversait. Il clot ses paupières, submergé par étrange une sensation de béatitude. Puis, ses lèvres charnues s'entrouvrirent à son tour pour y laisser passer un murmure :
— On va y arriver.
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