Chapitre 37 - L'Enfer sur Terre
— Sophia... hé, Sophia.
Quand j'ouvre les yeux, il fait jour, il fait beau. Je suis assise dans une herbe verdoyante. Le soleil laisse glisser sur moi de doux rayons. Une légère brise fait bouger les brins tendres du tapis vert sur lequel je me trouve.
Le Bloc. Mais sans ses murs. Sans le labyrinthe.
Nous sommes tous là. Il y a tous les blocards et les différentes installations. Et, autour, un champ d'herbe et des collines, qui s'étendent à perte de vue.
Dans ce magnifique paysage, une seule chose finit par retenir mon attention.
— Qu'est-ce que tu penses de celle-là ?
Gally se tient debout. Il est appuyé contre un établi en bois et fait tourner entre ses mains, une statuette toute faite main. Faite, de ses mains. La forme est simple, mais la figure travaillée. C'est un visage.
Sauf que je finis par le regarder lui. Gally. Il est rayonnant, souriant. Il a l'air apaisé. Même la cicatrice sur son nez n'est plus aussi visible. Je le trouve beau. Rassurant. Mon cœur bat la chamade et une apaisante chaleur s'empare de mon corps.
— C'est magnifique.
Il dépose la statuette et bien trop longtemps pour moi, se met à marcher dans ma direction. Je me rends compte que je suis assise dans l'herbe.
Quand il s'installe face à moi, le monde autour de nous disparaît. Car je ne vois que lui. Et le sentiment omniprésent en moi, c'est que le réconfort. L'amour. Je suis le bonheur à l'état pur.
Gally prend ma main dans la sienne. Et ça ne peut pas être plus vrai. Il n'est jamais parti. Car il est là, avec moi.
— Tu me manques, me murmure-t-il. Terriblement.
Je fronce les sourcils et le ciel commence à s'assombrir.
— Qu'est-ce que tu racontes ? Je suis là, Gally. On est ensemble. Et on sera toujours ensemble ! Pas vrai ?
Son visage se tord, ses traits se tirent et toute la beauté que je voyais en lui se déchire. Il n'est plus que douleur. Il retire son t-shirt, comme si ce dernier le brûlait. Une piqûre de griffeur s'épanouit sur son abdomen.
— Gally...
Alors qu'il cherche à s'éloigner, je le prends dans mes bras. Il s'apaise. Mais le monde continue de changer. Les murs du labyrinthe sortent de terre et commencent à nous étouffer.
— On reste ensemble, lui murmuré-je en retour, en pleurant. On reste ensemble, j'aurais jamais du partir, j'aurais du rester avec toi, oh Gally, pardonne-moi, pardonne-moi...
Mais, lorsque mes bras se referment sur du vide, les murs du labyrinthe continuent de se rapprocher. Ils vont finir par m'écraser. Les parois appuyant maintenant contre ma peau, je suffoque. Disparu, le sentiment de plénitude qui m'habite. La peur me broie les entrailles. La pression est telle que je crois que je vais exploser.
— Gally, j'essaie de crier. Aide-moi ! Gally !
Mais, il est parti. Et le mur continue de m'écraser.
— Sophia ? Sophia ?
J'ouvre les yeux, toujours allongée par terre, sauf que Minho n'est pas là. Il fait jour, nous sommes toujours contre le tas de débris qui a été notre cachette. C'est Teresa qui m'a tiré de mon sommeil, en me secouant doucement l'épaule.
— Sophia, tu as fait un cauchemar.
Je me redresse lentement, frottant mes yeux. Je suis étonnée de trouver mes joues trempées. Ce rêve avait l'air si réel. Je préfère m'accrocher à sa première partie. Sauf que, je n'en ressens qu'une douleur intense qui justifie amplement mes larmes.
Je cherche maintenant Minho du regard, car après tout je me suis endormie avec lui.
— Sophia, me dit Teresa. Tu as parlé dans ton sommeil. Tu as fini par appeler Gally.
— Ah bon ? Et je suppose que Minho l'a entendu.
Elle acquiesce, la tête basse.
— Tu devrais être claire dans ton comportement avec lui. Il va souffrir, par ta faute.
Sa remarque me pique profondément.
— Je ne t'ai pas demandé ton avis. Ce n'est pas toi, qui, la veille, m'a simplement ignoré après m'avoir envoyé boulé ? Tu es bien la dernière de qui j'attends des conseils.
Choquée, elle me regarde, bouche-bée. Cependant, je sais qu'elle a raison. Mais, comment le dire à Minho ? Quoi qu'il arrive, il souffrira. Il n'est qu'une victime dans cette histoire, un dommage collatéral.
Je me redresse de toute ma hauteur, et commence à m'éloigner du groupe qui s'éveille doucement. Marcher me fait du bien.
D'ailleurs, nous nous mettons rapidement en route, direction ces fameuses montagnes où nous devons trouver le bras droit. Nous quittons le bâtiment délabré, tandis que le soleil s'étale à l'horizon derrière la chaîne montagneuse.
Minho ne me regarde pas. Il a l'air de mauvaise humeur et je sais que j'y suis pour quelque chose. Cependant, je n'ose pas l'aborder. Nous marchons dans le silence, lorsque Winston finit par ralentir.
Nous décidons de fabriquer un brancard de fortune, pour l'aider. Nous nous relayons pour le porter et continuons ainsi notre chemin. Sauf que son état se dégrade à une vitesse fulgurante. Sans doute l'accumulation de la fatigue, de la chaleur et du manque d'eau, qui aggrave son état ?
Quoi qu'il en soit, de plus en plus blême, il finit même par perdre connaissance.
Vers la fin de matinée, nous décidons de faire une halte, bien méritée, nous partageant une bouteille d'eau. Nous avons peu parlé de la matinée afin de préserver nos forces. L'avancée dans ce désert aride est bien plus compliquée qu'escompté.
À côté de ça, le labyrinthe et le bloc, c'est du pipi de chat. De plus, le moral des troupes est au plus bas.
— Combien de temps on va encore marcher, comme ça ? s'énerve Newt, jetant un caillou tout sec au loin.
Teresa, comme à bout, décide de se lever. Elle s'éloigne du groupe. Thomas la rejoint quelques minutes plus tard. Ils disparaissent de notre vue.
— On devrait en profiter pour nous reposer un peu, leur dis-je, commençant à m'allonger.
— Bonne idée, approuve Fry.
Nous nous allongeons tous. Je suis fatiguée. Cet endosquelette n'est pas fait pour ce désert. Malgré lui, je suis presque à bout de force. Moi qui, avant, n'était pas si souvent fatiguée. Je soupire.
Pensant à la fois à Gally, me sentant mal de son absence et à Minho, culpabilisant de mon comportement vis-à-vis de lui, je finis par m'assoupir.
Je suis soudain réveillée par une grosse détonation. Je me redresse, en sursaut. Minho, déjà debout, s'exclame :
— Putain, Winston, qu'est-ce que tu fous ?
Il lui arrache son arme des mains. C'est celle qu'il a récupéré sur le garde évanoui, quand Aris et lui nous ont ouvert la porte. Thomas et Teresa arrivent en trombe :
— Qu'est-ce qui se passe ? demande-t-il.
— Ce taré a essayé de se tirer une balle ! s'écrie Minho.
Nous sommes tous choqués, à bout de nerfs et effrayés. Winston, plus que tout, a l'air au bout du rouleau. Il n'est plus que souffrance. De ses mains tremblantes, il remonte le manche de son haut. Sa peau est complètement nécrosée. La morsure a totalement disparu sous la chair calcinée et rongée.
— Je ne fais que vous ralentir. On pourra pas me guérir. Laissez-moi en finir.
Comme personne ne dit rien, il ajoute :
— Laissez-moi en finir, je vous en prie. Ce que je sens... sous ma peau... je veux pas finir comme ces dégénérés d'hier soir. Pitié...
Newt prend finalement l'arme des doigts de Minho. Ce dernier a les yeux presque révulsés. Pour ma part, mon cerveau a dû mal à accepter ce qui se passe. Il est encore dans le déni.
— Newt, fait Thomas.
Mais Newt l'arrête et, se mettant accroupi, il dit à Winston :
— Merci. Merci pour tout.
Et il lui donne l'arme, avant de se lever et de s'éloigner. Son sang froid est impressionnant. Cependant, je ne peux imaginer la souffrance qui l'habite en cet instant. Nous faisons tous nos adieux, au fur et à mesure. Je n'avais jamais parlé à Winston, nous n'étions pas très proche, mais il était gentil.
Mes amis, qui le connaissaient depuis plus longtemps : Minho, Newt, Fry. Ils vont être inconsolables.
Nous ne sommes maintenant plus en vue de Winston. Nous reprenons notre route quand, quelques secondes plus tard, une nouvelle détonation résonne. Nous nous arrêtons net, sachant tous ce que ça veut dire.
Newt est le premier à avancer. Malgré la douleur, nous finissons par le suivre. La montagne était encore loin...
La nuit qui suit n'est que solitude. Le silence est palpable et Winston encore présent dans les pensées de tous les garçons. N'ayant pas adressé la parole à Minho, je dors seule. Il est un peu plus loin, dans son coin. Cependant, c'est Teresa qui s'approche de moi.
— Je suis désolée, Sophia.
— Moi aussi, je lui réponds
Je me tourne dans l'autre sens, n'étant pas prête à lui parler davantage. En fait, à qui que ce soit. Et je me mets à penser à des choses heureuses, je reprends mon rêve là où ce dernier s'est brutalement arrêté. Je rêve de Gally tout en retenant mon chagrin d'éclater.
Demain est un autre jour et, malgré nos pertes, il faut qu'on avance. Ou alors ce sera à notre tour de périr.
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