Tournant le volant, la voiture rentra dans la petite allée de son jardin. Annie ferma le portail et courra vers sa porte d'entrée à cause de la pluie battante qui frappait ses épaules. En quelques minutes, elle profitait de l'eau chaude qui se glissait sur sa peau de velours. S'enroulant dans sa serviette, elle lava doucement son visage avant d'appliquer de la crème. Il était environ une heure du matin et elle se prépara un plat de pâtes avant de s'avachir sur son canapé. Elle s'était habituée à ces horaires de merde.

Il était revenu. Elle se rappelait de cette enquête qui l'avait propulsé directement en tant que commandant de police. Les femmes commençaient à disparaitre de façon inexpliquée vers 2015. La première avait une trentaine d'années et avait été retrouvée dans les mêmes circonstances que Sasha Braus. La seconde avait été enlevée une semaine après et comme ceci pendant quatre mois. Le nom de l'étrangleur avait été dévoilé au grand public : Zeke Jeager. Un homme barbu, assez charmant avec un style différent des autres hommes. Fumant le cigare, lunettes rondes, assez grand et des épaules carrées, il travaillait en tant que médecin. Il était décrit comme quelqu'un à l'écoute, souriant, aimant et qui faisait son maximum pour aider ses patients.

Le monstre se cache souvent parmi nous, parmi nos proches.

Annie attrapa un roman qui retraçait toute l'histoire de Zeke Jeager. Un roman écrit par un auteur qui avait sorti d'autres livres sur des enquêtes. Elle appréciait beaucoup les analyses de ce dernier et avait d'ailleurs écouté ses interviews. La blonde tourna une page et commença à lire l'extrait sur les découvertes des corps afin de se remémorer parfaitement l'enquête dans son intégralité. La mention de la rose blanche n'était pas un hasard. Symbole de pureté et d'innocence, la victime choisissait des femmes qui avaient entre vingt ans et trente ans, n'ayant jamais eu de relations sexuelles. Elle avait conclu qu'il les punissait mais n'avait jamais confirmé son hypothèse. Elle avait abattu Zeke Jeager de sang-froid alors qu'il allait tirer sur sa victime de l'époque : Historia Reiss. Elle était d'ailleurs la seule à s'en être miraculeusement sortie. Annie devrait peut-être la recontacter.

Posant ses yeux sur le portable qui sonnait sur la table basse, Annie referma le roman qu'elle posa à côté.

- Commandant, je viens de terminer d'analyser le corps ! s'exclama Hanji.

Annie porta son attention sur l'heure : 3 h 20. Elle n'arrivait pas à dormir de toute façon alors elle s'habilla et fonça vers le commissariat.

*

Arrivée sur les lieux, elle entra dans les locaux et descendit vers les sous-sols du commissariat où Hanji possédait un énorme bureau rien que pour elle. Le commandant se demandait comment elle pouvait faire pour travailler dans un espace où les fenêtres étaient inexistantes mais Hanji aimait ce lieu. Un lieu où la mort se tenait à côté de vous et vous toisez avec un grand sourire. Toquant poliment à la porte, elle entendit une voix joviale, l'invitant à entrer. Annie tomba sur Armin qui était à moitié assis sur une table, les bras croisés et un doux sourire sur ses lèvres.

- Que faites-vous ici ? demanda Annie en refermant derrière elle.

- Je vous rappelle que je fais partiellement partie de votre équipe pour cette enquête, Commandant, répondit avec tendresse le blond.

Malheureusement pensa la blonde en se tournant vers la légiste qui se leva de sa chaise.

- Je m'excuse de l'heure mais vous m'avez dit de faire vite ! Écoutez, je pense avoir percé tous les secrets de ce cadavre. Les morts me parlent et ils relèvent bien plus de choses que quand ils sont vivants !

Le jeune détective sourit même s'il sentit un dégoût qui démangeait sa gorge en voyant le cadavre disséqué devant lui. Nue, allongée sur la table de dissection, il pouvait voir le corps ouvert où il aperçut partiellement quelques organes. Il commençait à avoir la tête qui tournait et les mains moites.

- Si vous voulez vomir, c'est dans le couloir, intervient Annie avec un ton glaçant quand elle remarqua son visage blanc.

- Bien. Les causes de la mort sont bien la strangulation comme le confirme ces marques violacées sur la gorge. Je me suis permis d'ouvrir la trachée afin d'en avoir la confirmation et j'ai vu juste : tranchée écrasée, montrant des signes traumatiques forts et l'os hyoïde est fracturé. Évidemment, strangulation égal crise cardiaque. Ici, regardez le cœur...

Annie se pencha vers l'organe tandis qu'Armin grimaçait, restant en retrait.

- Il présente des zones de nécroses et fibroses. J'ai, comme vous me l'avez conseillé Commandant, procédé à une analyse toxicologique et devinez comment notre tueur la enlevait ? Sourit Hanji en frappant de ses mains, scrutant les deux enquêteurs qui haussèrent des épaules. Somnifère ! Précisément du Stilnox !

Armin s'apprêta à ouvrir la bouche quand la légiste gigota comme une enfant pour qu'il se taise.

- En effet détective ! Médicament prescrit pour les lourdes insomnies : occasionnelles et transitoires ! Pour des troubles sévères du sommeil chez l'adulte. Médicament qui provoque des fortes hallucinations, confusions, de l'angioedème et j'en passe. Bref, un médicament qui a beau soigner le sommeil mais qui nous balance d'autres merdes.

- Je pensais que le Stilnox n'était plus vendu librement ? Ajouta enfin Armin en levant le doigt.

- Vous êtes médecin maintenant ? Répliqua Annie avec un haussement des épaules.

- Vous avez vu juste Arlert, sourit Hanji, excitée comme une puce. Laissez-moi finir, vous êtes trop pressés et cela m'agace ! Le Stilnox est composé de Zolpidem. Prescrit seulement pour des urgences car cette molécule fait aussi l'objet de trafics, le Stilnox n'est plus vendu en libre-service. Il faut une ordonnance de béton pour s'en procurer !

Annie hocha la tête afin qu'elle continue.

- Le tueur a drogué sa victime avant de l'enlever. Il la torture et l'abandonne ici. Fin.

Le silence se posa dans la pièce.

- Heure de la mort ? Relança Annie.

- Entre 22 heures et 22 heures 40, confirma Hanji en regardant ses résultats.

- ADN relevé ?

- Non, malheureusement, soupira la légiste. J'ai tout de même envoyé les vêtements au labo afin d'en avoir la certitude mais comme la pluie a tout effacé, j'ai bien peur de ne rien trouver.

*

- Donuts ? Demanda Hitch en tendant le sachet à Armin qui s'empressa d'en piquer un.

Reiner l'imita rapidement et se goinfra comme un porc devant le regard hébété de son Commandant.

- Bien, je vais laisser la parole au détective Arlert qui en sait beaucoup plus sur cette femme, dit Annie en se reculant.

- Sasha Braus a disparu le 3 novembre 2020, en pleine nuit. Personne n'a rien entendu ni vu quelque chose, commença Armin en ouvrant le dossier sur lequel il avait travaillé. Ses parents ont signalé sa disparition le lendemain et ses collègues également. J'ai interrogé tous ses proches, malheureusement, je n'ai rien pu en tirer, termina Armin. Sasha Braus avait une vie banale, avait un travail et semblait être appréciée. Joyeuse, amicale et très ouverte aux autres, elle était décrite comme le rayon de soleil de ses proches.

- Une femme sans histoire ? Demanda Hitch en reculant dans son siège, les lèvres tapissés de sucre.

- Exactement.

- Donc, en soit, vous n'avez aucune piste qui tient la route ? Aucun suspect ? Ajouta Annie en toisant Armin qui hocha la tête. Super. Bien, Hitch et Reiner, je veux que vous interrogiez les habitants, proche de la scène de crime. En arrivant, j'ai vu plusieurs petites habitations à la lisière de la forêt. Quelqu'un a dû voir une voiture, un van passer. Le tueur a sûrement dû utiliser un moyen de transport pour déplacer la victime au milieu des bois. Moi et Arlert, nous allons annoncer la nouvelle à la famille et également les questionner à nouveau.

- Annie, appela Hitch avant qu'elle ne se volatilise. Tu penses qu'il est vivant... Zeke Jeager ?

La blonde se tut.

- C'est impossible.