Chapitre 1 - Un ciel qui s'effondre

Karis ancra ses pieds dans le sable, brandissant sa lame au-dessus de son épaule. Face à elle, le mannequin d'entraînement semblait lui jeter un regard de défi, la face couverte de rayures, signe des nombreuses attaques dont il avait souffert de la part des Apprentis.

Avec un grognement, la jeune elfe s'élança sur sa cible, décrivant un arc de cercle avec l'arme de bois qui termina sa course en plein cœur. L'impact perça le silence nocturne qui régnait dans la cour de la Citadelle.

Le mannequin vacilla. Karis s'autorisa une pause, et repoussa les cheveux collés sur son front par la sueur, après une bonne heure passée à s'entraîner pour tromper ses insomnies. Essoufflée, la jeune fille s'assit sur le sol poussiéreux avant de rejeter la tête en arrière pour lever les yeux vers le firmament.

Morceau par morceau, il se désagrégeait lentement au fil des ans, comme un temple dont les piliers étaient trop faibles pour soutenir le plafond.

Karis ne pouvait pas imaginer une vie où il en serait autrement. Dans les souvenirs les plus anciens de sa courte existence de dix-sept ans, il manquait déjà des constellations dans cette voûte céleste, striée de ténèbres. Mais pourtant, elle connaissait par cœur l'emplacement des étoiles disparues grâce aux livres. Son oncle Jil lui avait montré dans sa mémoire l'image d'un ciel purement azur, que seuls les nuages pouvaient venir troubler.

Il lui racontait que, lorsqu'un morceau s'en était décroché pour la première fois, le royaume d'Askan tout entier avait remué, craignant la fin du monde. Même les astronomes et leurs savantes lunettes n'avaient pu percer le mystère depuis.

La jeune fille se releva, puis asséna un dernier coup au mannequin. Ce dernier se plia en deux dans un grincement abominable qui lui arracha une grimace. Il était temps d'arrêter de le torturer. Alors qu'elle se dirigeait vers la lourde porte qui menait à l'intérieur de la Citadelle, celle-ci s'ouvrit. La silhouette d'une femme apparut sur le seuil. Sourcils arqués, elle croisa les bras en l'apercevant. Karis lui rendit un rictus contrit.

Lumi n'aimait pas que son Apprentie traîne dans la Citadelle si le sommeil ne lui venait pas. Et Karis se gardait bien de lui dire que c'était le cas chaque nuit.

— J'aurais dû me douter qu'un tel vacarme ne pouvait venir que de toi. As-tu seulement une idée de l'heure qu'il est ? s'enquit-elle, agacée.

Lumi portait encore son uniforme – un haut sans manches couleur sable, et un pantalon parsemé de trous à l'allure de griffures – ce qui signifiait qu'elle rentrait tout juste de son tour de garde. Karis posa sa lame et hasarda une réponse d'un ton qu'elle espérait jovial :

— Quelque part entre minuit et l'aube ?

— Cinq heures pour être plus précise, la corrigea sa Maîtresse. Ce n'est pas une heure pour s'entraîner, tu vas être fatiguée demain.

— Aujourd'hui vous voulez dire.

Deux prunelles émeraude la foudroyèrent du regard, mais Lumi ne put dissimuler une moue rieuse. Elle défit le châle qui couvrait ses épaules pour le poser sur celles de Karis. Le tissu était rugueux, mais tiède, et sentait l'iode de la rivière qui coulait à quelques kilomètres de la Citadelle.

— Et en plus tu vas attraper la mort à force de rester dehors, mets-toi au chaud à l'intérieur au moins. Pourquoi ne restes-tu pas à la bibliothèque ? Je serais plus tranquille si je savais où tu étais.

Karis esquissa un demi-sourire devant ses tendances maternelles, qui lui rappelaient qu'elle n'était pas seulement le mentor que le Conseil lui avait attribué, mais également sa belle-mère. La jeune fille resserra les pans du châle contre elle.

— Ne vous inquiétez pas, qu'est-ce qu'il pourrait m'arriver de pire qu'un rhume, entre ces murs ?

Un coup de vent souleva la tresse négligée de Lumi tandis que de multiples tintements retentirent dans la cour. Ils provenaient de dizaines et dizaines de lames au faible éclat, suspendues sur les murailles, que le vent faisait cogner contre la paroi. Un frisson traversa Karis, qui détourna le regard. Ces lames la mettaient toujours dans cet état. C'était d'ailleurs leur rôle : rappeler ce qu'ils avaient perdu près de trente ans plus tôt.

— On dirait bien que les Ashkanis sont du même avis que moi, plaisanta Lumi.

Karis ne répondit pas. Les deux elfes savaient pertinemment qu'ils n'auraient jamais pu envoyer un tel signe. Les Ashkanis n'avaient pas droit au repos éternel. Leurs Âmes avaient été totalement détruites par l'ennemi. Un sort assez ironique, puisque leur renommée tenait à leurs pouvoirs, qui leur permettaient de modeler à leur guise les Âmes sous toutes leurs facettes : Corps, Esprit, Cœur.

Leurs pouvoirs faisaient des Ashkanis des pions stratégiques que les souverains askaniens avaient placé il y a quelques siècles au nord du pays, dans la Citadelle. Intégrés aux Gardiens – protecteurs de la frontière – ils faisaient des merveilles contre le royaume du Dalren en cas d'invasion. Jusqu'à ce qu'une Reine plus maligne que les autres les annihilent jusqu'au dernier pendant la Guerre de Dix ans.

Ce que leurs ennemis ne savaient cependant pas, c'était qu'au fil des générations, les Ashkanis étaient de moins en moins nombreux. Des Gardiens étaient nés en ne pouvant maîtriser qu'une seule facette de l'Âme parmi les trois. Une honte pour ces guerriers d'élite.

Pourtant, seuls les non-Ashkanis avaient survécu à la mystérieuse vague de ténèbres, car moins sensibles à ses effets. Depuis ce jour, ils continuaient à garder la Citadelle, sans les Ashkanis et avec des pouvoirs diminués, mais tout de même redoutables.

Karis s'était toujours demandée à quoi ressemblerait sa vie si les Ashkanis étaient encore de ce monde. Sa vie serait drastiquement différente, c'était sa seule certitude.

— D'accord, céda-t-elle finalement pour dissiper le regard inquiet de Lumi. Si les Ashkanis ont dit que je devais rester à l'intérieur, qu'il en soit ainsi.

— Ne prends pas un ton aussi dramatique, s'amusa son mentor. Si tu t'ennuies tellement, tu n'as qu'à aller à Numarie dans la matinée. On a besoin d'Apprentis pour...

— Laissez-moi devinez, une demande de ravitaillement, grogna Karis.

Lumi opina du chef, puis recala avec douceur une des mèches brunes de son Apprentie derrière son oreille. Karis secoua aussitôt la tête dès que la femme tourna le dos pour se diriger vers la porte. La jeune fille préférait laisser ses cheveux libres, coupés en un carré dégradé, que le vent vint à nouveau ébouriffer.

— Puisque cela semble te réjouir au plus haut point, gloussa Lumi, tu n'as qu'à demander à Limbe et Calizo de t'accompagner. Et maintenant, au lit.

Karis grommela un vague « d'accord ». Elle ne négocia pas, c'était peine perdue. Elle pourrait toujours faire semblant de retourner à son dortoir, pour aller ensuite à la bibliothèque attendre l'aube avec une bonne histoire entre les mains.

Avant de franchir le seuil de la porte, elle jeta un dernier coup d'œil aux lames des Ashkanis. Même si elles étaient à nouveau parfaitement immobiles, en rentrant à l'intérieur de la Citadelle, Karis avait encore l'impression que leur tintement plaintif emplissait sa tête.



Limbe et Calizo se révélèrent tout aussi enthousiastes que Karis à l'idée d'aller à Numarie. Ses deux amis pestaient contre les quelques kilomètres qui séparaient la Citadelle de la ville. Mais une fois sur place, ils se laissèrent transporter avec ravissement par l'énergie grouillante de la place du marché.

Abrités du soleil sous des tentures aigue-marine et indigo, les marchands hurlaient à tue-tête, comme s'ils cherchaient à ameuter le quartier tout entier. Pièces d'argent à la main, les gens se pressaient contre leurs étals montés devant les habitations cubiques. Karis devait jouer des coudes pour se frayer un passage dans la foule.

— À quoi ça sert que les Maîtres nous rabâchent que nous sommes le futur des Gardiens, si c'est pour être corvéables à merci ? râlait Calizo. La prochaine fois, ils iront demander à quelqu'un d'autre, ça fait trois fois qu'on y va ce mois-ci.

— Au moins, on échappe à l'entraînement grâce à ça, marmonna Karis.

Elle manqua de rentrer dans son amie qui s'était arrêtée net.

— Regarde ça, s'exclama celle-ci.

Assis dans un coin, un charmeur jouait un air mélancolique avec une longue flûte fine, aussi effilée que les serpents colorés qu'il faisait mouvoir. Karis s'approcha, suivie de près par Calizo. Elles observèrent avec fascination les créatures domptées qui fixaient le vide de leurs yeux d'or.

Elles manquèrent de sursauter lorsqu'on leur saisit le bras pour les tirer sans ménagement vers l'arrière.

— Si vous vous arrêtez à chaque curiosité, on n'arrivera jamais à déposer la demande de ravitaillement, les taquina Limbe avec un sourire malicieux.

— Déesse toute puissante, jura Karis en le repoussant d'une tape, ne refais jamais ça.

Il ricana avant de pointer les serpents du doigt.

— Vous pensez que si on leur tranche la tête avec un izu, ils continueront à danser ? rit-il.

— La vraie question, répliqua Calizo, c'est de savoir si ça vaut la peine de salir des izus pour ça.

Karis secoua la tête. Leurs armes avaient trop de valeur pour les utiliser ainsi, bien qu'au premier abord on puisse douter de leur utilité. Mais si les izus avaient l'apparence de simples manches de poignard, leurs lames pouvaient se rétracter à volonté, un mécanisme dont les Gardiens conservaient jalousement le secret. Karis tapota par réflexe les siens, accrochés à sa ceinture, avant de se détourner du charmeur de serpents.

— Limbe a raison, déclara-t-elle, plus vite on se débarrasse de cette corvée, plus on aura de temps pour revenir.

— Ce n'est pas faute de l'avoir déjà souligné maintes fois. Si vous n'étiez pas aussi lentes aussi, soupira-t-il.

— N'exagère pas non plus, grommela Calizo. Et n'oublie pas que tu me dois quelque chose pour te faire pardonner, alors ça serait la moindre des choses que de prendre ton mal en patience.

— Comment ça, je te dois quelque chose ? C'est toi qui as manqué de me défigurer hier, s'écria-t-il en pointant la tâche bleutée sur sa pommette.

— Tu l'avais cherché, pouffa Karis.

La veille, Limbe avait eu la merveilleuse idée de pincer Calizo par surprise dans la Bibliothèque, alors que le trio était censé étudier leur leçon du jour. Le seul réflexe de l'Apprentie avait été de lui jeter un ouvrage relié à la figure.

— Montre-moi cette jolie bosse, je ne me lasse pas de la voir, railla-t-elle en triturant les joues du jeune homme, qui protesta vivement.

Après un regard d'avertissement infructueux, il lui saisit les poignets, couverts par des protège-avant-bras. Calizo afficha un sourire mutin sans se débattre.

— Fort heureusement, je connais un remède miracle.

Elle planta un baiser sur la blessure avec la délicatesse d'un chameau. Limbe parut troublé pendant une fraction de seconde, avant de furtivement lui rendre son embrassade, à la grande surprise de Karis. Le visage soudain chaud, celle-ci feignit d'être attirée par un étal d'où se dégageaient des senteurs sucrées et amères.

— Tu sais faire largement mieux, crut-elle entendre murmurer son amie à l'oreille du jeune homme.

Les passants les toisaient d'un air blasé, mais Karis ne sut dire si c'était parce que ses amis se trouvaient en plein milieu du passage, ou tout simplement à cause de leur uniforme. Même si la Citadelle protégeait Numarie, la plupart de ses habitants n'osaient généralement pas les approcher. Les mauvaises langues racontaient que les Gardiens n'avaient rien de commun avec les autres elfes, à part leur mortalité. Ils saignaient et mouraient, mais de leurs mains sortaient des éclairs, vestiges de créatures maléfiques qui auraient corrompu leur Âme.

Il fallait admettre que ces rumeurs grossières avaient une part de vérité.

Le trio sortit de la place du marché pour remonter une rue pavée, moins fréquentée. Et pour cause, les passants accéléraient le pas devant les soldats aux traits fermés alignés le long du mur, paré de mosaïques d'un camaïeu vert.

Karis n'était jamais entrée dans le palais de l'Orem, le dirigeant de leur région. Ils n'en avaient pas besoin : une cavité dans le mur, surveillée de près, leur permit de glisser la liste manuscrite que Lumi leur avait confiée avant de partir. Les directives de la Citadelle seraient exécutées sans délai, un chariot chargé de vivres frapperait à leurs portes dès l'aurore.

— Une bonne chose de faite ! s'exclama Limbe.

Ils replongèrent dans l'agitation de la place par une autre allée. Des travailleurs s'y affairaient, hissant bruyamment des poteaux pour installer les banderoles d'une fête à venir.

— L'avenir, claironnait une voix au loin, laissez-moi lire votre avenir, messieurs, dames !

— Non, maugréèrent Karis et Limbe en voyant les étincelles dans les yeux bleus de Calizo.

— Allez, ça peut être drôle, les implora-t-elle.

Les deux amis ne résistèrent pas bien longtemps devant son entrain, et se laissèrent traîner devant celui qui se disait voyant. Vraisemblablement âgé d'une petite vingtaine d'années, vêtu d'un pantalon trop grand pour lui, il était perché sur une caisse et entouré d'une foule de curieux qui hésitait à découvrir les secrets de leur avenir. Calizo les doubla, se portant aussitôt volontaire.

— En voilà une courageuse, approche, je t'en prie, l'invita-t-il.

Calizo s'exécuta, suivie par ses amis, et le voyant s'accroupit pour lui saisir la main.

— Une guerrière, à ce que je vois, constata-t-il en désignant les trois losanges tatoués au dos de sa main.

Elle acquiesça. Karis et Limbe avaient les mêmes, symboles de leur appartenance aux Gardiens. Nullement impressionné par leur uniforme, leurs tatouages ou leurs izus, le jeune homme poursuivit son examen en se penchant sur la paume de la blonde.

Chray*, mais que vois-je, une magnifique ligne continue. Tu aura une longue vie, affirma-t-il.

Limbe se pencha pour glisser tout bas à Karis :

— Tu crois que ça lui arrive de dire aux gens qu'ils vont mourir dans la semaine ?

— Peut-être, s'il a un ami apothicaire qui vend des potions miracles.

Le voyant redressa la tête vers eux. La jeune fille craignit qu'il ne les ait entendus, mais il ne fixait qu'elle, d'un regard intrigué. Lorsqu'elle fronça les sourcils, il reporta aussitôt son attention vers Calizo.

— Oh, s'exclama-t-il d'un coup. Un grain de beauté près du pouce ! Tu as un admirateur secret caché dans cette foule.

Ladite foule poussa en chœur une exclamation attendrie. Calizo laissa échapper un gloussement. Elle le laissa retourner sa main sous toutes les coutures, le temps qu'il lui prédise l'âge exact de sa mort, le nombre de ses enfants, et si elle aurait une vie heureuse. Cependant, il secoua la tête lorsqu'elle lui posa des questions plus précises.

— La Déesse de la nuit m'a comblé en me donnant ce pouvoir, mais mes compétences restent hélas limitées, je ne peux tout prévoir, déplora le jeune homme théâtralement.

Karis retint un rictus moqueur. Elle n'en croyait pas un mot, ce n'était qu'un charlatan qui abusait de la crédulité des passants. Kya ne pourrait jamais accorder de tels pouvoirs. La raison ? Elle avait disparu avec sa sœur némésis, la Déesse du jour, depuis plusieurs siècles.

— Mais je vois qu'il y a une autre charmante jeune fille qui, j'en suis sûr, ne serait pas contre quelques petites prédictions, poursuivit-il.

— Sans façon, répondit Karis en repoussant sa main tendue, le nez froncé.

Limbe éclata de rire tandis que Calizo poussa une protestation déçue. Elle la poussa en avant, l'enjoignant d'essayer. Non sans grommeler, Karis finit par céder devant son insistance.

— Voyons voir, se réjouit le voyant en tirant sa main vers lui. Que nous disent ces lignes ?

Les muscles de la jeune fille s'étaient raidis sans qu'elle ne s'en rende compte. Le contact de la peau du jeune homme sur sa paume la révulsait, mais elle garda contenance devant ses amis, qui s'apprêtaient à écouter les prédictions avec curiosité.

— Je suis tellement désolé, murmura-t-il assez fort pour que tous l'entendent.

— Qu'est-ce qu'il y a, je vais bientôt mourir dans d'atroces souffrances ? ironisa-t-elle en levant les yeux au ciel.

— Non, non, mais je vois que tu as perdu quelque chose de cher. Ou plutôt quelqu'un.

Karis cilla. Mais avant qu'elle ne puisse articuler le moindre son, le voyant l'agrippa. Quelque chose de froid lui griffa le visage. Éberluée, elle n'eut pas le temps de réagir lorsqu'il la repoussa violemment en arrière.

Calizo la rattrapa avant qu'elle ne se cogne le crâne contre le sol. Le voyant prit ses jambes à son cou et fendit la foule qui lâchait des cris effrayés.

— Oh que non, ça ne va pas se passer comme ça, fulmina Limbe avant de partir à ses trousses.

Karis se redressa, palpant sa nuque anormalement nue. Tout son corps se tendit lorsqu'elle remarqua que sa poitrine était trop légère. Elle hurla une insulte qui laissa Calizo pantoise.

— Mon médaillon ! Cet imbécile va me le payer, cracha-t-elle.

Elle sauta sur ses pieds et courut à la suite de Limbe, talonnée par Calizo. Elle s'était faite avoir comme une débutante. Ce n'était pas elle qui avait attiré l'attention du voyant, mais la lune argentée qu'elle portait autour du cou. Un objet qui devait sûrement valoir plus d'un an de ce qu'il gagnait en arnaquant les gens. Mais hors de question qu'elle le laisse filer.

Karis arriva à la hauteur de Limbe, mais le voyant était encore loin devant eux. Il bousculait les passants qui ne s'étaient pas écartés à temps de sa trajectoire avec une facilité déconcertante.

— On n'arrivera jamais à le rattraper, lui cria son ami.

— Pas si j'utilise ma maîtrise animique, grinça Karis.

— Mauvaise idée ! Les Maîtres...

— Je ne demandais pas ton avis, le coupa-t-elle.

— Très bien, soupira-t-il.

Karis s'arrêta net, tandis que Limbe poursuit sa course. Elle n'avait pas le choix. La gorge sèche, elle ferma les yeux, tendant un doigt tremblant.

Si aucun démon ou esprit malfaisant ne vivaient en eux, les Gardiens de la Citadelle possédaient bien une seconde vision. Au travers de ces yeux invisibles, ils décelaient la présence des Âmes, autant de flammes immaculées qui ondulaient dans une danse éternelle.

Karis ne tarda pas à repérer l'Âme du voyant. Il allait payer. Des étincelles dorées jaillirent de ses doigts, qui formèrent un cercle assorti de divers symboles. Elle récita mentalement une prière à la Déesse de la nuit. Ça devait marcher, elle ne pouvait pas le laisser partir avec son médaillon. Peu importaient les regards effrayés des habitants et l'air béat de Calizo.

Le cœur battant à toute allure, Karis posa sa main contre la lumière, qui se désintégra aussitôt.

Quelques instants plus tard, le voyant hurla.

Figé.


*Chray : juron numarien servant à exprimer l'agacement, la joie ou l'étonnement.

J'espère que ce chapitre 1 vous aura plu :3 N'hésitez pas à me partager vos impressions si vous en avez envie, ça me serait très précieux :D

Bisous <3

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