Le plan:

" Quelle barbe..."

Assis sur un rocher, une cigarette éteinte entre les lèvres, qu'il agitait de bas en haut, un homme observait, examinait et analysait la vue qui lui faisait face.

Une personne normale aurait fui ces lieux.

Mais l'homme était loin de ce que l'on pourrait qualifier de "normal".

Il portait un long manteau gris, sous lequel on pouvait apercevoir une élégante chemise blanche au col orné d'un ruban noir. Ses chaussures, cirées et brillantes, tapaient impatiemment le sol. Et ses mains de pianiste s'agitaient en tous sens : elles pianotaient sur ses jambes, ses bras, et s'enfouissaient dans ses poches. Ses cheveux d'un blond qui tirait sur le châtain, retenus en arrière en une queue de cheval basse, s'échappaient tout de même en diverses mèches éparses, qui tombaient sur ses épaules et sur son front.

Une mâchoire carrée et un menton mal rasé, un nez légèrement courbé, quelques pâtes d'oies aux coins des yeux et des sourcils épais venaient agrémenter son visage.

A première vue, l'homme paraissait tout à fait normal.

Pourtant en l'observant de plus prêt, en dépassant la banalité de son apparence, un détail sautait aux yeux.

Son regard.

Azur, avec des éclats plus ombragés, son regard reflétait une expérience et un savoir sans limite.

Jonathan Quent était son nom. Et d'autres pseudonymes le suivaient. Mais il avait une préférence pour Jonathan Quent, son nom de naissance.

Et ses yeux si particuliers étaient à ce moment-là remplis d'ennui.

"Quelle barbe...", insista-t-il d'une voix râpeuse, où se lisait toute sa lassitude.

Devant lui, depuis de longues et mornes heures, le même paysage monotone.

Une plaine déserte, désolée, inhospitalière et abandonnée.

Pas le moindre souffle de vent.

Pas le moindre brin de verdure.

Pas la moindre trace de vie.

Uniquement de la roche, qui s'étendait, là , jusqu'à l'horizon, qui se consumait dans un ciel couvert de nuage sombres.

Et le silence.

Mais pas n'importe quel silence : étouffant et suffoquant, qui prenait les tripes et instiguait un malaise dans l'âme.

Il y avait, dans ce paysage, quelque chose qui terrifiait.

Enfin, qui terrifierait toute personne normale.

Une petite moue sur les lèvres, il sortit une montre à gousset de sa poche, et souleva le couvercle d'un mouvement vif du pouce. Sous son regard sans âge, les aiguilles défilaient dans un "tic tac" continu. Avec un claquement agacé de la langue et une grimace impatiente, il rangea sa montre.

Entre ses lèvres, la cigarette se balançait toujours, mais un peu plus vivement, signe d'une légère frustration.

Face à lui, pas un bruit, pas un geste ; seulement de la roche granuleuse et sombre : fade.

Et cette roche terne et sans saveur, il commençait sérieusement à en avoir marre.

Il se passa une main nerveuse dans ses cheveux. Ses yeux fixaient un point perdu dans la mêlée que formait la pierre.

Il se décida à allumer sa cigarette, et d'un geste leste et rapide, craqua une allumette. La fumée s'échappa prêt de lui, formant un filet virevoltant et confus. Grande inspiration, grande expiration. Et la fumée filait sous ses yeux, comme les secondes et les minutes, sur le rythme de sa montre cachée sa poche.

Et il attendait.

Cela ne devrait plus tarder à présent.

Et, en effet, cela ne tarda plus.

Tout d'abord, il y eut comme un flottement dans l'air, qui le brouillait, à l'endroit même où Jonathan concentrait son attention. Au début, ce fut infime. Mais au fur et à mesure que le temps s'écoulait, le phénomène s'intensifiait. Jusqu'à  ce qu'une partie de l'air ressemble à un rideau, secoué dans tous les sens. Puis, dans un craquement sinistre et puissant, tel le hurlement du tonnerre, l'espace se fissura.

De son côté, c'était le visage de Jonathan qui se fissurait d'un sourire malsain.

Pas trop tôt !

Avec un soupir de soulagement, ce même rictus sur les lèvres et la cigarette roulant entre ses doigts, il se leva et réajusta son manteau gris sur ses épaules.

Le silence désagréable avait laissé place à un grondement perpétuel tandis que la faille s'élargissait. Un trou lui faisait face, rempli de ténèbres d'un noir profond et insondable. Il s'en dégageait une atmosphère détestable, qui faisait planer sur l'esprit et sur le cœur une ombre suffocante.

Et avec un craquèlement clair, la brèche cessa son expansion.

La porte du Néant était ouverte.

Largement assez grande pour remplir son objectif.

Dans une marche nonchalante, avec de larges enjambés en raison de sa grande taille, Jonathan s'avança vers l'ouverture. Il se stoppa vite, ses cheveux secoués par un vent nouveau provoqué par la faille. L'air s'engouffrait à l'intérieur avec violence et la cigarette qu'il retenait jusqu'alors entre ses doigts d'une prise faible s'envola, engloutie très vite par l'obscurité opaque. Il ne s'en formalisa pas et prit une posture détendue, à quelques pas de la fissure, ses pieds fortement ancrés dans le sol.

Hors de question de subir le même sort que sa cigarette...

Et soudainement, venant de la brèche, une voix aigue et innocente : enfantine.

Un chant.

Il secoua la tête, plus amusé qu'exaspéré.

Il reconnaissait cette voix. Impossible de la confondre avec une autre. Il étouffa un rire. Sacré petit bout de femme... Impossible de la changer... C'était bien elle, ça, de chanter dans un situation pareille. 

Les paroles de la chanson devinrent plus audibles. Et en saisissant le sens des mots, il ne se retint plus : il éclata de rire.

Ah, oui, elle savait faire dans l'humour ! Un humour teinté d'une ironie assez acide !

" Néant et vide, prison d'horreurs, prend garde au temps et à tes sens.

Rêve et Cauchemar, mondes d'évasion, prend garde à avoir tes défenses.

Vie et Eden, lieux aux milles peuples, prend garde à Ses Griffures.

Bien et Paradis, où volent les Anges, prend garde à être bon et pur.

Mal et Enfer, terres des Démons, prend garde à rester loin du vice.

Mort et Limbes, royaumes des morts, prend garde aux spectres à Son service. "

Et la mélodie se répétait, encore et encore, les paroles devenant de plus en plus claires. Jusqu'a ce qu'une fine silhouette de la taille d'un enfant apparaisse dans la faille, accompagnée derrière elle par une personne plus grande : un adulte.

Jonathan resta immobile, son sourire s'agrandissant au fur et à mesure que les deux figures devenaient plus nettes, suffisamment pour les observer correctement.

La première, une fillette au teint clair, rosé sur les joues, allait en sautillant et en chantonnant dans un tourbillon de jupons blancs remplis de froufrous, de dentelles et de rubans, sa voix fluette résonnant autour d'elle.

Elle était fascinante. Pas seulement par son chant, mais aussi par son apparence envoûtante.

Ses cheveux aux teintes pastels étaient relevés en d'élégantes boucles qui tressautaient autour d'elle à chaque soubresaut, comme secoués par le vent d'une tempête. Ses yeux, deux billes de grenat, possédaient une touche d'espièglerie. Ses lèvres carmin semblables à deux pétales de rose s'étiraient en un sourire rayonnant.

La seconde, un homme vêtue de guenilles, souvenirs d'une redingote sombre, se laissait traîner par l'enfant avec une expression épuisée.

Lui aussi attirait l'attention d'une manière spectaculaire. Mais d'une façon bien différente.

Sa peau, grisâtre, était striée de veines d'un noir d'encre. De-ci de-là , des plaies déchiraient son corps et saignaient, de longs et minces ruisseaux écarlates coulant sur sa peau. Parmi ses mèches de cheveux argentées apparaissait un regard unique. Deux orbes, l'une dorée, l'autre verdoyante, plongées dans un tourbillon de noirceur où se lisaient la fatigue et la fureur et, enfouie plus profondément, quelque chose de bien plus dangereux : la folie.

En un dernier bond, la fillette sortit de la brèche, son compagnon juste derrière elle. Et avec un ultime craquement assourdissant, qui fit trembler l'atmosphère et le sol, la faille se referma.

Jonathan reprit sa marche vers les deux nouveaux venus. Mais il n'avait d'yeux que pour un seul d'entre eux. Ecroulé, les genoux plantés dans le sol, la respiration laborieuse et les blessures toujours à vif, l'homme faisait peine à voir.

Mais malgré cette vue, Jonathan souriait d'un sourire euphorique, rempli de soulagement et d'excitation.

"Jonathan, lâcha l'homme en l'apercevant.

- Adaranthe.", le salua-t-il en retour en s'arrêtant à ses côtés. Il se tourna vers l'enfant, un sourire tendre sur ses lèvres." Merci, Ivoire."

Elle fit un geste vague de la main.

"Ah, pas de ça avec moi ! Tu sais bien que je ferais n'importe quoi pour notre ami ici présent !",expliqua-t-elle de sa voix fluette. Son attitude devint plus féroce tout à coup, un air grave, teinté d'amusement et de malice, prenant place sur son visage innocent. "Ne faites pas trop de bazar, les garçons..."

Et sur ce, avec un claquement de doigt rapide, elle s'évapora.

Jonathan eut un petit rire, son regard toujours l'endroit qu'elle venait de quitter. Puis, avec un grand sourire, il tendit sa main à Adaranthe pour l'aider à se relever.

"Tu crois qu'elle s'attend vraiment à ce que l'on reste sage toi et moi ?", lui demanda en riant Jonathan.

Son ami l'ignora et se releva par lui même, en grognant de douleur au passage. Jonathan soupira. Toujours aussi têtu...

Adaranthe s'examina en grimaçant, les sourcils froncés, et jeta un coup d'œil à Jonathan.

"Raconte-moi tout ce que j'ai loupé.", lui ordonna-t-il sèchement, dans un filet de voix râpeuse.

Jonathan retint un soupir. Ce n'était pas la gratitude qui l'étouffait...

"D'accord. Mais après, quoi ? ", lui demanda-t-il avec un sourcil haussé.

Adaranthe laissa planer un court silence apaisant, le visage fermé. Mais la folie se faisait plus présente dans ses yeux hétérochromes, signe que la paix n'était qu'illusoire.

"Après ? Après, on fait comme prévu, tout simplement.", lâcha-t-il doucement, avec une chaleur dangereuse et satisfaite.

Jonathan sourit de nouveau, le regard pétillant d'affection et d'humour.

"Ne faites pas trop de bazar, les garçons... "

Désolé, Ivoire...

"Ca m'a l'air d'être une excellente marche à suivre.", apprécia Jonathan en faisant volte face, tout en sachant pertinemment qu'Adaranthe ne tarderait pas à le suivre.

...mais rester sage et ne pas causer d'embrouilles, ce n'était pas leur style.


Note: Bonjours, bonjour !

Non, ce n'est pas un chapitre ! Juste un petit quelque chose pour fêter les 7K de vues <3 !

Donc... *met la sono, fait péter le champagne et le champomy pour les mineurs, lance des confettis et des serpentins*...célébrons :D !

J'aimerais vous expliquer à quel point ça compte pour moi, vous remercier comme il se doit et vous faire de gros câlin, mais je suis absolument nulle pour ce genre de discours :""") ! Et puis, les câlins virtuels, il y manque un petit quelque chose :p !

Donc, un grand MERCI !

Et une avalanche de cœurs ! *vous lance plein de cœurs*

Et des cookies pour ceux qui aiment (@Hudren t'es visé lol !)!

Et...et....*explose* Plein de câlins et de bisous (parce que même si c'est virtuel, ça vaut quelque chose '3' !)!

Merci à ceux qui votent, merci à ceux qui commentent, merci à ceux qui ajoutent cette histoire à leur liste de lecture, merci à ceux qui font les trois, merci à ceux qui se contentent de lire: je vous aime tous !

*arrête le discours bisounours, parce qu'elle va finir par être diabétique à force de parler avec des paroles aussi sucrées de bons sentiments*

Pour parler brièvement de ce texte, il devait s'agir du prologue de la réécriture. Mais j'ai changé d'avis. Je l'ai écris l'été dernier, mis à part la fin, que j'ai écris récemment. Donc, je ne trouvais rien à faire de lui: quoi de mieux que de vous le donner en cette occasion :D ! Je vous laisse en tirer vos conclusions et vos hypothèses !

Je vous fait de derniers bisous baveux et câlins étouffants, bonne journée et à très bientôt <3 !


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