Chapitre 33:

« Nous avons rencontré quelques...problèmes. »

Brutal.

« Oui, aucune perte. Drakayn et Firma sont les plus touchés, mais ils s'en remettront. »

Un poil énervé.

« Trei Kinger, le Chasseur. Ainsi qu'une Rêveuse, une certaine Astria... Le nom ne me dit rien. En tout cas, ils se sont Envolés vers Telmar. »

Mais surtout incroyablement inquiet.

« Drakaïs est saine et sauve, oui. Un peu secouée, mais rien de bien méchant. Et avant que tu ne demandes : Sin et moi allons bien également. Merci de ta considération. »

Oui, le pas d'Akhal en cet instant, alors qu'il se rappelait la conversation qu'il venait d'avoir avec Fergon, était multiple.

« J'espère que nous n'aurons pas d'autres surprises. », lâcha Drasera, une Draconique à la chevelure brune.

Akhal tourna son regard vers Yls, qui marchait avec une posture droite, les mains dans le dos. Seul le Nocturne pouvait être source d'une nouvelle surprise. Voilà pourquoi ils le surveilleraient avec toute leur attention.

« Ah, Drasera... Voyons, ça rajouterait un peu de piment ! », s'exclama Achoura en passant un bras autour des épaules de l'autre soldate.

Cette dernière se dégagea brutalement, du dégoût sur le visage.

« C'est sûr que vous autres, Draconiaques, aimaient le désordre et le chaos ! », siffla-t-elle, la mine hargneuse, d'autres Draconiques hochant la tête autour d'elle.

La Démone lui souffla un baiser, provocateur.

« Tu ne te doutes pas à quel point, ma belle... », susurra Achoura, la main à l'épée.

Akhal serra les dents, mais se força à garder son calme.

« Achoura. », fit-il simplement.

La Démone laissa son bras retomber contre son flanc, en roulant ses yeux vermeils.

« Pas de vague, c'est clair ? D'autres choses méritent notre attention. », expliqua-t-il, son regard toujours rivé sur le dos d'Yls.

Achoura soupira lourdement, maugréant quelques injures, mais se recadra.

Par les Six. Elle était aussi catastrophique que Drakayn sur ce point. Un exploit.

Akhal fronça les sourcils.

La prise de la Tour ne s'était pas déroulée comme prévu. A se demander si d'autres points de leur plan tourneraient à la catastrophe...

L'élimination des soldats de la Caserne ? Peu probable. Cerbère, qui menait l'attaque, était un guerrier puissant à l'expérience immense dans ce genre d'affaire. Sans compter sur sa meute et l'escouade d'Elfe qui l'accompagnaient, menée par Elesborn, haut gradée dans les rangs de son peuple.

Les postes de garde, donc ? Au nombre de six par étage, ils comportaient entre une quinzaine et une vingtaine d'individus. C'était là qu'il y aurait peut-être le plus de problèmes. Sans oublier les quelques patrouilles qui sillonnaient les rues... Yls avait tenté de mettre le plus de ses hommes dans la surveillance des festivités, mais il n'avait pas réussi à la placer complètement sous son contrôle.

Mais le plus grand danger venait justement du Nocturne.

« Tu devrais arrêter de me regarder de la sorte, Saneur, l'interpela Yls, en tournant son visage pour lui jeter un coup d'œil froid.

-Pourquoi, Yls ? Timide ? », le provoqua Achoura, avec un petit rictus.

Le regard du Nocturne se fit glacial, mais il ne prit pas la peine de lui répondre. Akhal ferma les yeux, profondément agacé.

Oui, sa binôme était tout aussi frustrante que Drakayn.

« Vous, Démons, ne savaient vraiment pas quand la fermer, hein ? », siffla Drasera, hargneuse.

Akhal s'enjoignit à la patience. Drasera était une jeune Draconique, du même âge que Drakaïs. Brune aux yeux gris, elle possédait un fort caractère et surtout, une haine tenace pour les Draconiaques.

« Oh, nous ne savons peut-être pas « la fermer » comme tu l'entends, humaine, mais nous sommes parfaitement capable de réduire au silence les individus dans ton genre ! Je peux même te faire une démonstration, si tu en doutes !», cracha son partenaire, Hessin.

Oh, par les Six !

Et voilà que ces deux là s'y remettaient !

Depuis qu'ils étaient avec eux, ils n'avaient pas arrêté. Il entendit le rire d'Achoura, et la vit observer l'échange avec amusement. Les autres, comme Akhal, s'agaçaient de l'attitude des deux trouble-fêtes. Même Yls semblait irrité : ses mains se serraient un peu plus à chaque altercation.

Comme Drasera, Hessin avait un tempérament de feu, accentué par son ascendance démoniaque. Ses cheveux blonds lui donnaient l'allure féroce d'un lion, et ses yeux pourpres brillaient d'une lueur cruelle. Akhal se demandait comment ces deux-là pouvaient s'être supportés si longtemps sans faire couler le sang.

Même si le plan d'Idris pour mettre plus de bonne entente entre les Draconiques et les Draconiaques avait su être efficace pour certains, pour d'autres, c'était tout le contraire.

Drasera et Hessin en était l'exemple parfait.

« Vous deux, ça suffit, ordonna Akhal, le ton sec. Vos enfantillages n'ont aucune place ici. Gardez-les pour la fin de la journée, quand tout sera réglé. »

Il les foudroya du regard, l'air sévère.

Avec une dernière insulte, les deux soldats se tournèrent le dos, l'humeur sombre.

De vrais gamins : Akhal devrait avoir une discussion avec eux une fois l'opération terminée. Une telle attitude dans un moment comme celui-ci était intolérable.

Mais pour l'heure, c'était le Conseil qui l'intéressait.

La porte de la salle de réunion apparut devant eux, et sans les attendre, Yls l'ouvrit brutalement, rentrant dans la pièce comme un roi prêt à prendre son trône.

Akhal serra les dents et le suivit.

Ilvia Frendz les accueillit, toujours aussi agréable.

«Yls, tu es en retard ! », aboya-t-elle, en pointant un doigt crochu sur le Nocturne.

Le Maître de la guilde d'assassins se contenta d'un petit sourire froid.

« Et vous aussi ! cracha la Fée de la Nuit, se tournant cette fois vers Akhal. A croire que la ponctualité n'est pas votre fort !

-Voyons, Ilvia... Ce qui compte, c'est que nous arrivions sur la place à midi... Nous avons encore deux heures... », tenta de l'adoucir Reyn Menbrac, qui bataillait avec son nœud papillon, Harn Abgrall à ses côtés, dans une lutte similaire avec sa cravate.

Les Conseillers de la cité s'étaient tous mis sur leur trente et un. Vêtus d'habits chics et élégants, parés de bijoux et plus pompeux que jamais.

Quel dommage de gâcher leur plan.

« Vous n'êtes pas habillés. », nota Quillian Desfourneaux, qui se frottait les mains nerveusement.

Ilvia Frendz, prenant compte des paroles de son collègue, fronça les sourcils.

« Et que font ces soldats avec vous ? », demanda-t-elle, le ton dur et rempli de suspicions.

Yls se mit à faire des cercles, tel un prédateurs sur le point de mettre à mort sa proie.

« Vous ne sortirez pas de cette pièce. », leur apprit le Nocturne, une profonde satisfaction dans sa voix.

Pour appuyer ses mots, Achoura ferma la porte d'un claquement brusque. Les autres tirèrent leurs épées. Akhal resta immobile, la main à son arme.

« Voyons...Que faites-vous là ? », bafouilla Reyn, abandonnant son nœud pour faire un pas en arrière, suivit par le Nain.

La Fée de la Nuit, comprenant la situation, s'empourpra de colère.

« Traîtres ! Vous n'avez aucun droit de_

-Oh, Ilvia... la coupa Yls doucement. Tu crois sincèrement que tu as un quelconque pouvoir ici ? »

Akhal fit un pas en avant, gardant à l'œil le Nocturne, prêt à intervenir à tout instant.

«Yls ! hurla la Fée de la Nuit, hystérique. Jamais l'Empire ne laissera impuni un tel acte ! Et vous ! siffla-t-elle en observant Akhal. Vous et votre sale famille, j'ai toujours su que étiez des traîtres ! Votre père est bien trop noble pour être dénué de toute scélératesse ; cela cachait forcément quelque chose ! Des Humains comme vous, sales parasites putrides, n'ont aucune place en nos rangs ! », vociféra-t-elle, hideuse dans sa rage.

Quillian Desfourneaux clignait des yeux avec frénésie, trop choqué pour s'offusquer de l'insulte.

« C'est un malentendu...Voyons...Seigneur Akhal...  balbutia Reyn, livide.

-Si c'est de l'argent que vous voulez, nous pouvons nous arranger ! », s'exclama le Nain, tout tremblant.

Le rire cristallin d'Achoura retentit derrière Akhal. Même lui avait du mal à retenir son amusement. Pathétiques.

Et la Fée de la Nuit n'en avait pas terminé.

« J'aurais vos têtes à tous ! To_

Soudain, elle hoqueta, une tache de sang apparaissant sur son ventre. Elle y porta ses doigts, frémissante et les yeux écarquillés par le choc.

Akhal se figea : l'attaque avait fusé de nulle part.

Un silence envahit la pièce, pesant et sombre, seulement ponctué par les gémissements de douleur de la Fée de la Nuit.

Le Draconique se tourna vers le Nocturne, sachant pertinemment que c'était lui le responsable.

« Yls, arrête ! », lui ordonna-t-il.

Drasera et Hessin, d'un même mouvement, se jetèrent sur le maître des assassins le saisissant avec une étrange facilité.

Mais ce fut peu efficace.

La Fée de la Nuit, de son côté, était soulevée dans les airs et lâcha un cri déchirant, une entaille profonde lui ouvrant le ventre.

Frustré, Akhal chercha la cause de la blessure, serrant les dents en ne trouvant rien.

Mais en baissant le regard, il la vit.

Au sol, plantant ses mains dans la silhouette de la Fée de la Nuit : une ombre. Déformée et monstrueuse, elle s'attaquait à celle d'Ilvia, sans merci.

Le Draconique se tourna vers Yls, qui observait la scène froidement, son regard de jais intense.

« Yls ! », hurla Akhal, sortant son épée.

Foutu Nocturne ! Il aurait dû avoir sa lame sur sa gorge pour être sûr qu'il ne tenterait rien !

Il s'avança vers Yls, prêt à l'arrêter lui même, voyant Drasera et Hessin lui courber le dos pour le faire plier.

Mais c'était trop tard.

Il vit Yls se libérer de l'emprise des deux soldats, un sourire malsain sur ses lèvres.

Puis, un voile de ténèbres envahit la vision d'Akhal, le rendant aveugle.

Et en même temps, des hurlements, ceux des autres Conseillers, résonnèrent autour de lui, des plaintes et gémissements qui leur laissaient peu de chance de survie.

Laissant tomber sa vue, le Draconique s'appuya sur ses dons reptiliens, cherchant les vibrations de la terre pour repérer le Nocturne.

Mais Yls était introuvable.

Akhal jura. Le maître des assassins n'aurait jamais dû venir avec eux. Avec son attitude amicale, ils s'étaient laissés suffisamment berner pour le sous-estimer. Une faute à ne jamais commettre avec les gens de son peuple, spécialistes dans le contrôle des ténèbres.

Il perçut les sifflements de rage de ses compagnons, sans doute réduis au même état que lui.

Ils s'étaient faits avoir en beauté.

Et enfin, le silence : plus de cris de douleur. Seul le néant, synonyme de mort.

Et aussi brusquement que l'obscurité avait envahi leur regard, elle se volatilisa, découvrant sous leur yeux impuissants le carnage provoqué par le Nocturne.

Les Conseillers gisaient au sol, leurs cages thoraciques ouvertes et leurs tripes à l'air. Contre le mur, collés comme des papillons sur une toile, Drasera et Hessin se débattaient pour tenter de se dégager de la prise d'Yls. En vain. Un coup d'œil à leurs ombres lui apprit pourquoi : elles étaient emprisonnées par deux autres, tout aussi monstrueuses que celle ayant attaqué Ilvia Frendz.

Et assis sur un siège, une forme noire comme l'encre, humanoïde, tapotait ses doigts sur la table du Conseil, comme impatiente.

Yls.

« Nous avions un accord ! », lui cria Akhal, furieux.

Par les Six ! Il avait joué avec eux, les manipulant comme il le souhaitait !

Le Nocturne laissa son visage reprendre une apparence plus conventionnelle, l'obscurité qui recouvrait son corps s'évaporant en de fins filaments, pour les regarder sans émotion.

« Nous avons un accord, en effet, lâcha-t-il, acide, arrêtant ses doigts pour les croiser devant son visage. Je vous aide à prendre cette ville, rien d'autre. Je n'ai jamais promis de ne pas tuer les Conseillers.»

Le salaud.

Achoura fusa sur le Nocturne, toutes griffes dehors.

« Tu oses jouer sur les mots en ma présence, Nocturne ? », siffla-t-elle, sa main autour du cou d'Yls, qui continuait de fixer Akhal, pas le moins du monde gêné.

Le Draconique comprit très vite pourquoi.

Une nouvelle ombre s'accrocha à celle d'Achoura, arrachant une exclamation de douleur à la Démone, qui lâcha Yls pour tenter de se libérer. Des plaies parsemèrent son dos, aux formes de serres griffant sa peau délicate.

« Ça suffit ! », s'époumona Akhal, hors de lui.

Son cri de rage résonna dans la pièce, tout comme sa respiration, saccadée et lourde.

Et avec un petit rictus satisfait, Yls rappela ses ombres, qui coururent au sol pour rejoindre la sienne.

Drasera et Hessin tombèrent au sol avec des grognements de douleur et Achoura fit un pas en arrière, une main sur l'épaule, la fureur transformant son beau visage en celui d'un monstre haineux.

« Nous avions besoin d'eux. », siffla Akhal, tremblant de colère.

En cet instant, il donnerait tout pour pouvoir étriper le Nocturne. Seul Drakayn avait réussi à le mettre dans cet état par le passé.

« Oh, je vous assure que non. », rétorqua le Nocturne, en se faisant craquer la nuque.

Il planta son regard noir dans celui d'Akhal, intelligent et calculateur.

« La seule personne dont vous avez besoin, c'est moi. »

Bandant ses muscles, Akhal tourna les talons, ordonnant aux autres de le suivre d'un mouvement sec de la main.

Oh, oui.

Ils avaient besoin d'Yls, plus que jamais.

Ce sale enfoiré y avait veillé.

Telle une demoiselle allant à un bal, Quantamoniam, en ce jour de fête, était rayonnante de splendeur.

Guirlandes éclatantes, confettis de diverses teintes, couronnes de fleurs d'automne ; une explosion de couleurs.

Des troubadours et ménestrels prêtaient leur talent à ce spectacle visuel, chantant les exploits de héros légendaires et des hymnes à la gloire de l'Empire ; déclamant les vers de poèmes tour à tour lyriques, puis épiques. Les musiciens accompagnaient les chanteurs : de leurs doigts fins et agiles, ils caressaient les cordes de leurs lyres et de leurs cithares, ou embrassaient doucement leurs instruments à vent. La mélodie oscillait entre tendresse délicate et rythme tonnant.

Le résultat était entraînant : la foule chantait et dansait avec les artistes ; et certains, déjà ivres, s'époumonaient sur les refrains, leurs voix cassantes, mais joyeuses.

Oui, si entraînant qu'Inviat se surprit à fredonner quelques airs familiers, le tout avec un petit sourire nostalgique. Il marchait le pas tranquille, évitant les passants d'un mouvement ample de l'épaule, les mains dans les poches.

« Une bière, mon brave ? », l'interpella un tenancier, la main déjà sur le tonneau, prêt à le servir.

Le Nécromancien s'arrêta et se tourna vers l'homme, quittant des yeux les danses et les chants pour se focaliser sur le bar, qui s'était installé en dehors d'une taverne pour le couronnement.

Une bière ?

Il joua un instant avec l'idée, puis se laissa convaincre. Il paya le vendeur et reprit son chemin, son regard cette fois attiré par les divers stands qui courraient les rues. C'étaient ceux consacrés à la nourriture qui savaient le mieux capturer son attention.

Boissons fruitées ou alcoolisées, apéritifs en tout genre, plats chauds comme froids, friandises multicolores ; le choix était large.

Et l'odeur, envoûtante. Une parfum de friture au loin, d'autres plus savoureux sur les côtés, mielleux et édulcorés. Un délice.

Oui, si envoûtante qu'Inviat ne résista pas plus longtemps et craqua sur un paquet de guimauves, se jetant dessus comme un affamé.

Il avait toujours été un bec sucré ; sa plus grande faiblesse.

Non, décidément, Quantamoniam en fête était un régal à bien des niveaux. Inviat regrettait presque que l'assaut gâche les festivités.

Il aperçut un soldat du coin de l'œil, qui festoyait alors qu'il était en service, les joues rosies et un pichet d'alcool à la main.

Hum, non. Finalement, pas tant de regrets que cela.

Inviat se sentait euphorique ce jour-là. Pendant des siècles, il avait cherché à effacer la dette qu'il devait aux Souterrains. Et enfin, après toutes ces années de travail, son projet aboutissait.

Ce soir-là, les Souterrains seraient libres.

Et le soulagement qu'il ressentait face à cette nouvelle était immense. Il aurait aimé Seth à ses côtés pour partager ce moment, libérateur pour eux deux, encore plus pour son frère.

A la place, il devrait se contenter de la boule de poil.

Il rit en pensant à Kaï, l'envie de le voir stoppant ses pas.

Normalement, le rôle d'Inviat dans la prise de Quantamoniam était terminé. Les Draconiques n'attendaient plus rien de lui, si ce n'était « de ne pas créer d'embrouilles ».

De vrais rabat-joie. Mais personne, non, personne, ne lui avait interdit de se mêler aux combats durant l'opération.

Ah ! Une grave erreur. Une erreur que Kaï n'aurait pas laissé commettre s'il avait su sa présence.

Un sourire sournois fleurit sur ses lèvres.

Oh, oui. Il était temps de rendre une petite visite à ce cher frangin...

Il fit demi-tour et descendit la rue en mastiquant avec frénésie un morceau de guimauve, appréciant sa douceur sucrée sur sa langue, qui trompait sa Faim. Cette Faim qui ne le quittait jamais et qui l'invitait à se repaître de sang.

Les friandises avaient toujours été une bonne diversion pour la tromper.

Depuis combien de temps...Oui, depuis combien de temps ne s'étaient-ils pas retrouvés tous les deux, Kaï et lui ?

La Caserne apparut dans son champ de vision, au loin, lui envoyant un éclair d'excitation à travers le corps.

Des décennies, non, des siècles.

Depuis sa mort à elle, maintenant qu'il y réfléchissait.

Comme un nuage sombre voilant le soleil, un air amer remplaça son sourire éclatant.

En fait, il n'avait plus été réuni avec Kaï, Hyder et Seth depuis qu'elle les avait quitté.

Il renifla brusquement, agacé.

« Quitté ». Elle était bien bonne ! Trahi, oui !

Il serra les dents, la haine et la Faim lui tordant les tripes.

Un mensonge raconté au reste du monde, pour épargner la réputation héroïque de leur groupe.

Quelle stupidité.

La Caserne lui faisait face désormais. Un bloc de pierres terne et carré : froid et imposant. Même les décorations de la fête n'arrivaient pas à lui enlever cette image tyrannique. Rien de surprenant. Le bâtiment symbolisait la menace permanente qui planait sur les Souterrains. Au moindre signe de rébellion, les autorités fermaient tous les passages qui menaient au sein de la montagne. La révolte, comme les habitants, mourraient alors lentement, succombant à la faim. Venait ensuite le coup de grâce : les soldats de la Caserne déboulaient dans les Souterrains, pour achever sans merci les rebelles qui avaient survécu.

Et le cycle se répétait, tuant petit à petit la flamme de révolte dans le cœur des habitants des Souterrains ; rendant chaque fois la tâche plus difficile à Inviat pour la rallumer.

Mais à cet instant, couchée sur le flanc de la montagne, plongeant légèrement dans ses entrailles, la Caserne paraissait anormalement inactive. D'habitude, l'endroit semblait être une véritable fourmilière, grouillant de mouvements et de bruits ; de vie.

La place devant le bâtiment était quasiment vide. Seuls quelques gardes patrouillaient à ses alentours.

Les hommes d'Yls.

Inviat se retourna, observant la rue derrière lui, d'où lui parvenaient les échos de la musique et les exclamations enjouées de la foule.

Le contraste entre la Caserne et le reste de la ville était criant.

Mais les Quantamoniens, comme à leur habitude, ne voyaient rien, ou plutôt, choisissaient de ne rien voir.

Une attitude de lâche.

Il reprit sa route, avalant sa dernière friandise, la Faim toujours présente mais apaisée, jamais vraiment absente.

Lorsqu'il arriva devant l'entrée, un garde lui barra la route de son bras musclé, l'expression sévère.

« On ne passe pas. », décréta-t-il, la main à l'épée.

Inviat soupira, à bout de nerf.

« Oh que si : je fais partie de l'opération, sombre imbécile. », mentit à moitié le Nécromancien, avec un large sourire.

Le soldat l'examina un instant, tentant de déceler la trace d'un mensonge. Il pouvait toujours essayer : Inviat, avec son attitude désarmante, se savait particulièrement troublant.

« Le code ? », insista l'homme.

Oh, par les Six !

Parmi tous les incapables qui vivaient à Quantamoniam, il était tombé sur un des rares qui faisait convenablement son travail ?

Il avait vraiment une chance de merde.

Car il ne savait pas du tout quel pouvait être ce foutu mot de passe.

Finalement, peut-être que les autres avaient prévu le coup...

Gardant son sourire éclatant, il réfléchit rapidement. Voyons...Cela ne pouvait pas être bien compliqué, non ?

Le soldat serra plus fort sa lame, la tirant légèrement de son fourreau.

Et puis merde : autant tenter le Diable.

« Dragon. », lâcha-t-il sans vraiment y penser, la voix posée, paraissant sûr de lui.

En vérité, il se baffait intérieurement.

« Dragon »..? Pas si compliqué, d'accord, mais si simple ? Imbécile ! Lui et son esprit naïf ! Il allait tout gâcher !

« Vous pouvez passer. »

Quoi ?

Le soldat lui souriait d'un air entendu, lui laissant la voie libre.

Inviat garda son expression calme et passa. Une fois à l'intérieur, il laissa l'incrédulité transformer son visage en une grimace absurde.

« Dragon » ? Sérieusement ? « Dragon » ! Il se devait d'avoir une discussion avec celui qui avait choisi ce code...

Le silence tenait les lieux. Inviat tendit l'oreille, cherchant le bruit de combats lointain.

Rien.

Il fronça les sourcils : arrivait-il trop tard ?

Il accéléra le pas. Les maigres rayons de soleil apportés par les rares fenêtres le laissèrent bientôt en compagnie d'une lumière plus artificielle : celle de lampes à huile accrochées aux murs, qui projetait de multiples ombres sur son passage.

La température baissait considérablement dans la Caserne, laissant apparaître son souffle dans l'air.

Certaines portes étaient grandes ouvertes, découvrant des salles vides de tout habitant. Inviat n'y accorda pas plus d'un bref regard. Il savait que ce qu'il cherchait reposait plus loin dans le couloir, au fond du bâtiment encastrée dans la roche.

Le réfectoire.

Un pot devait y être tenu, précédé par une réunion rappelant le rôle de chacun en ce jour de fête.

Le moment parfait pour les prendre par surprise.

Inviat soupira, agacé. Mais l'attaque aurait dû avoir lieu depuis déjà deux heures: il avait sans doute loupé toute l'action. A seulement une heure du couronnement, il ne restait plus que quelques points de gardes à éliminer.

Mais bon. Ce qui comptait, c'était ce cher Kaï.

Et petit à petit, des voix lui parvinrent, infimes et tenus. Il prit une allure plus rapide, impatient, tendant l'oreille pour tenter de mieux percevoir la conversation. Il entendit un timbre grave, qu'il reconnaîtrait en toutes circonstances.

Kaï.

Il arriva à un tournant, un grand sourire sur les lèvres, prêt à retrouver son frère après toutes ses années sans le voir.

Mais à la place, une flèche fusa sur lui, le prenant au dépourvu. Il eut tout juste le temps de l'éviter et se plaqua contre un mur pour se protéger d'une nouvelle attaque, remerciant sa vitesse plus rapide que la normale, même sous sa forme humaine.

« Bordel ! leur cria-t-il avec un rire. Si c'est comme ça que vous accueillez vos alliés, je me demande quel sort vous réservez à vos ennemis ! »

Il entendit un aboiement suivit d'un grognement sévère, dissuasif.

« Qui va là ? » demanda une voix féminine, claire et forte.

Il roula ses yeux verts. Lui qui s'était pourtant cru compréhensif...

« Comme je l'ai dit, un allié ! »

Il y eut un petit silence.

« Il va falloir être plus précis que ça. », fit finalement la femme, le son de la corde de son arc bandé résonnant dans l'air.

Ah, ces Elfes...Toujours aussi méfiants...

« Si je me présente à vous, pas de flèche pour me recevoir, d'accord ? », voulu-t-il savoir, avec humour.

Il n'attendit pas la réponse et se mit à découvert, les mains levées pour montrer qu'il n'était pas armé.

Il n'en avait pas besoin pour faire des dégâts.

Comme il s'y attendait, des Elfes, au nombre de trois menés par une femme aux cheveux châtains, lui faisaient face, leurs arcs bandés, prêts à le transformer en gruyère au moindre geste suspect.

Inviat n'avait jamais été un grand fan de gruyère. Un peu trop sale à son goût. Douloureux aussi.

Mais il les ignora vite, son regard se plaçant sur quatre Loups-Garous qui restaient en retrait derrière eux. Seul un l'intéressait.

Il ne voyait que lui.

Un loup blanc gigantesque, qui l'observait également, ses yeux ambrés légèrement écarquillés.

Kaï.

Inviat sentit un sentiment indescriptible prendre le contrôle de son cœur, qui pulsait avec force dans sa poitrine. Oh, cette stupide boule de poil lui avait terriblement manqué.

« Qui es-tu ? », l'interrogea froidement la femme, le tirant de ses pensées.

Elle s'était placée juste devant lui, laissant son arc de côté pour lui préférer une arme blanche, qu'elle pointait sur lui.

Inviat loucha sur l'épée, les sourcils froncés.

« Oui, bon, j'ai peut-être dit « pas de flèche », mais une lame, c'est du pareil au même ma cocotte. », ricana le Nécromancien, les mains toujours en évidence.

La frustration prit forme sur le visage délicat de l'Elfe, qui fit un pas brusque vers lui.

« Elesborn. », l'arrêta Kaï, qui n'avait pas quitté des yeux Inviat.

Les autres jetèrent des coups d'œil à l'alpha, confus.

« Que fais-tu là, Ikitav ? », reprit son frère, le ton sévère.

Les autres, en lâchant des exclamations choquées, baissèrent leurs armes.

Inviat fit la moue.

Ah, bravo, pour ce qui était de vendre la mèche, Kaï n'aurait pas pu faire mieux !

« Non seulement tu révèles mon identité, qui, soit dit-en passant, m'avait pris pas mal d'années à cacher, mais en plus, je n'ai même pas le droit à un « tu m'avais manqué » ou un « je suis content de te voir » ? C'est cruel, Kaï, même pour toi. », marmonna le Nécromancien en croisant les bras sur son torse, boudeur.

Cachant un sourire, il vit clairement son frère serrer les dents, frustré.

Oh, Inviat n'avait pas son pareil pour mettre en colère les gens. Mais énerver le célèbre Cerbère était un exploit que lui seul maîtrisait.

« Tu n'as pas répondu à ma question, Ik_

-Inviat, l'interrompit-il, les sourcils haussés. Je me fais appeler comme ça en ce moment. Depuis quelques temps, même. L'anonymat me manquait. Et ça devrait répondre à ta question. »

Kaï soupira doucement, l'affrontant du regard.

« C'est exactement pour ce genre d'attitude que tu ne m'as pas manqué, non. », grogna le loup.

Le Nécromancien mima un air blessé, la main au cœur.

« Ouch. », lâcha-t-il avec un petit rire.

Il prit le temps de bien examiner la situation, notant que plus loin, des Loups-Garous et d'autres Elfes se tenaient devant une porte fermée, certains blessés et du sang teintant les dalles de la Caserne.

« Un problème ? », voulu savoir Inviat, se mettant sur la pointe des pieds pour mieux y voir.

D'un geste brusque sur l'épaule, Elesborn le força à rester fixé au sol.

« Rien qui ne te concerne, Croque-Mort. », cracha l'Elfe, du dégoût sur le visage.

Inviat renifla de dédain. Ce terme n'avait jamais été insultant pour lui.

« Elesborn ! », aboya Kaï, menaçant, la faisant sursauter et s'écarter du Nécromancien comme si il avait la peste.

Inviat en profita pour dépasser la femme.

« Alors, que se passe-t-il ? », insista-t-il, prenant place aux côtés de son frère, les mains dans les poches.

Il sentit les yeux du Loup sur lui, rassurants et apaisants, taisant la Faim en lui.

« Quelques gardes qui nous ont échappé et qui se sont barricadés dans une salle. Dès que nous essayons d'entrer, ils nous attaquent. Et le seul homme qui a réussi à passer est mort, submergé par le nombre. », expliqua le loup, de nouveau calme.

Inviat huma doucement, avant de faire un pas vers la porte en question.

Soit Kai avait gagné en patience lorsqu'il était question de lui, soit Inviat avait perdu la main dans l'art de le rendre furieux.

« Qu'est-ce que tu fais ? », persifla Elesborn, de la fureur dans sa voix.

Inviat l'ignora, se plaçant devant la pièce, la tête penchée sur le côté. Les Loups-Garous et les Elfes autour de lui s'écartèrent sur son passage, de la crainte dans leurs regards.

« Je suis déçu, Kaï. J'aurais pensé que tu aurais foncé tête baissée dans le danger, déchiquetant tes ennemis sur ton chemin. », le nargua le Nécromancien, amusé.

Il entendit son frère grogner derrière lui. Ah ! Voilà ! Inviat avait commencé à douter de ses talents ! Un bref coup d'œil lui apprit que le loup était près de lui, montrant ses crocs et ses oreilles abaissées en arrière.

« Je n'agis plus de cette manière depuis longtemps, et tu le sais. Maintenant, si tu comptes agir, fais-le ou vas-t-en. Je n'ai pas de temps à perdre avec toi. », lâcha son frère, à bout de nerf.

Inviat éclata de rire.

« Oh oui, tu m'avais vraiment manqué. », souffla-t-il, les yeux pétillants de malice.

Kaï souffla bruyamment, frustré.

« Pas moi, crois-moi. »

Mais le Nécromancien savait que la boule de poil était heureuse de le retrouver, et ce, malgré ce qu'il disait.

Sa queue, qui s'agitait imperceptiblement et qu'il tentait de cacher entre ses pattes, le prouvait bien assez.

« Kaï, voyons... chuchota Inviat, cherchant son pouvoir aux tréfonds de son être et sentant sa présence si familière. Le mensonge, ça ne te va pas, et ça ne t'ira jamais. », termina-t-il, sa vision se teintant de noir et blanc, ses yeux éclatant d'un vert surnaturel.

Si son frère lui répondit, il ne l'entendit pas.

Le voilà dans sa petite bulle.

L'air se fit glacial, l'atmosphère plus sombre et pesante, remplie d'un silence étouffant, seulement brisé par des plaintes et des lamentations brutales. A priori, il s'agissait du même endroit : le même couloir, la même porte qui lui faisait face ; le même bâtiment.

Mais il ne fallait pas s'y fier.

Il n'était plus dans l'Eden, mais dans un monde complètement différent : les Limbes.

Immatériel, le royaume des Morts était infini et complexe. A cheval sur l'Eden, comme sur les Enfers et le Paradis, il n'était accessible qu'à de rares Mortels possédant un don lié à la Grande Faucheuse.

Et en tant que Nécromancien, Inviat pouvait passer d'un monde à l'autre comme il le souhaitait.

Cela lui offrait un océan de possibilités.

De nombreux esprits se trouvaient à ses côtés, criant de colère et de haine, essayant de s'emparer de lui avec leurs mains, avides de vengeance.

Les gardes de la Caserne.

Mais Inviat n'était pas un débutant : il en fallait bien plus pour le menacer sérieusement.

D'un mouvement sec du poignet, il les Renvoya, leur arrachant des hurlements aiguës tandis qu'ils disparaissaient dans des contrées plus lointaines, en attente du Jugement.

Enfin tranquille, il se concentra sur la raison de sa venue en ces lieux.

Un clignement de paupière, et la porte qui lui barrait la route s'évapora, comme un nuage d'encre versé dans de l'eau.

Un esprit lui fit face dans sa forme la plus éthérée, faible lumière brillant dans ce paysage monochrome, tel un phare dans la nuit. Au vu de ses oreilles élancées, il s'agissait d'un Elfe. Flottant en position fœtale, il attendait un Passeur. Inviat aperçut brièvement son air apaisé, caché pas ses long cheveux.

Une pointe de regret lui poignarda le cœur.

Il détestait briser la paix des Morts de cette manière.

« La mort n'est pas ce à quoi on s'attend, n'est-ce pas ? », déclara-t-il, sa voix sortant déformée, brouillée et creuse.

L'esprit bougea, enfonçant sa tête dans ses bras, comme un petit enfant dérangé dans son sommeil.

« J'ai toujours pensé qu'il n'y avait aucune justice dans la mort. », continua Inviat, restant immobile sur le pallier de la porte.

Cette fois, le Mort leva son visage, confus.

« « Elle ne fait pas de choix, personne ne lui échappe, les bons comme les mauvais, les enfants comme les vieux » et bla bla bla. La Mort n'est pas juste : elle est, tout simplement. Bienveillante, malfaisante ? Stupide. Elle est tout, elle est rien. Universelle. Mais bon, il y a bien une chose qui est vraie : c'est une grosse co_

-Que me voulez-vous ? », le coupa l'esprit, le ton sombre et las.

Enfin ! Attirer leur attention était toujours le plus pénible. Bavarder semblait être le plus efficace : cela les agaçait, une réaction comme une autre.

La suite était beaucoup plus intéressante.

« Tu es mort, lâcha-t-il brutalement, sans aucun tact. Ce n'est pas le cas de tes meurtriers. Juste, injuste...A toi de voir. Je te propose de changer ça. »

Un éclair de lucidité traversa l'expression apathique du Mort.

« Vraiment ? », fit-il avec intérêt, mêlé à de la suspicion.

Inviat hocha la tête.

« Tout ce que tu as à faire, c'est prendre ma main. », lui expliqua-t-il en tendant son bras en avant.

L'esprit déroula son corps, se tenant debout face à lui. Dans cette position, Inviat voyait clairement les multiples plaies qui peignaient son corps. Les survivants de la Caserne n'y étaient pas allés de main morte.

Sans mauvais jeu de mot.

« Pourquoi devrais-je vous croire ? », demanda-t-il en s'arrêtant devant lui, ses yeux noirs l'examinant de la tête aux pieds.

Inviat soupira, sachant qu'il n'aurait pas pu y échapper. Il ferma les yeux brièvement, invoquant son uniforme. Il y eut un frémissement dans l'air, similaire à celui des ailes d'un oiseau déployant ses ailes.

Répondant à son appel, un long manteau enserra ses épaules et flotta autour de son corps, l'engouffrant d'une texture d'un noir opaque et l'embrassant comme un vieil ami.

Il sentait la texture froide et familière de Bibiche dans son autre main.

L'esprit avait les yeux rivés sur son arme, reconnaissable parmi mille autres.

« Je fais partie du personnel. », clarifia Inviat, agitant ses doigts pour l'inviter à le rejoindre.

Et sans plus attendre, satisfait, le Mort lui serra la main.

La poigne était froide et drainante, lui envoyant des piques de douleurs dans les muscles. Rien d'inhabituel dans ce genre de cas. Inviat attira l'esprit à lui, serrant son poignet avec plus de force, jusqu'à trouver ce qu'il cherchait.

De minces filets translucides quittaient le Mort, disparaissant dans le vide des Limbes.

Le Nécromancien sourit. Les Attaches étaient encore présentes. Un travail en moins ; il n'aurait pas besoin de les recréer.

En plissant les yeux, Inviat remonta les fils, quittant les Limbes pour les suivre jusqu'à un cadavre sanglant, qui gisait au sol.

Bingo.

De sa paume, il poussa brutalement le Mort en arrière, le projetant hors des Limbes, se servant de son pouvoir pour tirer sur ses Attaches, qui l'attiraient vers son corps sans vie.

Ne restait plus que la touche finale.

Le regard d'Inviat traversa la peau pâle, les muscles qui se refroidissaient, les os laiteux ; une seule chose l'intéressait : le cœur.

Il le tenait.

Il serra le poing, sentant la chair sous ses doigts, comme s'il s'y trouvait.

Imperceptiblement, il sentit un mouvement contre sa peau.

Boum boum.

Inviat sourit et appliqua plus de pouvoir, qui remonta le long des Attaches avec une rapidité extraordinaire.

Boum boum.

Écarlate, il vit le sang jaillir dans les veines du cadavre, réveillant ses muscles endormis, donnant plus de couleurs à ses joues pâles.

Boum boum.

Le cœur tressautait dans sa main, le pouls désormais fort et régulier.

Il desserra son poing ; c'était suffisant.

« Lève-toi. », souffla Inviat, utilisant son don pour donner à ses paroles une puissance magique.

Et suivant son ordre, le zombie ouvrit les yeux.

« Venge-toi. »

Et sans même observer ses actions, Inviat se laissa glisser en arrière, ne rencontrant aucune surface dans sa chute.

Juste le vide autour de lui.

Et cette sensation de tomber...

Tomber...

tomber,

tomber,

...pour s'écraser.

Aussi brutalement qu'il était entré dans les Limbes, il sortit, reprenant corps dans l'Eden avec une inspiration haletante.

La transition était toujours violente.

Des hurlements à glacer le sang, étouffés par le bois de la porte, furent la première chose qu'il perçut. Remplis de souffrance et de terreur, ponctués de sanglots et d'appels à l'aide.

Il vit la poignée de la porte s'enclencher, et d'un mouvement vif, y plaqua son pied pour faire barrage.

Personne n'échapperait au zombie.

La porte trembla, mais Inviat tint bon, y appliquant toute ses forces, brièvement décuplées suite à son voyage dans les Limbes.

Jusqu'à ce qu'elle s'immobilise.

Inviat se tourna vers ses alliés, restés derrière lui.

Elesborn le dévisageait, horrifiée. Les autres arboraient un air similaire, dans lequel se lisait aussi de la peur.

Seul Kaï l'observait normalement, si ce n'est avec exaspération.

Inviat était toujours vêtu de son long manteau noir, Bibiche reposant tranquillement dans ses doigts.

Le Nécromancien rit doucement en voyant leurs expressions.

« Bouh ! », lâcha-t-il, en prenant un petit air menaçant.

Ils tressaillirent tous, sauf Kaï, qui grogna, lui arrachant cette fois un éclat plus vif et enjoué.

S'il y avait bien une chose qu'il aimait dans son uniforme, c'était ce petit effet.

Et Bibiche.

Bibiche restait sa favorite.

« Oh, et de rien. », fit Inviat après s'être calmé, ses lèvres étirées en un sourire rayonnant.

Derrière lui, les hurlements s'étaient tus, laissant place à un silence funèbre.

Juste ou injuste.

Bienveillante ou malfaisante.

Tout ou rien.

Inviat s'accordait sur une chose quant à la Mort.

Tout le monde tombait sous sa faux.

...Et c'était vraiment une grosse conne.

« Oh, et pendant que j'y pense : qui a eu l'idée de ce mot de passe stupide ? »

Note: Bonsoir à tous :D ! Me revoilà avec un petit chapitre !

Par rapport au précédent, il ne se passe pas grand chose, mais il y a tout de même des scènes qu'il me tardaient d'écrire (notamment celle avec Inviat)!

Yls a donc fait des siennes (avec ses pouvoirs ! *mime un tour de magie*)! Honnêtement, c'était prévisible, n'est-ce pas :") ? Et Inviat...Il retrouve donc son frère, qui n'est autre que Cerbère :D ! Bon, normalement, c'était largement devinable XD ! Et enfin, mon passage préféré: celui des Limbes ! Vous avez un gros aperçu de ce dont Inviat (ou Ikitav...Même si il préfère Inviat pour le moment X")!) est capable ;) ! Avec, évidemment, un chouia d'informations (bah voui !) ! Des idées sur ce "elle" ;) ? J'en ai déjà parlé dans un chapitre précédent !

Bon bon...Le chapitre prochain est un peu flou dans ma tête... Je me tâte pour lâcher une grosse info (pas d'inquiétude, si vous ne l'avez pas au prochain, vous l'aurez à la fin de ce tome !)...Je verrai bien :D ! En tout cas, on entre dans la partie finale ! J'ai fait mon compte, et ce tome ne dépassera pas les 40 chapitres ! Et après: A MOI LA REECRITURE :D !

J'espère que ce chapitre vous aura plu ! N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé !

Gros bisous ! Je vous aie fort et vous êtes les meilleurs <3 ! (moment émotion et câlin !)

Ps: Bon, ça va la note :D !

Ps2: Désolée pour les fautes, il y a eu peu de relectures (trois complètes à tout péter)et je compte me relire plus tard pour les éradiquer avec plus d'efficacité >:D ! 



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