Chapitre 28:
Notice: Alors, je préfère prévenir au cas ou, mais ce chapitre est plutôt violent ^_^ ! Bon, rien de bien dégoûtant (quoique...)mais bon, je ne sais pas, peut-être que certains d'entre vous sont sensibles à ce genre de chose ! Il y est question de torture, de massacre et de pédophilie (que c'est joyeux tout ça !).
Sur ce bonne lecture !
Inviat adorait le rouge.
C'était après tout une couleur si fascinante !
Embrasée, riche, synonyme de passion ; d'amour, de haine, de violence.
Le rouge était très imagé.
Le rouge était sang pour le Nécromancien.
Et Inviat dégoulinait de sang.
Mais il adorait le rouge.
Donc, il s'en fichait.
Il sifflotait joyeusement sur son chemin, traînant un sac derrière lui, dans lequel apparaissait une silhouette qui de débattait en gémissant.
Sur son passage, des portraits accrochés aux murs semblaient le dévisager.
Sentiment assez perturbant, même pour lui.
Soudain, il s'arrêta devant un portrait.
Celui du propriétaire.
Avec son petit air hautain, la figure du tableau semblait le toiser.
« Hum... »
Inviat plissa les yeux et se pencha en avant, une main sous son menton.
Un visage légèrement joufflu, un nez aquilin, une mine austère, des cheveux poivre et sel.
« Il manque quelque chose...Mais quoi ? », murmura Inviat.
Il pencha sa tête sur le côté, la réflexion flétrissant ses traits en un masque crispé.
« Oh ! »
En claquant des doigts et avec un large sourire, il se releva brutalement, arrachant un cri de douleur à ses côtés.
Un petit rire satisfait lui échappa, et il passa vivement son index poisseux de sang sur la toile, y dessinant alors un nez de cochon écarlate.
Il prit le temps d'admirer son œuvre.
« Bien mieux comme ça. », se félicita-t-il avant de tourner les talons pour s'avancer davantage dans le couloir.
C'était une belle demeure.
Avec ses meubles en acajou lustré, ses tapisseries et tapis raffinés, ses gravures délicates, son sol marbré et ses peintures d'artistes reconnus, sa noblesse était indiscutable.
Oui, une bien belle demeure.
La même chose ne pouvait pas être dite pour ses habitants.
Oh, c'étaient de sales porcs. Des spécimens particulièrement exécrables. De vraies pourritures, pour ne pas dire salopards sans foi ni loi, qui méritaient de mourir dans les plus affreuses souffrances.
De sales porcs, donc. Les pires de tous, qui s'enrichissaient sur le désespoir des autres.
Inviat s'y connaissait bien, en sales porcs. Il en avait croisé beaucoup dans sa vie.
Il se savait donc bon juge sur le sujet.
Et ce jour-là, oh oui, ce jour-là, il en avait croisé un nombre astronomique.
Il fit un rapide calcul.
Depuis le matin, cela devait bien faire deux cents porcs qu'il égorgeait !
Son sourire se fit plus sadique et une lueur mauvaise apparut dans ses yeux, un petit rire secouant son torse face à ce funeste bilan.
Oh, quel boucher il faisait !
Il avait commencé par le célèbre bordel du Plaisir Céleste tenu par ce salaud de Grez Ricard.
Ah, oui... Lui, c'était vraiment un porc bien gras... Il l'avait laissé aux mains des prostituées avec un malin plaisir. Il avait poussé des glapissement digne de sa condition, alors qu'il se faisait déchiqueter vivant par les femmes qu'il avait maltraitées. Elles s'étaient jetées avidement sur lui, toutes griffes dehors, pour l'écorcher et le réduire à un état de chair ensanglantée méconnaissable.
Grez Ricard ne savait-il donc pas qu'il ne fallait pas froisser une dame ? A croire que non.
Puis, il y avait eu le marché noir de la vieille Dina.
Ah, celle-là... Une vraie truie.
Avec ses réseaux d'esclaves et de drogues, elle avait brisé de nombreuses vies.
Depuis longtemps, Inviat rêvait de lui mettre la main dessus.
Il revoyait encore son visage ruisselant de larmes, tandis qu'il engouffrait dans son gosier les saloperies qu'elle vendait, son corps traversé par de violents spasmes.
Jusqu'à ce qu'elle s'étouffe dans ses vomissements et ses marchandises.
Il l'avait laissée pourrir au sol.
Là où était sa place.
Ses associés avaient subi le même sort.
Ensuite, vint la guilde des voleurs : les Pies.
Des escrocs sans vergogne, qui contrôlaient d'une main de fer le quartier dans lequel ils s'étaient installés, écrasant de taxes les malheureux qui passaient sur leur territoire.
Et gare à celui qui ne pouvait pas payer...
Là aussi, un véritable massacre. Les cris avaient résonné entre les murs de leur bâtiment, faisant siffler ses oreilles. Le sang avait imbibé le parquet, digne d'un cauchemar venu tout droit des enfers. L'odeur avait été abominable ; teintée de fer et de déjections.
Rien qu'avec ces trois groupuscules, Inviat avait abattu une centaine de porcs.
Le suivant était le plat de consistance.
La guilde des Ombres sifflantes.
Ah ! Ces enfoirés...
Ils n'avaient pas vraiment de spécialités et représentaient sans doute la plus grande concurrence des Mercenaires Sanglants.
Ils tuaient, assassinaient, volaient, espionnaient, torturaient, manipulaient...et la liste était encore longue.
Avec eux, c'étaient encore une soixantaine de porcs qui disparaissaient.
Un joli petit bain de sang. Égorgements, empalements, étouffements...
Un joli petit concert de hurlements. Craquements, démembrements, écorchements...
Un joli tableau de corps à ses pieds. Terrifiés, horrifiés, désespérés...
Très jouissif.
A ce stade, il devait être un peu plus de midi. Et les exécutions avaient continué le reste de la journée. Mais le plus gros du travail était déjà fait.
Les Mercenaires Sanglants, avec l'aide de Yls, avait su rendre ses massacres discrets. Et avec l'aide de ses troupes, le Nocturne ne laissait sortir aucune information des Souterrains. Le stratagème serait efficace le temps de l'assaut.
Et maintenant, alors que minuit approchait, sa tache se terminait.
Plus qu'une seule.
Une seule organisation, et il en avait fini.
Les Souterrains en auraient fini.
Son allure se fit plus rapide, une traînée pourpre traçant un sillage de mort sur ses pas.
Un gémissement misérable vint troubler sa marche et lui arracha un soupire ennuyé. En roulant ses yeux, Inviat donna un méchant coup de pied dans le sac derrière lui. Une plainte étouffée lui répondit.
« Oh, la ferme !», cracha le Nécromancien.
Dans ce sac se trouvait Allan Treach, fils de Heym Treach, propriétaire de la demeure.
A croire qu'on était porc de père en fils, dans la famille.
Et ces lascars étaient particuliers. Inviat les avait gardé pour la fin. Le dessert.
Il les exécutait en dernier pour une raison.
Une excellente raison.
Plus personnelle.
Le fils était à la tête d'un vaste réseau de vol.
Un réseau de vol qui se servait d'enfants.
De jeunes enfants.
De jeunes enfants dont faisait partie Anas.
Ah, sa petite souris... Inviat n'oublierait jamais leur rencontre... Pauvre petit bonhomme, qui avait essayé de lui faire les poches le jour de son arrivée, et qui avait sans doute eu la peur de sa vie lorsqu'il s'était rendu compte à qui il avait affaire... Inviat sourit à ce souvenir.
Anas avait le regard de sa tante. Ce regard noisette qui finirait par se teinter de sang. Ce regard noisette qui aurait dû être rempli d'innocence.
Un regard noisette qui était pourtant terriblement marqué par les horreurs de sa courte vie.
Inviat serra les dents, son sourire aussitôt fané face à ce chemin de pensées.
Se servir de gosses pour de telles bassesses... Pitoyable.
Et le père Treach...
Inviat eut un frisson de dégoût. Et seuls les Six savaient à quel point il était difficile de lui inspirer cette émotion.
Le père...
Le père gérait un...commerce.
Un ignoble commerce.
De la pédophilie.
Il offrait les services de certains enfants dont se servait son fils, à des monstres venant de l'extérieur.
De sacrés monstres. Inviat s'était promis de les traquer eux aussi, et de leur offrir une mort à la hauteur de leur crime.
De sales monstres. Tous autant qu'ils étaient.
Les clients comme le fournisseur.
Heym Treach, ce salaud putride, exploitait sexuellement de pauvres enfants innocents. Et Inviat entendait bien lui faire payer son infamie.
De nouveau, le dégoût le traversa.
Bordel, c'était atroce.
Les corps mutilés ? Oh ! Il pouvait supporter. La torture aussi. Le meurtre et l'assassinat ? Ah ! Un passe-temps.
Mais de telles...actions sur des enfants ?
Non.
Cela le dépassait.
Ce putain d'Heym Treach avait de la chance de ne pas être en face d'Hyder...
Inviat eut un sourire cruel à cette pensée.
Son jeune frère ne serait-il pas le mieux placé pour s'occuper de cette pourriture ? Ah ! Oui, lui, il saurait s'occuper d'un monstre pareille, c'était certain. En bon défenseur des enfants qu'il était, Hyder s'occupait de ce genre d'individus dès qu'il le pouvait.
Mais très vite, Inviat changea d'idée.
Non, il s'en occuperait lui-même.
Après tout, il l'avait promis à sa petite souris. Et de toute manière, il était sans nouvelle d'Hyder depuis des années.
A ses côtés, Allan Treach avait cessé de se débattre. Il était étrangement silencieux.
Un peu trop au goût du Nécromancien.
Il n'était tout de même pas mort ? L'avait-il tant abîmé que cela ?
« Eh ! Ne va crever tout de suite, tu m'entends ? », fit Inviat en donnant un nouveau coup dans le sac.
Une plainte pitoyable lui répondit et une nouvelle tâche de sang apparut sur la toile déjà poisseuse du sac. Inviat ricana méchamment. Au moins, il était encore en vie.
Même si « être en vie » ne correspondait pas vraiment à l'état du fils Treach.
Ce serait plutôt « tabassé ».
Inviat ne l'avait pas loupé.
Le Nécromancien s'arrêta soudainement, en plein couloir.
Il en avait assez de chercher.
Il lâcha le sac à ses côtés, sa chute étouffée par les tapis. Le Nécromancien l'ouvrit et tira par les cheveux le fils Treach, son visage tuméfié et violacé transpirant de sang et de larmes.
Le corps n'avait rien à lui envier.
« Dis-moi où est ton paternel. », exigea Inviat, impérieux.
Un gargouillement sortit de la bouche craquelée de sa victime, du sang apparaissant aux coins de ses lèvres.
Ah.
Le dernier coup devait avoir brisé une côté, cette dernière ayant transpercé le poumon, provoquant une hémorragie interne... Oups ?
Inviat soupira et posa une main sur la gorge d'Allan. Pour le Nécromancien, contrôler le sang était aussi naturel que respirer. Douce ironie... Une petite pression de son pouvoir et la gorge du fils Treach était de nouveau libérée.
Inviat lui répéta son ordre, glacial.
« Il...Il devrait... ê_être dans son bu_bureau... à l'étage... », lâcha finalement Allan.
Le bureau.
Évidemment.
Inviat grogna.
C'était toujours ce putain de bureau.
Il fit demi-tour, ne prenant pas la peine de remettre l'autre dans son sac. Il serra ses doigts poisseux de sang dans le cuir chevelu d'Allan, qui, en se fiant à son agitation désespérée et ses hurlements d'épouvante, devait avoir compris ce qui l'attendait : une mort douloureuse.
Les cris, aux oreilles d'Inviat, sonnaient comme une douce mélodie.
Que le salaud qui servait de père à ce misérable tremble de terreur en l'entendant s'égosiller de la sorte.
Il réapparut dans le hall d'entrée. Et sans accorder la moindre attention aux corps des gardes de la demeure gisant au sol, il entreprit l'ascension des escaliers qui menaient à l'étage.
Chaque marche était ponctuée par les gémissements aigus d'Allan.
Et plus vite qu'il n'y parut au Nécromancien, la porte tant recherchée lui fit face.
Il enclencha la poignée. Un claquement retentit. Verrouillée. Avec un reniflement de dédain, Inviat s'éloigna légèrement, leva une jambe, et frappa.
La porte vola en éclat.
Un sourire féroce fissura l'air sérieux et sombre du Nécromancien.
La voie était libre.
Il entra calmement et s'immobilisa sur le pas de la porte. Il se retint avec difficultés de sautiller sur place. L'euphorie et l'adrénaline pulsaient dans ses veines.
Enfin, il tenait Heym Treach.
Les yeux verts d'Inviat, remplis d'excitation, se plantèrent immédiatement dans ceux, terrorisés, d'Heym Treach.
Debout, derrière son bureau, frémissant et livide, le propriétaire de la demeure semblait voir la Mort en personne. Inviat, en cet instant, se savait horrifiant.
Trempé de sang de la tête aux pieds, le regard fou et un sourire sadique sur les lèvres, il avait tout pour terroriser.
Il fit un pas vers sa proie.
« N'approche pas ! », hurla Heym Treach en pointant un doigt tremblant vers lui.
Inviat stoppa sa progression, amusé.
« Que veux-tu ? », hoqueta le propriétaire en se reculant contre le bord de son bureau.
Le rictus cruel d'Inviat s'élargit.
« Ta mort. », roucoula-t-il simplement.
L'autre pâlit davantage.
« Allan ? », gémit Heym en apercevant la forme aux côtés du Nécromancien.
Inviat avait oublié celui-là... Il jeta un coup d'œil au fils. Allan croassa faiblement.
Ah. Le sang semblait avoir de nouveau envahi sa gorge.
Le Nécromancien laissa tomber sa prise sur le parquet. Autant le laisser crever dans son sang, au sol, comme le porc qu'il était. Il en avait fini avec lui de toute manière, et sa principale cible était juste sous ses yeux.
Et sans autre forme de cérémonie, Inviat se jeta sur Heym Treach, enserrant son cou de ses doigts glacés pour le soulever dans les airs.
« Toi et moi, mon salaud, on va s'amuser un peu, tu veux bien ? susurra Inviat en enfonçant ses ongles dans la chair du père.
-Qu_Qui t'envoie ? », parvint à articuler Heym en agrippant les poignets d'Inviat pour essayer de le faire lâcher prise.
Il ne répondit rien.
« Tu...Tu vas...vraiment...me tuer... , comprit Heym Treach, les lèvres tremblotantes. P_Pourquoi ? »
Cette fois, Inviat laissa échapper un rire moqueur.
« Tu pensais sincèrement que tu allais pouvoir vivre de cette manière éternellement ? Que tes crimes resteraient impunis ? siffla Inviat avec dégoût et haine. Tu n'es pas le premier à y passer. Mais tu seras le dernier, promit-il avec malice. Je libère les Souterrains de cette influence putride que vous exercez, toi et les autres de ton espèce, sur les pauvres habitants de ces lieux maudits. Cependant... » Il resserra sa prise et obtint un hoquet sec de sa victime. « ...ce qui m'amène en ces lieux est plus personnel...
-Q_ ? »
Inviat n'attendit pas d'attendre la fin de sa question. Avec violence, il plaqua la tête de l'homme contre le bureau.
« Laisse-moi te raconter une petite histoire... siffla Inviat, la voix dure et cassante. Il était une fois, un petit garçon de six ans qui vivait avec sa famille dans les Souterrains : sa mère et son frère aîné âgé de dix ans. Or, vois-tu, ils étaient pauvres. Très pauvres. Comme la plupart des habitants ici... Après tout, les pourritures comme vous qui s'enrichissent sur le dos des autres ne courent pas les rues en ces lieux... Enfin, façon de parler... Et donc, pour pallier à leurs besoins, le petit garçon et son frère durent se résoudre à travailler... Je suppose que tu vois où je veux en venir, n'est-ce pas ? », cracha-t-il, une envie de meurtre lui serrant le cœur et les tripes.
Sous ses doigts, Heym Treach tremblait plus que jamais.
« Alors que le petit garçon offrait seulement ses services à ton connard de fils, son frère, hélas, n'eut pas cette chance... Il tomba également sous ta coupe...et mourut suite aux atrocités que son corps subissait à cause de toi et de ton sale commerce.
-P_Pitié... Je_ », supplia Heym en pleurnichant.
En un mouvement fluide, Inviat souleva la tête de sa proie pour l'écraser une nouvelle fois sur le bureau. Sa victime poussa un cri de douleur tandis que du sang commençait à s'étaler sur le meuble : le Nécromancien lui avait brisé le nez et ouvert l'arcade sourcilière.
« Chut, chut, chut, souffla Inviat, la voix faussement douce. Je n'ai pas fini. Je disais donc... Le frère mourut. Et le jeune garçon se retrouva seul avec sa mère. Deux ans s'écoulèrent, il avait huit ans. Il avait continué à travailler pour ta sale engeance...car on ne sort pas facilement et intact de ton réseau. Et un jour, tes yeux, comme ils s'étaient auparavant portés sur son frère, se portèrent sur lui : tu l'entraînas dans ton enfer. Ou plutôt, tenta. Car son premier...client... » Le ton d'Inviat se fit acide. « ...un de ses sales vers putrides...ne se déroula pas comme prévu. Le petit garçon se débattit et réussit à blesser cet enfoiré. Il sortit presque intact de cette rencontre. J'ai dit : presque. En guise de punition pour s'être attaqué à ton si précieux client, tu lui offris une raclée d'une violence terrible pour un si jeune âge. Il en garda des cicatrices. Et à cause de ces dernières, tu le décrétas inapte aux tâches que tu prévoyais pour lui. Comble de l'ironie, ta sanction le sauva d'un sort bien pire... »
Inviat fit une pause et examina l'insecte qu'il avait à sa merci.
Quelle loque.
Le dégoût qu'il lui inspirait était immense.
« Ce jeune garçon se nomme Anas. Cela te rappelle-t-il quelque chose ? », siffla le Nécromancien en resserrant sa prise.
L'image d'Anas, roué de coups par ce lâche, le poussa presque à lui planter ses dents dans la nuque pour l'égorger sur place, et sentir la vie le quitter tandis qu'il lui déchiquetait la gorge.
L'image d'Anas, sous les mains de son premier client, lui donna envie de vomir et de libérer sa fureur sur l'ignoble connard qui avait osé le toucher de cette manière.
L'image d'Anas, pleurant dans ses bras pendant qu'il lui racontait son histoire, lui rappela les raisons de sa venue en ce lieux.
Heym Treach secoua la tête à la négative, larmoyant et puant.
Il s'était pissé dessus.
Ce salaud méritait tellement plus que la mort... Toutes les punitions qui venaient à l'esprit d'Inviat lui semblaient trop clémentes et douces...
Toutes, sauf une.
« Mauvaise réponse, lâcha Inviat avec un grognement bestial, la soif de sang lui tordant le ventre et lui injectant une pique de douleur dans les dents. Quoique, aucune de tes réponses n'auraient été satisfaisantes à ce stade... Et pour ce qui est d'Helena, de Rick, de Samuel, d'Anna, de Phil et de Rachel ? Qu'en est-il de Quin, le frère d'Anas ? Rien non plus, n'est-ce pas ? », vociféra Inviat, en le secouant contre la table.
Seul le bruit de sanglots lui répondit.
Oh, ce monstre n'avait pas le droit de pleurer...
Ses canines démangeaient Inviat. Elles ne demandaient qu'à se planter dans la chair si tendre et si invitante du cou d'Heym...
Mais Inviat ne devait pas régler la chose en tant que Vampire.
« Je vais te faire regretter de les avoir oublié.», chuchota-t-il, ses mots remplis de rage, de ténèbres et de promesses.
Des promesses de souffrances infinies.
Le Nécromancien le lâcha et fit quelques pas en arrière.
Heym resta prostré sur la table, transi de peur.
Inviat le toisa sans parole, gravant dans sa mémoire cette posture, cet air catastrophé et dévasté. Il regrettait presque de ne pas avoir pris Anas avec lui pour qu'il observe la scène. Mais Inviat savait que l'écarter de l'action était lui rendre service.
Anas avait vu trop d'abominations dans sa courte vie.
Anas, au vu de son identité, verrait trop d'abominations dans le futur.
Autant lui épargner celle-la.
Inviat brisa le silence, sa voix tombant tel un couperet, comme une sentence de mort :
-Il est tout à vous.
Lentement, l'air se fit glacial. Du gel se forma sur les murs. Le souffle rythmé d'Inviat et les halètements paniqués d'Heym flottèrent devant eux.
L'atmosphère se fit pesante. Un silence de plomb, seulement brisé par la respiration des deux hommes, tenait la pièce d'une main de fer.
Et soudainement, répondant à cette autorisation, des formes laiteuses, menues mais imposantes, se dessinèrent aux côtés du Nécromancien.
Les spectres.
Des Enfants.
Helena.
Rick.
Samuel.
Anna.
Phil.
Rachel.
Et enfin, Quin.
Leurs traits juvéniles se firent plus clairs. Leurs yeux d'encre se firent plus accusateurs, haineux, vengeurs. Leurs plaies, striant des corps parfois nus, se firent plus pourpres, plus prononcées, plus indélébiles.
Dans un même mouvement, ils avancèrent vers celui qui avait ruiné leur vie.
Dans une même voix, leurs murmures envahirent le bureau.
« Pourquoi ? »
Heym Treach, livide comme jamais, observait d'un air impuissant les spectres vengeurs.
« Pourriture. »
Comprenant son sort, le père Treach gémit et se laissa glisser par terre. L'effroi donnait à son visage un masque grotesque.
« Assassin. »
A chaque mot, Heym Treach sursautait, comme frappé par un coup violent.
« Monstre. »
Bientôt, les morts l'entourèrent et le toisèrent de leurs regards sans vie.
L'homme implora Inviat, resté en retrait :
-Pitié...
Écœurant.
« Dis-moi, Heym Treach...souffla le Nécromancien, plantant ses yeux dans ceux de l'homme. As-tu eu pitié d'eux ? »
Et sur ces dernières paroles, les spectres passèrent à l'action.
Un cri à glacer le sang retentit. Se tordant de douleur, Heym Treach s'éleva dans les airs. Un craquement sinistre se fit entendre, et ses membres se tordirent en tout sens.
Mais le pire restait à venir.
Ses cris se transformèrent en hurlements stridents, remplis de douleur et de terreur. Lévitant verticalement, ses membres en miettes dégoulinant de sang, Heym Treach subissait une punition digne de ses crimes : l'écartèlement.
Les fantômes, comme une seule entité, levèrent leurs mains.
« Meurt. »
Ils serrèrent leurs poings.
La cage thoracique d'Heym Treach éclata. Le sang et les boyaux giclèrent. Ses bras et ses jambes volèrent aux quatre coins de la pièce.
Ainsi mourut Heym Treach.
Ainsi, justice fut rendue.
Inviat, durant toute la scène, n'avait pas esquissé le moindre geste. Il savait que la mort d'Heym Treach n'appartenait qu'aux esprits vengeurs. Et dans la mort, si la Grande Faucheuse le permettait, ils continueraient de martyriser son âme damnée.
Un à un, les fantômes se positionnèrent devant lui. Ils avaient désormais une expression apaisée et reposée. Avec un hochement de tête et quelques sourires, ils disparurent.
Seul un resta.
Quin, le frère d'Anas.
La tête d'Heym Treach dans ses mains translucides, il observait Inviat avec réserve et neutralité.
Il n'avait pas encore trouvé la paix.
« Prenez soin d'Anas, s'il-vous-plaît. », demanda-t-il avec sévérité.
Inviat hocha la tête, les sourcils froncés.
« Et dites-lui la vérité. »
Inviat serra les dents, récalcitrant.
« Il mérite de savoir. Je méritais de savoir. », insista Quin, glacial.
Ils méritaient surtout d'avoir une vie remplie de bonheur et joie. Mais l'un était mort et l'autre n'aurait qu'une existence remplie de manipulations, de complots et de sang.
Inviat baissa le regard, un sentiment de culpabilité inhabituel lui serrant le cœur.
« Je suis désolé, lâcha-t-il. Si j'avais su, je_
-Je serai mort tout de même, le coupa Quin. Vous, plus que quiconque, savez que l'appel de la Mort est irrésistible. »
Oui, Inviat le savait.
« Prenez soin d'Anas. Et dites-lui la vérité. »
Et il s'évapora, son trophée avec lui.
Le Nécromancien se passa une main sur le visage.
La vérité... La réputation de beauté et de pureté qui la suivait était une illusion instable.
La vérité n'était pas que paix et harmonie.
La vérité pouvez être peine, haine, terreur et rage.
C'est ce qu'elle serait pour Anas.
« Ikitav. »
Une voix d'outre tombe s'était élevée devant lui. Inviat leva les yeux jusqu'à croiser son interlocuteur.
Assis sur le bureau, une jambe repliée contre son torse et l'autre pendant dans le vide, une apparition vêtue d'une longue cape noire, un capuchon rabattue sur le visage, lui faisait face. La faux stylisée, qu'il tenait lestement contre lui, suffisait à deviner sa nature.
Un Faucheur.
« Hadès. », le salua Inviat.
Ils se jaugèrent un instant, sans rien dire.
« Ikitav... Tu n'en as encore fait qu'à ta tête, sans penser aux conséquences. », fit Hadès de sa voix sombre et profonde.
Le Faucheur, avec un mouvement du poignet, fit apparaître une feuille et une plume, qu'il saisit avec délicatesse. Une liste. D'un geste vif, il barra deux noms.
« Tu nous as apporté bien du travail, aujourd'hui... J'ose espérer que les raisons d'un tel chaos sont légitimes...
-Elles le sont. », répondit froidement Inviat.
Secouant la tête, Hadès rit doucement.
« Tu causes bien trop d'ennuis à mon goût... J'aurais cru qu'avec le temps, tu aurais appris à ne pas te mêler des affaires des Mortels... et à ne pas te rebeller contre Sa volonté. »
-Tu sais bien qu'Elle n'a que faire de mes actes.
-Soit. Mais tes incessantes actions dans le monde des vivants n'apportent que des problèmes dans les Limbes. Et les prochains jours seront eux aussi lourds en victimes...et tu n'y seras pas pour rien. La Mort est neutre, Ikitav. Tu sembles oublier ce point bien trop souvent.
-Je fais ce qui me plaît, Hadès. Tu sembles oublier ce point bien trop souvent..., rit Inviat en croisant les bras sur son torse.
-Ne joue pas à ça avec moi, Ikitav. Ta part dans ce conflit ne fera que compliquer les choses... Tu ne peux pas intervenir.
-Je ne peux pas, ou je ne dois pas ? ricana Inviat en plissant des yeux.
-Ikitav... le prévint le Faucheur.
-Hadès, répliqua Inviat. Sache que je ne suis pas là en tant qu'Ikitav, mais en tant qu'Inviat. Alors cesse de me faire chier et retourne dans les jupes de ta Maîtresse. »
Les deux s'affrontèrent du regard silencieusement. Enfin, Inviat imagina qu'Hadès l'affrontait du regard. Difficile à savoir avec son capuchon.
« Quels qu'ils soient, je te conjure de changer tes plans. », demanda Hadès avec sévérité.
Inviat ricana légèrement. « Conjurer » et Hadès ne faisait pas bon ménage ensemble... A croire que le Faucheur tenait absolument à ce qu'il revienne sur son idée.
« Voyons, je pensais pourtant avoir été clair... Je ne changerai pas d'avis, Hadès. Ma décision est irrévocable. »
Inviat le vit serrer les poings et les mâchoires.
« Tu commets une grave folie. »
Le Nécromancien haussa les épaules.
« Ne va pas me faire croire que ça n'est jamais arrivé auparavant... », fit-il avec amusement.
Hadès resta silencieux un moment.
« Hélas, non.», répondit-il avec agacement.
Inviat haussa les épaules.
« Et donc... Que me vaut l'honneur de ta présence ? Ne me dis pas que je te manque tant que ça... », rigola-t-il.
Même s'il ne voyait pas les yeux de son interlocuteur, le Nécromancien savait parfaitement qu'en cet instant, il le foudroyait du regard.
« L'un de tes frères tuera beaucoup de monde, dans les prochains jours. Il participera à ta sombre entreprise...», le prévint-il au bout d'un moment.
Inviat ne chercha pas à cacher sa surprise.
Lequel ?
Lequel de ses frères allait bien pouvoir faire une chose pareille ? Hyder ? Non... Des années qu'il hibernait... Seth ? Absurde. Il ne voulait plus rien avoir à faire avec Quantamoniam. Ne restait plus que...
« La boule de poils ? »
Le Faucheur acquiesça imperceptiblement. Inviat rejeta la tête en arrière et éclata de rire.
« Si on m'avait dit qu'une chose pareille arriverait un jour, je n'y aurais pas cru ! Tous les deux, on s'entend comme chien et chat ! »
Et le Nécromancien ricana à la blague qu'il avait faite inconsciemment.
« Chien et chat..., pouffa-t-il. Oh oui. Il faudra que je lui répète...
-Ikitav. Tu ne sembles pas réaliser la gravité d'une telle situation. Que ton frère, un gardien de la vie, participe à cette guerre, c'est_
-Catastrophique ? le coupa Inviat avec mépris. Oh, voyons, tout est catastrophique avec toi !
-Ikitav ! pesta le Faucheur en élevant la voix. Tais-toi, et laisse-moi parler. Les Dieux ont décidé d'intervenir. Sais-tu ce que cela signifie ? Ils vont envoyer des Désastres. Comme lors de l'incident avec Dodrémont. »
Inviat balaya le problème de la main.
« Et alors ?
-Et alors ? Par les Six ! Ne te mêle pas des affaires des Dieux, Ikitav ! Tu sais ce que tu risques ! La punition qu'Elle t'a infligé la dernière fois ne t'a pas suffi ? »
Le Nécromancien sourit sinistrement.
« Il faut croire que non...
-Ikitav... Tes actes auront des répercussions que tu ne peux mesurer. Ce conflit est beaucoup plus important que tu ne l'imagines. Toi et tes frères ne devaient pas y prendre part.
-Trop tard ! rit Inviat, grisé par les événement de la journée. Seth est déjà impliqué, je le suis aussi, et Kaï également, dorénavant ! Tu ne peux pas nous empêcher de faire ce qu'il nous plaît ! Rien ne le peut.
-Seth ? s'exclama avec inquiétude Hadès. Par la faux du Faucheur originel... Quand apprendrez-vous qu'il n'arrive rien de bon lorsque vous vous mêlez d'affaires qui ne vous regardent pas ?
-Jamais, fit Inviat, un sourire rayonnant sur les lèvres. Et tu te trompes... Cette histoire ne nous est pas étrangère. »
Et sur ces derniers mots, le Nécromancien tourna le dos à Hadès, le démissionnant.
« Tu le regretteras, Ikitav... Tu le regretteras... Estime-toi chanceux d'être Son favori. », termina le Faucheur avant de disparaître.
Inviat ricana doucement.
Hadès ne changerait jamais. Ce gêneur n'avait pas fini de lui rabattre les oreilles avec ses remarques... Des millénaires qu'il le faisait, alors pourquoi s'arrêter en si bon chemin ?
Inviat était drainé.
Il empestait, il dégoulinait de sang, qui était séché à certains endroits, et son corps endolori le suppliait d'aller se coucher.
Mais le sommeil devrait attendre encore un peu.
Il sortit une montre à gousset d'une de ses poches.
Minuit passé... Il sourit. Une dernière chose à faire, et il pourrait profiter d'un repos bien mérité.
∞
Trottinant silencieusement dans une rue déserte des Souterrains, une silhouette avançait dans l'obscurité éclairée par les lampadaires.
Un peu plus loin sur son chemin se dressait un bar éclairé d'où sortaient des exclamations enthousiastes.
Il y avait foule là-bas.
L'agitation qui animait le lieu était palpable.
Jouant des coudes pour pouvoir entrer, l'individu se trouva une place dans un coin et abaissa sa capuche, révélant par la même occasion son visage d'enfant et ses yeux noisettes. Anas promena un regard sérieux sur les alentours et s'adossa paresseusement contre le mur.
Debout sur le comptoir, surmontant la foule et s'exprimant avec de grands gestes, se tenait un homme. Léo Graham. Depuis des années, il était connu dans les Souterrains pour ses idées révolutionnaires. Il était à la tête du plus grand groupe dissident ici bas.
« Mes frères, mes sœurs ! Pendant bien trop longtemps, nous avons courbé l'échine ! Pendant bien trop longtemps, nous nous sommes contentés de survivre plutôt que de vivre comme nous le méritons ! Pendant bien trop longtemps, nous sommes restés impassibles face aux atrocités que nous subissons ! Mes frères et sœurs, il est temps de prendre notre destin en main ! »
Des hurlements approbateurs répondirent à l'homme qui parlait.
Anas continua d'examiner la scène, un léger sourire sur les lèvres. Il ne comptait plus le nombre de réunions similaires auxquelles il avait assisté ces deux derniers jours... Un feu semblait s'être ravivé dans les Souterrains ces temps-ci, échauffant les volontés et réveillant des colères enfouies. Et les autorités n'avaient toujours pas agi pour réprimer ces actions, comme elles l'avaient si bien fait auparavant. Non, les soldats ne faisaient rien pour empêcher leurs rencontres. Ils semblaient occupés par autre chose.
Son sourire s'agrandit en sachant que son protecteur devait avoir sa part de responsabilité dans une telle réaction.
« Combien ont souffert de la faim et de la soif ? Combien ont dû commettre des actes ignobles pour survivre un peu plus ? Combien sont morts comme des chiens ? Beaucoup trop ! Et que font les gens de la surface en attendant ? Ils vivent sur nos souffrances et sur nos morts ! Ils nous exploitent, nous, nos hommes, nos femmes, nos frères, nos sœurs, nos enfants ! Cela ne peut plus durer ! »
Une nouvelle vague de cris emportés s'éleva. Anas, lui, serrait les poings. Les paroles de l'homme trouvaient un écho dans chaque personne ici présente, mais chez lui, ces paroles avaient aussi l'effet d'un coup de poignard.
Léo Graham avait bien trop raison.
Affreusement raison.
« Nous ne pouvons pas continuer à espérer que les choses changent sans rien faire. Un tel espoir n'est plus permis. L'attente n'est plus permise. Si nous voulons que cette situation évolue, nous devons agir de nos mains ! Réclamons ce qui nous revient de plein droit ! Réclamons la vie que nous méritons ! Assez d'être traités comme des chiens ! Assez d'être traités comme des insectes ! Assez d'être traités comme des esclaves ! »
Léo Graham avait hurlé ces derniers mots et avait levé le poing dans un geste rageur. La foule lui répondit d'un même mouvement.
« Prenons les armes ! Prenons notre liberté ! Prenons notre existence en main ! Décidons de notre destin ! cria Léo Graham.
-A bas la tyrannie ! », vociféra la salle.
Et dans une action collective, ils levèrent leur coupe d'alcool et la portèrent à leurs lèvres. Même Anas eut son verre, qu'il avala goulument. Dans les Souterrains, un enfant buvant de l'alcool n'avait rien d'anormal. Même lorsque le pichet de bière paraissait énorme comparé aux petites mains qui le tenaient avec maladresse.
« C'est bien beau ces paroles, Léo, mais ce sont celles d'un optimiste. », fit une voix sur la gauche d'Anas.
C'était une vieillarde. La vieille Igrid. Sûrement la plus âgée ici. Et l'une des plus sages. Tous, dans les Souterrains, lui vouait un grand respect. Et une grande affection, comme le prouvait le surnom qui l'accompagnait partout où elle allait : mémé Igrid.
« Parle, mémé Igrid. Fais-nous partager ton avis. Tes mots sont toujours dignes d'intérêt. »
La vieille se leva doucement et s'appuya sur sa cane. De son seul œil valide –l'autre était aveugle depuis déjà longtemps.−, elle balaya l'assistance.
« Tu appelles à la violence et à la révolte. Tu crois qu'en nous rebellant, la situation s'améliorera. Je suis une vieille carne bien décharnée, et tu n'es pas le premier à vouloir mener cette entreprise. Et des actions pareilles ont toujours été sévèrement réprimées par le passé. Qu'est-ce qui est différent aujourd'hui ? Qu'est-ce qui te fait penser que nous serons gagnants cette fois-ci ? Avec quelle armée vas-tu conquérir notre liberté ? Celle des Souterrains ? Avec ces hommes-là ? » Elle montra de sa main la foule devant elle. « As-tu des armes à ta disposition ? Un plan ? » Elle secoua la tête. « Je ne doute pas de ta volonté, Léo, mais de tes moyens. Dans l'état actuel des choses, tu cours droit au massacre. »
Un silence accueillit ses paroles. Les visages s'étaient refermés et tous examinaient leur verre avec moins d'engouement.
Anas fronça les sourcils et serra les poings.
Lentement, il se leva à son tour et se tourna vers la vieille Igrid.
« Moi, j'ai tout perdu. Ma maison, mon père, ma mère, mon frère...tout. Y'a encore peu, j'avais même perdu l'espoir de vivre. Donc, j'ai plus rien à perdre. Et j'suis pas le seul dans ce cas. On a pas d'armée ? On a qu'à s'en créer une ! Pas d'armes ? C'est pas c'qui manque dans ce trou à rat ! Pas de plan ? On peut en trouver un aussi ! »
Anas reprit son souffle et cligna plusieurs fois des paupières pour chasser les larmes qui commençaient à s'entasser aux coins de ses yeux.
« C'est vrai, mémé Igrid. Rien n'est différent par rapport à tes anciens jours où t'étais toi aussi une môme. Et c'est là le problème. Les femmes continuent d'se prostituer pour nourrir leur famille. Les hommes continuent d'se tuer la santé pour nourrir leur famille. Les gosses comme moi continuent de voler, et même pire, pour nourrir leur famille. Et j'en ai marre! » Anas laissa échapper un sanglot et ne chercha pas à le retenir. « Est-ce qu'on va continuer à trimer et crever comme des chiens ? Est-ce qu'on va continuer à s'laisser marcher dessus sans rien faire ? Moi, j'peux pas ! Il faut tenter queq' chose ! Quitte à mourir, autant le faire en s'battant et en s'défendant ! »
La respiration d'Anas était rapide et sa vision était floue en raison des larmes qui noyaient ses yeux. Mais il ne fit pas un geste pour les essuyer. Il continuait de fixer l'assistance pour graver ses paroles dans leur esprit.
Soudain, un applaudissement chaleureux s'éleva juste à côté d'Anas, le faisant sursauter.
« Voilà ce que j'appelle un beau discours. Ma petite souris ici présente vous à tous les deux battu à plate couture sur ce coup-là ! », déclara Inviat en souriant malicieusement et en posant une main affectueuse sur la tête du petit, qu'il ébouriffa copieusement.
Avant de rejoindre le bar, il s'était changé et arborait désormais une chemise immaculée.
Seule trace de ses activités précédentes ; du sang séché traînait de-ci de-là dans ses mèches brunes.
Anas leva son visage vers lui et lui sourit d'un air complice.
Inviat se concentra de nouveau sur les gens qui lui faisaient face et haussa un sourcil en voyant qu'ils étaient tous muets de stupeur devant lui.
Eh bien quoi ? Il était pourtant sûr de s'être suffisamment nettoyé pour ne pas attirer l'attention avant de venir ici...
« Le Sauveur... », murmura finalement une personne.
Ah.
Oui, cela pouvait également expliquer leur réaction... Après tout, son identité n'était plus vraiment un secret : ces deux derniers jours, il n'avait pas pris la peine de cacher qui il était lorsqu'il participait à de telles rencontres.
Très vite, des murmures enjoués et admirateurs remplirent la salle. Inviat soupira. Non, étrangement, la célébrité n'avait jamais été vraiment son genre... Il effectua une tape réconfortante sur les cheveux d'Anas et s'avança dans la foule, les gens s'écartant immédiatement pour lui faciliter le passage.
Bon... Il devait avouer que sa popularité avait aussi ses bons côtés...
Arrivé à côté de Léo Graham, Inviat le salua d'un bref hochement de tête avant de s'adosser contre le comptoir.
Un silence respectueux tenait le bâtiment.
Inviat prit une longue inspiration. Il savait ce qu'on attendait de lui : de belles paroles. Même s'il était indéniablement doué pour les faire, il ne pouvait s'empêcher de vouloir avoir Seth à ses côtés pour le remplacer... Ce gaillard-là, quand il magnétisait les foules... C'était d'un tout autre niveau. Mais hélas, pas de ce bon vieux frérot pour lui éviter cette corvée.
Inviat prit une attitude sérieuse. Une rare exception.
« Commençons tout d'abord par un point particulier...Vous avez dû remarquer une hausse d'activités au niveau des gardes aujourd'hui... » Il se rattrapa, se rappelant qu'il était plus de minuit. « ... ou plutôt hier. C'est parce que nos très chers amis cachent mes petites affaires. L'élimination des groupuscules qui tenaient les Souterrains. Je m'en suis personnellement occupé. »
Une vague d'agitation traversa son auditoire. Il observa Anas, qui semblait sous le choc.
Ce ne fut qu'une fois le calme revenu qu'il reprit :
-Ensuite, sachez que ce qu'a dit la vieille Igrid est tout à fait pertinent. En nous lançant tels que nous sommes dans la bataille, nul doute que nous nous ferons écraser.
Des murmures perturbés s'élevèrent. Inviat les ignora.
« Cependant... Léo et Anas ont tous deux également parfaitement raison. Je suis las de voir les Souterrains dans cet état. Comme ils l'ont si bien dit, vos conditions de vie sont misérables. Je ne vais pas les répéter alors que vous êtes les mieux placés pour les connaître. Toutefois, vous semblez tous oublier un point primordial... »
Il se tut un instant en songeant avec amertume à l'événement qu'il allait évoquer.
« Avant la création du dôme, les Souterrains étaient déjà un dépotoir pour ceux de l'extérieur. Ils comportaient surtout des réfugiés à l'époque...» Sa voix se fit lointaine. « Comme vous le savez, la protection de Quantamoniam s'est payée par un lourd tribut. Mais pas par la cité. Par vous. Les victimes se sont comptées en milliers. Hommes, femmes, vieillards... » Ses yeux se portèrent sur Anas, qui avait repris du poil de la bête. « ...enfants. On aurait pu croire que les habitants de la surface auraient alors traité avec compassion, si ce n'est gratitude, les survivants de ce cataclysme. Une pensée bien naïve. Ils préférèrent les laisser croupir sous leurs pieds en se persuadant que leur honte et leur culpabilité n'avaient pas lieu d'être. Et aujourd'hui, le même phénomène se perpétue. Vous avez donné votre lot de sang. Vous avez donné votre lot de vie. Vous avez donné votre lot de sacrifice. Vous méritez plus que tout autre de connaître la chaleur du soleil sur votre peau, de sentir la force du vent dans vos cheveux et d'observer le monde extérieur. Des siècles que je vois cette cité aux fondations pourries et monstrueuses. Des siècles que je la vois sur cette montagne, étrange beauté à la laideur intérieure. Des siècles que je rêve de la voir unie et soudée. »
Un silence ému régnait sur la salle. Un sanglot étouffé le brisa. C'était mémé Igrid.
« Oh... Tu es un bien bel optimiste, mon garçon... Le meilleur que j'ai vu. », murmura-t-elle en secouant la tête, les yeux brillant d'émotions.
Inviat lui sourit. Comme il aurait aimé que Seth assiste à cette scène...
« Appelle-moi optimiste si tu le souhaites, vieille Igrid. Ah ! Tu peux même m'appeler rêveur si ça te chante ! Mais je te jure, je vous jure, que dans une semaine, les Souterrains seront libres.
-Et comment comptes-tu réaliser ce miracle ? l'interrompit Léo Graham en s'asseyant sur le comptoir, juste à côté d'Inviat. Comme l'a si bien remarqué mémé Igrid et toi-même, nous ne sommes pas en état pour un tel combat. Et je doute que nous le soyons dans une semaine, si ce n'est des mois ! »
Tous le dévisagèrent avec attention, attendant ce que le Nécromancien allait bien pouvoir proposer.
« Nous y voilà... », songea-t-il avec un sourire mystérieux.
« Pour ce qui est d'une armée, j'en ai une à disposition... Il en va de même pour les armes et un plan pour conquérir la surface. »
Des chuchotements sceptiques lui parvinrent.
« Que veux-tu dire par là ? », lâcha Léo Graham, soucieux.
Inviat croisa le regard d'Anas. Il lui souriait d'un air entendu.
« Il est temps de lâcher la bombe... », s'amusa Inviat en fermant les yeux un instant.
Lorsqu'il les rouvrît, toute la salle l'observait avec impatience.
Ce moment resterait dans l'histoire de la cité.
Celui où les Souterrains avaient fait leurs premiers pas comme zone libre.
Il prit une voix mielleuse :
-Je suppose que vous connaissez les Draconiques ?
Note: ...Alors x) ? J'avais raison de prévenir ou pas :') ?
Je me suis fait plais' sur ce chapitre :D ! Ca fait du bien d'écrire du point de vue d'Inviat :3 ! J'espère que ça vous aura plu !
De l'action, donc ! (du sang aussi !) Ca bouge enfin ! Youpiiii !
Avec l'arrivée le massacre des groupuscules, la voie est libre pour les Draconiques ! Champagne ! Ca se fête ! *ouvre une bouteille* Je vous préviens, plus que deux chapitres avant le début de l'assaut ;) ! Avec sûrement une interlude (encore, oui x") ! Mais c'est pour la bonne cause :p !)juste avant.
Donc C-2 avant le chapitre C :D ! (chuuuuuuuuut je tente des trucs :p !)
YEY !
Donc, dans ce chapitre, pleins de petites infos cachées de ci-de là :3 ! Sur Anas (le pauvre coco, j'ai pas été cool avec lui, hein :""D ? Je suis affreuse !), sur Inviat, sur ce fameux "Elle" (les plus forts devineront :p ! C'est pas difficile, vous inquiétez pas XD !) etc !
D'ailleurs, un avis sur tout ça :D ?
Le prochain chapitre sera plus court et...et je vous en dis pas plus ! Encore de l'action :) ! Et de nouveaux personnages !
YEY :D !
(peut-être que l'interlude passera du coup... Hum... A voir !)
Allé, sur ce, je pars au dodo :D !
Gros poutou !
Ps: Note moyenne pour un chapitre de taille moyenne ("seulement" 13 page sur Open, c'est rien :p !)!
Ps2: Désolé, il risque d'y avoir pas mal de fautes ! J'essayerai de me relire demain !
Ps3: J'avais prévu de dédicacer ce chapitre, mais finalement, vu le contenu, je me suis dit:"Euh...ouais, non, on attendra le prochain XD !"!
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