Chapitre 23 (partie 1):

Il pleuvait.

La pluie battait les carreaux de la fenêtre durement, les gouttes glissant avec une certaine maladresse sur la vitre.

Dehors, les gens cherchaient à s'abriter, que ce soit sous des parapluies, qui s'agitaient face au vent, ou encore sous des protections plus fiables, telles les toits de bâtiments, qui offraient chaleur et nourriture.

Avec un soupir, Drakaïs appuya son front contre la vitre froide de la fenêtre, de la buée venant brouiller sa surface.

En se concentrant, elle pouvait voir le reflet de sa chambre.

Deux lits, dont l'un était impeccablement  fait tandis que l'autre n'était qu'un fouillis de draps et de couvertures en désordre. Des vêtements éparpillés sur une commode dans un coin. Une longue étagère plaquée à côté de la porte. Quelques livres, empilés les uns sur les autres et trônant sur sa table de nuit.

Et cette vue monotone commençait sérieusement à l'ennuyer.

Une semaine. Sept jours. Cent soixante huit heures. Et un nombre astronomique de minutes. Et plus encore de secondes.

Voilà ce qui s'était écoulé depuis que Drakayn et elle avaient quitté la guilde. Ce qui s'était écoulé depuis qu'elle restait cloîtrée à l'auberge.

Et quel que soit l'angle sous lequel Drakaïs observait la chose, elle arrivait au même constat : le temps passait lentement.

Car Drakayn et les autres n'étaient pas revenus sur leur décision; au contraire ! Ses protestations n'y avaient rien changé: elle devait toujours faire profil bas jusqu'à l'assaut.

Un nouveau soupir lui échappa.

Drakaïs aurait aimé leur en vouloir mais elle savait qu'ils avaient raison. Elle l'avait toujours su. Mais à présent, elle l'acceptait. Ce qui était complètement différent. Alors, avec résignation, elle avait compris qu'elle devait faire ce qu'ils lui demandaient, que c'était la meilleure solution à choisir.

Mais quitte à rester cloîtrer dans une auberge à jouer le soldat obéissant, autant en profiter.

Avait alors commencé son entraînement à la magie.

Et contrairement à Drakayn, elle possédait quelqu'un dans son entourage qui était en moyen de l'aider : la Dragonne. La créature si présente dans son esprit n'était pas si nuisible que cela...Elle savait trouver son utilité.

Et les séances que lui soumettait son mentor étaient épuisantes.

Drakaïs s'était attendue à beaucoup de choses lorsqu'elle avait demandé de l'aide à la Dragonne, mais certainement pas à...ceci.

Adieu les longues leçons sur ce qu'était la magie. Adieu les grands discours sur les limites et les règles auxquelles se plier pour se former à la magie. A la place, la Draconique avait découvert des entraînements exigeants et extrêmement drainants. La jeune fille ne comptait plus les courbatures qui endolorissaient ses muscles et les blessures mineures qui parcouraient sa peau. Car pour le moment, il s'agissait plus de faire appel à son corps qu'à son esprit.

« Contrôle ce qui te sert de corps. Une fois que tu le connaîtras et que tu l'auras endurci, tu auras fait un nouveau pas dans ton apprentissage. » Voilà ce que lui répétait sans cesse la Dragonne.

S'ensuivait des séances exténuantes qui perlaient sa peau de sueur et des jurons colorés qui venaient résonner dans la pièce vide. Des exercices d'étirement, de musculation et d'endurance.

Une vraie joie.

Et le despote qui lui servait de guide ne lui laissait quasiment aucun répit. De courtes pauses de quelques minutes et suffisamment d'heures pour dormir et manger, mais le reste était une vraie torture.

Et elle était justement en train de profiter de l'une de ces rares pauses.

Sa poitrine se soulevait d'un rythme apaisant et le front collé contre la vitre froide, Drakaïs s'offrit un court moment de calme. En fermant les paupières, un doux sourire sur les lèvres, elle s'autorisa à ne plus penser à rien. Juste...se détendre.

Le silence l'entourait.

Ou presque.

Elle pouvait entendre la pluie qui tombait dehors. Elle pouvait entendre le fourmillement de l'auberge au-dessous d'elle. Elle pouvait entendre l'escalier qui craquait. Elle pouvait entendre les pas d'une personne, qui se dirigeait vers sa chambre...

Brusquement, elle rouvrit les yeux, ses sens tous en alerte tandis qu'elle se tournait vers la porte de sa chambre, sa main portée à la dague qui ornait sa ceinture.

Et aussi soudainement que les pas s'étaient approchés de sa chambre, ils la dépassèrent. Alors seulement, elle s'autorisa à se relaxer.

Mais le charme était brisé. Impossible de retrouver la paix après un tel événement.

De nouveau, un long soupir quitta ses lèvres.

Cette paranoïa qui l'habitait constamment commençait à être usante. Toujours être sur ses gardes. Toujours. Une leçon qu'elle avait apprise il y a un moment déjà, mais qu'elle avait oubliée ces derniers temps.

Comme lors de l'aventure avec le Chasseur.

Elle fronça les sourcils.

Elle ne ferrait plus cette erreur.

Trei Kinger.

Un Chasseur plutôt renommé dans le milieu de la chasse aux Draconiques. Mais Drakaïs ne s'y était jamais intéressée. Trop de mauvais souvenirs et de souffrance peuplaient ces eaux troubles. Non, si elle savait désormais plus en détail qui était le Chasseur, elle ne le devait qu'à Yls. Le maître de la guilde connaissait cet homme et ce qu'il leur avait appris sur lui était de mauvais augures.

Le tueur d'un Dragon. D'un vrai Dragon. Une affaire qui avait fait sensation, il y a une vingtaine d'années de cela.

Ryx le Dégénéré.

Un Dragon fou, qui avait semé la destruction dans l'Eden, annihilant tout ce qui se trouvait sur son chemin. Un groupe de Chasseurs s'était constitué pour mettre fin à cette abomination. Trei Kinger en faisait partie. Et il fut le seul survivant. De cette chasse, il en était ressorti méconnaissable. Brisé. Physiquement et mentalement. Tous avaient chanté ses louanges et ses exploits pour avoir mis fin au règne du Dragon. Mais Trei Kinger, alors âgé de vingt-six ans, avait tourné le dos à sa gloire. En avait naquis une obsession pour tout ce qui était lié, de près comme de loin, aux Dragons.

Et sa longue liste de victimes innocentes avait commencé. Femmes, enfants, vieillards ; aucune importance tant qu'ils étaient des Draconiques. Aucune importance à part ce qu'il voyait en eux : l'ombre du fantôme de Ryx le Dégénéré.

Enfin, c'était l'hypothèse d'Yls.

Drakaïs grinça les dents.

Trei Kinger était dangereux. C'était une certitude. Il existait peu de personnes pouvant se vanter d'avoir tué un Dragon, fou qui plus est. Et la liste de ses victimes, indénombrables, suffisait à elle seule à prouver la menace qu'il représentait.

La prochaine fois que Drakaïs le verrait, elle devrait le tuer. C'était quelque chose qu'elle savait ; qu'elle acceptait. Cette chasse se terminerait seulement avec la mort de l'un d'entre eux. Et ce ne serait pas celle de Drakaïs.

« Quelle poisse... », soupira la jeune fille, qui mollement, s'appuya sur sa main, son regard fixant avec ennui et une certaine frustration les passant qui filaient sous la pluie, dehors.

Ils étaient libres de faire ce qu'ils voulaient, eux.

Pas elle.

En grinçant des dents, elle se força à changer le fil de ses pensées. Celles là étaient bien trop...contrariantes. Et très vite, ses pensées reprirent un chemin convenable, s'arrêtant sur la semaine qui s'était écoulée. Une semaine, déjà... Et aucune nouvelle, ou presque, des autres.

Akhal passait presque tout son temps au conseil de la cité, où il était convoqué pour diverses raisons. Le Draconique, étrangement, ne s'en plaignait pas. « Une bonne occasion pour en apprendre plus sur eux, et sans éveiller les soupçons. », lui avait-il appris il y a trois jour de cela, lorsqu'elle l'avait interrogé.

Interroger...

Elle soupira.

Interroger.

Oh...Elle ricana froidement. Il y a avait de nombreuses questions qu'elle aimerait poser à Akhal. Mais bizarrement, le Draconique trouvait toujours le moyen de s'éclipser discrètement à chaque fois qu'elle se trouvait dans la possibilité de le faire.

Il l'évitait.

Elle fronça les sourcils.

L'évitait-il ? La chose lui paraissait à la fois incongrue et juste. Elle ne pensait pas que c'était du genre d'Akhal d'agir d'une manière qui pour lui, était d'une impolitesse certaine. Non, son impolitesse était une chose qu'il réservait seulement à Drakayn... Mais comment expliquer autrement les faits ?

Et Drakayn...

Nouveau soupir.

Le Draconiaque traînait dans les Souterrains, à discuter de plans et de stratégies avec Yls et les patriarches, en quelque sorte présents par le biais d'un sort de liaison.

Elle ne le voyait donc quasiment jamais. En réalité, elle ne le voyait plus du tout depuis qu'elle était confinée à l'auberge.

Et oserait-elle l'admettre ?

Oui.

Oui, l'insupportable Démon lui manquait.

Terriblement.

Mais il n'était pas le seul. Non, évidemment. Bien sûr que non. Et s'il lui manquait autant, c'était parce qu'elle était affreusement seule. Oui, tout à fait. Et pas à cause d'autre chose.

Tous les autres lui manquaient.

Achoura suivait de près Akhal. La Draconique ne savait pas comment la Démone avait fait pour se faire accepter aux séances du conseil, mais elle était l'ombre de son partenaire. Chaque soir, lorsqu'elle revenait d'une réunion, elle restait auprès de la Draconique, à l'encourager lorsque la jeune fille s'entraînait, et à discuter avec elle lors de son temps libre.

Et Drakaïs y prenait beaucoup de plaisir.

Achoura était une femme brillante et d'excellente compagnie. Avec ses manières aussi enflammées que celles de Drakayn, son caractère naturellement chaleureux et son humour enjoué, Achoura ne cessait de réchauffer le cœur mélancolique de Drakaïs.

A travers elle, Drakaïs retrouvait en quelque sorte une grande sœur.

Fergon restait jour comme nuit auprès du Passage. Il y avait installé un petit camp ; juste de quoi subvenir. Tous ses manuscrits l'accompagnaient. Il passait son temps à chercher comment lever le sort qui camouflait le Passage. Une tache ardue. Car après tout, Seth n'était certainement pas un magicien lambda. Mais d'après ce qu'avait compris Drakaïs, Fergon non plus. Et il était sûr qu'un jour ou l'autre, le sort qui lui résistait tant finirait par lui céder.

Des paris circulaient d'ailleurs sur le sujet.

Sin avait dit que la chose serait pliée en un jour. Tous les autres, même Fergon, avaient affirmé le contraire.

Tous les autres avaient évidemment raison.

Et Sin... Sin...Sin, lui...

Drakaïs sourit.

Sin jouait à l'enquêteur.

Une semaine auparavant, lorsque Drakayn et Drakaïs avaient parlé de Seth et Inviat aux patriarches, ces derniers s'étaient inquiétés.

Seth et Inviat, deux hommes de pouvoir.

Deux hommes que personne ne connaissait.

Personne.

Drakayn, Yls, Idras, Idris; tous avaient fait jouer leurs relations et leurs sources.

Mais pas une seule pour leur apprendre la moindre chose concrète sur ces deux hommes.

Des rumeurs, de ci-delà.

Un Vampire aux pouvoirs surpuissants, que même les Premiers Nés, sang royaux de la race vampirique, ne pouvaient contrôler.

Un homme aux yeux bleus, qui sauve un village d'un groupe de goules.

Rien de plus.

Alors, ils avaient laissé tombé.

Mais pas Sin.

Sin fouillait, interrogeait les gens, lisait même des livres.

Aucun résultat pour le moment.

Les autres le regardait faire avec amusement. Rien de sérieux là-dedans, tous le savaient, même Sin. Cependant, la situation était au point mort. Et comme Sin n'avait rien de mieux à faire pour le moment, libre à lui de faire ce qu'il souhaitait de son temps.

Ce qui la laissait elle, à croupir dans cette auberge.

Elle fronça les sourcils.

Finalement, peut-être qu'elle n'avait pas totalement pardonné aux autres son isolement...

« Il est temps de reprendre la séance, Dragonneau. », fit son mentor, sa voix rocailleuse la tirant de ses réflexions.

Avec un grognement, Drakaïs se leva et s'étira le dos, ses articulations craquant avec délice.

Elle ne souhaitait vraiment pas s'y remettre. Juste quelques secondes de plus... Pour se faire à l'idée que sa pause adorée était terminée...

« J'aurais quelques questions, avant, si tu permets. »

Tout pour gagner un surplus de temps... Même si la technique n'avait jamais marché par le passé, la Draconique était bornée : tant qu'elle n'aurait pas de résultats satisfaisants, elle ne changerait pas de tactiques.

Pas dupe, la Dragonne ricana et laissa planer un petit silence.Une première.

« Soit, lâcha-t-elle soudainement, de l'humour dans la voix. Pose donc quelques questions Dragonneau. Mais en échange, je ne veux plus de ces petits stratagèmes pour retarder la reprise.

Drakaïs prit un air soupçonneux. Il y avait anguille sous roche, c'était certain...

« ...et ne crie pas à l'injustice si mes réponses sont vagues, roucoula-t-elle. Je sais être généreuse, mais je ne suis pas stupide. Il y a des raisons à mon silence : ne les remet pas en question. »

La Draconique laissa échapper un rire tremblant. C'était donc cela. Elle roula ses yeux. Rien de surprenant. L'offre était trop belle pour être vraie après tout.

Mais ce n'était pas pour autant qu'elle allait lui tourner le dos.

« Qui es-tu ? », lança-t-elle à brûle pourpoint.

La créature ronronna de plaisir.

« Ah, mais tu le sais parfaitement, mon Dragonneau... J'aurais pensé que tu serais plus pointilleuse dans tes questions...Mais soit : je suis une Dragonne. »

La Draconique percevait la moquerie dans le ton de sa guide. Mais c'était sa réponse qui l'énerva réellement. A ce stade, ce n'était plus « être vague », mais jouer sur les mots.

« En quoi est-ce une réponses satisfaisante ? grommela la jeune femme, les dents serrées.

- N'oublie pas notre marché, Dragonneau...Et le temps file, souvient-en. Je ne compte pas rassasier ta curiosité éternellement. », la rapella-t-elle à l'ordre.

Avec effort, Drakaïs se recadra. La voix tendue, elle reprit :

-Tu es liée à mes rêves. Que signifient-ils ?

La Dragonne ne dit rien pendant un instant, mettant la patience de la jeune fille à rude épreuve. Et quand, enfin, elle lui répondit, ce fut avec hésitation, ses émotions gardées :

-C'est ton héritage.

Un sourire radieux fleurit sur les lèvres de Drakaïs.

Enfin, une réponse satisfaisante.

« Mon héritage ? » la relança-t-elle avec engouement.

Elle sentit le malaise de son mentor. Décelant une brèche dans l'armure habituellement sans faille de la Dragonne, Drakaïs décida de l'harceler jusqu'à ce qu'elle cède.

« Ce sont tes souvenirs, n'est-ce pas ? Héritage... réfléchit-elle à voix haute. Pour que ce soit mon héritage, encore faudrait-il que nous ayons un lien...Mais un héritage est familial et_ »

Son visage prit un air neutre sous le coup de l'idée qu'elle venait d'avoir.

Dans son esprit, la Dragonne s'agitait nerveusement.

« As-tu un quelconque lien de parenté avec moi ? », demanda-t-elle la voix atone.

A cet instant, son mentor laissa tomber toutes ses barrières.

Plus vulnérable que jamais. Le moment parfait pour infliger le coup de grâce. Mais Drakaïs ne pouvait pas s'y résoudre.

Car l'espoir lui serrait le cœur.

Le silence s'étira, mais il n'était pas désagréable. Et pour Drakaïs, il était rempli de non-dits.

Et avec un sentiment indéchiffrable, la Draconique se rendit compte qu'elle ne voulait pas vraiment de réponse à cette dernière question.

«Ne dit rien. Je ne veux plus savoir.», lâcha-t-elle brutalement.

Un « oui », l'aurait remplie d'euphorie.

Un « non » l'aurait anéantie.

Et entre les deux, malgré l'attitude de la Dragonne, c'était la réponse négative qui semblait la plus probable.

Et cet infime espoir, qui avait jailli dans son être à l'idée d'avoir encore une personne, reliée de près ou de loin, à sa famille, était un trésor qu'elle voulait garder, jalousement, pour elle.

Un espoir puéril et stupide.

Mais c'était son espoir.

Avec une acuité pointue, elle sentit que la Dragonne avait reprit contenance.

« Tu es libérée pour la journée. Nous reprendrons demain au matin, à l'heure habituelle. »

Et sans plus de paroles, la Dragonne s'évanouit.

Laissant Drakaïs seule, l'espérance étouffant son cœur, un sourire enfantin sur le visage.

Pour une fois depuis de nombreuses années, elle s'autorisa à rêver, à imaginer, qu'elle n'était pas réellement seule.

Et cela la remplit de joie.

Note: Hello à tous :D!  Je suis de retour :D ! Pour vous jouer un mauvais tour ! La team_

Ok, ok, ok ! J'arrête ! Mais par pitié, écartez ce pic à glace !

*toussote*

Je sais que c'est court pour un nouveau chapitre, mais j'ai décidé de vous publier cette partie, et le reste suivra très prochainement. Nope, je n'ai pas fini ce chapitre. Mais je suis en bonne voie :D ! Je ne fais pas promesse (on sait ce que ça donne...), mais ça avance :) !

Je n'oublie pas non plus les explications pour mon absence, qui viendront lors de la dernière partie :) (et ça risque d'être assez looooooong !)!

En tout cas, ce chapitre sera découpé en de nombreuses parties (a priori quatre).

Pas de questions pour le coup, je vous laisse me dire ce que vous en pensez en commentaire ;) !

Oh, une dernière chose ! J'ai commencé à écrire une série de nouvelles en rapport avec l'univers de la Révolte des Dragons. Il s'axe sur la Nécromancie et le passé d'un personnage. Deux partie sont sorties. Le spin-off se trouve sur Chronique des Six Mondes sous le nom du Mort-Vivant :D ! Si ça vous intéresse, je vous invite à aller y jeter un coup d'oeil ;) !

Gros poutou et à très bientôt <3 !

Ps: Notez bien ce petit cœur, c'est pour vous achetez.... .....Comment ça, "ce n'est pas suffisant" ? Pfff ! D'accord, va falloir employer les grands moyens à ce que je vois ! *sort son arme secrète* Cookies pour tout le monde !

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