Chapitre 21 (partie 1):

Elle volait vers Onyx. Elle se concentrait sur cette certitude pour se rassurer, mais cela ne suffisait pas. Elle était rongée par l'inquiétude. Seth avait réussi à implanter cette peur en elle, cette angoisse que quelque chose soit déjà arrivée à Onyx.

Elle n'aurait jamais cru que les Anges puissent s'en prendre à lui, à eux, et c'était justement cela qui l'effrayait. Qui savait ce qu'ils pourraient lui faire ! Allaient-ils le tuer ? Ou pire ? Elle n'en savait rien et c'était cela qui la terrifiait réellement. Car même avec les nombreuses années derrière elle, elle faisait désormais face à une situation qui lui était inconnue. Comment la résoudre ? Que faire ? Ces questions l'obsédaient. Elle avait beau se dire que ce n'était que des Anges, elle avait un mauvais pressentiment. Son instinct lui soufflait que quelque chose n'allait pas et que cette fois, c'était grave.

Plus elle se rapprochait, plus cette impression devenait réelle, devenait une certitude.

Elle accéléra.

Son plan était simple : elle débarquait au Temple, là où Seth lui avait appris que le Dragon était détenu, tuait tous les Anges qui étaient sur son chemin, trouvait Onyx et le libérait. Elle avait conscience que son plan était peut-être trop précaire, mais elle était une Dragonne. Un des six Dragons ancestraux qui plus est.

Les paroles de Seth lui revinrent en mémoire : « Si même Onyx a échoué face à eux, il y a des raisons à se poser des questions. Même toi, tu ne peux pas passer à côté d'une chose pareille. »

Évidemment, Seth disait vrai. Mais elle n'avait pas le temps de se poser ces questions.

Elle était proche du Temple, à présent. Et maintenant qu'elle était à proximité, elle pouvait sentir, entendre et voir, qu'effectivement, quelque chose n'allait vraiment pas.

Cela faisait très longtemps qu'elle n'avait plus vu un tel spectacle, et elle avait bien cru qu'elle n'en reverrait jamais de pareil.

Car là, devant le Temple, les Anges et la harde d'Onyx combattaient.

Dans une tempête de hurlements bestiaux, de cris de guerre et de douleur, les deux peuples volaient et échangeaient des coups, de la magie fusant dans tous les sens et les corps des stupides volatiles tombant comme des mouches.

Après des millénaires de paix, le conflit entre les Dragons et les Anges reprenait.

Drakaïs émergea doucement, ses yeux papillonnant légèrement tandis qu'elle reprenait conscience. Son cœur battait la chamade. Encore un rêve. Et pas des moindres, même s'il avait été plus court que les précédents. Une guerre entre Dragons et Anges. Onyx. Seth. Toute cette situation la dépassait et elle sentait qu'elle commençait à perdre pied.

Avec une grande inspiration, elle reprit son calme, le voile du sommeil encore présent, obscurcissant sa volonté. Avec un petit soupir fatigué, elle se retourna dans sa couette et se concentra sur les alentours, avec plus ou moins de difficulté. Autant se focaliser sur quelque chose qu'elle pouvait influencer. Le reste était sans importance pour le moment.

Elle était sur une surface plane, très confortable. Trop confortable. Cela n'avait rien à voir avec le lit de l'auberge. Elle souleva ses paupières brutalement, et se rendit vite compte qu'elle était dans le noir complet tandis que tout lui revenait. Inviat, la journée épouvantable qui avait suivi, Enzo et Firma.

Drakayn.

Où était Drakayn ? Il n'était pas là. D'ailleurs, il n'y avait personne autour d'elle. Même avec tant d'obscurité, elle pouvait sentir qu'elle était seule. C'était bien la première fois qu'elle aurait aimé que le Démon soit à ses côtés à son réveil.

Elle examina sa situation.

Elle se trouvait dans un lit à baldaquin bien trop grand pour elle. Les couvertures étaient rouges sangs et elle reposait sur un tas de coussin. Pas étonnant qu'elle ait si bien dormi. Car elle s'était endormie. Et Drakayn ne l'avait pas réveillé. Une pointe de colère émergea à l'encontre du Draconiaque. Elle n'était même pas au courant de la tournure qu'avaient pris les événements ! Mais vu comment ses hôtes l'avaient traitée, il ne devait pas s'être passé de choses affreuses. Du moins, elle l'espérait. Qui savait ce que Drakayn pouvait faire alors qu'elle n'était pas là pour essayer de le tempérer.

Elle se redressa, rejetant la couverture par la même occasion, et s'assit sur le bord du lit, laissant alors ses jambes pendre dans le vide. Elle écarta d'un geste les rideaux. Une chambre. Voilà là où elle semblait être. Sur les murs, aucune fenêtre. Une chose, qui, en temps normal, aurait été handicapante. Il aurait été impossible de deviner une idée du lieu qui l'abritait. Mais il était fort probable que ce soit le même bâtiment dans lequel Firma et Enzo les avaient mené.

Le lit était au centre de la pièce, entouré d'une table de chevet sur lequel trônaient une lampe et quelques ouvrages. Juste devant elle, une armoire, plutôt banale et petite. Et sur les côtés, deux étagères, accompagnées d'un bureau, lui aussi austère. Le tout d'un rouge sang qui commençait à écœurer la Draconique. Pas de doute possible : elle était bien dans le même bâtiment.

Elle remarqua qu'elle portait toujours ses vêtements, mais qu'on lui avait pris ses armes. Deux nouvelles : une bonne et l'autre, mauvaise.

Bien. Elle se massa les tempes. Réfléchir. Elle devait réfléchir et agir.

Tout d'abord, elle devait sortir de cette chambre. Ensuite, elle devait absolument retrouver Drakayn.

A priori, rien de difficile.

A priori.

Par les Six ! Comme elle était agacée ! Elle détestait ne pas savoir ce qui se passait ! Elle ne savait même pas si elle avait raison d'agir comme elle le faisait ! Peut-être qu'il n'y avait aucun problème et qu'elle allait se comporter comme une imbécile !

Elle respira un bon coup, relâchant ses épaules contractées d'un même mouvement. Eh bien, tant pis. Si ses hôtes n'avaient rien à se reprocher, elle se serait seulement tromper. Mais si ce n'était pas le cas...

Elle se leva et se rapprocha de la porte sans faire le moindre bruit. Elle enclencha la poignée, qui se bloqua. La porte était verrouillée.

Drakaïs ricana froidement. Évidemment. Elle aurait dû y penser. Elle était bloquée ici, certes, mais il fallait voir le bon côté des choses : cela lui donnait de nouvelles informations. Ses hôtes n'avaient pas rien à se reprocher. Ils l'avaient enfermée. Donc, elle était leur prisonnière. Et cela changeait beaucoup de choses. Il fallait désormais ajouter « s'échapper » à la liste de ce qu'elle devait faire. Car à présent, elle doutait qu'on les laisse partir facilement une fois qu'elle aurait trouvé Drakayn.

Dans quel pétrin les avaient-ils encore mis ?

Elle s'apprêtait à forcer la serrure quand elle entendit des voix, derrière la porte.

« On peut savoir ce que tu fais, Henkiel ? »

C'était la voix calme d'Enzo. Au nom d'emprunt de Drakayn, le cœur de Drakaïs s'accéléra. Au moins, même si elle n'était pas encore sortie, elle avait « trouvé » Drakayn.

Le Draconiaque ne répondit pas tout de suite, mais au son de sa voix, Drakaïs tendit l'oreille :

-Je veux juste la voir.

Le Démon avait lâché cela en soupirant : il était ennuyé.

« Tu sais que le Maître te l'a interdit. »

Drakayn rigola amèrement.

« Je veux la voir. Et je me fiche de ce qu'Yls a dit. Ce n'est plus mon Maître. »

Ah ! Cette façon d'agir, c'était du Drakayn tout craché...

« Henkiel... »

Au ton irrité d'Enzo, Drakaïs comprit que c'était un avertissement. Mais elle savait que Drakayn n'allait pas le suivre. Il adorait énerver les gens ; c'était presque sa spécialité. Elle sourit à cette idée.

« Quoi, Enzo ? Tu penses vraiment que vous allez pouvoir m'empêcher de la voir ? Tu te rappelles ce que j'ai dit tout à l'heure, non ? »

Il y eut un silence après la réplique du Démon.

« Oui, je m'en rappelle. Mais les ordres sont les ordres. Tu ne peux pas la voir, Henkiel, reprit Enzo, d'un air nettement plus sec.

-Ah oui ? »

Le ton de Drakayn s'était fait terriblement menaçant. Elle n'attendit pas la suite de la discussion. Drakaïs devait intervenir. Mais ce ne serait pas pour empêcher le Draconiaque de se battre, comme elle semblait avoir pris l'habitude de le faire. Non, cette fois, elle combattrait avec lui. Car elle en était désormais certaine : quelque chose n'allait pas. Autant commencer par mettre hors d'état de nuire Enzo, et s'occuper des autres, si c'était nécessaire pour s'échapper d'ici.

Elle prit une grande inspiration et donna un énorme coup de pied dans la porte. Les gonds sautèrent et l'édifice en bois vola.

A son coup, elle avait entendu des jurons. Mais elle n'y fit pas attention. Il fallait qu'elle profite de l'effet de surprise.

Une fois la porte ouverte, elle se glissa avec fluidité à l'extérieure et se jeta sur Enzo. Cette fois, la situation n'était pas la même que lors de son dernier combat: elle était en pleine forme. Le Yuuzan avait été surpris, et ce fut trop tard qu'il la vit arriver. Elle se faufila jusqu'à lui, et d'un geste vif, l'attrapa par le cou et le plaqua au sol. Le tout, dans un même mouvement. Elle utilisait toute ses forces, si bien qu'Enzo avait du mal à respirer. Concentrée sur sa prise, tous les sens aux aguets et les muscles tendus par l'effort et la tension, elle surveillait son adversaire, ses yeux verts plantés dans ceux si gris et si imperturbables d'Enzo. Puis, soudain, légèrement tremblotant, un rire s'éleva derrière elle.

C'était Drakayn.

Drakaïs ne fit pas l'erreur de se retourner pour le fusiller du regard. Elle préféra parler.

Oui, parler, c'était aussi un très bon moyen pour faire comprendre à quelqu'un que l'on était énervé.

« Je peux savoir ce qui te fait autant rire ? », fit-elle froidement, sa voix claquant comme un fouet.

Le Draconiaque cessa de rire, mais même retournée, Drakaïs savait qu'il devait avoir son fameux petit sourire en coin collé sur le visage.

« Tu es en colère. », nota-t-il simplement.

Oh, il avait remarqué ? Mais le terme qu'il avait utilisé n'était pas celui qu'elle aurait choisi.

« Non, je ne suis pas en colère : je suis furieuse. Furieuse parce que tu rigoles comme un imbécile. Furieuse parce que tu ne m'as pas réveillé. Furieuse parce que tu m'as laissé en arrière. »

En dessous d'elle, Enzo, étrangement, ne faisait rien pour se dégager. Il était incroyablement calme. Mais elle ne se détendit pas pour autant. La dernière fois qu'elle avait sous-estimé un adversaire, Seth, elle avait fini au sol. D'ailleurs, elle avait terminé dans la même position qu'Enzo. Sauf que le Yuuzan possédait plus d'expérience, et qu'il n'aurait sans doute aucun mal à s'échapper.

Elle resserra son emprise.

« D'accord, d'accord. Je savais bien que j'allais regretter de t'avoir laissé dormir. », s'amusa Drakayn.

Il le savait mais il l'avait fait quand même. Elle entendit des pas et Drakayn s'accroupit à côté d'elle. Elle ne le regarda toujours pas et laissa son attention fixée sur Enzo.

« Maintenant, si je peux me permettre, je peux savoir ce que tu fais à ce pauvre Enzo ? »

Son ton s'était de nouveau fait rieur. Elle savait qu'à cet instant, il avait du mal à s'empêcher de rigoler.

Drakaïs se crispa et fronça les sourcils.

« Ça ne se voit pas ? Je le maintiens au sol. Et si tu veux tout savoir, j'attends que tu le neutralises. Tu vois, je mets en pratique les techniques que tu m'as appris. Maintenant, c'est à moi de te demander ce que tu fais. »

Le Démon ne lui répondit pas. Elle essaya une nouvelle fois :

-Alors ? Qu'est-ce que tu attends pour venir m'aider ?

Toujours pas de réponse. Et Enzo qui continuait de ne rien tenter... Le Yuuzan ne faisait que l'observer, tout simplement. Et alors qu'elle commençait à trouver sa conduite décidément trop étrange à son goût, elle se sentit soulevée en arrière. Des bras la ceinturèrent et elle fut forcée de lâcher sa prise. Elle sentit le souffle de Drakayn sur sa nuque.

« Qu'est-ce que tu fais ? hurla-t-elle en se débattant

-Drakaïs, calme-toi... gronda le Draconiaque.

-Tu veux que je me calme ? Très bien ! Alors pose-moi immédiatement par terre ! », siffla-t-elle.

Elle se sentit posée au sol.

« Satisfaite ? », soupira Drakayn.

Pour toute réponse, elle lui envoya un regard noir.

De son côté, Enzo s'était levé et époussetait ses vêtements.

« Pas mal. », lâcha-t-il en jetant un bref coup d'œil à la Draconique.

Drakaïs l'ignora et se planta face à Drakayn.

« Ecoute... Je peux tout t'expliquer... », commença-t-il en baissant les yeux.

Au moins, il n'arrivait pas à soutenir son regard courroucé !

« Oh, mais je suis toute ouï... J'espère que tu arriveras à justifier le fait que tu ais craché mon vrai nom... Toi qui voulais absolument me garder à l'auberge après l'événement avec le Chasseur, voilà que tu commets l'impair que nous n'avions pas fait jusqu'à là ! Et..."Elle montra du doigt Enzo."...pourquoi ne m'as-tu pas aidé à le mettre hors d'état de nuire ? fulmina-t-elle.

« Eh bien... », tenta de répondre le Draconiaque.

Drakayn se passa la main dans la nuque.

« Eh bien quoi ? J'étais prisonnière. Prisonnière ! Et ne me dis pas le contraire ! J'étais enfermée dans cette chambre ! Et j'ai entendu votre discussion. Tu ne pouvais pas me voir, hein ? Le Maître l'avait interdit ! Si ce n'est pas le traitement que l'on offre aux prisonniers, ce n'est certainement pas celui que l'on offre aux invités ! »

Elle vit la bouche du Démon s'ouvrir puis se refermer aussitôt. Drakayn fronça les sourcils et se passa, cette fois-ci, la main sur le visage.

« Elle a tout à fait raison. », déclara derrière eux une voix, suave, qui était inconnue à Drakaïs.

Elle fit volte face. Accoudé au balcon, un homme les observait avec amusement.

« Tu ne m'aides pas vraiment, Yls... grogna Drakayn.

-Maître... », le salua en même temps Enzo.

Alors c'était lui, le Maître dont elle avait tant entendu parler.

Elle l'observa plus attentivement, avec circonspection. Il ressemblait à Seth. Enfin, pour être plus exact, ils avaient les mêmes cheveux, sombres comme la nuit la plus noire, et la même peau, blanche comme la lune, d'une couleur nacrée presque éclatante. Ses yeux, eux, ténébreux, étaient différents. Un nez, droit et dur. Des pommettes fines, comme la forme de son visage, rehaussé par des mâchoires puissantes. Sa taille, elle, n'avait rien d'extraordinaire. Ni petit, ni grand, il était de taille moyenne, mais son attitude, quant à elle, en disait beaucoup sur le personnage : même dans une position nonchalante, il inspirait le respect et imposait une conduite soumise.Ses vêtements, simples et élégants, ̶ un foulard, une veste noire sous laquelle perçait une chemises blanche, un pantalon foncé et des bottines en cuire ̶ n'étaient pas ce qui attirait le regard dans sa tenue. C'était plutôt la longue épée, qui ornait sa ceinture et sur laquelle il posait une main sûre.

C'était un bel homme, Drakaïs devait bien se l'avouer. Mais quelque chose chez lui lui donnait la chair de poule, la poussait à vouloir le fuir. La Draconique mit du temps à mettre le doigt dessus. C'était une odeur. Une odeur familière. Teintée de fer. Elle comprit soudainement. Du sang. L'odeur du sang lui collait à la peau.

Elle se figea.

« Combien de personnes avez-vous tuée ? », demanda-t-elle brutalement.

Enzo et Drakayn rivèrent leurs regards sur elle, mais elle les ignora. Le Maître, quant à lui, haussa simplement les sourcils.

« Pourquoi pensez-vous que j'ai tué quelqu'un ? », fit Yls en souriant calmement.

Ce sourire la fit frissonner.

« Vous empestez le sang.», expliqua-t-elle en fronçant le nez.

L'odeur était partout. Et tout ce rouge qui les entourait ! La moquette était de la même couleur que le sang, si bien qu'elle se demandait si ce n'était pas du vrai qui l'avait teintée ainsi.

« Combien de personnes avez-vous tuez ? », insista-t-elle.

Elle avait besoin de savoir si cet homme était bien le monstre qu'elle pensait qu'il était.

« Beaucoup.», répondit-il finalement, en examinant ses ongles avec l'ombre d'un sourire sur ses lèvres.

Beaucoup. Ce n'était pas un chiffre mais cela en disait long. Il en avait tué tellement qu'il en avait perdu le compte. Elle espérait qu'elle n'arriverait jamais à un tel stade.

« Vous êtes dangereux.», affirma-t-elle en voulant dégainer son épée.

Elle pesta : elle avait oublié que sa lame n'était plus à ses côtés.

« Merci... je suppose ? fit en rigolant gentiment le Maître. On ne nous a pas présenté, je crois. Henkiel n'a pas voulu lâcher une seule information sur vous. »

Yls s'avança vers elle d'une démarche souple et silencieuse. D'une démarche de tueur. Drakaïs recula tandis qu'il s'approchait d'elle et buta contre le torse de Drakayn. Remarquant son attitude, le Maître lui sourit amicalement.

« Vous allez finir par me vexer mademoiselle... », son ton s'était fait amusé.

Derrière elle, Drakayn s'était crispé à ces mots et posa une main protectrice sur son épaule.

« Elle s'appelle Drakaïs. », déclara Enzo en se frottant le cou. Il avait une marque rouge, celle des mains de Drakaïs, sur la peau. Etant donné qu'il venait de révéler son nom et plus encore par la même occasion, elle ne regrettait absolument pas de lui avoir laissé une telle trace.

Le Maître haussa les sourcils et se murmura pour lui-même :

-Une Draconique, évidemment ! Quand on sait qu'Henkiel est un Draconiaque, c'est plutôt logique !

Le sang de Drakaïs se glaça dans ses veines. Yls savait aussi pour Drakayn ? Elle prit le Démon à l'écart et lui adressa un regard de reproche.

« C'est compliqué, se justifia Drakayn en détournant les yeux.

-Oh. Compliqué ?"Elle ricana méchamment." Compliqué ou pas, tu vas m'expliquer la situation. »

Drakaïs n'avait pas demandé, elle avait ordonné. Elle en avait plus qu'assez de ne pas savoir ce qu'il se passait.

Drakayn soupira.

« C'est ce que je comptait faire, figure-toi !

-Alors vas-y ! s'impatienta la Draconique.

-Très bien ! », répliqua le Démon, visiblement agacé. Il reprit son calme. « Bon, tout d'abord, je ne t'ai pas réveillé parce qu'Yls a explicitement demandé à s'entretenir seul à seul avec moi. Ensuite, tu étais endormie. Vraiment endormie. Même un pachyderme n'aurait pas réussi à te réveiller. Et je me suis dit qu'après la journée, disons, mouvementée que nous venions de passer, dormir te ferait du bien. »

Drakayn fit une pause et lui jeta un regard lourd de sens, semblant dire la chose suivante : tu vois que j'avais de bonnes raisons ! Elle écarta d'un geste sa remarque silencieuse.

« Passons. Ce n'est pas le plus important. », le pressa-t-elle de continuer.

A nouveau, elle vit dans ses yeux un message ironique. « Ah bon ? », avait-il l'air de lui dire alors qu'il haussait les sourcils.

« Que s'est-il passé après ? exigea-t-elle en montrant son agacement et son impatience.

-Après ? Eh bien, nous avons parlé. Tu es sûre de vouloir savoir la suite ?"Il grimaça." Parce que tu ne vas vraiment pas aimer... 

-Drakayn... gronda-t-elle.

-D'accord, d'accord !"Il leva les mains." Mais sache que ce que j'ai fait était la meilleure des choses à faire, donc, ne t'énerves pas trop. S'il te plait. »

Elle avait vraiment un mauvais pressentiment. Qu'il la prévienne qu'elle n'allait pas aimer ce qu'il avait fait était une chose déjà assez inquiétante en soi, mais le fait qu'il lui demande de ne pas se mettre en colère était terrifiant. Tout d'un coup, elle n'était plus très sûre de vouloir savoir ce qu'il s'était passé.

« Vas-y. J'essayerai de ne pas trop m'énerver. »

Oui, essayerai. Drakayn devait avoir remarqué la nuance, mais ses épaules se décontractèrent quand même. Etait-il donc si effrayé par sa réaction ? Par les Six... L'angoisse lui tordit le ventre. Qu'avait-il fait?

« Yls sait pour notre tentative d'invasion. Et avant que tu ne me fusilles de ton regard noir, sache que ce n'est pas moi qui l'ai mis au courant. Je pense qu'il a deviné tout seul. Il en serait bien capable. Bref, il veut cette ville tout autant que nous et il veut nous aider à la prendre. J'ai cru comprendre qu'il en avait déjà parlé à Akhal, même si je ne sais pas quand il a pu en avoir l'occasion... Il veut que je négocie son aide avec Idris et Idras. »

Drakaïs se décontracta légèrement. Elle avait imaginé pire...

« Attend avant de te détendre... la prévint-il. Ce n'est pas tout... et c'est ça que tu ne vas pas aimer. »

  Évidemment s'était trop beau pour être vrai. C'était de Drakayn dont il s'agissait. D'un signe de la tête, elle l'invita à poursuivre.

« Eh bien voila, Yls a émis une condition... »

Drakaïs serra les dents.

« Quelle condition ? », grogna-t-elle.

Drakayn fronça les sourcils. Apparemment, lui aussi, il n'aimait pas cette condition.

« Il veut que tu restes avec lui tout le long des négociations. Il sait que s'il te garde ici, je ne lui ferai pas faux bond ou que je ne tenterai pas de lui faire une mauvaise surprise.

-Quoi ?" Elle avait crié et se ressaisis. "Et tu as dit oui ?

-Tu avais dit que tu ne t'énerverais pas, lui rappela-t-il. Et rassure-toi, je compte refuser.

-J'espère bien ! Hors de question que tu prennes une telle décision sans moi ! »

Mais c'était toujours mieux que ce qu'elle avait imaginé. Ses épaules se rabaissèrent.

« Mais il y a un problème. », reprit Drakayn.

Par les Six ! Quoi encore ?

« Tu ne connais pas Yls, mais moi, si. C'est une personne qui aime que les choses soient faites à sa manière. Il a déjà menacé d'aller nous dénoncer au conseil de la ville, auquel il appartient. »

Parfait ! C'était la cerise sur le gâteau !

« Tu as encore d'autres nouvelles comme celles-ci ou tu as enfin fini ? »

Drakayn secoua négativement la tête. Alors, Drakaïs s'autorisa à soupirer de soulagement.

Elle avait un plan. Elle avait réfléchi à tout cela pendant qu'il lui parlait et pensait que c'était une bonne idée. Enfin, de son côté, cela lui semblait une bonne idée...

« Maintenant, c'est moi qui ai quelque chose à te dire. Et tu ne vas pas aimer non plus. »

Le Draconiaque l'observa suspicieusement.

« Dis toujours... l'encouragea-t-il en plissant les paupières.

-Je vais rester ici et tu iras négocier avec Idris et Idras. »

Drakayn cligna des yeux plusieurs fois. Les muscles sur son cou se tendirent.

« Pas question. »

Elle croisa ses bras et prit un air déterminé.

« Pourquoi ça ?

-Drakaïs, tu n'y penses pas sérieusement !  " Il posa ses mains sur ses hanches. "Ce n'était pas toi qui t'énervais pour la même raison tout à l'heure ?

-Ce n'était pas pareil, maugréa-t-elle. J'étais énervée car je pensais que tu avais pris la décision sans moi. Mais comme maintenant, c'est de mon propre choix que je la prends, c'est différent. Tu comprends ?

- Non, je ne comprend pas." Il prit un air exaspéré. "Je ne te laisserai pas ici. Tu ne sais pas de quoi ils sont capables.

-Certes, mais je peux me débrouiller toute seule.

-Non, tu ne peux pas. Pas ici. Ce sont des tueurs. C'est une guilde d'assassins, Drakaïs. Et je sais que tu as senti à quel point Yls est dangereux. Eh bien, sache que les autres n'ont presque rien à lui envier. Si Enzo l'avait voulu, il aurait pu se dégager et t'égorger avant même que tu ne t'en rendes compte. »

Drakaïs fronça les sourcils.

« Tu exagères.

-A peine. Non, vraiment, il y a un autre moyen.

-Ah oui ? Et lequel ? "Elle rigola froidement." Vas-y, explique-moi ta solution miracle ! »

Il afficha un sourire en coin et déclara : 

- J'ai dit que je ne te laisserai pas seule ici. Et je vais refuser la proposition d'Yls pour cette raison-là. Mais si on ne se plie pas à sa condition, il ne va pas aimer. Alors, on va agir de la manière suivante : tu vas rester ici, mais moi aussi. Je ne vois pas pourquoi je devrais sortir de la guilde puisque de toute manière, j'utiliserai un sort de liaison pour parler avec Idris et Idras. Donc, autant le faire ici. Comme ça, la condition sera remplie et je n'aurais pas à m'inquiéter pour toi.

C'était simple comme tout, mais son idée tenait la route.

« Faisons comme ça, alors », accepta-t-elle.

Elle fit la moue. 

« Mais je trouve toujours que tu me maternes trop. »

Au mot « materne », Drakayn avait levé un sourcil.

« Que tu me vois comme une mère de substitution est vraiment la dernière chose que je veux, crois moi. Mais je sais que j'ai raison sur ce point-là. Et je ne te « materne » pas, comme tu dis. Je prends soin de toi, c'est différent. Et sache que je pourrais dire la même chose de toi.

-Je ne te materne pas.», protesta-t-elle.

Le Démon lui lança un regard éloquent.

« Tu vois comme c'est irritant ! », fit-il en rigolant.

Il reprit son sérieux. 

« On ne se materne pas."Il grimaça à ce mot. A croire qu'il ne l'appréciait vraiment pas." On prend soin l'un de l'autre. Tu vois la différence ? Alors sort-toi de la tête cette idée d'instinct maternel ou je ne sais quoi."Drakaïs roula des yeux. Il déformait ce qu'elle disait." Le sujet est clos ? »

Non. Elle pensait toujours qu'il la surprotégeait. Mais elle hocha la tête. Ce n'était pas le moment d'en parler.

« Bien ! », lâcha-t-il en la dépassant. « Yls !, l'interpela-t-il. J'ai quelque chose à te proposer. »


Note: Voilà pour cette première partie ! Je n'ai pas encore "corrigé" la suite et fin, mais elle sortira trèèès prochainement (vraiment ! Promis ! Croix de bois, croix de fer, si je ment, je vais ne enfer !)!

Vous aurez sans doute l'impression qu'il ne se passe rien dans cette partie de chapitre. Et c'est vrai. C'est du blabla (mais j'ai tellement pris de plaisir à écrire les dialogues dans cette partie...), de l'esbroufe, et une vision du début qui n'apprend rien de particulier. C'est dans la suite que j'y vois quelque chose d'important ;) !

Une petite chose: vous l'aurez sans doute remarqué, mais Drakaïs a désormais un caractère quelque peu différent du début du récit. C'est normal. Non seulement elle a toujours eu un caractère de feu et capricieux, mais désormais, il faut savoir que la Dragonne fait aussi des siennes. Pour le coup, Drakaïs sait également que Drakayn se met dans un pétrin pas possible à chaque fois et la situation est assez alarmante pour qu'elle se prête à cette attitude ;) !

Bref !

Mes petites questions pour cette partie !

Pour les visions de Drakaïs: qu'en pensez-vous en général ? Et celle-ci ? La prochaine ne sera pas avant un bout de temps ! La réaction de Drakaïs vous préoccupe-t-elle ? Et celle de Drakayn ? D'Yls ? Enfin: Est-ce que le dialogue entre Drakaïs et Drakayn traine trop ?

Allé, je vous relâche :D !

A très vite !

Gros poutou !

Ps: si je me mets à faire des notes pour les parties... Eh ben ! On en a pas terminé !

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