|1| "Dors sur tes deux oreilles...

Drakaïs était vraiment trop crevée pour cette merde.

Des tintements mécaniques et des sifflements crissants brisaient le silence de la forêt. Les arbres autour de la Drakonique paraissaient inébranlables, leur feuillage dansant avec une mélodie apaisante. Sous ses doigts serrés, la terre froide humide, les feuilles mortes et les brindilles cassées la soutenaient dans son observation. Et à seulement une trentaine de mètres en contrebas, à l'orée de la forêt, les Humains semaient leur habituelle destruction.

Un amas d'activités fourmillait, partiellement caché par la végétation qui tenait dans l'ombre la Drakonique et ses compagnons. Abattement d'arbres qui tombaient en grinçant pour exploser au sol, feux de brindilles aux fumées irritantes, ordres hurlés avec agressivité aux ouvriers; soldats qui se tenaient sur le qui vive, la main crispée à l'épée et le regard braqué sur la forêt ; d'autres soldats plus loin, encore, toujours, qui échangeaient quelques mots, une tasse de café près des lèvres. Un fatras chaotique, accompagné d'un vacarme tonitruant.

Putain d'Humains.

L'aube pointait son museau, écartant les rideaux de la nuit mais épargnant l'obscurité salvatrice de la forêt. Le noir du ciel laissait entrevoir un bleu sombre parsemé de pans plus clairs. Le moment aurait dû être solennel; à la place il était sinistre. Un gâchis. En temps normal, elle se serait perdue dans cette contemplation, mais la présence humaine la lui rendait en cet instant particulièrement irritante. Une pointe de douleur perça le crâne de Drakaïs, ses yeux verts tout à coup traversés par une vague d'aiguilles brûlantes. Elle serra les dents et ravala une plainte tout en tirant sèchement sur l'une de ses mèches rousses, le picotement offrant une maigre distraction dans son tourment. Elle aurait tué pour avoir une tasse de café. Le matin, sans caféine, ses pensées n'étaient qu'un tas confus pesant. Un bâillement essaya d'échapper aux murs de sa gorge, mais là encore, elle l'étouffa brutalement, écrasant à la source la tentative d'insurrection.

Dormir.

Pas encore.

Putain d'Humains, oui.

« Et on se lève avant l'aube pour ces connards... »

Drakaïs laissa son attention planer sur Lya un vague instant, notant rapidement les poches sous ses yeux et la grimace qui fripait son visage enfantin, puis la recentra sur les Humains devant elle.

« On se lève avant l'aube parce que ces connards n'ont pas retenu la leçon. », précisa Drakaïs, sa voix, un sifflement mauvais entre elle et la jeune fille.

Lya plissa le nez, ses yeux brillant d'une lueur dorée avant de reprendre cette couleur chocolatée que Drakaïs lui aimait tant.

« On aurait dû les tuer. Ça, c'est une leçon qu'ils arriveraient à retenir.

– Peut-être. La mort a un côté plutôt mémorable. », marmonna Drakaïs en s'emmitouflant un peu plus dans ses fourrures. Par les Six, hiver ou été, il faisait toujours un froid glacial dans cette région.

Cette fois, ce fut au tour de Lya de l'observer un instant. Drakaïs soutint l'examen en silence, mais craqua au bout d'une minute :

– Quoi ?

– Rien, rien... Juste... D'habitude, tu m'encourages pas dans ma violence. D'habitude, tu me sors les mêmes conneries que Cerbère. D'habitude, c'est Elesborn qui–

– Oui, eh bien, Cerbère et Elesborn ne sont pas là, n'est-ce pas ? », maugréa Drakaïs en fronçant les sourcils, un nouveau bâillement aux bords des lèvres.

Nouveau silence. Nouvel examen, plus poussé cette fois.

« T'es fatiguée, remarqua Lya, surprise.

– Comme toute la meute. Les joies de se lever avant l'aube.

– Non, je veux dire, vraiment fatiguée. Et tu en veux à Cerbère et Elesborn de nous avoir fait lever à cette heure.

– Pas toi ?

– Si, mais, et crois-moi, ça me tue de l'admettre : j'ai douze ans et je suis moi, c'est dans ma nature de faire la tronche pour ce genre de truc. Toi ? Pas tant que ça. »

Drakaïs choisit de se draper dans un silence mutin.

« C'est tes rêves, c'est ça ? Je pensais que t'avais dit à Elesborn et Cerbère que c'était pas grave, que t'arrivais à dormir, que ça te mettrait pas en danger et que – »

D'un regard noir, Drakaïs la coupa dans sa lancée. Pendant quelques secondes, seul le vacarme causé par les Humains leur parvint.

« C'était une conversation privée, Lya. », la réprimanda Drakaïs. Elle semblait calme, mais une tension dans ses mots trahissait sa colère.

Lya décida sagement de ne rien répondre.

« Toi et moi, on parlera plus tard de ce que le mot « privé » entend. Mais à présent, toi et moi allons nous concentrer sur ces connards, qui sont la raison pour laquelle nous sommes là, à se les geler alors que l'on devrait être dans nos lits, à dormir, ou à essayer. Compris ? », martela Drakaïs, ses yeux verts plantés dans ceux de la plus jeune.

Lya, les épaules tendues, hocha la tête dans un mouvement crispé et se tourna de nouveau vers les Humains plus bas. Avec un soupir, Drakaïs fit de même. Elle crut entendre un « Là je te reconnais bien... » ronchon de la part de Lya, mais préféra l'ignorer. Le plus tôt ils en auraient terminé avec les Humains, le plus tôt elle pourrait retourner au lit pour essayer de dormir quelques heures.

Essayer, oui. Depuis maintenant quelques semaines, Drakaïs dormait mal à cause des rêves, ou plutôt cauchemars, qui hantaient les rares heures de sommeil qu'elle s'autorisait. Elle repensa à la vision qui l'avait tenue éveillée toute la nuit, se rappelant juste d'un hurlement strident, un « MAMAN ! » qui semblait s'être gravé dans son âme. Un simple mot, mais suffisant pour savoir quel cauchemar l'avait hanté. Un souvenir cette fois, mais ce n'était pas toujours le cas.

Elle ne comptait plus les nuits durant lesquelles elle s'était réveillée, en sueur et le cœur dans la gorge. Mais le pire restait les nuits où, comme la veille, elle sautait hors de son lit, un cri aux bords des lèvres. Lors de ces nuits-là, impossible de se rendormir. Ne lui restait plus alors qu'à envahir le lit de Cerbère ou d'Elesborn. Jamais celui de Lya ou d'un autre membre de la meute. Pas besoin que tout le monde soit au courant de son petit problème. Encore moins Lya. Elle préférait les yeux de la jeune fille brillants d'admiration plutôt que ternes d'inquiétude.

Elle aurait aimé être concentrée sur les Humains, mais à côté d'elle, Lya se tortillait sur elle-même en se mordillant les lèvres, ses yeux ternes revenant toujours sur Drakaïs.

Bien joué, idiote. Une vraie réussite pour ce qui était d'éviter de l'inquiéter, hein ?

En soupirant, elle posa sa main sur l'épaule de Lya et la caressa du pouce. Elle lui offrit un petit sourire sincère, qu'elle espérait rassurant, puis chuchota :

– Ce n'est rien de grave, Lyly. Pas dangereux. Juste des rêves. Et puis, Cerbère et Elesborn savent ce qu'ils font.

Les yeux de Lya se firent plus brillants, et la chose fut réglée. Cerbère et Elesborn avaient ce petit don : il suffisait de les nommer pour détendre l'atmosphère.

Et en parlant du loup...

A une vingtaine de mètres sur sa gauche, elle vit un éclair de fourrure blanc, Cerbère, bondir hors des buissons, suivi de près par Elesborn, une ombre noire. Ils filaient vers les Humains en contrebas, qui continuaient de fixer l'orée de la forêt, ignorant l'approche des deux prédateurs.

Quels gardes efficaces.

Temps de refermer le cercle sur eux.

D'un geste sûr, Drakaïs prit son arc, sortit une flèche de son carquois accroché à sa ceinture et l'encocha aussitôt.

« Tu restes bien derrière moi, jeta-t-elle par dessus son épaule à Lya en entamant sa descente vers leurs proies.

– Oui, maman. »

Petite peste. En d'autres circonstances, elle lui aurait donné une taloche, mais Drakaïs savait bien qu'elle ne pouvait plus se permettre de jouer avec Lya. Les Humains n'étaient jamais un jeu après tout.

Du coin de l'œil, elle aperçut les autres membres de la meute quitter leur cachette. A la cadence relâchée de ceux sous leur forme canine, il aurait été facile de les penser détendus. Mais il ne fallait pas s'y tromper : ils chassaient.

Un cri d'alarme devant elle apprit à Drakaïs que les Humains venaient de les remarquer. Trop tard ; ils étaient déjà sur eux. Drakaïs laissa l'obscurité rassurante de la forêt derrière elle et tendit la corde de son arc. Un des soldats braquait une arme affreusement familière dans la direction de Cerbère. Elle décocha sa flèche, qui se ficha à ses pieds. L'Humain lâcha un glapissement.

« Range-moi ça, ou la prochaine sera entre tes yeux. », grogna Drakaïs.

Derrière elle, Lya ricana.

« Drakaïs. »

Une nouvelle flèche encochée et sa corde déjà bandée, Drakaïs laissa son regard vert rencontrer l'ambre de celui de Cerbère. Avec un reniflement agacé, elle pointa sa flèche vers le sol, mais garda sa corde bandée. Au cas où.

Les Humains avaient cessé toute activité et leur vacarme avait laissé place à un délicieux silence, seulement brisé par la nature environnante. Des troncs d'arbres abattus écrasaient la terre enneigée et boueuse. Plus loin, des habitations sommaires en bois polluaient l'horizon. Elles étaient plus nombreuses que lors de leur dernière visite.

Les ouvriers avaient reculé pour laisser les soldats devant eux. Ces derniers surveillaient les nouveaux venus avec une crainte crispée mais résignée. Les flammes des brasiers allumés près des machines humaines léchaient leurs visages, soulignant leurs traits fatigués.

Un long grognement, grave et rageur, interrompit les observations de la Drakonique. A côté du loup blanc, assis et détendu, la louve noire montrait les babines, debout et crispée.

« Je pensais pourtant que la dernière fois, nous nous étions mis d'accords et que vos sales petits culs d'Humains auraient fichu le camps ! », aboya Elesborn en se dressant de toute sa hauteur sur ses quatre pattes, la fourrure hérissée alors que son grognement gagnait en intensité, jusqu'à noyer ses mots.

L'effet fut immédiat. Tout autour de Drakaïs, les grognements grondèrent dans les gorges des membres de sa meute. Drakaïs elle-même ne put s'empêcher de répondre à la colère de son Alpha, et lâcha un long sifflement enragé. Les Humains se tassèrent davantage sur eux mêmes.

« Alpha Elesborn. Alpha Cerbère. Il est un peu tôt pour ce qui est d'une visite pacifique, non ? »

La voix nasillarde venait d'un Humain qui s'était frayé un passage parmi les soldats. Les mains entrelacées derrière le dos en une posture nonchalante, il se tenait droit, une expression dédaigneuse tordant son visage de fouine.

« ''Visite pacifique'', hein ? aboya Elesborn en montrant les crocs. La dernière fois était pacifique, Humain. Aujourd'hui ? Nous avons bien vu les effets du pacifisme : aucun. Putain de décevant. Trop à mon goût. Mais quelque chose me dit que vous défoncer la gueule sera plus efficace. »

La fouine haussa un sourcil.

« Quoi, simplement pour quelques arbres coupés ? Non, voyons, nous savons tous très bien que ce n'est pas suffisant pour justifier une attaque. Un massacre pour vos précieuses brindilles ? Qu'en dirait la Vie, chiens ? Ce ne sont pas vos règles. Alors arrêtez ce petit jeu d'intimidation et foutez-moi le camp. Je suis sûr que d'autres affaires tout aussi importantes vous occupent.

– Pas un massacre, non, gronda Elesborn, sa fourrure hérissée. Mais pas besoin d'un massacre pour faire couler le sang. Les mots ne marchent pas avec vos petites cervelles d'attardés, peut-être que la douleur sera plus efficace. Et si la douleur ne marche pas non plus, arracher vos gorges de merde le sera.

– Des mots, des mots et encore des mots, marmonna la fouine en roulant les yeux. Mais où sont tes actions, chienne ? »

Il n'en fallut pas plus à l'Alpha pour bondir vers les Humains, le regard habité par une fureur sauvage. Les Humains sautèrent collectivement en arrière dans un concert de cris terrifiés. La fouine se cacha derrière un soldat, qui pointait une épée tremblotante vers la Loup-Garou. Elesborn, qui avait atterri là où se trouvaient peu avant les Humains, lâcha un reniflement moqueur, les babines retroussées sur des crocs blancs pour former un rictus dangereux.

« Mon petit jeu d'intimidation marche plutôt bien finalement, hein couillon ? » ricana la louve noire.

La fouine se dégagea de son bouclier humain, haineux et humilié. Il pointa un doigt tremblant vers elle en vociférant :

– Nous n'avons rien fait de mal, sales clebs ! Ce sont juste des putain d'arbres, alors arrêtez de venir nous harceler comme si nous nous en prenions à l'Arbre Mère en personne !

Drakaïs serra les mâchoires, la douleur lancinante dans son crâne progressivement plus vive. Plus la fouine parlait, plus l'envie de l'étrangler la gagnait. Elle tourna son regard vers le ciel, qui s'éclaircissait davantage au fur et à mesure que le soleil se levait. 

« Peut-être pas en personne, non, répondit Cerbère, sa voix rauque impossible à confondre. Mais c'est tout comme en vous en prenant à ses enfants. Cette forêt est sacrée. En l'attaquant, vous perturbez l'équilibre qu'elle représente. Vous commettez un crime. Pardonnable si vous vous arrêtez, condamnable de la peine capitale si vous vous bornez à continuer. C'est votre dernière chance, Humain. Notre dernière visite « pacifique », comme vous dites. La prochaine fois, nous ne serons pas là en tant que négociateurs, mais en tant que bourreaux. »

Drakaïs ne chercha pas à cacher son sourire quand la fouine resta silencieuse tandis que des murmures craintifs s'élevaient chez les Humains. Le regard toujours tourné vers le ciel, elle remarqua un attroupement de nuages, des tâches claires qui contrastaient avec le reste. Elle plissa les yeux. Leur forme ressemblait étrangement à un Dragon. La queue, les ailes, le corps, les pattes, le cou, la gueule... Un sifflement retentit dans ses oreilles, tout d'abord distant et étouffé, puis plus proche et perçant par la suite. Soudain –

un Dragon fend le ciel bleu nuageux, un hurlement puissant et sifflant déchirant l'air, une tache claire disparue aussi vite qu'apparue –

Drakaïs cligna des yeux, sonnée.

Le ciel était vide, les tâches de nuage dispersées et rosées par l'aube naissante.

Quoi ?

Une douleur sans nom déchira ses pensées. Une lance semblait lui percer les tempes, ses yeux engloutis par une vague d'aiguilles brûlantes. Sa flèche glissa entre ses doigts lorsqu'elle appliqua une main contre son front.

Par les Six, une migraine, ici et maintenant ? Elle aurait peut-être dû rester au camp. Peut-être que le manque de sommeil était plus sévère que prévu. Peut-être que–

Lya s'accrocha à son bras, ses griffes enfoncées légèrement dans sa peau. Autour de Drakaïs les grognements hargneux grondaient, ponctués d'aboiement agressifs. Des cris et des insultes - « Monstres ! » « Sales clebs ! » « Allez vous faire foutre ! »- fusaient dans l'air. Les Humains, acculés et terrifiés, étaient sur le point de craquer et de les attaquer. Les loups, eux, étaient à deux doigts de leur sauter dessus. Elesborn faisait les cent pas, sa fourrure hérissée.

La « visite pacifique » n'en serait bientôt plus une si les choses continuaient ainsi.

Putain d'Humains. Putain de migraine de merde. Putain. Putain. Putain !

« Silence ! »

Au milieu du chaos et de ses pensées embrumées par la souffrance, Drakaïs réussi à fixer son regard sur la figure blanche de Cerbère. A son ordre, tous s'étaient tus, y compris les Humains.

« Drakaïs ... ? », lui chuchota Lya, inquiète.

Mais toute l'attention de la Drakonique allait à Cerbère. Toujours assis, il contemplait le triste spectacle devant lui avec une froideur agacée.

« Nous ne sommes pas venus ici pour nous battre. »

La remarque était adressée à sa meute tout autant qu'aux Humains. Elesborn s'arrêta, ses yeux tournés vers l'autre Alpha. La louve noire baissa la tête, les oreilles en arrière et le nez plissé, contrariée.

« Seulement un avertissement, continua Cerbère. Le dernier. Nous reviendrons dans cinq jours. Et si vous êtes encore là passé ce délai, nous suivrons nos lois et nous vous forcerons à partir. D'une manière ou d'une autre, vous quitterez ces lieux. Alors autant que vous partiez la vie sauve et de votre propre chef. »

Un mouvement brusque surgit à la périphérie de la vision de la Drakonique. Elle tourna la tête vivement. Quelque chose n'allait pas. Danger. Danger. Danger. La lance de souffrance dans son crâne engourdissait sa raison. Ses tempes palpitaient. Douleur. Douleur. Douleur.

Un Humain, un soldat, s'était avancé. Son visage était voilé par une expression menaçante, son corps tremblant de fureur. Drakaïs encocha une flèche d'un geste inconscient. Entre les doigts de l'Humain se trouvait une arme, une arme humaine, ce pistolet de malheur, qui avait déjà fait tant de victimes parmi leur rang, et peut-être que le tremblement dans son bras annonçait un mouvement plus funeste, peut-être qu'il amorçait une mise en joue, peut-être qu'il allait la pointer sur eux, sur Cerbère et peut-être qu'il –

il se tient devant elle, l'épée entre ses doigts brille d'une aura sombre teintée de sang, il s'avance vers elle, un sourire fou sur ses lèvres, il lève son épée et la lame brille plus intensément, il abaisse son épée, et elle réagit enfin –

Elle décocha sa flèche.

Un cri de douleur la ramena à la réalité.

Devant elle, l'homme et son épée avaient disparu.

Mais plus loin, l'Humain, le soldat, était au sol, une flèche dans l'épaule. La Drakonique sentit le sang quitter son visage.

Puis, tout dérapa.

La fouine beugla et les soldats se jetèrent sur les Loups-Garous. Des couinements jaillirent dans l'air, suivis de près par des cris horrifiés et agonisants. Les crocs et les griffes déchirèrent la chair. Les épées s'enfoncèrent dans la fourrure. Des égorgements, des étripements, des décapitations, de tout côté. Et les tirs, des faisceaux bleus, ces foutus pistolets, mais aussi des flèches, qui fusaient de tous côtés.

Drakaïs ne réfléchit pas et laissa son instinct prendre le contrôle de son corps. Elle enchaîna flèche sur flèche, élimina menace après menace. Et une fois à court de flèches, elle laissa son arc et tira son épée de son fourreau. Lya était auprès d'elle, une tornade de griffes et de crocs, son poignard tailladant ses adversaires à la moindre ouverture. Et même si la Drakonique ne baissait jamais sa garde, elle faisait en sorte de laisser une partie de son attention sur la plus jeune, n'hésitant pas à tuer vicieusement les adversaires du louveteau si elle les jugeait trop dangereux. Et le rythme reprenait, coup après coup, esquive après esquive, parade après parade.

Très vite, tout fut fini.

Les corps des Humains gisaient au sol. Des tripes, de la chair, des touffes de poil, des membres éparpillés, des épées orphelines, des flèches plantées. Le sang teintait la neige boueuse. L'odeur métallique imprégnait l'air. Les membres de la meute blessés léchaient leurs blessures, les autres examinaient les corps, Lya était silencieuse près de Drakaïs, Elesborn leur tournait le dos, crispée, et Cerbère...

Cerbère n'était plus blanc, mais rouge.

Pendant un instant, il sembla à Drakaïs qu'elle était hors du temps, loin, loin, loin, mais pas ici, non, comme si elle était simple spectatrice de cet affreux tableau.

Ses pensées étaient claires. La douleur absente. Elle aurait pu en pleurer de joie.

A la place, elle se plia en deux et vomit toutes ses tripes.

« Qu'est-ce que c'était que ça, Drakaïs ? », grogna Elesborn en apparaissant devant elle. Elle était nue, ayant quitté sa forme canine, son corps peint de sang, le contraste entre sa peau sombre et le rouge saisissant à l'œil.

Drakaïs s'essuya les lèvres d'un revers de la main et ouvrit la bouche. Aucun mot n'en sortit. Elle la referma.

Les Loups-Garous se mirent à japper et couiner autour des deux femmes, sensibles à l'intensité de leurs émotions.

« Elesborn. », prévint Cerbère en venant placer son museau sous l'une des mains de l'autre Alpha.

Le regard toujours braqué sur Drakaïs, les sourcils froncés en une moue alarmée, Elesborn vint gratter les oreilles du loup blanc-rouge en ce geste rassurant que la Drakonique et les autres lui connaissaient tant, signe qu'elle se maîtrisait. Satisfait, Cerbère s'assit. Cette fois, c'était lui qui avait le regard le plus lourd. Face à lui, Drakaïs redevint une petite fille. Elle baissa les yeux, les lèvres tremblantes, un sanglot dans la gorge. Lya vint lui serra la main de toutes ses forces.

« Je... »

Sa voix sortit brisée.

« Je... »

Elle se racla la gorge. Les cadavres des Humains l'accusaient, leurs regards éteints tournés vers le ciel.

« Je ne sais pas. »

Mensonge.

Du moins, partiellement.

Tout ce qu'elle savait, c'est que ses rêves l'avaient cette fois capturée éveillée.


Note: 

Hey :D !

Le retour tant attendu des notes ahah ! J'ai dû me faire violence la semaine dernière pour ne pas ouvrir mon bec pour le 0 et le prologue :p ! Je reviens donc en force avec ce chapitre 1 ! 

Pour les anciens lecteurs, des personnages que vous connaissez déjà, mais qui ont bien changés pour certains eheh ! Et pour ce qui est du contenu du chapitre... rien à voir avec le premier jet, n'est-ce pas ? 

Un premier chapitre que j'ai mis beaucoup de temps à écrire ! Je crois que c'est sans doute l'un des textes les plus abouti que j'ai écrit. Je n'avais jamais accordé autant d'attention à chaque mot que j'écrivais. Et qui devient donc court. Je vous avez bien dit que la longueur des chapitres serait différente !

Un chapitre qui met en scène Drakaïs, le personnage principal et introduit l'une des thématiques principales de ce tome: l'identité. J'espère qu'elle vous aura plu ;) !

 J'espère sincèrement qu'il vous aura plu ! J'y ai mis tout mon petit coeur <3 !N'hésitez pas à me faire part de votre avis !

Bisous  et à la semaine prochaine !

PS: regardez-moi ça, une note plutôt courte pour ce premier chapitre ! Pas sûr que ça dure par contre...


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