48 : Retrouvailles

Le port d'Edimbourg se profilait depuis le pont du navire Fleurial où se trouvait Marie. Pendant toute la durée du voyage, elle avait dû faire la cuisine. Cela lui évitait de payer le capitaine avec des pièces pour la traversée. Tous les matelots avaient été ravis de bien manger pendant trois jours en mer. Cela les changeait habituellement du gros Riff qui ne leur servait pratiquement que du poisson sec avec des patates. Aussi, lorsque la jeune femme descendit sur le quai, tous la saluèrent un par un en la remerciant pour ce voyage, le capitaine aussi.

- Si vous avez un jour besoin de notre aide, sachez que nous serons là. Le navire reste à quai pendant un bon mois avant de repartir pour la France.

- Je vous remercie capitaine de m'avoir prise à bord.

Elle s'inclina puis partit à la recherches d'informations pour trouver le comte de Lantaganac.

Les jours passèrent puis les semaines pour laisser place aux mois. La bourse se vidait petit à petit si bien qu'il ne restait plus que quelques pièces d'argent. Malgré qu'elle ait trouvé un travail dans une auberge pour se laisser le temps de chercher, Marie n'avait trouvé aucune informations sur un certain Pierre de Lantagnac. L'espoir commençait à partir et elle se demandait si parfois elle n'aurait pas mieux fait de rester à la cour de France.
Seule dans son lit, elle avait les mains jointes et priait de toutes ses forces le Seigneur pour lui donner le courage de continuer.

- Je Vous en prie mon Dieu. Aidez-moi dans ma mission, faites que je retrouve mon mari.

Et les jours passaient, avec le même rythme de travail et les mêmes prières chaque soir. Un jour du mois de novembre, alors que la pluie et la brume s'étaient bien installées, plusieurs personnes entrèrent dans l'auberge. Ils s'installèrent à une table et appelèrent la serveuse pour prendre leur commande. Marie s'essuya les mains sur son tablier et s'avança vers eux.

- Que désirez-vous boire ?

- Quatre pintes et un beau sourire de ta part ma jolie, dit l'un d'eux avec un sourire carnassier.

Marie ne tint pas compte de la fin de la phrase et alla chercher ce qu'ils demandaient. Lorsqu'elle revint, la jeune femme surprit une conversation qui lui fit tendre l'oreille.

- Le futur roy Robert de Bruce a choisi comme un de ses ministres le noble français.

- Quand je pense qu'il n'a pas connu le grand William Wallace. Il pense tout connaître des écossais mais il n'est rien si ce n'est un traître à sa patrie. D'après ce qu'on raconte, il aurait trahi le roy Philippe pour de l'argent et en vendant des informations aux anglais.

- L'on m'a raconté qu'il avait monté une rébellion contre Philippe et que pour le punir, il avait tué toute sa famille et avait fait brûlé son château.

En entendant ces mots, Marie laissa tomber ses choppes de bière et vira au blanc. Toutes les têtes se tournèrent vers elle et un des hommes s'avança vers elle en lui demandant si tout allait bien.

- Tout... Tout va bien. Vous venez de parler du futur ministre du roy Robert. Connaissez-vous son nom ?

- Ah ça pour sûr ma p'tite dame. Malgré son nom anglais, on sait très bien qu'avec son accent, il est français. Pas vrai les gars ? dit le roux en se tournant vers ses camarades qui rirent.

- Son nom je vous en prie, murmura Marie les mains jointes.

- Peter de Landway, il habite à Falkirk. Le roy Robert lui a confié cette ville.

Marie ferma les yeux en remerciant la Vierge Marie pour son aide. Elle le fit de vive voix pour l'homme aux cheveux roux puis elle alla trouver l'aubergiste et lui annonça qu'elle partait. En échange de son salaire, l'aubergiste la laissa aller puis reprit sa tâche comme s'il ne l'avait jamais connu.

La jeune femme se dirigea de nouveau vers la table des hommes qui avait parler de son époux et leur demanda s'ils se dirigeait vers Falkirk.

- Qu'irions-nous faire à Falkirk ma p'tite dame ? se moqua un grand brun en buvant sa pinte.

- Emmenez-moi là-bas, et je vous promets que vous serez bien récompensé. Il se trouve que je connais le seigneur Landway.

- Vous connaissiez à peine son nom il y a quelques instants, comment vous croire ?

- Escortez-moi et je vous prouverai que j'ai raison. Vous ne le regretterez pas.

Les hommes se concertèrent et pesèrent le pour et le contre. Au bout d'un moment qui sembla être une éternité pour Marie, ils acceptèrent son offre et lui dirent de préparer ses affaires pour être prêt dans quelques minutes. Elle se dépêcha d'aller jusqu'à sa minuscule chambrée et récupéra ses quelques affaires qu'elle avait pu acheter avec son argent. Elle rejoignit les écossais dehors et l'un d'entre eux lui tendit la main pour la faire monter sur son cheval.

- Nous allons passer un peu de temps ensemble toi et moi, ma mignonne j'ai l'impression.

- A votre place, j'éviterais de mettre en colère une jeune femme et encore moins une française. Ce que vous sentez contre votre cuisse est mon arme. Gardez vois doigts autour des rênes et tout se passera bien.

L'homme fronça les sourcils mais obéit. En quelques heures, ils traversèrent les terres écossaises en passant par de nombreux petits villages. Lorsqu'ils arrivèrent enfin à Falkirk, la nuit était tombée et la bruine avait trempé les cavaliers. Aussi, lorsqu'ils s'annoncèrent au château du comte, les serviteurs ne surent comment agir.
Marie se tourna vers les hommes et leur demanda d'attendre dans la pièce le temps qu'elle revienne. Elle suivit le serviteur qui la laissa dans un salon d'attente pendant qu'il allait chercher son maître.
Marie en profita pour observer la petite pièce. Les pierres étaient grises et laissaient passer le froid de l'extérieur. Mais grâce au feu dans la cheminée, l'air était plutôt tiède. Ses yeux regardèrent la peinture au-dessus de la cheminée. Un portrait avait été peint d'une manière remarquable. La jeune femme plissa les yeux essayant de voir à la lueur du feu à quoi ressemblait la personne représentée. Elle sursauta en se reconnaissant quelques années plus tôt. Son mari savait donc peindre et elle ne le savait pas. Elle s'approcha un peu plus près de la cheminée et se mit sur la pointe des pieds pour mieux observer le tableau.

- Hum hum, fit une voix derrière elle.

Elle se retourna et ouvrit la bouche sans qu'un son ne sortit. Devant elle se trouvait son époux. Malgré la barbe qui avait poussé et quelques cheveux blancs, son mari n'avait pas beaucoup changé. Quelques cicatrices étaient cachés sous sa barbe taillée mais il restait le même homme d'il y a quelques années.

- Bonsoir... Pierre, commença-t-elle en ramenant ses mains devant elle.

***


Pierre était à son bureau, en train de rédiger une lettre pour le roy lorsque son serviteur était venu le trouver pour lui annoncer que la comtesse était rentrée. Étonné, il lui avait demandé qui avait bien pu oser dire ça. Le vieil homme qui repartait s'était retourné et avait dit d'une voix calme :

- Le portrait craché de votre portrait Sir.

Pierre avait posé ses verres de vue et s'était levé rapidement pour aller voir dans le salon d'attente. Il ouvrit la porte discrètement et regarda la femme de dos qui observait le portrait de son épouse. De dos, il ne saurait dire si c'était bien elle ou bien une autre qui se fait passer pour sa Marie. Il toussota et lorsqu'elle se retourna, il ouvrit en grand la bouche et l'admira. Oui, c'était bien elle, sa Marie, sa femme. Celle qu'il avait aimé déjà enfant.

- Bonsoir... Pierre.

Il fit deux pas vers elle et la prit dans ses bras pour la serrer aussi fort qu'il pouvait. Il se recula légèrement sans la lâcher pour éviter de la perdre de nouveau et murmura :

- Tu... Tu es en vie ?

- Ce serait à moi de te poser la question. J'ai cru que tu étais mort, le roy avait ordonné ton exécution, dit-elle en versant des larmes tout en l'admirant.

- Quand vous êtes partis, ils m'ont conduit dans un endroit isolé de la forêt. J'ai réussi à me libérer grâce à Eric, un de nos allié. Nous avons...

- Père, l'interrompit une voix masculine.

Ils se tournèrent tous les deux vers un jeune garçon qui se frottait les yeux tout en les observant. Marie le regarda attentivement, les yeux embués puis observa son époux.

- Nous avons récupéré les enfants avec Eric et nous nous sommes enfuis en Écosse. Je me suis rapproché de Robert de Bruce jusqu'à son couronnement. A présent, je suis son ministre.

Marie lâcha son époux et s'avança vers le petit garçon qui était toujours sur le seuil de la porte. Elle s'agenouilla près de lui, essuya ses joues et dit tout bas :

- Bonjour, Thibaud. Cela fait longtemps que tu ne m'as pas vue mais je suis...

- Mère, hurla Thibaud en se lançant dans ses bras.

Marie pleura à chaude larmes en le prenant dans ses bras et se relevant. Elle se tourna vers Pierre.

- Pas un instant je n'ai cessé de penser à toi. Je n'ai appris que lors de mon évasion que tu étais en vie. Je serais vneue plus tôt si j'avais su.

Pierre s'approcha d'elle et l'enlaça tendrement. Il baisa son front et murmura :

- Nous sommes enfin réunis et c'est ce qui compte le plus.

Le prochain chapitre est l'épilogue. 

Après ce sera terminé. Déjà... 

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