11.2 : Bataille
Le temps se figea un instant, les souffles furent retenus tandis que les morceaux de bois aux pointes acérées frappèrent de plein fouet les deux camps. Les chevaliers avaient une armure plus résistante que les fantassins et ils levèrent, en plus, leur bouclier de fer. Ceux qui se battaient contre les cavaliers furent décimés et du côté de l'ost, Robert d'Artois sourit à son fils :
- Ils viennent de commettre une lourde erreur. Lorsqu'ils arriveront avec leurs chevaux, que nos archers et nos arbalestriers leur tirent dessus. Nous chargerons avec le reste de nos soldats par la suite. Je compte sur toi mon fillot.
- Bien père !
Dans l'autre camp, les alliés de Robert de Namur pestèrent en voyant les hommes tomber un à un. Le bailli de Furnes, furieux car c'était surtout ses hommes qui avaient payés le prix de la décision de tirer, galopa vers Robertet lui cracha au visage en prononçant ces paroles :
- Vous me paierez ces lourdes pertes Dampierre !
Puis il partit au galop vers ses troupes qui restaient. Pierre sortit son épée du fourreau et lança le cri de la charge. Suivit de cinq cent cavaliers, dont Walram de Juliers, Jean de Gavre et Robert de Namur, le fils du comte de Lantagnac galopa jusqu'au centre de la plaine, pourfendant chaque ennemi qu'il croisait sur son chemin.
Les français tirèrent une salve de flèches causant quelques morts. Puis les derniers chevaliers français qui restaient, chargèrent avec à leur tête Robert d'Artois et son fils. Ce dernier poussait un cri bestial, s'apprêtant à pourfendre celui qui dirigeait les flamands : Robert de Namur.
La bastaille faisait rage et les chevaux hennissaient, certains tombaient à terre sous les coups. Pierre tentait d'atteindre Robert d'Artois afin de le tuer et ainsi semer la débandade dans les troupes ennemies. Alors qu'il n'était plus très loin, son cheval tomba à terre sous les coups des français dans ses jarrets. La jambe du futur comte fut bloquée sous la croupe du cheval et il tenta de se dégager tout en se défendant. Pensant sa dernière heure arrivée, il eut une pensée pour Marie qui devait l'attendre à Castelroc. Il tenta une dernière fois de se dégager sans succès. Il vit une épée brandit au-dessus de lui et commencer à s'abaisser. Mais le détenteur de cette arme fut tué et Walram de Juliers apparut devant Pierre.
- Debout mon ami ! Il faut aider Dampierre. Il est en mauvaise posture, déclara-t-il en tendant sa main pour l'aider à se relever.
- Que se passe-t-il ? Manda Pierre en enfonçant sa lame dans la poitrine d'un français après s'être relevé.
Les deux alliés se mirent dos à dos pour se protéger mutuellement et pourfendirent quelques français en essayant de communiquer.
- Le bailli de Furnes s'est retourné contre nous. Il nous a trahis, emmenant avec lui plus d'une centaine d'homme.
Pierre de Lantagnac allait répondre lorsqu'il vit Robert de Namur combattre Philippe d'Artois, ce dernier brandissait son épée au-dessus du corps de son adversaire qui était au sol. Pierre fit signe au comte de Juliers de le suivre jusqu'à eux. Tranchant têtes et mains, les deux hommes se firent un chemin jusqu'aux deux adversaires. Dampierre allait se faire occire mais le fils Lantagnac fut plus rapide et il bloqua l'épée du fils d'Artois avec la sienne.
- Lantagnac, cracha ce dernier.
- D'Artois, répliqua calmement mais froidement Pierre.
Les deux hommes se mirent en position tandis que Juliers aidait Robert à se relever. D'Artois chargea le premier et les épées s'entrechoquèrent. Les passes s'enchaînaient et chacun manqua de tomber à chaque coup à cause des corps à terre ainsi que de la boue. Pierre fit un faux pas et Philippe frappa de son épée. Il eut tout juste le temps d'esquiver mais son bras fut touché lui arrachant ainsi un hurlement de douleur. Il tint son bras de sa main et appuya dessus pour qu'il puisse se ressaisir sans que la douleur ne le perturbe trop. Mais alors qu'il s'apprêtait à riposter, Pierre tomba sur son épaule en glissant dans la bouillasse et Philippe, un rictus narquois sur le visage, s'apprêta à le pourfendre. Pierre lui lança de la terre dans le visage, le faisant ainsi reculer de quelques pas en se frottant les yeux et en hurlant de douleur. Il récupéra son épée et s'approcha de Philippe qui essayait d'enlever la boue de ses yeux.
- Pitié Lantagnac ! Epargne-moi !
- M'aurais-tu épargné ?
Le jeune homme resta sans voix et Pierre soupira. La bastaille n'était peut-être pas perdue s'il achevait cet homme. Pourtant, une phrase de son père lui revint en mémoire : « Un homme désarmé est un homme sans défense. Montre lui que tu as de l'honneur mon fils ! ». Il se retourna et s'apprêta à partir pour sonner la retraite avec Dampierre et Juliers. Mais Philippe d'Artois se releva rapidement, malgré sa vue brouillée, et sortit une dague de sa manche. Le hurlement du fils d'Artois se fit retourner Pierre et il allongea le bras devant lui. Le visage de son adversaire était à quelques centimètres de lui, un rictus de douleur inscrit sur son visage. Pierre baissa les yeux et vit sa lame insérée dans le ventre de son adversaire.
- Tu as perdu Lantagnac ! Ta famille mourra... Ainsi que tous... ceux que tu aimes... Et... Il est trop tard pour les sauver... Castelroc est... mort !
Il rit et cracha du sang sur le visage de Lantagnac. Pierre hurla et tourna son épée dans les tripes de Philippe lui arrachant ainsi un dernier cri de douleur. Il le rapprocha de lui, enfonçant un peu plus sa lame et murmura dans son oreille :
- J'ai peut-être perdu cette bastaille mais toi... tu as perdu la vie ! Et je pourrai ainsi voir ton père souffrir !
Il poussa ensuite Philippe d'Artois loin de lui et le corps de ce dernier tomba sur le sol. Pierre frappa le mort plusieurs fois de suite pour exprimer sa rage lorsque Walram de Juliers posa une main sur son épaule.
- Pierre ! Il est temps de partir. La retraite va être sonnée, retournons à Lille.
Les yeux assombris, Pierre releva la tête et observa le champ de morts devant lui. Beaucoup d'hommes se battaient encore, dont Robert d'Artois. Pierre se dégagea de l'emprise de Walram et abattit son épée sur le corps de Philippe d'Artois une dernière fois. Il prit ensuite par les cheveux le chef coupé de ce dernier et le brandit bien haut en hurlant le nom de Robert.
Le comte d'Artois tourna les yeux vers les hurlements et vit la tête de son fils. Blêmissant, il bégaya quelques instants avant de crier de colère. Il ordonna à ses hommes de poursuivre Lantagnac et les archers à se préparer pour tirer.
Walram de Juliers tira Pierre par le bras, qui lâcha la tête sanguinolente sur le sol boueux, et tous deux coururent pour rejoindre Dampierre près de la forêt. Les flèches furent tirées et Pierre se sentit bousculé sur le sol, une masse lourde tombant sur lui. Il poussa le corps qui se trouvait sur lui et se leva pour voir qui l'avait poussé. Il vit le corps de Walram inerte. Il cria son nom et tourna l'homme pour qu'il soit fasse à lui. Une flèche transperçait ses poumons et il murmura :
- Partez Pierre ... Rejoignez votre famille... Sauvez-la et... reformez une armée...
Robert de Namur lui hurla de le rejoindre mais Pierre voulut aider Walram à s'en sortir. Ce dernier le repoussa du mieux qu'il pouvait pour qu'il le laisse, avant de rendre son dernier souffle. En le voyant ainsi, le fils de Lantagnac lui ferma les yeux et courut vers Robert pour qu'ils puissent s'enfuir. Ils courraient du mieux qu'ils pouvaient, essayant de semer les français :
- Dispersez-vous ! Nous devons à tout prix les trouver, hurla l'un des chevaliers.
- Nous devons... nous cacher... Attraper des chevaux... Rentrer... Haleta Dampierre.
Pierre acquiesça de la tête et ralentit. Il se cacha ensuite derrière un arbre, suivit de Robert essayant de comprendre ce qu'il faisait. Posant son index sur sa bouche, Pierre observait les alentours, tentant de se repérer. Il sortit son épée doucement, sans faire de bruit puis, lorsque les bruits de sabots d'un cavalier se rapprochèrent d'eux, Pierre laissa passer un instant avant de frapper avec son épée le cavalier. Ce dernier tomba à terre et Robert l'acheva d'un coup sec.
- Essayons d'en avoir un autre. Je m'en occupe, déclara Pierre de Lantagnac.
Robert acquiesça et le laissa partir s'occuper d'un cavalier. Quelques instants, plus tard, le Gascon revint, les rênes d'un cheval dans la main.
- Nous devons faire vite, je crains n'avoir attiré des soldats vers nous.
- Retournons à Lille. Mon père risque d'avoir besoin de soutien.
- Il nous faut d'abord voir s'il y a des survivants !
- Jean de Gavre est mort, Walram de Juliers aussi. Le bailli de Furnes nous a trahis ! nos fantassins ont été décimés. Nos chevaliers sûrement emprisonnés. Et nos archers... Nos archers ont dû fuir. Ne retournons pas sur le champ de bastaille. Rentrons à Lille et...
- A deux ? Nous n'allons pas revenir avec une défaite et en plus sans hommes. Nous allons donc reconstituer une armée et marcher sur Furnes et toute autre ville flamande aux mains des français. Redonnons espoir au peuple !
- Mais...
- Tu as fait l'erreur de tirer sur nos fantassins alors que je t'avais prévenu ! A partir de maintenant, je prendrais les décisions. Direction Castelroc ! Le roy Philippe risque de nous attaquer à cause de notre trahison. Je ne laisserai pas mon peuple seul.
- Ne penses-tu pas qu'il l'a déjà fait ?
- Je ne l'espère point !
Les deux nobles partirent au trot, tentant de ne pas se faire repérer par les soldats grouillant dans la forêt flamande. Ils contournèrent Paris et descendirent la France pour retourner en Gascogne. Sur les terres des Lantagnac.
Voici que Pierre va essayer de rejoindre Marie. Mais arrivera-t-il à temps pour la sauver ? Et sa famille ?
Le prochain chapitre se passera sur les terres des Lantagnac (pendant que Pierre affronte les français).
Merci d'avoir lu ce chapitre et joyeuses Pâques à tous ! :)
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