chapitre dix-neuf






Anastasia


     Ce temps avec son père lui avait fait du bien. Ils avaient pleuré, chanté, dansé. Anastasia s'était senti à la maison. Depuis quelques années, ils ne prenaient plus vraiment ce temps à deux. La brune savait pertinemment que cela était de son chef. Elle se cachait derrière son travail, derrière ses études. Elle fuyait ces moments avec son père. Cette connection l'effrayait. Rien ne lui garantissait qu'elle ne le perdrait pas lui aussi.

Ils étaient rentrés la veille. Depuis, elle n'avait aperçu ni son père, ni sa belle-mère. Evan lui avait généreusement laissé une tablette de chocolat sur son bureau. Elle sentait son hésitation à chaque fois qu'ils se croisaient. Elle l'avait aperçu jeter un coup d'œil rapide du balcon et filer à l'instant où leur regard s'étaient croisés.
Vu l'heure, il était sûrement déjà à la librairie. Elle ne lui avouerait pas, meme sous la torture, mais le blond lui manquait. Elle se sentait comme un poids lourd, comme une chose impossible à gérer.

Son téléphone sonna quelque part à sa gauche. Elle décrocha.

« Allo ?
- Bonjour Anastasia, tu vas bien ?
- Will ! Écoute ça va et toi ?
- Tut tut, Evan m'a dit que t'avais passé un week-end compliqué.
- Quel traître.
- Non, je suis content qu'il me l'ait dit.
- Ah oui ?
- Je suis là pour ça aussi tu sais, pas que pour les bisous.
- Ah bon ? Mince alors, on s'est mal compris.
- Ha, ha. Hyper drôle la fille. Bon, sinon. Tu fais un truc aujourd'hui ?
- J'avais prévu de déprimer seule dans mon coin, gros programme.
- Wow, ok, dingue. Mais ça te dirait pas plutôt qu'on aille faire un tour en ville ?
- Tous les deux ?
- Bah oui. Pourquoi pas ?
- Ouais, ça me va. Très bonne idée.
- Super ! Je passe te chercher dans une vingtaine de minutes, ça te va ?
- À tout à l'heure. »



      À tout à l'heure, plutôt à tout de suite. Anastasia avait à peine eu le temps de s'habiller correctement que William toqua à sa porte. Il la salua d'un baiser sur la joue avant de lui ouvrir la portière.

« T'as une voiture, constata-t-elle une fois en route ;
- Quelle perspicacité.
- Non mais. T'as une voiture, et tu t'infliges le bus tous les jours. C'est pas cohérent.
- J'aime bien prendre le bus.
- T'aimes bien prendre le bus ? C'est très bizarre d'aimer prendre le bus. »

Le roux lui jeta un regard lourd de sens. Elle sentit ses joues se réchauffer à vive allure.

« Oh, j'ai compris.
- Compris quoi ?
- Tu sais très bien.
- Non, je ne sais pas. »

Elle souffla. Il lui pinça la cuisse.

« Tu sais, si tu veux passer du temps avec moi, tu peux tout simplement venir me chercher avec cette super voiture tous les matins.
- Etre comme ton chauffeur tu veux dire ? Super l'image que t'as dit moi.
- Non, comme le mec qui m'aime bien et que moi j'aime bien. Pour passer plus de temps rien que tous les deux. »

Il se gara face à la pharmacie. Chaque seconde dans le silence alimentait l'angoisse au fond du ventre de la brune.

« Tu m'aimes bien, alors ?
- Je pensais que c'était évident, marmonna Ana ;
- Je suis pas hyper sûr d'avoir compris. Tu peux répéter ? Peut-être même me l'écrire, comme ça je suis vraiment sûr de moi. »

Elle rit et sortit de la voiture. Il la suivit, un sourire amusé aux coins des lèvres.

« Aller, dis-le encore, réclama-t-il en déposant son bras sur ses épaules ;
- Où est-ce qu'on va ? »

Il lui embrassa tendrement le crâne, serrant doucement son épaule.

« Moi aussi je t'aime bien Ana, même très très bien. »

Elle sentit son rire le parcourir. Elle enfonça son nez dans son écharpe, étonnée de son propre courage d'il y a quelques minutes.

« Je pensais aller voir Evan, si ça te va ? Comme ça tu pourras refaire le plein de choses à lire.
- Tres bonne idée.
- Heureusement que ça te plaît, parce que j'avais pas d'autre plan.
- Tu joues avec mes points faibles.
- Je sais, moi et des livres et hop tu ne peux pas être plus heureuse !, sourit-il en lui ouvrant la porte de la librairie. »

La petite cloche au dessus de la porte sonna à leur entrée. La boutique semblait vide. Il n'y avait personne derrière le comptoir, personne sur les fauteuils et encore moins de monde dans les rayons.

« Quel accueil !, s'exclama le rouquin. »

Anastasia lui pinça doucement le bras. Elle entendit des pas lents avant d'apercevoir la silhouette de son demi-frère apparaître à sa gauche.

« Ana ! Will ! Qu'est-ce que vous faites la ? »

Quelques secondes après, le vendeur qui l'avait conseillé il y a quelques mois apparut du même endroit.

« Bonjour ! Bienvenus ! Qu'est-ce qu'on peut faire pour vous ? Oh mais je te connais, c'est toi qui avais pas lu toutes les Brontë, non ?
- Je pensais pas que t'allais t'en souvenir.
- Je me souviens de tous les livres que je conseille, surtout aux jolies filles. »

Elle sentit l'emprise de William sur ses épaules se resserrer doucement.

« Tout doux, Will. Il te la piquera pas, sourit le blond.
- Tu les connais ?, demanda Jake ? Jace ? ;
- Will, mon meilleur ami et Ana, ma demi-sœur.
- Les fameux ! J'ai beaucoup entendu parler de vous !, s'exclama l'homme au crâne rasé ;
- Oh crois moi, c'est réciproque, sourit malicieusement la brune. »

Elle observa, amusée, les yeux du blond s'écarquiller et le sourire du métis s'agrandir.

« Qu'est-ce qu'on peut faire vous ?, tenta de rebondir Evan ;
- Je voulais faire un petit cadeau à Anastasia alors quoi de mieux qu'ici ? »

Ana leva rapidement, trop peut-être, son regard vers celui du jeune homme à ses côtés. Un cadeau. Il voulait lui faire un cadeau. A elle. Mais en quel honneur ? Elle ne méritait pas de cadeau.

« Un cadeau ?
- Oui, oui. Choisis ce que tu veux.
- Mais William.
- Oui, Anastasia ? »

Personne ne l'avait regardé aussi tendrement que William à cet instant. A court de mots, elle se contenta de déposer délicatement ses lèvres sur les siennes. Elle le sentit sourire.

« Aller hop hop hop. En plus il faut que je papote avec Evan, lui dit-il ;
- Je peux prendre le livre que je veux ?
- Le livre, les livres même. Fais toi plaisir. C'est ma petite contribution pour te remonter le moral. »

Remonter son moral, ça il savait faire. Anastasia ne s'était pas sentie aussi heureuse depuis des jours.

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