Chapitre 7 - Un réveil difficile
Bonsoir à tous !
Désolée, j'ai un peu tardé à publier ce chapitre ^^ Scuze ... Haha ... Et pourquoi ? Oh, tout simplement parce que je n'ai pas arrêté de voyager en Italie ces derniers jours 😆 (Oui, ma vie est horrible). Bref, j'espère que vous l'aimerez quand même 💁🏻♀️ Ciao bambini !
En média : Eladar qui n'arrive pas à garder son sérieux devant mon objectif , ce flibustier incorrigible...
***
Lorsque Zélie ouvrit péniblement les yeux, elle constata immédiatement qu'un silence pesant l'entourait.
Déboussolée, la jeune femme battit des cils.
Soudain, une douleur fulgurante explosa dans sa tête. La souffrance lui déchira le crâne en deux, vrillant son cerveau - un sabre enfoncé dans l'œil ne lui aurait pas fait moins d'effet. Sa bouche s'entrouvrit d'elle-même et elle laissa échapper un long hurlement d'agonie.
Presque immédiatement, Zélie sentit des mains la toucher et lui prodiguer des caresses réconfortantes. Mais la jeune femme continuait de hurler sa souffrance et son dos se tendit comme un arc.
— Calme-toi, doucement. Regarde-moi, Capitaine, REGARDE-MOI !
Zélie, à travers ses larmes brûlantes, distinguait le visage flou de Coco penchée sur elle.
— Voilà ... Regarde-moi ... Ne bouge pas ...
Les larmes brûlaient les joues du capitaine tandis qu'elle pleurait sans pouvoir se contrôler. Ses yeux embués s'accrochaient désespérément à ceux de l'Espagnole, comme pour partager son fardeau bien trop lourd pour son enveloppe charnelle.
La jeune femme, tremblante et transpirante, reprenait peu à peu conscience, au fur et à mesure de ses inspirations heurtées. La douleur de son crâne pulsait toujours, mais une autre souffrance, plus insidieuse, lui enveloppait à présent l'omoplate comme un serpent en fer brûlant.
Zélie saisit la nuque de Coco d'une main brusquée par la fièvre et s'agrippa à elle fermement - elle aurait voulu lui broyer le cou qu'elle n'aurait pas procédé autrement. La matrone grogna et soutint son capitaine tant bien que mal, en veillant à ne pas amplifier son supplice.
— Qu'est-ce que ... qu'est-ce ...
Zélie balbutia un instant, puis montra les dents sans poursuivre, les paupières mi-closes.
— Calme-toi, insista l'Espagnole en posant une main fraîche sur sa joue sale. Je vais t'expliquer.
Coco patienta, le temps de vérifier que la jeune femme affaiblie lui témoignait une attention lucide, puis soupira :
— Tu étais sur le pont des colons, ramenant tes hommes à bord de l'Ourse. J'étais à tes côtés avec Gordon. Un type t'est tombé dessus. Littéralement. Un enfoiré de militaire, un gradé ... Celui qui ressemblait à un breton, tu sais ...
Coco aperçut une lueur d'approbation dans les yeux de son capitaine : cette dernière voyait très bien de qui elle parlait.
— Il s'est donc laissé tomber sur toi, comme on fait dans un traquenard, et t'a enfoncé une lame dans l'épaule. Je crois bien qu'il visait ton cou, mais sa chute était si maladroite qu'il t'a assommée sans le vouloir et son couteau a dévié.
— Ce breton ... chuchota Zélie en déglutissant péniblement. Il ...
— Envolé dans la nature, répondit l'autre avec une rage contenue. Constatant ton inconscience, il a probablement pensé t'avoir eue. Gordon s'est précipité vers toi en hurlant. Alors que moi - et j'ai honte de le dire - je suis restée choquée et immobile. Je ne comprenais pas comment, après une telle victoire, un rebondissement pareil avait pu arriver ... La situation m'a échappée. Je suis navrée, Zélie, mais le gredin court toujours.
La concernée sembla se dégonfler comme une baudruche et retomba sur son lit en lâchant la matrone abruptement. Sa rage se mêlait à sa souffrance, tandis qu'elle réfléchissait - ou du moins tentait de réfléchir. Son œil fiévreux croisa le regard d'Eladar qui la dévisageait avec inquiétude depuis son poste ; Zélie ferma ses paupières pour s'y soustraire, et replongea dans ses pensées.
Coco-la-Femme-Chat caressa une dernière fois sa joue et lui murmura qu'elle restait à sa disposition si besoin. L'instinct maternel était indéfectible. Lorsqu'elle sortit, le silence approximatif de la cabine n'était plus brisé que par la respiration de la jeune femme étendue, et le claquement des poulies contre la coque.
La bouche entrouverte, Zélie inspirait l'air humide avec lassitude. Comment diable avait-elle pu se laisser prendre de la sorte ?
Le sel lui brûlait la langue à présent. Elle avait soif. Manquait plus que cela ...
En se redressant péniblement sur les coudes, elle avisa son majordome avec une grimace.
— De l'eau, Eladar, s'il vous plaît, grogna-t-elle en sentant un autre liquide au goût métallique envahir ses gencives.
Tout à coup, le regard acéré de Zélie tomba sur un tas informe, étalé sur le parquet. Un dos voûté dépassait d'une couverture qu'elle connaissait bien. Et le dos respirait.
Une main ferme, mais douce, se coula sur sa nuque alors qu'elle fixait toujours le sol, privée de réaction. Une timbale bosselée approcha ses lèvres libres, et les baigna d'eau fraîche un moment. Mais la jeune femme ne pouvait détacher ses prunelles de ce corps gisant.
— Il vit encore ? Croassa-t-elle après quelques déglutitions maladroites.
— Il survit, répondit tranquillement le serviteur de sa voix grave, en posant le gobelet dans un renfoncement de la coque. Nous l'avons amené ici pour le soigner en même temps que vous. En bas, il aurait péri comme un rat au milieu des bactéries colportées par les Portugais.
— Qui en a donné l'ordre ? Maugréa Zélie en le fusillant du regard.
— J'en ai pris la responsabilité, Madame, annonça Eladar en soutenant leur échange visuel sans une once d'arrogance. J'ai pensé faire au mieux en m'opposant à Gordon et Coco-la-Femme-Chat. Eux souhaitaient l'attacher en bas, à l'écart certes, mais avec des soins hâtifs. Compte tenu de vos exigences habituelles, j'ai cru que vous vouliez le garder en bon état pour ensuite le marchander à votre guise. J'implore votre pardon si j'ai mal agi ... Voulez-vous que je le déplace autre part ?
— Vous êtes ridicule, Eladar. Laissez-le donc là où il est, ce n'est pas comme si nous avions le choix ...
Une plainte, suivie d'un hoquet de douleur, fusa dans les airs, les coupant dans leur discussion. La main qui soutenait la tête du capitaine se fit plus tendue mais, bien vite, un pouce irréfléchi lui caressa l'épiderme pour l'apaiser. Eladar était penché vers elle, la soutenant à bouts de bras, ses cheveux sombres chatouillant l'épaule de Zélie : le domestique dardait le séminariste blessé avec une animosité difficilement dissimulée.
— Voulez-vous que j'aille le calmer ? Murmura le majordome avec un rictus indéfinissable, inconscient de la familiarité qu'il témoignait à son capitaine.
Le corps de Zélie se réchauffait avec une vélocité alarmante, aussi glapit-elle immédiatement un "Oui !" perçant, qui fit sursauter son soigneur. Quand Eladar la reposa sur son traversin pour obéir, la jeune femme reprit son souffle (qu'elle avait court) et posa une main affaiblie sur son cœur battant du feu de Dieu dans sa poitrine.
"Par les tentacules de Davy Jones !" Songea Zélie en remontant ses draps sous son menton, encore tremblante.
La proximité avec son majordome avait été trop intime, son pauvre palpitant n'avait pas supporté un tel rapprochement inopiné. Que lui prenait-il à cet inconscient ? Elle était une femme, pas l'un de ses camarades de chambrée à rassurer ...
Si elle ressentait des passions comme toute créature femelle ou mâle de ce monde, elle s'était interdit depuis bien longtemps de les éprouver volontairement. Bien trop dangereux et emprisonnant.
Bien trop tentant aussi.
Alors que ses pensées se trucidaient les unes les autres, Zélie entreprit de se mettre en position assise, malgré son état. L'eau qu'elle avait ingurgitée devait contenir un calmant, car elle sentit sa douleur s'effacer sourdement mais lentement : bientôt, seuls quelques tiraillements à l'épaule persistaient. La jeune femme, la tête chamboulée par toutes ses émotions humaines en vrac, observa Eladar penché vers le séminariste.
C'est vrai qu'elle n'y avait pas été de main morte non plus ...
Eladar installa le pauvre diable sur le dos, lui tirant un grognement étranglé. Les yeux du blessé, superbement surmontés de sourcils broussailleux, étaient plissés par la souffrance, affrontant des démons invisibles qu'eux seuls voyaient ; Zélie les aperçut brièvement, cachés derrière des paupières closes, par-dessous la manche de son majordome affairé.
Si elle ne regrettait aucun de ses coups au moment où elle le dévisageait, elle sentit toutefois une pointe d'émotion indéfinissable titiller sa conscience. En le frappant, elle avait meurtri l'innocence pure : une vie dévouée et irréprochable aux yeux des hommes ; la tête froide, elle avait atteint son corps, consacré à un Ciel auquel elle ne croyait pas.
« Quelle étrange sensation » pensa-t-elle en se recouchant.
***
Les jours passèrent, s'étirant avec une lenteur exécrable ; la douleur de Zélie était si vivace qu'elle avait l'impression d'avoir un tisonnier planté dans son omoplate, de jour comme de nuit. La morphine la soulageait un peu, mais il fallait la rationner pour elle-même et le séminariste. Elle n'y avait donc droit que deux fois par jour, et encore ...
Son activité préférée était devenue le lancer de couteau à tous bouts de champ, depuis sa couchette. La porte de ses latrines personnelles était lacérée de haut en bas par de grosses entailles éparpillées, et un assortiment de lames était quotidiennement ramassé par Eladar sur le seuil.
Finalement, le seul réconfort de Zélie se réduisait à la perspective d'atteindre la côte le lendemain. De quoi mettre les pieds sur terre, ré-approvisionner le navire (notamment en morphine) et régler quelques petites affaires de pirate ; de plus, son statut de capitaine était en danger à cause de sa faiblesse, elle devait impérativement se rétablir au plus vite.
La jeune femme avisa le tas de bandages ensanglantés qui gisait au pied de son lit ; ce matin, sa santé fragile lui avait permis de se lever et d'effectuer quelques pas oscillants dans sa cabine. Mais sa blessure à l'épaule s'était rouverte et Eladar avait dû colmater la plaie, le temps que Coco vienne changer ses pansements ...
Pourtant, malgré sa blessure, le capitaine avait une mission à accomplir et elle avait largement eu le temps de songer à chaque détail de cette tâche.
Aussi se leva-t-elle et se dirigea-t-elle vers sa porte en fin de matinée, sans un regard pour l'homme recroquevillé à sa gauche ...
En passant, elle arracha sa précieuse canne, qui était suspendue dans l'entrée, et revêtit sa longue cape noire afin de dissimuler son corps tout entier.
À peine avait-elle entrouvert la porte qu'une bourrasque marine lui souffla à la figure, faisant valser les parchemins sur son bureau dans tous les sens. Ce grand air lui avait manqué, tout comme le cri perçant des mouettes et le parfum âcre des algues en décomposition.
Le pont était calme.
Malcolm et Bob étaient en train de réparer un filet, assis contre des tonneaux.
Si les deux compères arboraient un air sombre depuis la disparition de Jacky, Malcolm était celui des deux qui avait le plus souffert : il avait essuyé la perte d'un camarade proche, mais également de sa jambe droite, emportée par une rafale de balles meurtrières. Après les combats, Gordon et Gerry l'avaient maintenu pendant des heures, le temps que La Bidoche scie son membre déchiqueté au niveau du genou et cautérise la plaie au fer chaud. Ses hurlements avaient hanté les rêves de Zélie pendant des nuits.
Le bougre, dont la jambe de bois flambant neuve saignait encore, leva ses yeux clairs mais lourdement cernés vers son capitaine ; ses pupilles reflétaient la souffrance qu'il avait dû endurer pour rester en vie.
Malcolm avait vu la mort de près.
Il la gratifia d'un hochement de tête semblant dire "je partage votre fardeau" et retourna à son ouvrage sans tergiverser.
Zélie s'appuya sur sa canne et se planta devant ses hommes en frissonnant. Si son corps tenait à peine debout, il était désormais traversé par une excitation malsaine. Un souhait de vengeance et de fureur qui avait enflé pendant des jours et qui montrait maintenant son véritable visage. Un sourire fleurit sur ses lèvres bleues de froid.
— Messieurs !
Plusieurs têtes se levèrent à son appel. Zélie frappa le sol avec son grand bâton.
— La Griffe reprend du service ce matin ! Qu'on aille me la décrocher et allez me trouver Gordon ! Bougez-vous !
Les visages se décomposèrent en entendant ces simples mots - chacun regardait son voisin avec une appréhension viscérale.
— La personne qui y passe sait qu'elle est coupable, tonna Zélie d'une voix forte. Vous autres n'avez aucune raison de paniquer comme des brêles.
Tout à coup, un homme se mit à hurler de fureur. Ses camarades se tournèrent vers lui en un éclair et se saisirent de ses bras pour l'immobiliser. Le gaillard se démenait comme un chien enragé, distribuant des coups autant qu'il en recevait ; et de loin, on devinait la force de ses poings qui envoyaient les pirates dans les limbes aussi rapidement qu'une balle de pistolet.
Cela créa un véritable chahut sur le pont.
Zélie s'approcha, la tête haute, vers sa future victime. Cette enflure allait payer pour son insubordination.
Soudain, il leva la tête pour la fixer de ses prunelles folles de peur et de colère. Son crachat rebondit sur les planches devant les bottes enfilées à la hâte de Zélie.
Le capitaine s'immobilisa.
Ce n'était pas Óspakr.
***
Na ! Reste à savoir ce qui se passe après cette superbe *tousse* punchline 😏
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