Chapitre 3
Méfiance. Amis ? Bonheur ?
Des chaînes, du sang, de la souffrance. Des angoisses qui étaient enfouies si profondément en moi refirent surface. Ma vision se troubla, laissant place à des souvenirs d'horreur. Mes peurs les plus profondes réapparaissaient. Ma respiration s'accéléra.
- Ce n'est pas réel, ce n'est pas réel, ce n'est pas réel, récitais-je comme une incantation, un mantra qui me permettrait d'abréger mes souffrances.
Des larmes perlèrent sur mes joues. Tout mon corps ne pouvait s'empêcher de trembler. Alors que mes tremblements s'intensifièrent, des bras m'enlacèrent, m'accompagnant, me supportant dans mon épreuve. Ces crises se faisaient de plus en plus rares, mais étaient tout aussi violentes.
Après quelques minutes, ma crise se calma. Laissant place au silence dans ma chambre d'internat. Nous étions toutes les deux assises sur le parquet marron de la pièce. J'entendis Thaïs me parler. Seule autre personne présente. Je l'entendais, mais ne pouvais l'écouter. J'étais trop concentrée à lutter pour respirer, pour vivre.
- Hé, ho, tu m'écoutes, m'interpella ma colocataire d'un air doux. Je découvris qu'elle avait rassemblé sa longue chevelure blanche en une queux de cheval, lorsque j'étais en pleine crise.
- Désolée, tu disais ?
- Cela fait 2 mois qu'une crise n'était pas arrivée, c'est bien...
Je hochai la tête, peu convaincue.
- Tout s'arrangera quand nous irons à l'Académie. Le lycée ne va pas trop te manquer ? Me questionna-t-elle pour détourner mon attention.
Évidemment qu'il allait me manquer. Ce lycée était unique dans l'univers. Nous n'étions qu'une trentaine par an. Si nous nous trouvions ici, c'est parce que nous étions en danger dans le monde extérieur, ou bien qu'un de nos parents travaillait au gouvernement d'Ilgarde. Cette particularité entraîne donc une diversité d'espèces dans l'établissement qui est unique ! A Rowengarde, il n'y aura que des personnes comme moi. Cela me manquera...
- Ma vie ne se trouve pas à Ilgarde, il faut que je me concentre sur Rowengarde, ce lieu est ce que j'ai de plus cher, l'endroit qui je l'espère me fera sentir à ma place...
Thaïs se leva de toute sa hauteur en soupirant et me tendit un ticket.
- Tiens, cela serait bête que tu rates le vaisseau pour s'y rendre.
Je ne lui donnai qu'un vague grognement en guise de réponse, excédée qu'elle se prenne toujours pour ma mère après un an à se côtoyer. Je pris donc ce ticket. Il était noir avec un liseré doré tout autour, aucune destination n'était écrite dessus, nul n'a besoin de se rappeler où ce ticket mène.
- Et à mon avis si tu ne veux pas te faire remarquer, tu devrais faire disparaître ce halo de magie, me réprimanda-t-elle. Tes boucliers se relâchent avec moi, or tu n'as pas le droit à l'erreur, tu le sais plus que quiconque.
Sur ces mots, elle partit avec ses deux valises remplies en direction du hall, rejoindre les autres de la promo.
Merde ! Je n'avais pas remarqué. Je m'empressais de replacer mes boucliers, j'avais remarqué que je les négligeais de plus en plus. Heureusement qu'Onan n'était pas là pour voir ça. Ce n'était pas parce qu'il n'y avait pas d'espions dans le lycée, qu'il n'en aurait pas durant le trajet...Je me relevai de mon lit m'inspectant une dernière fois avant de partir dans le miroir de la chambre.
Je vis une fille de 18 ans qui a changé à bien des égards. En arrivant elle n'était qu'une graine à peine germée. Maintenant, elle prenait ses aises et était sortie de terre. Je ne parlais pas de ma puberté, mais de mes traumatismes qui me plongeaient dans une boucle infernale chaque jour contre lequel je dois me battre inlassablement.
Bon, assez fait de métaphores, il était temps d'y aller, je replaçai une dernière fois mes cheveux châtains ondulés derrière mes oreilles et priai pour que ce satané anticernes resterait là où il devrait être. Il n'était pas nécessaire que tout le monde puisse s'imaginer l'état dans lequel j'avais passé la nuit. Mes yeux noisette me regardèrent avec un éclat que je n'avais jamais vu auparavant. Cela me remonta le moral d'une certaine manière. 2 ans auparavant, ils étaient complètement vides. La sonnerie résonna pour la deuxième fois, m'indiquant que les collégiens et lycéens allaient bientôt sortir de leur chambre pour manger. Nous étions le 30 août et les cours avaient déjà recommencé.
Je passai le seuil de la porte avec ma valise, et me retournai une dernière fois en vitesse. La chambre 228... Elle m'a accompagnée pendant 1 an, elle était totalement symétrique, ses deux lits se trouvaient de chaque côté de la pièce, la fenêtre prenait place en face de la porte. Des placards étaient disposés à côtés des lits. La porte entrouverte, qui se trouvait à côté de celle-ci où je me trouvais, me montra la salle de bains. Habituellement, en champ de bataille causé par le maquillage et les soins de Thaïs (j'y piochais de temps en temps des affaires selon ses sollicitations.), maintenant, elle était toute blanche et propre, cela a un côté si impersonnel que je ne préférai ne pas m'y attarder.
Tout à coup, je sursautai, prise d'une panique indescriptible et me retournai. Mon cœur battait à la chamade, je pouvais compter ses battements tellement il me faisait mal. Cette présence, à tout point semblable à celle d'Ar... Non, ce ne pouvait pas être lui, je l'avais laissé il y a deux ans, vivant. Une erreur que je regrettais chaque jour. Et soudain ce voile qui me couvrit les yeux et qui se nommait la peur, croisa les deux yeux écarquillés d'un troisième. Effectivement, il faisait la même taille que lui, les mêmes cheveux et la même corpulence, mais ses yeux sont en tout point différents.
- Désolée, tu m'as fait peur, tu m'as prise par surprise, lui dis-je à bout de souffle causé par sa venue.
Il ne répondit pas et me regarda d'un air effrayé, presque soumis. Comme s'il était une marionnette et que l'on pouvait faire de lui ce que l'on souhaitait... Comme si un pouvoir plus grand que lui le contrôlait, qu'il n'était qu'une vie insignifiante, sans valeur.
Un pouvoir...
Merde mon bouclier, il s'était enlevé, causé par ma poussée d'adrénaline. Je m'empressai de le remettre, et regardai le troisième se remettre de ses émotions.
- Tout va bien ? Le questionnais-je, je suis navrée, je n'avais pas remarqué que...
Je n'eus même pas pu finir ma phrase qu'il s'enfuit en courant. Cela devait être un humain. Il ne devait avoir aucune once de magie en lui, il n'est pas habitué à ressentir cela chez les autres. Pour éviter qu'un accident de plus se produise, je m'empressai de descendre et de rejoindre mes amis dans l'entrée du lycée.
Une fois descendu, je m'efforçai de les trouver dans le hall. Il était exigu, agrémenté de blanc et de bois, bien que petit, il était élégant. La pièce ressemblait à celui d'un hôtel, avec des bagages partout, des groupes de personnes repartis dans toute la pièce. Je me massai le crâne, il y a bien trop de bruit pour une heure pareil. Je fis tout de même de mon mieux pour essayer de repérer Théo, le plus reconnaissable de loin. Et je remarquai une tête dépasser du lot, là, près des tables en verres disposés aléatoirement, à proximité du piano à queue noir (Qui ne servait qu'à énerver les gens de l'administration, qui travaille qu'à un mur de là, comme s'il attendait qu'un futur Beethoven se manifeste. À part Nyko, personne ne sait jouer, personne n'a eu l'occasion d'acquérir ce savoir.). Je me jetai dans les bras de Théo, le prenant par surprise.
- Tu vas me manquer gros bêta, je lui chuchotai en le serrant dans mes bras, en prenant tous mes amis par surprise, il est assez rare que je montre mon affection de manière aussi ouverte.
Enfin, j'essayais de le prendre dans mes bras, du haut de ses 2 mètres, mon mètre 65 dont je suis si fière me fit plutôt de la peine.
- Toi aussi petite menteuse... Me reprocha-t-il d'un air taquin, son visage assez enfantin esquissa un sourire, ce qui rehaussait ses yeux marron foncé.
Et voilà, c'est reparti, voilà 2 semaines qu'il savait enfin la vérité, mais il ne me lâchait toujours pas.
- Franchement Théo, tu exagères d'encore lui reprocher cette vérité, le réprimande Asher en fronçant ses sourcils blonds, tu sais pourtant que c'est la règle.
Théo leva les yeux aux ciels en entendant l'évocation de la règle numéro 1 du lycée et en me relâchant dans la même lancée. Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais l'impression qu'ils ne s' étaient jamais réellement appréciés.
- Allez, vas-y Asher rafraîchit ma mémoire veux-tu ? Dit-il, comme s'il essayait de le provoquer...
- Notre univers est donc composé de dizaines et de centaines d'espèces : elfes, loup-garou, magicien, métamorphes... Ces espèces sont pour la plupart dans l'alliance ARME, l'Alliance Royale Multi-Espèce et comme l'acronyme l'indique, c'est une alliance militaire, mais aussi politique... Cette alliance se place sous le commandement du roi d'Ilgarde. Roi qui supervise directement le lycée. L'établissement est donc composé d'élèves appartenant à de multiples espèces. Pour empêcher des attentats et attaques, nos raisons de venu dans l'école et notre espèce sont tenus secrets. La fin de l'année de terminal, il y a donc 1 mois, sonne la fin des cours et le début des préparatifs et la remise des diplômes. Hier, s'est déroulée la remise des uniformes de nos futures écoles, c'est à ce moment-ci que "légalement" on peut connaître l'origine de nos camarades... Répliqua Asher, à bout de souffle. Et d'ailleurs, si je peux ajouter quelque chose, on a enfreint la règle quand on t'a dit qui on était il y a 2 semaines.
Officiellement, je ne sais que depuis hier qu'Asher, Nyko et Thaïs sont de la même espèces que moi. Or, il est impossible de ne par reconnaître, de ne pas "sentir" les personnes appartenant à la même que nous.
- Franchement, ne fais pas ton M. Parfait, tout le monde sait que tu n'en as rien à faire des règles Asher, contra Théo en le toisant de toute sa taille.
- Eh bien, si on avait découvert que l'on avait révélé notre identité précocement on serait tous passé devant le Conseil, répliqua-t-il en lui jetant un regard noir de ses yeux verts.
J'étais étonnée qu'il ait réussi à se concentrer autant...
- Le Conseil ? Se questionna Théo.
- Pour expliquer rapidement, c'est le gouvernement à Rowengarde. Ici, à Ilgarde, c'est un roi et à Rowengarde, c'est un Conseil. Le Conseil est une assemblée d'élus qui ont le rôle de la cour de Justice et du gouvernement, lui renseigna Nyko, d'une voix calme parfaitement posée. Il avait changé son habituel jean contre le pantalon noir de l'uniforme. Il s'accordait parfaitement à ses cheveux.
- Le Conseil est réputé pour être très sévère. Je n'espère même pas qu'une personne que j'apprécie peu passe devant, tant qu'il est strict, marmonnais-je.
– N'aie pas peur, essaya de me convaincre Théo, tout au long de ta vie, tu seras accompagnée d'Asher, Niko et Thaïs vu que par chance, vous êtes de la même espèce, n'est-ce-pas les gars ?
- Bien évidemment, sans toi, il n'y plus de groupe, tu es en quelque sorte notre glue... Tenta de blaguer Asher en faisant son habituel clin d'œil.
- Je ne suis pas sûr que cela soit très reluisant comme comparaison Asher, éclata de rire Thaïs, ses yeux rouges rieur se tournèrent vers moi, pendant que Nyko donna une bourrade et son regard noir à Asher pour pas qu'il ne s'enfonce plus.
- Bref, tout ça pour dire que tu n'as aucun tourment à te faire, tout le monde t'admire par ton espèce et ton statut que ton confère de naissance... Reprit Théo.
Ma naissance, si mystérieuse, que personne ne savait vraiment comment j'étais née. Je n'avais personne à qui le demander, ils étaient tous morts ou bien, ils m'avaient fuis. C'est pour cela que j'évitais de montrer mon affection de peur de m'accrocher aux personnes qui m'entouraient. Le jour où ils m'abandonneront, et cela arrivera, je serais dévastée. Cela m'était déjà arrivé deux fois.
Je suis maudite.
Voyant que mes pensées me plongèrent dans des tourments que je ne pourrais combattre. Ce combat, jamais je ne parviendrais à le vaincre. Je n'étais pas assez forte. Je pris donc la décision de me reconnecter au monde.
- Après tout, vous êtes des dragons, conclut, Théo.
Merci d'avoir lu ce chapitre ! Qu'en pensez-vous pour le moment ?
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