Chapitre 21 - Harry


Je termine de mettre de l'ordre dans la maison pendant que Louis est sous la douche. Nous avons profité de ce dernier matin juste tous les deux. Il y en aura bientôt beaucoup d'autres, du moins je l'espère, mais ce matin marquait le dernier, ici, en Normandie.


Bien que ni Louis ni moi n'avons pris avec nous beaucoup d'affaires, nous nous sommes appropriés les lieux déplaçant un meuble ou deux, semant de-ci de-là nos effets personnels, livres, ordinateurs, pulls ou t-shirts. Je ramasse d'ailleurs l'un de mes sweats qui restait sur le canapé. Je le porte à mon visage, respirant l'odeur que Louis y a laissé après l'avoir porté chaque soir de cette semaine.


J'inspire fortement. Je n'ai pas envie de quitter cet endroit. Je n'ai pas envie de rentrer sur Paris. Je dois envoyer un message à Gemma depuis deux jours déjà et je ne parviens par à m'y résoudre. Je ne suis pas prêt à l'affronter, je ne suis pas armé à entendre les reproches qu'elle serait capable de me faire alors que c'est moi qui suis blessé par ses mots, son comportement.


Je souffle et me laisse surprendre par les bras de Louis autour de ma taille, son corps contre mon dos, ses lèvres entre mes omoplates à travers mon t-shirt.


"Tout va bien ? s'inquiète-t-il.

- Oui, ça va.

- Tu es bien songeur...

- Ouais, je réponds en me tournant entre ses bras, mes lèvres trouvant immédiatement les siennes. Je pensais à ma sœur. A la conversation que je vais provoquer.

- C'est pour le mieux, Harry.

- Je sais...

- Tu as besoin de cette conversation, peut-être qu'elle aussi. Peut-être que la relation restera comme elle est, mais tu seras libéré d'un poids. Tu pourras passer à autre chose, quoiqu'il en soit.

- Oui. Merci de me supporter Louis, je rétorque en embrassant à nouveau ses lèvres, resserrant mon étreinte autour de son corps.

- Je te soutiens, Harry. C'est différent. J'ai envie de te voir pleinement heureux."


Les mots de Louis me touchent énormément. Nous nous connaissons depuis si peu de temps et pourtant nous trouvons les mots qui nous permettent d'avancer, de reprendre confiance.


Notre petit moment est interrompu par un klaxon dans la rue. Louis et moi nous avançons devant la fenêtre ouverte pour découvrir la voiture de la fille d'Augustin et le vieil homme, installé à l'avant, nous faire un grand signe de la main à travers la vitre baissée. Je souris, ravi de revoir ce papy impertinent.


Je jette le sweat sur le canapé et glisse ma main dans celle de Louis alors que nous sortons pour accueillir notre hôte et sa famille.


La voiture est à peine stationnée que déjà Augustin ouvre sa portière. On entend sa fille l'enguirlander et lui demander d'attendre, de faire attention. Mais le vieil homme ne s'encombre pas des réprimandes et descend de la voiture, sa canne à la main en soutien. Sa fille nous salue et lève les yeux au ciel lorsque nous échangeons un sourire complice face au comportement de son père.


"Ah les gamins ! Quelle joie de vous voir ! dit-il en s'approchant de nous. Vous avez pris soin de ma maison ?

- Comme si c'était la nôtre, répond Louis en acceptant l'accolade que lui donne Augustin.

- Bien bien."


Augustin s'écarte de Louis et me serre la main en pressant mon bras. Le petit sourire au coin de ses lèvres est espiègle et je me demande ce qu'il a derrière la tête à cet instant précis. Et puis, il nous contourne, n'écoutant toujours pas sa fille qui lui demande de l'attendre. Augustin fait le tour de la palissade de sa maison et emprunte la route pavée, le pas sûr malgré sa récente blessure et la fragilité de son corps. Mais le sourire sur son visage et l'éclat de son regard quand il se retrouve sur la plage, face à la mer, nous laisse tous attendris.


La maison d'Augustin est idéalement située et, après l'avoir occupée quelques semaines, je comprends les raisons pour lesquelles il ne veut pas la quitter. L'environnement prête à la détente, à l'apaisement. Et dans le monde dans lequel on vit, toujours connecté, toujours en action, c'est un véritable havre de paix.


Je suis heureux de savoir que Louis et moi allons repartir plusieurs semaines avant de retrouver notre quotidien parisien. Je m'aperçois que j'aspire à une vie plus paisible, loin du bruit et de la foule. Aujourd'hui, même si les raisons de mon éloignement sont tout autre, je constate que rien ne me manque de ma vie d'avant, d'avant Louis.


Je regarde Augustin et son visage apaisé et heureux. Puis je tourne la tête vers Louis qui m'observe, son regard tendre posé sur moi, serein. Je l'ai connu douloureux, triste, maussade. La Normandie et notre rencontre, j'ose l'espérer, lui ont rendu son sourire et son bien-être.


J'avance de quelques mètres et rejoins Augustin. Je lui offre mon bras pour remonter vers la maison.


"Bienvenue chez vous Augustin, je lui dis.

- Ah ah, merci gamin. Cette vue m'a manqué.

- Je veux bien vous croire. Louis et moi disions hier soir, qu'elle allait nous manquer également.

- C'est le doux effet de la Normandie. De notre beau Cotentin, ça !

- Oui."


Je me tais, laissant mes pensées divaguer. Augustin s'en aperçoit et presse sa main sur mon avant-bras. Je porte mon regard sur lui et lui sourit doucement.


"Tu as sauvé l'âme en peine enfermée au centre. Laisse Louis sauver la tienne, gamin, reprend le vieil homme en s'arrêtant. Je te sens songeur et déjà nostalgique alors que vous n'êtes pas partis.

- Il a déjà beaucoup fait, vous savez Augustin.

- Oui. Mais une part de toi ne va toujours pas bien. Laisse-le entrer. Laisse-le t'aider à affronter ce qui te tracasse. Ta fuite ne te mènera nulle part.

- Je me suis confié. Plus que je ne m'en saurais cru capable. Et Louis ne me juge pas. Il m'écoute et me soutient. Il me conseille sans jamais être trop brusque ni sans prendre parti.

- C'est un homme intelligent.

- Oui. Je pense que le destin m'a conduit jusqu'ici pour me permettre de le rencontrer. Pour me redonner confiance et espoir. Je n'avais plus envie de..., je soupire en passant ma main libre sur mon visage. Louis m'a déjà bien sauvé, Augustin. Bien plus qu'il ne l'imagine d'ailleurs. Il m'a redonné goût à une vie dont je ne voulais plus. Aujourd'hui, je ne conçois pas un jour sans lui.

- Je te l'ai déjà dit... C'est l'amour, ça, Harry."


Augustin m'appelle par mon prénom et la conversation prend toute son importance. Je dois le reconnaître, Louis a ravi mon cœur en quelques jours. En quelques semaines à peine, je suis tombé amoureux de l'homme bienveillant et résilient qu'il est. J'espère être à sa hauteur.


Je presse les doigts d'Augustin entre les miens et lui murmure un merci alors que nous atteignons la maison. Je le laisse parcourir les quelques mètres qui le sépare de l'entrée. Je l'observe caresser les fleurs de ses hortensias qui bordent la façade. Je me tourne à nouveau vers la mer et inspire fortement. La voix de Louis me surprend autant que ses doigts qui agrippent mon menton pour me faire tourner le visage vers lui. Il ne dit rien de plus, juste son regard azur plongé dans le mien et le fin sourire sur ses lèvres qu'il dépose sur les miennes.


***


"Tu es sûr que je ne peux pas t'aider ? m'interroge Louis alors que je sors les légumes. Même juste éplucher ?

- Et te couper un doigt et nous obliger à partir aux urgences ? je l'interroge d'un air taquin, mon index appuyé contre son torse. C'est gentil Louis, mais...

- Aaah vous ne savez pas reconnaître mes talents culinaires. Tous autant que vous êtes !" m'interrompt-il faussement vexé.


Je le regarde contourner la table et sortir de la cuisine alors que je laisse échapper mon rire. Les premiers jours de notre cohabitation, Louis et moi avions convenu de cuisiner chacun notre tour. J'ai rapidement pris le relais si je voulais manger un minimum sainement, voire manger tout court. Il y met de la bonne volonté mais il y a toujours quelque chose qui vient gâcher son plat : trop cuit ou pas assez, trop salé, trop poivré. Souvent trop... tout.


Je rince les tomates sous l'eau fraiche lorsque son corps se glisse contre le mien, son nez chatouillant doucement mon cou. Je l'éclabousse légèrement et ça le fait râler, évidemment.


"Tu as décidé de m'embêter aujourd'hui ?

- J'adore ça... c'est vrai. Ca marche ?

- Non !

- Qu'est-ce que tu as ? Tu tournes en rond depuis tout à l'heure..., je lui demande en coupant l'eau et en récupérant le torchon pour m'essuyer les mains.

- Je suis triste de quitter cette maison, il chuchote près de moi.

- Moi aussi. Je me suis rarement senti aussi bien quelque part.

- Oui mais ça c'est parce que tu m'as rencontré !

- Tu crois ? je rétorque alors que je glisse mes bras autour de sa taille.

- J'en suis sûr !" sourit-il grandement.


Je ne résiste pas à ce sourire qui illumine son visage. Le regard de Louis est étincelant. Il est déjà nostalgique de quitter cette maison et nos nouveaux amis, mais l'idée de retrouver ses parents, sa famille, le rend heureux. Et moi aussi.


Je glisse mes lèvres sur sa joue, je mordille sa mâchoire tandis qu'il passe ses bras autour de mon cou. Ma playlist débute une nouvelle chanson et j'entraine Louis dans une petite danse langoureuse, au milieu de la cuisine d'Augustin.


Louis enroule mes mèches de cheveux autour de ses doigts, tirant légèrement dessus, alors que je cherche ses lèvres. Je tente de lui dérober un baiser mais il m'échappe. Je dévie l'une de mes mains un peu plus bas sur ses reins, pressant nos bassins l'un contre l'autre. Le désir s'immisce doucement entre nous. Son regard azur accroche le mien. J'inspire en mordillant ma lèvre inférieure. Louis me rend fou. Louis me rend vivant. Il m'a sorti de la torpeur dans laquelle je m'étais piégé.


Il avance son visage près du mien, cédant à mon envie de l'embrasser. Mais je joue le même jeu que lui et me dérobe, nichant mes lèvres dans son cou. J'aspire sa peau fine et le sens frissonner.


Mais je n'y tiens plus. Le corps de Louis contre le mien est une douce torture. Je relève mon visage et la pression de ses doigts à la base de ma nuque m'empêche d'amorcer le moindre geste. Il se hisse légèrement contre mon corps et capture mes lèvres. Le baiser est doux, empli de cette tendresse qui le caractérise sous son air indocile. Je resserre mon étreinte, quémandant un baiser plus intense.


Nous n'entendons pas le bruit de la porte d'entrée qui s'ouvre mais la voix d'Augustin qui nous signale son retour nous interrompt. A bout de souffle, à bout de désir, je m'écarte de Louis. Je caresse sa joue doucement et glisse un dernier baiser rapide sur ses lèvres rougies et gonflées.


"Et bien, les gamins... Qu'est-ce que vous étiez en train de trafiquer dans ma cuisine ?"


Louis s'adosse au plan de travail et se racle la gorge pour masquer son rire tandis que je glisse mes doigts dans mes cheveux, un peu nerveux, avant de récupérer le sac de courses dans la main du vieil homme.


"Louis a tenté de me distraire alors que je commençais à préparer le déjeuner...

- Mais quel menteur celui-là ! peste-t-il.

- Ah ! Gardez toujours cette espièglerie les enfants !"


Louis et moi échangeons un regard et un sourire emplis de jolies promesses.


*

*  *


Plus le temps passe et plus je les aime ces deux-là, peut-être moi-même un peu plus sereine.

J'espère que vous avez aimé ce chapitre.

Le prochain est presque terminé et il semble que j'ai retrouvé un rythme plus régulier d'écriture (de nouvelles idées aussi qui font leur chemin).

Merci, encore, de continuer à me soutenir dans cette histoire.

Je vous embrasse

Mimi


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