Chapitre 17 - Harry


J'attends Louis juste devant la maison, faisant tourner les clefs de ma voiture entre mes doigts. Il est nerveux et moi aussi, je dois bien l'avouer. Nous savions tous les deux qu'à un moment ou un autre, la réalité allait nous rattraper. Au fond, je suis heureux que ce soit la sienne plutôt que la mienne mais je ne m'étais pas préparé à rencontrer sa famille et son ami Zayn, dans ces circonstances.


Il sort enfin de la maison, les cheveux encore humides et en désordre. Je l'observe fermer la porte et me rejoindre, boitillant en appui sur sa nouvelle canne. Il n'en a pas besoin mais je n'ose pas le lui faire remarquer. C'est peut-être une manière pour lui de se protéger des assauts de sa sœur.


Tout comme Charlotte, je suis surpris qu'il ne l'ait pas tenue informée de sa sortie du centre et de son installation dans la maison d'Augustin avec moi. Lui a-t-il seulement parlé de moi ?


Pris de doutes au moment où il arrive près de moi, je glisse ma main sur son avant-bras, attirant son attention.


Je vois bien qu'il est tendu et qu'il attend de moi du soutien, toutefois, je lui demande :


"Tu es sûr de vouloir que je t'accompagne ?"


Il lève sur moi un regard incrédule mais presse mes doigts entre les siens.


"C'est peut-être ma seule certitude aujourd'hui... souffle-t-il.

- Ok... C'est juste que je ne veux pas créer une discorde de plus avec ta famille.

- Je vais passer un sale quart d'heure, mais ne t'inquiète pas, Charlotte sera heureuse pour moi et ravie de faire ta connaissance, répond-il en venant biser mes lèvres. Et puis, je suis sûr que Zayn a pris les devants... C'est difficile de résister à Lottie."


Louis rit et d'un seul coup, toute la tension autour de nous s'envole. Nous retrouvons la sérénité de quelques heures plus tôt.


Nous montons finalement dans la voiture, stationnée un peu plus haut dans la rue, juste après la boulangerie. Après une grande inspiration, je mets le contact et traverse le bourg jusqu'au centre. En quelques minutes à peine, Louis et moi arrivons sur le petit parking. Je gare le véhicule et coupe le contact. Louis ne bouge pas.


Je me penche vers lui et glisse ma main sur sa joue pour l'inciter à tourner son visage vers moi. J'embrasse doucement ses lèvres, lui insufflant le courage qui semble lui faire défaut.


"Tout va bien se passer."


Je me veux rassurant et le petit sourire qu'il m'offre est la preuve de ma réussite.


Nous sortons de la voiture et remontons jusqu'au centre. Adam, qui fume une cigarette devant l'entrée, nous aperçoit et nous interpelle. Nous nous arrêtons pour l'attendre. Il jette un regard à la canne de Louis, les sourcils froncés.


"Salut les gars ! dit-il en arrivant près de nous. Louis, la canne ?

- Circonstances atténuantes, je devance Louis dans sa réponse.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? interroge le jeune orthopédiste.

- Ma sœur a débarqué au centre pour me faire la surprise... Elle, son compagnon, leur bébé et Zayn, mon meilleur ami...

- Tu ne l'as pas prévenue de ta sortie ? pressent Adam.

- Ouais..."


Le désarroi envahit à nouveau Louis qui mordille l'intérieur de sa joue.


"C'est pas grave, voyons ! T'es toujours suivi ici. Que tu sois au centre ou non, ça n'a pas d'importance, tente Adam.

- Oui, mais je n'avais aucune raison valable de ne pas lui en parler.

- Sauf de cacher mon existence, je ne peux m'empêcher d'ajouter.

- Non ! s'indigne Louis. Allez, allons-y, que je lui explique la situation une bonne fois pour toute."


Pris d'un nouvel élan, Louis se met en route, la claudication légèrement plus prononcée. Adam me lance un regard auquel je réponds d'un haussement d'épaules, avant de rejoindre Louis sur le chemin de la plage.


C'est à proximité de notre banc que nous apercevons sa famille. Louis s'arrête et regarde sa sœur. L'émotion le gagne quand son regard se pose sur le petit bébé qu'elle tient tout contre elle. Au-delà de leurs retrouvailles, Louis va également faire connaissance avec son petit neveu.


C'est un garçon brun aux bras et au cou entièrement tatoués qui nous voit d'abord. Son sourire s'élargit et il nous rejoint à grandes enjambées, attrapant Louis contre lui sans lui laisser le temps de faire le moindre geste ou de dire le moindre mot. Son rire résonne et son étreinte se resserre autour des épaules de mon amant. La tendresse et la joie que je lis dans son regard m'apaisent. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit du meilleur ami de Louis.


Charlotte se tourne, son bébé calé contre elle et sa main sur sa bouche, contenant son émotion. Son compagnon récupère le petit et laisse la sœur de Louis lui tomber dans les bras. Discrètement, je le libère de sa canne qui l'encombre et dont il n'a nul besoin, que ce soit physiquement ou moralement.


Les retrouvailles sont si belles qu'aucune réprimande ne semble se profiler.


La sœur de Louis glisse ses mains sur le visage de son frère et sèche les larmes qui roulent doucement sur ses joues. Elle fixe son regard d'un bleu encore plus clair que celui de mon amant dans les yeux de Louis, tentant de percer tous ses secrets. En réponse, il cligne des paupières et prend les mains de Charlotte entre les siennes.


"Tout va bien, murmure-t-il.

- Tu as bonne mine, en effet, répond-elle soulagée.

- Tu me présentes mon neveu ?"


La voix de Louis est étranglée par l'émotion. Mon cœur se gonfle de tendresse pour le jeune homme, si fort, debout au milieu des personnes qui l'aiment sûrement le plus, moi y compris.


Le compagnon de Charlotte s'approche et cale le petit dans les bras de sa maman. Elle dégage le petit visage du plaid qui l'entoure et remonte légèrement le petit bonnet. Le bras de Zayn entoure les épaules de Louis, soutien physique dissimulé dans un geste affectueux. Le regard de Louis brille intensément lorsqu'il se pose sur le minois du bébé. Délicatement, il glisse son index sur la joue rebondie de son neveu.


"William, je te présente ton tonton Louis", minaude Charlotte.


Un petit gazouillis se fait entendre, ravissant le cœur de Louis... et le mien, de le voir si ému. J'aimerais prendre la place de Zayn et soutenir le jeune homme mais je n'ose m'immiscer au milieu de cette jolie famille.


"Salut petit bébé. Tu es tellement beau... Il est magnifique Lottie.

- Je sais... C'est un amour de bébé, fond la jeune maman avant de déposer ses lèvres sur le front de son fils.

- Je suis tellement heureux de te rencontrer enfin, souffle Louis à l'attention de son neveu.

- Il était temps, en effet... Et apparemment, on a bien failli te louper..."


Le ton de Charlotte est légèrement piquant. Même si elle semble en vouloir un peu à son frère, la joie de le voir et de lui présenter son fils a pris le dessus. Louis relève son regard sur elle et se décale légèrement, échappant à l'étreinte de Zayn. Il se tourne et plonge son regard dans le mien avant de tendre sa main vers moi.


J'inspire et me rapproche, glissant ma main dans celle de Louis. Il serre mes doigts entre les siens. Je caresse son poignet pour le rassurer.


"Hum, commence-t-il, tortillant ses lèvres d'hésitation. Voilà... donc... Hum.

- Je suis Harry, je finis par me présenter, sauvant Louis de son embarras.

- Oui, Harry. On s'est... Nous nous sommes rencontrés aux abords du centre. Il...

- Bonjour Harry, interrompt Zayn en me présentant sa main que je serre. Je suis Zayn, le meilleur ami de Louis. J'ai... beaucoup entendu parler de toi, sourit-il.

- Nous n'avons pas tous eu cette chance, rétorque la sœur de Louis. Moi, c'est Charlotte. Enchantée Harry. Je te présente Lewis, mon compagnon et William, notre adorable bébé."


Je salue tout le monde et souris devant la frimousse du petit.


"Nous pourrions aller prendre un verre au Cap Marine, je propose, en indiquant d'un geste de la main le bâtiment en briques rouge et beige derrière nous. Nous serons mieux pour discuter.

- Allons-y, rétorque le beau-frère de Louis, en récupérant la poussette et le sac à langer sur le banc.

- Nous avons beaucoup de choses à nous dire, oui, répond Charlotte. Si Louis retrouve sa langue."


Pour toute réponse, mon amant lui fait une grimace. Nous rions de bon cœur et prenons le chemin du restaurant qui borde la dune. Je retiens Louis et glisse mon bras autour de sa taille, sa canne toujours dans ma main. Je dépose mes lèvres sur sa joue juste avant qu'il se tourne vers moi.


"Elle est fâchée, tu crois ? demande-t-il d'une petite voix.

- Je ne pense pas non, je ris. Tu ne regrettes pas ton choix d'être resté ici ? Avec moi ?

- Absolument pas ! Ne prend pas ma gêne pour des regrets. C'est juste que... J'ai rarement présenté quelqu'un à ma famille. Surtout dans ces circonstances...

- J'ose espérer que tu n'es pas adepte des centres de rééducation pour séduire les âmes en peine qui errent autour !?!"


Son rire résonne près de mon oreille, alors qu'il crochète son bras autour de ma nuque. Il dépose ses lèvres sur les miennes, dans un baiser que je trouve beaucoup trop chaste.


"Non ! Mais s'il fallait en passer par là pour te rencontrer... Je n'ai pas de regret.

- Bon ! Vous venez les garçons ?!"


La voix de Charlotte interrompt ce moment suspendu. A mon plus grand regret, Louis se détache rapidement de moi, laissant mon cœur chamboulé battre un peu trop fort dans ma poitrine. Ses joues rosies et son sourire timide m'indiquent qu'il est vraisemblablement dans le même état que moi.


"Alors, vous restez combien de temps, questionne Louis tandis que nous rejoignons le petit groupe.

- On reprend la route lundi. En fin de journée sûrement, répond Lewis.

- On a eu la chance de trouver un petit gîte non loin du centre, qui venait de se libérer." précise Charlotte.


Louis et moi échangeons un regard complice, connaissant parfaitement ce petit gîte, témoin de nos premiers ébats. Il cale brièvement sa tête contre mon épaule, tandis que je dépose un baiser au sommet de son crâne.


***


Installés autour d'une table, vue sur la mer mais à l'abri de la véranda, Charlotte et Louis rattrape le temps perdu. La jeune femme raconte à son frère ses premiers pas en tant que mère et, bien qu'ils se soient souvent eu au téléphone, les anecdotes sont nombreuses. Zayn donne des nouvelles de leurs parents qu'il fréquente régulièrement et révèle leur impatience à retrouver Louis, sur ses deux jambes et en pleine forme. Je les observe, leurs sourires éclatants, le bonheur qui se dégage de chaque parole, chaque geste, le petit William calé contre le torse de Louis.


Assis face à lui, nos pieds entremêlés sous la table, je ne peux défaire mon regard de son visage serein. J'ai rarement eu l'occasion de le voir si détendu, si heureux. Une boule de chaleur grossit au creux de mon ventre en parfaite confusion avec mes sentiments et la raison qui me gagne.


Louis a toutes les raisons du monde de quitter la maison d'Augustin, la région. Moi.


Voyant le trouble gagner mon visage, il glisse sa main sur la table pour s'emparer de mes doigts.


Zayn couve son meilleur ami d'un regard approbateur tandis que Charlotte passe de nos mains liées à son frère. Sans la connaître, je devine les questions qui lui brûlent les lèvres. Suis-je seulement prêt à entendre les réponses que peut lui offrir Louis ?


"Alors Louis, si on arrêtait un peu de tourner autour du pot... commence-t-elle en faisant tourner la cuillère dans sa limonade. Depuis quand as-tu quitté le centre ?"


Louis se racle la gorge et se redresse. Il lâche ma main pour changer la position du bébé. Il plonge son regard, empli d'hésitation, dans le mien avant de se tourner vers sa sœur.


"Il y a une semaine.

- Une semaine ! répète Charlotte, incrédule.

- Après mon rendez-vous à l'hôpital, je n'avais pas de raison de rester au centre, c'est vrai. Mais le chirurgien m'a prescrit quelques séances de kiné supplémentaires parce que j'étais encore frileux à marcher sans aide ou sans appui..."


Louis récite l'explication qu'il a dû répéter mille fois dans sa tête. Je le sens soudainement tendu et j'aimerais pouvoir le rassurer. Charlotte est fermée près de moi, peut-être un peu vexée que Louis ait préféré rester ici plutôt que rentrer auprès des siens.


"Je suis bien ici. Je m'y sens bien, poursuit-il. Les premières semaines ont vraiment été difficiles et sympathiser avec Harry a été une bulle d'oxygène dans mon quotidien. Parler au téléphone, ça ne remplace pas les interactions physiques, souffle-t-il, tentant de ne pas brusquer sa famille. Depuis mon départ du centre, Harry et moi..., poursuit-il en se raclant la gorge, on garde la maison d'Augustin, un autre pensionnaire du centre qui est parti quelque temps chez sa fille. C'était un moyen de finir ma rééducation et de rester encore un peu ici, avec Harry. Avant qu'on ne doive se quitter..."


J'entends mon cœur éclater.


Je tente de rester impassible. Malgré mes propres craintes, je ne peux pas croire qu'il envisage sérieusement de partir en me laissant derrière lui. Pas après les mots d'Augustin, pas en sachant ce que Louis ressent véritablement. Il s'est mis sur ma route et non l'inverse. Je ne veux pas croire ces mots...


Je prends une gorgée de la bière devant moi, priant pour que cette rencontre se termine bientôt. Je ressens le besoin de rentrer et de m'isoler un peu.


La conversation se fait lointaine, je me perds dans les méandres de mes pensées, ce sentiment d'abandon qui surgit en moi violemment. Je finis par me lever, ma chaise raclant le parquet bruyamment, et m'excuse auprès des personnes qui m'entourent avant de me diriger vers les toilettes.


*

*  *


Ce n'est sûrement pas le meilleur chapitre pour se consoler de la fin du Love On Tour... Mais, moi, j'avais besoin de poster, besoin de me replonger dans cette histoire, les retrouver.

Pensez-vous que sa relation avec Harry n'est qu'une passade pour Louis ? Un moyen de combler un manque lorsqu'il se sentait mal et seul ? 

Se servirait-il de Harry et de son cœur mélancolique, blessé ?

Merci en tout cas si vous avez lu ce chapitre, si vous êtes toujours là...

J'espère que vous allez bien.


Mimi


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