Chapitre 16 - Louis

C'est éprouvant et pourtant tellement revigorant. J'ai l'impression de revivre vraiment, de retrouver toute mon indépendance, mon autonomie. Je suis fébrile, toujours sur le qui-vive, prêt à me rattraper à la barre ou au bras qu'Elin tend régulièrement devant moi. Mais, plus les jours passent, plus je suis droit et équilibré, stable.


En dehors des séances, je garde encore une béquille pour appui mais Elin est convaincue qu'un jour, je l'oublierai. Sans même m'en rendre compte.


Ces derniers mois ont été difficiles. Me remettre de l'accident physiquement a été long, douloureux, épuisant. Moralement, il y a eu des jours sombres, vraiment sombres. Jusqu'à ce jour où Harry est entré dans ma vie, où ses allers-retours sur la plage m'ont intrigué et poussé à sortir du centre. Pour lui, grâce à lui, je me suis surpassé.


Et aujourd'hui, les résultats sont là et ma longue convalescence touche à sa fin.


"C'est parfait Louis. On se dirige vers mon bureau, je vais te masser un peu, te détendre et tu pourras y aller.

- Allons-y."


Comme à mon habitude, je m'apprête à récupérer ma béquille, mais Elin me devance et s'en empare, m'obligeant à poursuivre l'exercice jusqu'à son bureau. Je rase un peu les murs, ce qui me vaut une petite moquerie de la part de ma kinésithérapeute.


"Entre dans le bureau et installe-toi. Je te rejoins dans une minute", me dit-elle en déverrouillant la porte.


Je m'exécute et m'avance vers la table de massage. Je sors mon téléphone de la poche de mon pantalon puis l'enlève avant de le déposer sur le siège près du mur. Je m'assieds sur la table et en profite pour regarder mes notifications.


J'ai deux appels en absence de Lottie et un message de Zayn.


Je mordille ma lèvre inférieure et me réprimande intérieurement. Ca fait plusieurs jours que ma sœur tente de me joindre et je ne l'ai toujours pas rappelée. Je me fais la promesse d'y remédier cet après-midi.


J'entends des voix s'approcher du bureau d'Elin, alors je jette mon téléphone sur mon pantalon et m'installe correctement sur la table, les jambes étendues devant moi. Mon regard sur elles, sur mes cicatrices, a changé lui aussi. J'ai repris du muscle et les cicatrices se sont atténuées. Les baisers tendres d'Harry ont fini par me les faire accepter. Elles sont là, elles sont visibles mais elles sont mon histoire et un peu la nôtre finalement. Sans elles, je ne serai pas là. Sans elles, Harry ne serait pas dans ma vie.


Je souris bêtement lorsque la porte s'ouvre sur Elin et Adam, les deux inséparables. Adam se moque régulièrement de moi et de mon coup de cœur pour Harry, mais je pourrais en faire tout autant avec lui. Je l'ai vu séduire Elin, ramer beaucoup avant que la jeune femme ne finisse par lui accorder un rendez-vous, puis deux, puis trois. Le dernier en date a d'ailleurs été un dîner au restaurant entre Adam, Elin, Harry et moi. Tous les résidents ne sont pas logés à la même enseigne.


"Salut Louis, m'interpelle Adam en entrant dans la pièce.

- Bonjour Adam, ça va ? Tu viens pour moi ou je suis encore la bonne excuse pour passer du temps avec Elin ? je le taquine.

- Un peu les deux, avoue-t-il en levant les mains.

- Je vois, je ris.

- Allez trêve de bavardage, j'ai un travail moi ! se manifeste Elin alors qu'elle s'approche de moi après s'être lavée les mains. OK Louis, décontracte-toi s'il te plaît."


J'inspire fortement et secoue mes jambes pour délier mes muscles. Puis Elin, de ses mains magiques, commence son travail.


J'ai dû me battre un peu pour qu'elle s'occupe de moi. Pas avec elle mais avec le Directeur du centre. Il a fallu organiser le planning pour une prise en charge en consultation externe. Je ne regrette pas les négociations parce que je n'ai confiance qu'en Elin. Elle a suivi ma rééducation depuis le premier jour, a subi mes sautes d'humeur, ma mauvaise volonté. Elle a été présente bien au-delà de son rôle de kinésithérapeute.


Je leur dois beaucoup, à Adam et elle.


La séance dure une demi-heure au cours de laquelle nous répétons les mêmes exercices d'appui et les mêmes gestes sur mes muscles, les massages pour atténuer les cicatrices. Le moment que je préfère reste quand la table s'abaisse et qu'Elin détend mes cervicales et les muscles de mes épaules que j'ai encore trop tendance à crisper.


Le geste habituel, sa main au niveau de mon plexus solaire, indique la fin de la séance. J'ouvre les paupières et m'étire légèrement avant de me redresser. Elin me tend mon pantalon et pendant que je me rhabille et me chausse, elle s'installe derrière son bureau ; Adam assis sur l'une des chaises face à elle.


Je les rejoins, regardant un peu autour de moi, pour m'apercevoir que la béquille qu'Elin m'a subtilisée n'est pas dans le bureau.


Je me râcle la gorge en m'installant, prêt à la questionner mais elle prend la parole en premier.


"Bien, Louis, il nous reste cinq séances."


Mon cœur se comprime imperceptiblement.


"Si c'est bon pour toi, je pense qu'on devrait les espacer pour les étaler sur les deux prochaines semaines. Qu'en penses-tu ?"


Elle relève son visage vers moi et plante son regard dans le mien. Elle doit y lire une certaine détresse alors que le sien est bienveillant, comme toujours.


"Oui. Si c'est ce que tu préconises, je te suis.

- Nous savons tous les deux que ces séances sont principalement du confort, Louis.

- Je sais... je souffle en baissant la tête.

- Tu dois te faire complètement confiance. Tu peux te déplacer sans aide que ce soit d'une béquille ou d'un bras, sans raser les murs aussi, dit-elle en riant légèrement.

- Une main reste autorisée" intervient Adam en bousculant doucement mon épaule, un sourire taquin aux lèvres, faisant référence à Harry.


Je ne réponds pas mais je sens mes joues s'empourprer, et une chaleur agréable envahir mon estomac. Elin réprimande gentiment Adam avant de poursuivre.


"Je te propose qu'on se revoit lundi. Ca te laisse trois jours de répit.

- D'accord.

- On va donc s'organiser comme ça. Séance le lundi et le jeudi. Et tu seras entièrement libéré le troisième lundi.

- Il faudra fêter ça ! poursuit Adam. Et en guise de cadeau de presque fin de traitement..."


Adam se lève et récupère dans l'angle de la porte, une canne de marche, de couleur bleue avec des motifs bleu clair et blanc.


"Je l'ai commandée exprès pour toi. Elle est à ta taille et le design a été choisi rien que pour toi, me dit-il dans un grand sourire. Elle ne doit te servir que lorsque tu en ressens le besoin. Elle ne remplace pas la béquille. Pour ces premiers jours, tu peux l'utiliser mais elle doit être là qu'en support, les jours où ton bassin te rappellera qu'un jour tu t'es retrouvé sur la trajectoire d'un bus. D'accord ?

- Ok, je souffle ; les battements de mon cœur désordonnés. Merci. Merci pour tout à tous les deux.

- Avec plaisir Louis !"


Je me lève et récupère la canne. Adam glisse ses bras autour de moi et m'offre une accolade.


"Ca fait chier, tu vas me manquer.

- Je ne suis pas encore parti..."


Je rends son étreinte à Adam, essayant de ravaler le flot d'émotions qui me submerge à cet instant.


Après avoir salué ma kiné et son petit-ami orthopédiste, je m'éloigne dans le couloir, boitant légèrement mais sur mes deux jambes et sans garde-fou, un petit sourire timide aux coins des lèvres.


***


Installé dans le canapé, la baie vitrée légèrement entrouverte, je laisse mes pensées divaguer, le regard perdu au large sur la mer.


Cet endroit est magnifique, à quelques encablures seulement du centre. Je comprends qu'Augustin ne veuille pas quitter sa maison. Elle est idéalement située et chaleureuse. Le vieil homme lui a donné le confort nécessaire. De l'extérieure, elle semble de taille moyenne mais en réalité, elle est spacieuse et fonctionnelle.


Nous nous y sommes installés il y a quelques jours et pourtant j'ai le sentiment d'être chez moi. C'est assez étrange de se sentir si bien dans la maison de quelqu'un d'autre.


Peut-être parce que je n'ai pas investi les lieux seul et que la présence d'Harry contribue à cette sérénité qui m'envahit.


Harry... Il me rejoint d'ailleurs sur le canapé, deux tasses de thé fumant dans les mains qu'il dépose sur la table basse sur laquelle j'ai étendu mes jambes. Il s'installe tout contre moi et quémande un baiser que je lui donne avec grand plaisir.


J'ai bien conscience qu'on se crée un cocon et qu'un jour ou l'autre, sa réalité ou la mienne viendra perturber notre quiétude.


Je glisse ma main sur son torse et me décale un peu pour approfondir notre baiser et notre étreinte. Les bras d'Harry m'encerclent. Sa main se faufile sous mon t-shirt, remonte ma colonne vertébrale dans une caresse qui me fait frissonner. Je glisse mes doigts dans ses cheveux.


J'adore ça. Cette sensation chaude dans mon estomac qui se propage dans tout mon corps. Cette excitation inédite, celle des premiers émois, des balbutiements d'une histoire qu'on espère qu'elle ne finira jamais.


La seconde main d'Harry abandonne ma hanche pour glisser de mes reins à ma cuisse. Il tire doucement sur ma jambe, m'incitant à m'asseoir sur lui. Je ne me fais pas prier et me retrouve à califourchon, nos érections naissantes appuyées l'une contre l'autre. Je quitte sa bouche et descends mes lèvres dans son cou. J'inspire contre sa peau fourrageant un peu plus dans ses cheveux.


La pression de ses mains est plus intense et, il semble que nous boirons nos thés froids, quand Harry se penche en avant et d'un geste souple se lève du canapé, mon corps prisonnier de ses bras, mes cuisses serrées autour de ses hanches. Il murmure à mon oreille laissant peu d'ambiguïté à la suite de notre après-midi.


Rapidement, mon dos percute le matelas - de la chambre d'amis - tandis qu'Harry me surplombe et m'observe, le regard envieux, étincelant de désir. Je ne contrôle pas les battements de mon cœur ni ma respiration plus rapide. Mon t-shirt se retrouve rapidement au-dessus de ma tête. La braguette de mon jean ouverte offre un accès à mon intimité qu'Harry vient titiller.


Je me consume sous ses caresses.

Je fonds sous sa tendresse.


Ses mains autour de ma taille et ses lèvres sur mon ventre commencent à avoir raison de moi. J'ai besoin de sentir son corps plus près du mien, son poids m'écraser délicieusement. Je glisse ma main sur sa joue, l'incitant à plonger son regard dans le mien. Le désir que j'y lis me dévaste de plaisir. Harry remonte le long de mon corps et ses lèvres s'écrasent sur les miennes. J'emprisonne ses hanches entre mes cuisses, glisse mes mains à la lisière de son t-shirt que je remonte contre son dos.


Harry s'écarte à peine quelques secondes. Juste le temps de faire voler son vêtement au-dessus de sa tête. Son pantalon et le mien terminent au bas du lit.


Mon amant récupère un préservatif dans la petite table de nuit et du lubrifiant. J'ai bien compris qu'Harry aimait prendre le contrôle de nos ébats et comme je suis versatile, ça ne me dérange absolument pas. J'aime le sentir pleinement en moi, lui donner ce plaisir. Et puis, je suis loin d'être en reste... l'orgasme prostatique n'a pas de secret pour lui !


Et c'est dans un échange de gestes emplis de douceur, de baisers enflammés, de langues inquisitrices, qu'une nouvelle fois, nous atteignons le plaisir.


Essoufflé et déjà un peu fourbu, je me cale contre le corps d'Harry, prêt à m'octroyer une petite sieste. Sa main caresse nonchalamment mon bras et ses jambes s'entremêlent aux miennes. Il se redresse un peu pour attraper la couette et nous couvrir lorsque la sonnerie de mon téléphone retentit dans la pièce.


Je soupire et me redresse à mon tour pour récupérer l'appareil dans mon pantalon.


"J'y vais, bouge pas !" dit Harry en se levant totalement, prenant le temps de déposer ses lèvres sur les miennes.


La sérénité post-orgasme est rapidement contrariée lorsque je vois le nom de Charlotte affiché sur l'écran de mon smartphone. Un frisson me parcourt alors que je prends l'appel.


"All...

- T'es où ? vocifère-t-elle. Louis ça fait des jours que j'essaye de te joindre. On te fait la surprise de venir te voir et qu'est-ce que j'apprends ?!? Tu n'es plus au centre ! T'es où ?"


Sa voix porte tellement qu'Harry s'est arrêté dans son geste alors qu'il venait se coucher près de moi. J'inspire fortement et tente de prendre un air détaché.


"Vous êtes au centre ? je demande, bêtement.

- Oui ! Là où tu étais aux dernières nouvelles !

- OK... Je ne suis pas loin. Donne-nous quinze minutes, on arrive.

- Comment ça, nous ? Louis...

- Lottie, tout va bien, d'accord. Je vais t'expliquer.

- J'y compte bien ! Zayn a un petit sourire en coin qui ne me dit rien qui vaille, mais il veut rien dire, cet imbécile ! J'ai l'impression de revivre vos 17 ans !"


Je ne peux pas m'empêcher de pouffer, ce qui agace encore plus ma sœur. Elle est plus jeune que moi et pourtant, à bien des égards, elle est plus mature que moi.


"J'arrive Lottie. Quinze minutes d'accord. Allez sur la plage, profitez du cadre...

- Il se fout de ma gueule ! je l'entends pester dans le téléphone alors qu'elle coupe la communication.

- Tu n'as pas dit à ta famille que tu avais quitté le centre ? m'interroge Harry, perplexe. Ca fait une semaine Louis...

- Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ? je bougonne gentiment. Ils n'auraient pas compris que je ne veuille pas rentrer.

- Mais tu pouvais juste leur dire que tu finissais ta kiné ici..."


L'incrédulité d'Harry me renvoie à mon comportement puérile. Je n'ai pas réfléchi plus loin que le bout de mon nez et ne rien dire était, selon moi, plus simple que d'expliquer le raz-de-marée d'émotions qui me submerge. A cause de lui.


Je m'extirpe du lit et commence à m'habiller quand Harry se place devant moi.


"Viens-là, dit-il en calant ses mains sur mes hanches. Ta famille, ta sœur, comprendra ta décision. Charlotte sait que tu vas bien, que tu es toujours là même si tu n'es plus au centre. On va prendre une douche avant d'aller la voir.

- Je lui ai dit quinze minutes...

- Ouais, mais tu pues le sexe et moi aussi. Pour une première rencontre, c'est pas top !"


Je saisis la main qu'il me tend et le suis dans la salle de bain en riant, plus léger.



*

* *


Hello à tous ceux qui passeront par ici. J'espère que vous allez bien.

J'ai un peu honte de ce temps entre chaque publication. Je suis pleine d'hésitation mais je ne veux pas lâcher ces deux amoureux.

Alors merci pour votre patience. J'espère que vous les garder toujours un peu dans votre tête, au creux de votre cœur pour pouvoir poursuivre leur histoire avec moi.


Belle journée


Mimi

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