Chapitre 12 - Louis
S'il y a une chose que je déteste à ce moment-là, plus que mon incapacité à me déplacer aisément, ce sont les larmes qui menacent de couler sur les joues de Harry. Depuis notre rencontre, il est mon soleil. Et même si j'avais remarqué une certaine mélancolie, je n'avais pas idée de son intensité.
Nous marchons quelques mètres jusqu'au petit muret qui délimite le sentier de randonnée. Le temps est assez clair malgré l'apparition de quelques nuages et la mer calme. La marée basse dévoile toutes les roches des falaises abruptes du Nez de Jobourg. Le paysage est magnifique, brut. Même si l'instant est un peu lourd émotionnellement, je suis heureux que Harry m'ait conduit jusqu'ici. Heureux de sortir enfin des murs ternes du centre de rééducation.
Je délaisse mes béquilles que je cale contre les pierres et accroche mes bras autour des épaules de Harry.
Ses bras m'enlacent et nos corps se rapprochent dans une étreinte rassurante. Je glisse mes lèvres dans son cou, déposant des petits baisers jusqu'à l'arrière de son oreille.
"On ne se connaît pas bien, je murmure, mais je sais que tu mérites mieux que tout ça. Vis tes rêves, Harry. Vis la vie que tu veux."
Ses bras se resserrent autour de mon corps abîmé et son visage tombe dans le creux de mon épaule. Nous restons ainsi plusieurs minutes. S'il y a des touristes autour de nous, nous n'y prêtons aucune attention, savourant ce moment.
Lorsque nous nous écartons l'un de l'autre, mon regard accroche le sien toujours brillant mais les larmes ont disparu. Harry cligne des paupières, comme un remerciement silencieux à mon soutien. Je glisse mes bras le long de son corps et presse ses hanches doucement.
"Je veux bien retourner à la voiture maintenant, je l'informe, l'envie de me retrouver vraiment seul avec lui se faisant pressante.
- On y va alors. Tu veux que j'aille la chercher ?"
Sa bienveillance me fait sourire et gonfle un peu plus mon cœur. Je secoue la tête de gauche à droite pour signifier mon refus et me mets en route. Je suis fatigué, c'est un fait, mais j'aime marcher près de Harry. Sentir sa présence et son corps rassurant près de moi.
Le vent souffle un peu plus fort en ce milieu d'après-midi. Je m'arrête un court instant pour remonter ma capuche sur ma tête. Harry se tourne vers moi et se rapproche. Il dépose un baiser sur ma joue avant de remonter la fermeture Eclair de ma veste. Puis, il s'empare de ma béquille et glisse mon bras gauche autour de son bras droit. J'apprécie le geste, la chaleur de son corps près du mien, son parfum qui s'infiltre dans mes narines.
Je n'ai pas envie que cette journée se termine. J'aimerais vivre des instants comme celui-ci tous les jours.
A mon rythme, nous rejoignons la voiture de Harry. Le ciel s'est couvert et c'est agréable de retrouver l'abri de l'habitacle. Alors qu'il insère la clef dans le contact, je glisse mes doigts autour des siens. Harry tourne son visage et nos regards se croisent. Je remonte mes doigts le long de son bras, puis sur son torse, son cou, sa nuque. J'attrape les petites mèches de cheveux puis attire son visage vers moi. Harry ne résiste pas. Au contraire, il se penche vers moi et cale sa main sur ma taille. La sensation de ses lèvres sur les miennes me fait frissonner. Je glisse ma langue contre la sienne. Le baiser devient ardent. La pression de la main d'Harry sur moi plus forte. Je le sens se contorsionner pour se rapprocher un peu plus de moi. Mon corps s'échauffe, mon cœur s'emballe. Depuis quand n'avais-je pas ressenti cette sensation au creux de mon ventre ? Cette impression de légèreté, de flottement en dehors du temps ?
A bout de souffle, Harry s'écarte de mes lèvres mais je m'accroche au col de son sweat. Je ne veux pas qu'il s'éloigne. Il cale son front contre le mien et laisse échapper un petit rire. Je claque un léger baiser sur ses lèvres en souriant.
"La voiture est un peu étroite... souffle-t-il.
- La voiture ?"
Il rit à mon espièglerie. Et ce son est tout simplement délicieux.
Nous quittons finalement le parking et prenons la route. Au fur et à mesure des kilomètres, le ciel s'assombrit. Mon moral aussi. Les gouttes de pluie commencent à claquer sur la carrosserie. Je m'enfonce un peu dans le siège, le regard tourné vers Harry. Il dépose sa main droite sur mon genou qu'il presse. Je glisse mes doigts entre les siens.
J'aimerais ne pas avoir à rentrer au centre. Plus les jours passent, plus je me sens proche de Harry. Sa compagnie est tellement réconfortante.
Comme s'il lisait dans mes pensées, il presse mes doigts entre les siens. Nos regards se croisent et son sourire est lumineux.
"Nous aurions pu prolonger notre après-midi si la pluie ne s'était pas incrustée... dit-il.
- Oui. J'aurais beaucoup aimé.
- On se verra demain ? demande-t-il.
- Tu as des projets ?
- Je suis en congés. De nous deux, c'est toi qui a des impératifs, rétorque-t-il en tournant son visage vers moi.
- J'ai mes séances demain matin comme tous les jours. Mais demain après-midi, j'ai un rendez-vous sur Cherbourg à l'hôpital.
- Quelque chose ne va pas ? s'inquiète Harry.
- Non. C'est un contrôle. Je pense que ça déterminera ma date de sortie définitive, je souffle.
- Ah..."
L'atmosphère s'alourdit légèrement dans la voiture. Notre histoire avec Harry est éphémère. Un peu comme un amour de vacances. L'intensité des sentiments est exacerbée par la durée limitée de notre histoire. Je vais partir du centre tandis qu'il restera là. Nous nous ferons des promesses de nous revoir lorsque nous serons tous les deux rentrés mais nos quotidiens prendront le dessus et nous nous éloignerons certainement.
Une boule se forme au creux de mon estomac, désagréable, alors que nous apercevons au loin, les murs jaunes du centre de rééducation.
J'aimerais ne pas avoir à rentrer au centre.
Harry gare la voiture sur le petit parking à l'entrée du bâtiment et coupe le contact. Ni lui ni moi n'amorçons un mouvement.
J'aimerais ne pas avoir à rentrer au centre.
"Est-ce que tu veux... commence Harry.
- Oui. Peu importe ta question, ma réponse est oui."
Il rit. Ce rire enfantin et tellement sincère. Mon cœur se libère.
Il remet la voiture en route et nous quittons la rue du centre pour traverser la petite ville. Harry m'amène "chez lui", dans ce petit cottage bleu et blanc qu'il m'a décrit. Alors que sa portière claque, il se presse pour venir m'ouvrir et m'aider à sortir de la voiture tandis que la pluie continue de tomber.
En quelques enjambées, nous nous retrouvons devant la porte d'entrée. Harry glisse la clef dans la serrure et nous pénétrons dans la chaleur agréable du petit logement.
Rapidement, ses bras m'enlacent. Je laisse tomber mes béquilles sur le sol pour m'accrocher à lui, rien qu'à lui. Je savoure ses baisers, ses mains dans mon dos, ses caresses. Je lui rends chaque baiser et chaque geste tendre. Je lui montre mon empressement.
La réalité reprend ses droits et interrompt le moment. Le portable d'Harry sonne dans sa poche. Il regarde le nom de son correspondant et fronce les sourcils.
"Je vais prendre l'appel mais je n'en ai pas pour longtemps."
Il ponctue sa phrase d'un léger baiser sur mes lèvres, se baisse et me tend l'une de mes béquilles avant de répondre. Silencieusement, je lui demande où sont les toilettes. Il me montre la porte face à nous. Je presse son bras et me dirige vers la salle de bain pendant qu'il décroche, saluant sèchement la personne qui l'appelle.
Je prends quelques minutes avant de sortir pour laisser à Harry l'intimité dont il a besoin. Lorsque je pousse la porte, ma veste à la main, je le trouve planté devant moi, ses doigts malmenant ses cheveux. Le téléphone est posé sur le plan de travail de la petite cuisine, encore allumé, signe qu'il vient à peine de terminer son appel.
J'ancre mon regard au sien et lui offre un sourire réconfortant. Harry fond sur moi et glisse ses mains sous mes cuisses pour me soulever. J'accroche mes bras autour de son cou alors que je retrouve ses lèvres. Mes jambes se croisent naturellement autour de ses hanches, rapprochant nos corps et nos bas-ventres. Harry sourit contre mes lèvres alors qu'il se déplace légèrement sur sa gauche. Mon dos percute doucement une porte qui s'ouvre sur la chambre.
Mon cerveau met en sommeil les douleurs de mon corps pour ne profiter que de l'instant présent. Délicatement, il me pose sur son lit, me surplombant. Sa carrure m'enveloppe. Je glisse ma main sur sa joue. Ses doigts agrippent mon poignet et dans un sourire, il vient déposer un baiser au creux de ma paume.
L'instant est doux, agréable, réconfortant. Totalement hors du temps.
Je glisse mes doigts sur les deux petites rides qui se sont formées entre ses sourcils. Je le sens se détendre entre mes bras.
La présence de l'un fait oublier, l'espace d'un instant, les soucis de l'autre.
Jamais encore je n'avais eu cette sensation. Ce sentiment d'être entier auprès de quelqu'un. Alors, je ferme les yeux et savoure chaque seconde de notre étreinte, chaque baiser et chaque souffle. Les gestes de Harry, la caresse de ses doigts sur ma peau à mesure qu'il enlève mes vêtements. La chaleur de nos peaux qui se rencontrent. Chaque mouvement de nos bassins, chaque gémissement qui franchit nos lèvres.
*
* *
Le temps file pour nos deux loulous et le besoin de plus se fait ressentir.
Ils sont si tendres, tellement présents et à l'écoute l'un de l'autre. Cette relation est utopique mais elle fait du bien, non ?
Je vous embrasse
Mimi 🦋
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