Chapitre 14 - Helena.

15 mai, 7 Péchés Capitaux.

Calant mon talon sur la barre transversale du haut tabouret et posant une fesse sur le bois recouvert de velours, je soupire longuement. Elias n'a été nulle part où j'ai cherché. De guerre lasse, je me suis plongée dans le travail et me retrouve ici. Je dois m'avouer que je suis déçue. J'étais prête à le narguer, le faire baver et jouer avec lui. La pièce est dans le noir, seule la lumière qui traverse le miroir sans tain devant moi éclaire le mobilier succinct. J'ai promis à Carla de surveiller sa séance avec son client. Pour le moment, il ne se passe rien de trop dangereux. Elle n'a pas assez confiance dans son contrôle ni dans le fait qu'il s'arrêtera si elle lui demande. Plongée dans mes pensées, mon regard se porte sur la scène sans que la tension sexuelle et les corps dénudés ne m'affectent. Pour moi, c'est un spectacle banal. L'homme a attaché une Clara nue sur la croix de Saint André et prend son temps pour choisir quel instrument il va utiliser sur elle. Un fouet, un martinet à neuf queues ou plutôt un paddle en bois souple ? Le choix est large et l'homme commente chacune de ses hésitations pour faire trembler sa sub. (*) Plus il tergiverse, plus la tension monte entre eux.

La femme est couchée sur le ventre, la tête tournée vers moi. Elle ne peut me voir, mais sa confiance en notre système de sécurité ne sera pas déçue. Sa peau se couvre d'une couche de sueur et de frissons. Son maître revient et pose délicatement les lanières de cuir souple sur son omoplate. Il glisse avec lenteur vers le bas, effleurant le creux de son dos et caressant ses fesses tout en douceur. Le geste est tendre, lent et précis. Il met en confiance, il tranquillise et endort sa proie. Jusqu'à ce qu'il claque d'un coup sec sur le globe sans protection. Clara sursaute et retient un cri, son client sourit et lui flatte la croupe. Le geste est répété, donnant une marque rose jumelle sur le côté opposé. La séance a commencé, je me redresse pour ne rien rater des signaux corporels de ma fille, elle compte sur ma vigilance.

Les coups deviennent plus réguliers, parfois forts, parfois légers. L'alternance et les changements de rythmes déstabilisent la soumise et l'empêchent de prévoir la suite. Son souffle devient erratique et la pièce se remplit de ses gémissements et de ses cris de douleur - plaisir. Même si ce n'est pas le genre de sexe que je préfère, je commence à ressentir les effets d'un désir sourd dans mon ventre.

— Serais-tu une adepte du voyeurisme ? murmure une voix grave à mon oreille.

Je sursaute au souffle chaud qui recouvre mon cou. Elias est entré sans faire le moindre bruit et me surprend à regarder un couple baiser. Il est normal qu'il pense que je ne suis qu'une petite perverse.

— Je ne m'imaginais pas ça de toi Helena. Tu es plutôt une femme qui aime être dans l'action, pas en retrait comme ici.

— Tu ne me connais absolument pas, comment pourrais-tu juger de mon caractère quand tu ne fais que m'insulter ou me crier dessus?

— Je peux t'embrasser aussi, ajoute-t-il en riant tout bas.

Je ne me suis pas retournée vers lui, mes yeux sont restés fixés sur Clara pour qu'il ne puisse pas voir mon trouble. Car depuis qu'il est dans mon dos, j'éprouve plus de frissons et de chaleur que pendant la séance. Je hausse une épaule, jouant les indifférentes.

— Ah ! Ils en viennent au fait, ricane-t-il pour attirer mon attention sur le couple en face de nous.

Je suis si touchée par ce qu'il me fait ressentir que je n'ai rien remarqué, mes yeux étaient aveugles à tout sauf aux images suggérées par ses paroles. Clara a changé de position et est à genoux devant son Maître d'une soirée. Je me sermonne en silence, me secouant pour revenir à la réalité. Elle a les bras tirés en arrière et des menottes aux poignets. Sa bouche est occupée par le sexe engorgé de l'homme. Sa tête subit ses assauts, enserrée dans les poings plongés dans ses cheveux courts.

Mon souffle précipité se bloque dans ma gorge quand je sens les doigts d'Elias taquiner ma taille puis la contourner. Ses mains se posent sous mes seins. Les pouces sont si près du bas de ma poitrine que si je respire plus fort, je vais enfin connaître la sensation de leur toucher.

— Mais... je te connais, ma belle. Je me suis renseigné sur toi, tes habitudes, tes coups de cœur.

— Ce n'est que la surface, je ne t'ai rien dit de moi que je ne voulais cacher. Et puis, je ne suis pas si intéressante.

— Tu tentes de me convaincre ? C'est raté, ce que je vois me plait.

— Quoi exactement ?

Ma voix déraille un peu sur la fin de la question, ses doigts ont débuté un mouvement en cercle qui me trouble au plus haut point. Son corps s'est plaqué contre mon dos et répand une chaleur bienfaisante malgré mon désir qui augmente.

— Tu aimes ta sœur, tu aides les filles malgré ta réputation de reine des glaces. Tu parles cinq langues et manies les relations humaines comme personne. Je reconnais aussi avoir eu tort en te criant dessus, la peur de te voir agressée m'a fait oublier que tu es une professionnelle et que tu es capable de gérer les hommes.

Pendant ses compliments et demi-excuses, il continue de me caresser en douceur. Ses mouvements sensuels nourrissent mes besoins d'affection, ses paroles regonflent mon ego malmené. La paume de sa main glisse sur ma robe, longe son bord et remonte sous le tissu. Je me fige, incertaine de mes désirs. Mon cœur bat la chamade, mon pouls tambourine contre la peau de mon cou et Elias le remarque. Son sourire qui m'effleure le démontre. Ses doigts me taquinent, demandant la permission sans une parole, en attente de mon prochain geste.

Mon corps prend la décision sans écouter mon cerveau qui crie que je ne devrais pas le laisser m'atteindre. Je me penche vers l'arrière et colle encore plus mon dos contre son torse, ma nuque se ploie et lui offre un chemin dégagé vers ma mâchoire. Il embrasse ma peau sensible et entreprend en parallèle une attaque contre mon string. Des frissons traversent mon corps et je gémis quand il atteint son but. Mes yeux se posent sur le spectacle sensuel qui se déroule dans la pièce en face. Le client baise Carla en l'étranglant, mais je ne bouge pas. Elle sourit et prend plaisir.

— Ne fais pas trop de bruit, sinon ils entendront. On m'a dit que c'est une possibilité.

Son invasion empêche toute réponse de ma part, le plaisir est trop bon, trop fort. J'aime quand l'homme s'occupe de moi en premier, c'est si rare.

Cette pensée germe en moi et plante ses racines sombres dans ma psyché. Bien que je tremble et que je retienne mes gémissements, je ne peux que me demander ce qu'il désire.

Sa main libre relève mon menton et le dirige vers le couple ignorant ce qu'il se passe ici. Puis il recouvre mon sein, le pressant avec fermeté et sans hésitation.

— Imagine qu'ils soient dans la situation inverse. Ils nous surveillent, nous matent. Tu aimerais ? Ou n'es- tu qu'une petite voyeuse ?

Je tente de m'éloigner, mais il referme son bras, et ricane.

— Ne joue pas les timides, si tu ne veux pas jouer les exhibitionnistes, je ne te forcerai pas. Mais laisse-moi juste le temps de te connaître plus... intimement. Je te comblerai, me promet-il de sa voix rauque et basse.

Sur ces paroles sulfureuses, Elias appuie plus fort sur mon clitoris et tire sur mon téton dont la pointe m'a trahi. Je halète face à cette infime douleur, retenant un cri. Mon orgasme monte et je suis presque à la limite d'exploser.

— Tu... Tu veux quoi ? je demande en bégayant lamentablement dans une tentative de rester lucide.

— Je veux te voir jouir, observer ton visage à l'apogée, connaître tes cris, tes gémissements et me repaître de ta beauté dans ces moments de luxure.

Je ferme les yeux, obligeant mon cerveau à effacer les images qu'il vient d'apposer devant mes paupières. C'est sexy et si cru que je frissonne.

Mon plaisir augmente, les premiers spasmes naissent dans le creux de mon ventre, je serre les jambes pour couper cette montée et arrêter les mouvements habiles de ses doigts. Je dois me reprendre, avant de faire la plus grosse bêtise de tous les temps.

— Non, je voulais savoir... ton prix, tu as une idée en tête, j'en suis certaine, comme à chaque fois. Donc... Qu'est-ce que tu veux de moi?

Mes mots sortent décousus entre deux sursauts et gémissements.

Elias se fige, plus un seul mouvement, une sorte de froid me descend de la nuque. L'ambiance sensuelle et chaude se transforme en frigo.

— Comment ? Pour qui me prends-tu au juste, Helena ?

Il recule, retirant ses mains bien trop douées de mon corps assoiffé d'attentions et je me retourne pour découvrir un visage choqué, un regard vexé et énervé. Mes épaules s'affaissent, toute la tension qui me parcourait me quitte d'un seul coup. Je l'ai blessé ?

— Ce n'est pas parce que tu ne fréquentes que des mecs qui se servent de toi que je suis pareil. Je ne voulais que te donner du plaisir et partager un moment avec toi. Je n'avais aucune idée préconçue en entrant ici. Rien que te parler et me rapprocher de toi. Tu salis mes intentions en les comparant à tes expériences passées. Merde ! s'écrie-t-il oubliant le couple à côté.

— Elias, je...

Il me coupe en levant une main entre nous. Ses yeux ont perdu la chaleur qui m'a fait craquer il y a peu de temps.

— Non, tais-toi, tu en as assez dit, je préfère partir avant de prononcer encore une fois des insultes à ton sujet.

Extériorisant sa colère, il ouvre en grand la porte d'un geste trop fort. Il s'arrête sur le seuil, croise mon regard et m'offre un sourire dédaigneux.

— Et, de rien pour les chaussures, je savais que tu ne pourrais pas résister à ses bijoux.

Avant que je puisse répondre, il claque le panneau de bois et je me retrouve dans la salle obscure. Aussi sombre que mon esprit en cet instant. La honte et la gêne se battent pour prendre la première place dans les sentiments qui m'agitent.

Et merde ! Je ne jure pas souvent, les leçons de maintien et d'éducation de mon enfance ont trop bien été retenues. Mais Elias n'a pas tort d'utiliser ce mot. 

Note :

Sub : terme BDSM utilisé pour soumise.

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