When the rain begins to fall

Quand je finis mon boulot il est souvent tard. J'ai l'esprit embrumé par ma journée. Des chiffres. des chiffres, des stats, des données, des microbes et des formules qui forniquent dans tous les sens dans mes cellules grises. Je pense à une bière fraîche en détachant mon vélo. Peut-être même une deuxième. Ou à un verre de vin.

Le jeudi soir est presque une délivrance en soi: il ne me reste qu'une journée de travail avant de me laisser glisser dans le week-end patiemment attendu cinq jours entiers.

Les premiers mètres passés je prends mon rythme de croisière, pédalant efficacement sur le chemin facile et sans surprise du retour. Une goutte tombe. Une petite averse. Beaucoup d'eau et pas de cape, pas prévu, suis con.

Un déluge s'abat sur Paris ce jour là, les rues se vident aussi vite que les caniveaux se transforment en torrents urbains, les gens s'abritent à la hâte sous les porches et dans les boutiques à la grande joie des commerçants. Mes lunettes sont pleines de buée et mon jean devient aussi lourd que collant. La sensation est d'autant plus insupportable que je sais qu'une douche longue et chaude m'attend chez moi. Rien de prévu ce soir. La meilleure douche de ma vie c'est certain.

Mes mains tremblent de froid tandis que je cherche les clefs de mon cadenas, j'attache fermement ma monture dans le local à vélo de mon immeuble en grelottant et en pestant contre cette pluie démente qui va me rendre malade comme un chien. Je vais passer le week end enfermé dans un rhume et des kleenex sales. Je suis de mauvaise humeur. J'ai froid, je suis crevé, j'ai des chiffres plein le crâne et je suis trempé. Je monte les étages en maugréant à chaque pas bruyant que font mes tennis détrempées. Journée de merde. La soirée ne s'annonce pas plus gaie.

Je me déshabille en laissant un tas de fringues, de veste, de chaussures, en boule à même le sol, de toutes façons ce ne sera pas pire. Je me rends dans la salle de bain et savoure ma douche brûlante comme la récompense idéale et éphémère d'une journée morose. Je me sèche longuement et bien dans les recoins pour ne plus avoir la moindre sensation d'humidité sur ma peau. J'enfile un T-shirt doux et sans formes et un autre jean et remplis ma machine à laver. A presque 40 ans elle est la grande nouveauté de ma vie, en devenant propriétaire de mon appart je suis devenu propriétaire de mon lavomatic perso.

Plus de lessive. Putain !
Pas grave, m'en fous, je ferai tourner ça demain, je vais me servir un verre et me légumer devant une série en sirotant du vin.

C'est en fouillant dans les placards de ma cuisine que je me suis rendu à l'évidence, le cauchemar n'était pas fini.
Plus de vin.
PUTAIN !!
Ressortir.
Enfiler une veste étanche, de nouvelles chaussures et descendre à l'épicerie.
En profiter pour racheter de la lessive. Clefs, carte bancaire, et me voila reparti.

La pluie n'a pas cessé, des mètres cubes de flottes se déversent dans les rues, c'est presque inquiétant je n'ai jamais vu une pluie pareille durer aussi longtemps. Je cours vers le Monop' et choisi à la va-vite un Chinon bio, une boite de tarama, des blinis et un pot de crème glacée aux marrons confits. Je le mérite bien.
Je prends aussi des bières et une pizza au cas où la pluie m'empêche de sortir demain on ne sait jamais. J'attrape un paquet de chips avant d'aller vers les caisses pour payer et embarquer mon butin de célibataire dans mon sac à dos.
Je cours aussi vite que je peux bien que chargé pour éviter les trombes d'eau.

Je ne le vois pas tout de suite quand je cherche encore une fois ces satanées clefs au fond de mon sac, sous les bières et le vin.

"Fucking IPhone, fucking weather, fucking Paris ! Fuuuuuck ! I'm so fucked up."

Un sweat à capuche sur ma gauche est visiblement dans le même état que moi il y a une bonne heure. Visiblement pas d'ici et visiblement paumé.

-May I help you ?

Il reste dans la pénombre du porche le visage enfoncé dans sa capuche détrempée mais lève le menton dans ma direction et répond dans un français parfait avec un bel accent américain :

- Je suis perdu, je suis trempé, j'ai cassé mon cellphone, j'ai froid et je ne peux pas appeler mon agent pour qu'il vienne me chercher, je suis... Je suis...
- Vous voulez entrer un instant pour téléphoner ?

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Va-t-il laisser rentrer un inconnu? Est-ce que cet inconnu à capuche l'est tant que ça? Va-t-il s'arrêter de pleuvoir?

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