Nightcall
Sylvain sait. Nico est au courant. Christophe doit déjà savoir. À priori tout mon cercle d'amis est désormais au courant que si je n'ai pas fermé l'oeil depuis quelques nuits c'est parce que je suis obsédé par le sabre laser de Dylan.
À chaque fois que je dis son nom, même dans ma tête, même juste pour moi je trouve ça ridicule. J'ai le sentiment d'être ma cousine à treize ans en train de se rouler par terre devant "Beverly Hills" à chaque apparition de Luke Perry. DYYYYLLLLAAAANNNN!!!
Georges, Brad, Matt, Jake, Hugh, Christian, Michael... Tout ça serait passé sans soucis mais "Dylan" j'ai parfois comme un doute.
J'essaye de me raccrocher à tout ce qui est normal et simple dans ma vie encore une fois, je le trouve trop jeune, trop acteur, trop américain. Trop insolescent. C'est absurde ce qui nous arrive, ça ne tient pas debout. Je crois bien finalement que je ne vais pas aller à Los Angeles.
Je me sers un Irlandais sur des cubes de granit qui dorment au fond de mon congèle et le bois d'un trait sans l'apprécier. Je remplis mon verre une seconde fois et laisse les arômes fumés tapisser mon palais. Je dégaine mon téléphone et actualise rageusement Grindr. J'ai envie d'un mec. j'ai envie d'un mec qui n'a aucune importance pour moi, aucune saveur. Je veux me taper un mec cul-sec comme un Label5 écoeurant dans une boite glauque.
Je trouve Bertie78 qui est "dur et dispo" et pas loin. En plus d'être en état il est d'accord pour se déplacer jusqu'à mon appart. J'ai du mal à exprimer mon humeur en l'attendant ; comme si ma tristesse et ma résignation se changeaient en une colère sombre. Je refais défiler les photos de son compte Facebook encore une fois et laisse passer une remontée acide et bileuse en regardant l'ignoble photo sur laquelle il embrasse du bout des lèvres sa petite greluche. Je fais passer le goût et l'émotion avec un troisième whisky.
En attendant l'arrivé de Bertie78 je finis mon verre en regardant le début de "Prince of Persia", certainement un des rares mauvais films avec Jake Gyllenhal mais certainement celui dans lequel il est le mieux léché. Je suis un peu saoul et déjà excité lorsque Bertie sonne à la porte, je sors du lubrifiant et des capotes de l'armoire de la salle de bain avant d'aller lui ouvrir. Il est plutôt mignon, petite cagole aux cheveux courts en dessous et longs dessus et un T-Shirt au col en V un peu trop moulant. Il est aussi fade et convenu que les trois derniers mecs que je me suis envoyés grâce au site. Avec son sourire timide et son tatouage à chier il est standardisé comme une pizza de qualité médiocre. La différence c'est qu'il arrive vite et que je n'ai pas de pourboire à donner.
Je le laisse entrer sans franchement le regarder ; en fait je m'en fous. Je jette un dernier coup d'oeil à Jake en monstre body-buildé et huilé avant de m'adresser à l'autre.
-Clément, t'as trouvé facilement?
-Bertrand, pas de soucis. C'est sympa ton appart.
-Et les murs tu les trouves comment?
-Blancs, euh... bien peints.
-Regarde les donc de plus près.
A ces mots, je l'embrasse avec hargne. je ne lui propose pas d'aller s'installer sur mon futon, je le colle contre le mur et poursuis mes baisers dans sa nuque. Il geint. Je m'applique à le serrer plus près de la cloison et m'empresse de défaire les boutons de son jean slim trop serré.
-T'es pressé toi dis-donc? Dit-il en feignant un sourire coquin que je ne relève pas.
-Oui, je suis pressé. J'ai très envie. Pas toi?
-Si, si bien sur c'est juste que...
Que? Queue. Je dégaine le lubrifiant et en applique avec empressement sur mon dard au garde à vous et au passage un peu sur lui en essayant de faire comme s'il s'agissait d'une caresse. Je regarde une dernière fois l'écran : quand on est pas sur de son coup autant être sur de son fantasme, non?
Je sais que je suis brutal avec lui, je suis raide et ivre, j'ai envie de le foutre avec rage comme si ça pouvait calmer ma tête, tout effacer parce que j'ai joui avec un autre. Bertie couine un bref instant le temps que je m'installe en lui, je relâche mon éteinte pour qu'il reprenne son souffle et se détende. Quand je le sens mollir sous ma pression j'entame un va et vient très perso. Je m'en fous de savoir si je tape comme il faut là où ça lui fait du bien, j'ai envie de me faire du bien à moi. Au fond je suis tellement malheureux, tellement blasé de ces plans cul à vomir, tellement sinistré des sentiments que je ne fais même pas attention à l'autre crétin qui éjacule dans ma main. Je viens fort seulement lorsque l'image d'un tube de concentré de tomate jaillissant sur du tissu léopard me traverse l'esprit. Je me retire et part jeter le préservatif. Quand je reviens Bertrand à remonté son jean et me lance un regard de braise.
-Moi aussi j'avais très envie. Ça te dit d'aller boire un verre et de remettre ça plus tard?
-Non. Je vais pas avoir le temps. Et puis j'ai pas plus envie que ça.
-Ah oui je vois, tu fais partie des connasses toi aussi?
-T'as pas idée. Maintenant excuse moi Bertie mais j'ai envie de rester seul, navré si tu voulais plus ou mieux.
Il m'insulte copieusement en partant mais je ne l'écoute même pas. J'ouvre la fenêtre pour faire partir l'odeur de M. Pizza et je m'installe dans mon futon pour regarder la fin de mon porno soft, mais le cœur n'y est pas. Regarder Jake me fait penser à un cow-boy triste quelque part en Amérique qui n'ose pas être amoureux.
Je prononce son prénom à voix haute et le "l" s'étrangle dans ma gorge.
Ce soir j'ai treize ans et j'ai envie de me rouler par terre en pleurant.
"DYLLLLAAAN"!!!
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Pas très en forme notre Clément ce soir. Je pense qu'il a besoin de vacances. Je me demande bien où il pourrait partir tiens... Des idées?
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