Chapitre 5 : "Par Fulbert, où avez-vous trouvé ce chien ?"
Quand Gatien vit le grand garçon arriver, aussi fin qu'un fil de fer et les habits de travers, il soupira de soulagement. Cela faisait une demi-heure qu'il attendait devant la pharmacie Loger, qui se trouvait être celle dans laquelle il avait volé les médicaments.
-Tu es en retard, dit-il.
Le garçon se contenta de marmonner quelque chose à propos de voleurs et de bagarres, puis s'enfonça dans la ruelle. Gatien le suivit aussitôt, le dépassa, et lui montra le chemin jusqu'à la vieille boutique en ruine.
-Il y a un chien ? s'étonna le garçon.
-Euh...il n'est pas à...
-Le patron va être content, continua le garçon sans lui prêter attention. Il se plaint souvent de ne pas avoir assez de chiens à fournir à la résistance.
Gatien garda donc pour lui que le chien n'était pas à lui, et se contenta de sourire : si le recruteur voulait des chiens, c'était un bon moyen de se faire bien voir.
-Comment va-t-on faire ? demanda-t-il.
Le grand garçon regarda le chariot, le remplit avec les sacs, et y déposa le corps du chien.
-Tu pousses, je porte la fille, déclara le garçon.
Gatien le regarda, sceptique. Le garçon paraissait bien trop frêle pour porter une autre personne, bien qu'elle soit légère. Mais, à son grand étonnement, le garçon la souleva sans trop de difficulté et sortit de la boutique.
Gatien s'empressa de prendre le chariot et de les suivre.
Arrivés dans la rue, ils la descendirent et tournèrent à droite. Ils traversèrent différents rues, puis firent demi-tour lorsqu'un robot apparut plus loin. Quand il se fut éloigné, les deux garçons reprirent leur chemin vers le bar et le trouvèrent quelques minutes plus tard.
-Tiens-là, je vais chercher le patron, dit le garçon en tendant Estelle à Gatien.
Celui-ci la prit tant bien que mal et la déposa par terre, dos contre la vitrine, alors que le garçon rentrait.
Il revint bientôt avec le recruteur et un homme d'âge mûr, possédant une barbe noire brossée proprement et des yeux d'un bleu éclatant.
-Il est là, dit le garçon en montrant le chien.
Le recruteur parut content.
-Parfait, rentre chez toi, maintenant. Les autres, suivez-moi !
Ils vérifièrent qu'aucun robot ne trainait dans les parages, puis s'engouffrèrent dans une boulangerie fermée pour la nuit. Le recruteur les fit descendre un escalier, et alluma la lumière : ils se trouvaient dans un garage.
-Oh ! s'exclama Gatien , émerveillé à la vue de la voiture qui trônait devant eux.
Elle semblait presque neuve, sa carrosserie rouge reflétait la lumière des lampes électriques, et une troisième paire de pneus avait été installées devant les roues arrières. C'était un tout nouveau modèle, qui devait coûter plus cher que la cuisine de Pascal et la forge du père d'Estelle réunies. Gatien l'avait vu dans un catalogue, par-dessus l'épaule d'un client du restaurant de Pascal.
-En voiture ! s'exclama le recruteur, dont le sourire montrait qu'il était fier de posséder une telle splendeur.
Il mit les sacs dans le coffre, installa Estelle et le chien au milieu de la banquette arrière, et invita Gatien à s'asseoir à côté d'elle. Le deuxième homme s'assit à la place du copilote, et le recruteur alluma le moteur en posant son doigt sur le volant.
-C'est parti...
Une porte de garage s'ouvrit et la voiture remonta dans la rue, sans un bruit. Elle fila dans une ruelle, vira à gauche, déboula sur une avenue déserte, et sortit de la ville en silence.
Là, le recruteur sourit et mit la voiture en pilote automatique. Celle-ci prit aussitôt de la vitesse, fonçant droit devant elle sur le petit chemin de terre.
-Nous sommes partis pour un trajet de huit heures, annonça le recruteur. Mettez-vous à l'aise, si vous avez soif ou faim, demandez-donc à haute voix ce que vous voulez. Si c'est disponible - c'est écrit sur le menu dans la pochette derrière les sièges - le bras mécanique vous le servira. Le bouton rouge sur les portières penche le dossier si vous souhaitez dormir. La lumière se baisse en faisant tourner la roue bleue au plafond. Si vous voulez regarder la télé, demandez-le et je vous la ferrai sortir.
La voiture prit un virage, et Gatien s'émerveilla de ne presque rien ressentir. Les pneus amortissaient les chocs et les rebondissements, et la vitesse ne se sentait pas.
Il regarda avec de grands yeux le recruteur demander une bière, et le bras mécanique qui sortit d'un coffre central pour lui en tendre une. Les deux hommes appuyèrent sur une manette et un écran apparut devant le pare-brise. La télévision s'alluma et un présentateur annonça les gagnants du concours de rodéo. Le recruteur changea de chaîne, et une femme apparut, énonçant les dernières nouvelles de l'empire : une ville avait été rasée car certains de ses habitants n'avaient pas payé leurs impôts, un résistants avait été exécuté devant le palais de l'empereur, une tempête était annoncée dans le Nord pour le lendemain, un duc avait été retrouvé mort dans son jardin et une domestique avait été accusée d'avoir empoisonné le vin qu'elle lui avait servi, l'empereur avait acquis un nouveau cheval de compétition qui promettait de lui rapporter beaucoup d'argents, des scientifiques avaient mis en place un nouveau programme de mutation génétique animalier pour créer des chiens d'élite doués à la fois pour le combat et l'espionnage...
Gatien observa le chien, à côté de lui. Se pouvait-il qu'il se soit enfui d'un de ces centres d'expériences génétiques ?
-Comme toujours, c'est du n'importe quoi... marmonna le recruteur. Ils n'ont même pas parlé de l'incendie de l'atelier de couture de l'empereur, que les résistants ont provoqué ! Et ils ont accusé une pauvre domestique de la mort du duc, alors que c'est le Chef en personne qui s'est déplacé pour l'assassiner ! Et de la pauvreté du peuple, de nos efforts, de notre recrutement qui s'accélère ? Ils l'ont totalement censuré ! Depuis le temps que je dis qu'il va falloir introduire des résistants sur les plateaux télé si on veut un jour arriver à quelque chose !
-Je suis informaticien, dit le deuxième homme. Mon oncle m'a appris à pirater les ordinateurs, les comptes et les capteurs de réseaux. Je pourrai peut-être aider la résistance sur ce sujet.
-Parfait ! s'exclama le recruteur avec un grand sourire. Cela fait plaisir de trouver des gars comme vous, mon cher ! Doué et utile, c'est ce qu'on cherche !
Gatien ouvrit la bouche pour faire remarquer que très peu de gens avaient accès à une télévision, et que les plus riches n'étaient pas vraiment ceux qui seraient le plus intéressés par des publicités en faveur de la résistance, mais il se retint, de peur de déplaire au recruteur.
Après avoir vaincu ses dernières gênes - et avoir vu l'homme aux yeux bleus se servir de la soupe chaude, du vin et une salade de fruits - Gatien commanda plusieurs paquets de biscuits apéritifs, des chips, des sandwichs, des sodas, des pains aux raisins et des barres chocolatées.
Ensuite, tout en sirotant un chocolat chaud saupoudré de petits chamallows et de crème chantilly, Gatien posa sa tête contre la vitre et laissa son regard se perdre dans le paysage qui défilait à toute allure...
*
-Debout, on arrive !
Gatien se réveilla en sursaut au son de la voix du recruteur. Il renversa sur lui le fond de son chocolat, maintenant froid, et pesta en essuyant son pantalon. Mais, malgré ses efforts, la tâche paraissait décidée à rester à sa place.
-Dans quinze secondes, vous allez voir l'entrée ! s'exclama le recruteur avec enthousiasme.
Gatien se redressa, curieux, et la voiture tourna derrière un gros rocher, faisant apparaître à leur vue la porte d'un grand hangar, en plein dans les montagnes.
-Où sommes-nous ? demanda Gatien en jetant son verre dans la poubelle. C'est le quartier général de la résistance ?
-Nous sommes dans l'Est des montagnes Alfords, répondit le recruteur. Un trou perdu, peu connu et désert...parfait pour nous ! Et, oui, vous voilà arrivés chez vous !
L'homme aux yeux bleus parut ému, et renifla bruyamment en essuyant une larme.
Gatien, lui, ne pouvait plus tenir en place. Ils étaient enfin arrivés ! Plus que quelques minutes et ils seraient à l'intérieur du quartier général de la résistance ! Ils avaient enfin trouvé un endroit où ils seraient en sécurité !
La voiture s'arrêta devant la porte, le recruteur pianota sur un clavier qui était apparu devant lui, puis un bras mécanique sortit de la porte pour venir se placer à côté de sa portière. Il ouvrit la fenêtre, posa son doigt sur le boitier, et la porte s'ouvrit avec lenteur, dévoilant peu à peu un grand garage rempli de voitures, de chars et d'autres véhicules.
Le recruteur referma sa fenêtre et la voiture s'engouffra dans le hangar.
Une fois garée entre un tracteur et un char blindé, la voiture s'immobilisa et le moteur se tut. Le recruteur poussa un grognement de contentement et ouvrit sa portière.
-Alors, alors, alors ? demanda une petite femme en arrivant en trottinant. Vous avez des nouveaux ? Dites-moi que vous avez un ingénieur !
Gatien la regarda, à travers la vitre, se planter devant le recruteur. C'était vraiment étrange de voir à quel point elle se déplaçait vite, avec ses talons vertigineux et ses semelles de compensation. Et, même avec ces chaussures, elle ne devait pas dépasser les épaules de Gatien. Elle portait une petite robe verte à carreaux, une chaîne argentée en guise de ceinture, des collants transparents et un collier de perles roses. Ses longs cheveux étaient attachés en un chignon complexe, des bracelets argentés s'entrechoquaient à ses poignets, et son regard se posait sur le recruteur d'un air impérieux.
-Je suis désolé, Hélène, dit le recruteur en inclinant la tête avec respect. Je n'ai pas d'ingénieur. Mais j'ai un informaticien qui peut nous aider à pirater les chaines de la télévision, le réseau et les ordinateurs du gouvernement ! Et deux adolescents qui savent se débrouiller tout seul dans la nature, voler sans se faire attraper et qui ont déjà des bases pour le combat. Sans oublier leur chien !
-Leur chien ? répéta la femme, tout de suite intéressée. Vraiment ?
Elle ouvrit la portière de Gatien et le regarda avec curiosité. Puis son regard se figea sur l'animal.
-J'y crois pas... souffla-t-elle. Par Fulbert, où avez-vous trouvé ce chien ?
Elle paraissait au bord du malaise, mais ses yeux brillaient et son sourire n'arrêtait pas de s'allonger.
-Nous ne l'avons pas depuis très longtemps, répondit Gatien. Nous l'avons trouvé dans la rue, il s'est vite attaché à nous, prétendit-il.
La femme observa l'animal de plus près, la retourna, la remit à l'endroit...
-Merveilleux, c'est une femelle...mais pourquoi dorment-elles ?
-Gatien leur a injecté un puissant anesthésiant volé dans une pharmacie, expliqua le recruteur. Par accident, bien sûr. Elles devraient se réveiller dans deux jours.
-Quel anesthésiant ? demanda la femme.
-J'ai encore une seringue dans mon sac, dit Gatien. Le nom doit être dessus.
Il sortit, le recruteur lui tendit son sac, et en sortit la seringue.
-Anesthésiant 328, dose pour trois jours, lut-il.
-Magnifique ! s'exclama la femme en lui prenant la seringue des mains. Je peux te la prendre ? Pour la donner au labo ? Cela fait une éternité que nous cherchons à reproduire cet anesthésiant, en vain. Avec cet échantillon, nous allons pouvoir trouver la recette et en produire !
-Euh...pas de problème, répondit Gatien, qui ressentit tout de même un pincement au cœur en voyant la seringue disparaître dans une poche de la femme.
-Bonjour, madame, dit l'homme aux yeux bleus en sortant à son tour de la voiture. Je suis Reda.
-Bienvenue, vous êtes l'informaticien ? Parfait ! Je suis Hélène, cheffe de la direction de la logistique.
Ils se serrèrent la main, puis Hélène se tourna vers la porte de sortie, laissée ouverte.
-MICHEL ! GERARD ! AUDE ! hurla-t-elle. VENEZ ICI TOUT DE SUITE !
Gatien la regarda, ahuri, en titubant, déséquilibré par sa puissance vocale. Jamais il n'aurait pensé qu'une si petite femme pouvait crier aussi fort.
Aussitôt, un vieillard, une jeune femme et un adolescent arrivèrent en courant.
-Présents ! clamèrent-ils en chœur, se mettant au garde à vous devant Hélène.
-Parfait. Michel, je te confie la tâche d'emmener la jeune fille et la chienne qui se trouvent dans la voiture à l'infirmerie. Elles ont été anesthésiées pour encore deux jours. Gérard, guide donc Reda et Gatien chez Fulbert pour qu'il leur fasse passer le test. Aude, accompagne Gaston à la cafétéria et arrange-lui un rendez-vous avec Clément. Moi, je vais envoyer un mail pour prévenir tous les résistants.
Les trois résistants la saluèrent et s'activèrent. L'adolescent courut chercher un brancard, y posa Estelle et la chienne, et s'en alla en sifflotant. Aude et le recruteur s'éloignèrent en bavardant gaiement. Hélène partit en trottinant sur ses talons à aiguilles. Et le vieillard s'avança avec un chariot qu'il remplit avec les sacs.
-Suivez-moi, dit-il à Gatien et au dénommé Reda.
Gatien les suivit, s'éloignant de la voiture avec regret. Il avait passé à l'intérieur les meilleures heures de toute sa vie ! C'était dur de la quitter aussi vite, alors qu'il y avait mangé plus qu'à sa fin pour la première fois.
Gérard leur fit traverser de nombreux couloirs aux murs blancs, éclairés par des néons électriques qui grésillaient parfois. Ils arrivèrent sous une voûte, puis montèrent un grand escalier en colimaçon en croisant quelques hommes pressés. Au détour d'un virage, ils manquèrent rentrer dans un chariot rempli de fioles, poussé par une adolescente, et ils se heurtèrent à un couple qui se disputait à propos d'un dosage minutieux que l'un avait raté.
Gatien regardait autour de lui avec émerveillement. Tout était grand, bien équipé et propre. Il avait l'impression d'être entré dans un autre monde.
-Par là, fit Gérard en les poussant dans un couloir plus fréquenté.
Ils se glissèrent entre des hommes et des femmes croulant sous de longues piles de dossiers, et entrèrent dans une petite salle d'attente.
-Oui ? dit un gamin, derrière un grand bureau.
Les pieds sur la table, il pianotait sur son téléphone à toute vitesse. Ses cheveux blonds cendrés ne semblaient pas avoir vu passer de brosses depuis un bon bout de temps, et le bleue marine originale de sa salopette était à peine visible derrière toutes les tâches de peinture et de confiture. Quand il releva la tête vers les nouveaux arrivants, ses yeux pétillèrent de malice.
-Bonjour Matéo, dit Gérard. Que fais-tu ici ? Et tes pieds n'ont sans doute rien à faire sur ce bureau.
-Lauryne est en congé maternité depuis deux jours, dit le gamin en se rasseyant normalement. C'est moi qui la remplace en attendant !
-Bien, peut-on voir le chef ? J'ai des nouveaux.
-Papa est seul dans son bureau, donc libre de vous recevoir ! s'exclama joyeusement l'enfant en se levant.
Il trottina vers une porte en verre fumé, et l'ouvrit après y avoir frappé deux coups.
-Gérard, mécanicien et garagiste, vous apporte deux nouveaux ! clama-t-il à la personne qui se trouvait à l'intérieur.
Il s'écarta et retourna s'asseoir au bureau.
Gérard le remercia et entra, faisant signe à Reda et Gatien de le suivre. Ceux-ci s'empressèrent d'obéir après avoir salué le gamin.
Le bureau du chef était plutôt petit, mais la décoration assez riche. Un vieux lustre éclairait la pièce depuis le plafond, les murs étaient pourvus d'ornements en or, les pieds du bureau et des chaises étaient sculptés en têtes de loups, de vieux livres inondaient une bibliothèque et un riche tapis recouvrait le sol.
Assis derrière son bureau, le chef de la résistance, Fulbert, reposa une tasse de café. Ses longs cheveux gris tombaient avec raideur sur ses larges épaules, et ses yeux verts semblaient passer Gatien et Reda aux rayons X.
-Bonjour, dit-il. Je vous remercie de me les avoir emmenés, Gérard. Les nouveaux, asseyez-vous donc.
Gérard le salua et se retira. Puis la porte se referma et Gatien s'assit, imitant l'autre homme.
-Eh bien je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue dans la résistance, commença Fulbert. J'espère que vous savez dans quoi vous vous êtes embarqués et que vous servirez corps et âmes notre mouvement. Je vais vous poser quelques questions, lire votre dossier, et vous attribuer une place que vous devrez garder jusqu'à ce que je décide de changer d'avis. Vous dormirez dans des dortoirs avec des résistants de votre âge, vous mangerez à huit heures du matin en même temps que tout le monde dans le réfectoire après une toilette rapide, et vous travaillerez pendant le reste de la journée, pour finir à six heures. Le déjeuner sera à midi, et vous aurez une demi-heure pour manger. Il vous faudra respecter vos supérieurs, obéir aux ordres, rester à votre place et ne pas transgresser les règles, compris ?
Gatien et Reda approuvèrent d'un même signe de tête.
Fulbert sortit alors un ordinateur et pianota sur le clavier. Il lut les dossiers qui s'affichèrent, sans dire un mot.
-Vous êtes informaticien ? s'étonna-t-il en regardant Reda.
-Oui. J'ai pu me payer les études : c'était juste avant que mon père ne se suicide parce qu'il avait perdu toute sa fortune en pariant.
-Hélène vient de m'envoyer un message pour me dire que vous seriez intéressé par un poste de piratage informatique.
-C'est cela.
Fulbert l'observa un moment, puis ses lèvres s'étirèrent en un sourire féroce. Gatien frissonna : cet homme lui fichait la trouille.
-Parfait, dit Fulbert à mi-voix. Vous avez le poste. Bloc 5, huitième étage, centre des données et de l'informatique. La journée a déjà commencé, donc vous prendrez votre poste dès demain.
-Merveilleux, dit Reda. Je suis comblé.
Fulbert hocha lentement la tête, satisfait, puis se tourna de nouveau vers son ordinateur pour lire le dossier de Gatien.
-Tu n'as pas fait d'études, je suppose, dit-il au bout de plusieurs minutes.
-Non, monsieur.
-Hum... Mais tu sais voler, t'introduire sans te faire remarquer chez les gens, et quelque peu te battre. Cela pourrait nous être utile... Mais tu es trop jeune pour entrer dans notre réseau d'espionnage, ou du moins tu n'as pas encore fait tes preuves et viens d'arriver. Tu n'auras qu'à aller dans l'armée et apprendre à te battre en attendant. J'envisagerai peut-être de te faire basculer chez les espions dans un an ou deux, si tu montres que tu es efficace. Tu commences demain, comme Reda.
-Euh, très bien, fit Gatien après quelques secondes d'hésitation.
Il n'était pas très sûr de vouloir particulièrement se battre avec l'armée, mais il ne savait pas vraiment ce qu'il s'était imaginé en pensant à ce qui l'attendait dans la résistance.
-Quant à la fille qui est venue avec toi, elle pourrait peut-être aller en logistique, si elle a gérer les comptes de la forge de son père, continua Fulbert d'un ton pensif. Oui, c'est bien, ça.
Il regarda son téléphone portable qui venait d'émettre une vibration, et éclata d'un rire froid.
-Et tu as une chienne mutée ? continua-t-il en regardant Gatien. Sais-tu au moins à quel centre elle appartenait ?
-Non, dit Gatien en se disant que le mensonge ne l'amènerait à rien sur ce plan-là.
-Hélène a vu à la télévision un documentaire sur un élevage de chiens d'élite mutés, pour espionner et combattre, dit Fulbert. Ta chienne a dû s'en échapper.
Gatien ne dit rien, ne sachant que dire. Il avait bien de la chance d'être tombée sur cette chienne : elle allait sûrement lui apporter un peu d'importance !
-J'espère que tu accepteras de la mettre dans notre propre élevage de chiens, où elle sera encadrée par nos dresseurs.
-Hum, oui, bien sûr... marmonna Gatien. Mais je ne sais pas si elle vous obéira.
Il ne savait même pas si elle lui obéirait à lui.
-Très juste, dit le chef. Eh bien nous verrons quand elle se réveillera !
Cette réplique sembla mettre fin à la séance. Tout le monde se leva, se serra la main, et les deux nouveaux sortirent du bureau.
-Hélène vous attend dans le couloir! précisa Matéo, de nouveau les pieds sur le bureau, quand ils passèrent devant lui.
Et, en effet, Hélène surgit devant eux dès qu'ils arrivèrent dans le couloir.
-J'ai vos résultats ! annonça-t-elle en agitant son téléphone portable devant leur nez. Suivez-moi, je vais vous faire visiter, vous donner un petit-déjeuner, vous montrer vos dortoirs et vous présenter quelques personnes. Ah ! Tiens, voilà déjà Alida. ALIDA, ALIDA !
Une grande femme aux longs cheveux et à la peau aussi sombre que la nuit se retourna vers eux. Elle portait une jupe grise et un pull blanc, ainsi que des ballerines pourpres. Ses bras étaient encombrés de dossiers qu'elle venait de recevoir d'une secrétaire.
-Des nouveaux ? dit-elle en s'approchant. Bonjour, bonjour à tous les deux !
Elle leur adressa un grand sourire, et les examina.
-Tu es bien jeune, toi, dit-elle à Gatien. Où sont donc tes parents ?
-Morts, répondit Gatien sur un ton catégorique.
Sa mère était peut-être toujours vivante, mais les fous étaient souvent achevés après quelques années à l'asile s'ils n'étaient pas rentrés chez eux avant, leur santé mentale retrouvée.
-Oh, c'est bête, hein ? fit-elle. Je suis désolée. Tu n'as pas de famille ?
-Je suis orphelin, assura Gatien, qui ne voulait plus entendre parler de sa tante.
-Oh, c'est trop triste... Et vous ? Vous avez de la famille ? demanda-t-elle à Reda.
-Une fille, mariée depuis peu, répondit vaguement Reda.
-Oh, elle est venue ici ?
-Non, elle n'a pas envie de s'engager.
-Cela peut se comprendre, approuva Alida. Allez, bonne journée à tous les trois !
Et elle s'éloigna.
-Alida est la femme de Fulbert, le chef, expliqua Hélène. Elle est vraiment sympa ! Un peu trop curieuse, parfois, mais très attachante ! C'est la mère de Matéo, le petit à la place de la secrétaire.
Cela étonna Gatien. Alida lui paraissait bien trop rayonnante et joyeuse pour être mariée à un homme comme Fulbert.
Hélène leur sourit et les entraîna à sa suite, tout en parlant du génie de Fulbert et des incroyables missions de la résistance.
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Alors que pensez-vous qu'il va se passer à partir de maintenant ?
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