Chapitre 5
"Sugar
Yes please
Won't you come and put it on on me
Oh right here, cause I need
Little love and little sympathy"
Maroon 5
Je m'en veux terriblement. Je me suis fait remarqué à l'aéroport, ils ont trouvé une fourchette dans ma poche au moment ou je passais la fouille. Ils me l'ont confisquée et m'ont regardé avec un air supérieur déplacé pour des PakistHindoues. Ils m'ont ensuite interrogé sur le contenu du flacon de comprimés dans la poche intérieure de mon imper Burbuerry's mais l'ordonnance du Dr. Lecter les a radoucis.
Le médicament est puissant, je me suis endormi comme une souche dans l'avion. Mon profond sommeil a été bercé de rêves légers dans lesquels je dépeçais des hôtesses de l'air blondes avec de gros seins après les avoir traies les une après les autres. Je prends conscience du bien-être que m'a procuré ma première séance chez l'excentrique médecin de Hell's Kitchen. Je rentre Mardi matin ce qui me laissera le temps de persécuter un ou deux de mes employés avant de me rendre à mon rendez-vous.
Samira est mon assistante à Paris. Elle a pris soin de préparer mon appartement comme je l'aime. Il y a du lait de riz dans le réfrigérateur. Muësli danois et thé vert Matcha dans le placard. Samira est une perle. Je ne la vois jamais et tout est toujours en ordre. Je cours quarante-cinq minutes sur mon tapis de course, après j'utilise la douche et le sauna.
Je suis frais.
Je vais bien.
J'ai envie de le dire au Dr. Lecter et d'annuler notre prochain rendez-vous qui n'aura plus lieu d'être puisque je suis en parfaite santé. Je n'entends pas de bruits. Je n'ai pas de goût métallique omniprésent dans la bouche.
Le premier plaisir que j'aime m'offrir lorsque j'arrive à Paris est assez simple et c'est un classique auquel je n'aime pas déroger. Samira a pris soin d'acheter des bières blondes de marque distributeur et elles sont bien fraîches dans le bac à légumes. Un paquet de chips m'attend dans le second placard. Des chips parfumées "Onion & Cream". Ce sont celles qui ont le parfum le plus exécrable. Elles sont un des éléments clefs de la bonne réussite de l'expérience.
Je m'installe confortablement dans le canapé blanc du salon, semblable à la table blanche laquée que j'ai achetée chez Protis et au meuble Hi-Fi. J'hésite un peu sur le choix du programme. Après dix minutes de réflexion je lance le replay de Chérie25 pour pouvoir regarder "C'est mon choix". Je bois la première bière en écoutant le générique et le sujet de l'émission.
"Je dépense mes allocations familiales dans des accessoires de luxe."
Je bande déjà rien qu'en entendant Evelyne Thomas énoncer le thème. J'ouvre une deuxième bière et plonge la main gauche dans le sachet de chips. Le goût infâme des "Onions & Cream" est mis en valeur à la perfection par la fausse amertume industrielle des bières premier prix. Une grosse brune à la peau huileuse explique qu'elle file chez Dior dès que la CAF lui a fait son virement. J'ouvre mon pantalon Tom Ford slim pour être plus à l'aise. Main gauche dans le paquet croustillant, main droite pour tenir le flacon de houblon. Je guide lentement ma soirée au gouvernail des mes plaisirs coupables.
Une blonde qui doit décolorer elle-même ses cheveux raconte qu'elle nourrit ses enfants dans les hard discount mais qu'elle pousse son caddy sur des Jimmy Choo et rien d'autre.
J'hésite à prendre un troisième bière ou à me caresser tout de suite tant je suis excité par les délicates protagonistes de l'émission.
Evelyne Thomas mouille ses lèvres avant de demander d'un air faussement impartial :
"Vous vous sentez quelque fois coupables auprès de votre entourage?"
Décapsulage. Je glisse une main dans mon caleçon en soie Hermès mais je résiste malgré l'envie, il faut que ça dure, je n'ai pas fait le trajet depuis NYC pour tout larguer en trois minutes.
La grosse brune est alors invectivée par un spectateur qui lui demande si elle n'a pas honte? Si elle ne se sent pas égoïste? Si elle arrive à regarder ses enfants en face?
Je m'empiffre à pleines poignées. Je bois très vite mes vingt-cinq centilitres et décapsule la quatrième en rotant tandis que la vilaine se défend face au public qui commence à huer dans les gradins.
"J'aime mes enfants mais j'aime aussi mes chaussures. Le virement des alloc' il est à mon nom, donc je peux bien faire comme que je veux!"
J'ai bu ma bière d'un trait. J'espère que ma main un peu froide va m'aider à tenir bon mais j'en doute tellement c'est excitant. J'enfourne encore une poignée de chips dans ma bouche. Je mastique la bouche ouverte en ricanant, je m'astique le froc ouvert en écoutant.
La blonde renchérit avec un magistral "De toutes façons je ne pourrais sortir dans la rue si je n'étais pas habillée correctement. Je suis pas du genre de celles qui se négligent".
Je ferme un bref instant les yeux pour imaginer la peau orange de son visage cloquer sous l'effet d'un chalumeau. Un petit, comme celui que les pâtissiers utilisent pour les crèmes brûlées. Après les cloques de petits lambeaux d'épiderme commencent à se détacher. Dans mon fantasme elle hurle de douleur mais préserve ses chaussures en les planquant derrière ses fesses. Je continue de la brûler. La cadence de ma main se calque sur les passages de la flamme sur ses joues.
Lorsque la brune jette l'air mauvais aux spectateurs qui la conspuent "Nan mais j'vous juge pas moi alors fermez-la et laissez moi vivre, bordel!" je ne tiens plus et je jouis. Avec l'âge j'ai un peu perdu en endurance. Si ça n'avait pas été si bon je me serais un peu déçu.
Pendant que je me lave sous la douche entièrement réalisée au tadelakt (j'ai demandé à l'artisan de reponcer son travail trois fois. Non pas parce que c'était mal fait mais pour le faire chier à titre gracieux) je réfléchis à ce que je vais bien pouvoir avancer comme arguments au récoltant pompeux avec qui j'ai rendez-vous demain pour lui faire casser ses prix. Les paysans français ont souvent le malheur de placer leur ego et leur porte-monnaie au même endroit. Il me suffit de taper dans l'un pour que l'autre tombe, encore une fois, je vais être privé de sport ce week-end.
La chaleur de la douche se combine au jetlag et j'envisage de m'allonger une heure ou deux avant de partir pour mon rendez-vous. Je sais que ce n'est pas prudent, il faut que dorme ce soir et pas avant. Je dois tenir. La médecine du Dr. Lecter a ses limites que mes addictions savent combler. J'attrape un un exemplaire des "Misérables" sur la bibliothèque Stark à 10 000 €, ma Visa Infite et je récupère le Nokia 3210 relique de ma trentaine.
J'ai pris soin de retirer toutes les viscères électroniques à l'intérieur de l'appareil pour l'utiliser comme planque à coke. Quelques grains de sucre pour un peu d'amour et de sympathie! Je flâne le nez au vice avec les Maroon 5 à fond sur la chaîne Bang & Olufsen.
Le parfum piquant de ma vieille amie me redonne du cœur à l'ouvrage et je passe un pantalon crème Hugo Boss pour sortir. La poudre blanche m'agace l'esprit à mesure que je croise des hypsters à la barbe bien taillée dans les rues. Pas après pas sur les trottoirs parisiens je me prends à rêver d'une ruelle discrète et mal éclairée dans laquelle je pourrais témoigner tout mon content d'admiration à l'un d'entre-eux.
Il arrive sans que je ne m'y attende. Ses lunettes me chauffent autant le sang que le troisième rail de poudre bien tassée que j'ai pris avant de quitter mon appartement.
Avec la drogue je suis plus rapide mais un peu "peine à jouir". Je ne prends pas vraiment mon temps ni mon pied lorsque je le saigne à la fourchette derrière une poubelle. Avec le guidon de son Fixie je lui défonce le crâne en deux coups et je prends une minute pour observer son menton qui sort de chez le barbier : il n'en reste plus qu'une bouillie sanglante qui émet un petit gargouillis typiquement français. Ah, les petits hommes de Paris! Il ne m'en fallait pas plus pour me diriger vers mon restaurant favori et apprécier leur spécialité de foie de veau aux fèves. Je vais même commander leur délicieux Chianti hors de prix pour l'accompagner.
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