VIII-2 : Duel


À peine eut-il prononcé ces quelques mots qu'Alyne se précipitait sur lui. La patience n'était sans doute pas le point fort de l'elfine.

Elle enchaîna plusieurs assauts fulgurants, mais ne put percer la défense de Galaniel. Le jeune homme répondait au coup par coup, et faisait preuve de réflexes foudroyants. Tous deux furent très vite surpris de l'intensité et la rapidité de cet enchaînement. Ils n'arrivaient à le suivre que de justesse, et devaient jouer sur la moindre demi-seconde de réaction.

Une lueur d'étonnement s'était allumée dans les yeux d'Alyne. Malgré toute la vivacité, malgré toute l'habileté dont elle faisait preuve, le jeune humain continuait de lui tenir tête.

Elle se reprit. Même s'il se révélait un peu plus dégourdi que la moyenne, il restait loin de pouvoir se mesurer à elle.

Elle accéléra ses mouvements, continua sur une botte ardue, qu'une Guerrière Immaculée lui avait apprise quelques années auparavant. Ses gestes se firent difficiles à suivre pour les spectateurs qui ne purent plus distinguer qu'une tornade blanche effervescente. Ses bâtons tournoyèrent et virevoltèrent en tous sens. Elle évita une des armes de Galaniel, dévia l'autre d'un revers, se rapprocha de lui, abattit ses armes.

Ses deux bâtons furent stoppés net à quelques centimètres de la poitrine de Galaniel, par une arme qu'elle n'avait pas vu revenir. Le visage d'Alyne se teinta de surprise. Son adversaire était acculé à une hutte ; il ne pouvait pas contrer une attaque aussi élaborée. C'était impossible.

« Dommage. » Fit Galaniel avec un sourire.

Il repoussa les armes d'Alyne de sa main droite et fit décrire à sa main gauche un arc de cercle dévastateur. L'elfine se pencha en arrière jusqu'au déséquilibre pour l'éviter. Il crut qu'elle allait tomber à terre, comme tout combattant ordinaire l'aurait fait. Néanmoins, Alyne était loin d'être ordinaire.

Elle accepta la chute, ses mains rencontrèrent le sol, poursuivirent le mouvement, l'en soulevèrent, et achevèrent son impeccable rotation souple.

Ses pieds touchèrent à nouveau terre. Elle se réceptionna aussitôt pour offrir une garde de combat parfaite.

Déjà Galaniel l'attaquait de nouveau. Elle dévia une attaque, pirouetta, riposta sans succès, puis se baissa pour laisser l'arme de Galaniel siffler au-dessus de ses cheveux. Elle contre-attaqua aussitôt sur les jambes de son adversaire.

Le jeune homme bondit au dernier moment dans sa direction. Elle s'écarta d'un mouvement fluide et lança l'une de ses armes alors qu'il se réceptionnait au sol. Galaniel la vit arriver droit vers sa tête, voulut l'arrêter, l'éviter, perdit l'équilibre, puis s'affala sur le sol sablonneux.

Il n'aurait pas le temps de se remettre d'aplomb. Alyne bondissait à son tour vers lui, sans lui accorder le moindre répit. Un coup de coude contraignit son bras gauche à lâcher son arme et abandonner toute tentative de défense. Il tenta de se relever, mais fut plaqué au sol.

L'arme d'Alyne siffla vers la tête de l'humain, alors qu'il continuait de se débattre dans un nuage de poussière.

Elle fut stoppée net par le dernier bâton que tenait Galaniel. Elle marqua une demi-seconde de stupeur face à cette riposte inattendue de la part du jeune humain affalé au sol, la vision opacifiée.

Cette demi-seconde constitua un répit suffisant pour Galaniel. Ses jambes se détendirent, et propulsèrent Alyne en arrière.

Le jeune homme se releva, et frotta ses yeux pour en retirer la poussière. Alyne était déjà debout – sans doute s'était-elle d'ailleurs réceptionnée avec son adresse coutumière – ses cheveux en bataille envahis par le sable. Sa tenue avait perdu sa blancheur immaculée, et sa main gauche se maintenait crispée sur ses côtes, souffle coupé, et respiration sifflante.

Le regard qui illuminait son visage poussiéreux restait sans équivoque. Surprise, d'abord, alors qu'elle dévisageait l'humain qu'elle n'aurait jamais cru capable de lui tenir tête. Orgueil, ensuite, volonté de vaincre, de finir ce duel qui ne s'était déjà que par trop prolongé.

Galaniel toussota, secoua son bras gauche endolori, et affermit sa prise sur l'unique bâton qui lui restait. Alyne le fixait toujours de ses yeux intenses, mais ce qui l'étonna plus, c'était la présence de Césape, apparemment remis de son "échauffement". Les villageois se massaient de même sur les côtés, revêtus de leurs sempiternelles armures dorées. Aucun d'entre eux n'aurait plus raté ce duel improbable et à la tournure inattendue.

« On pourrait s'arrêter, proposa Galaniel.

— Pourquoi, tu es déjà fatigué ?

— Pas particulièrement, non, mais je...

— Alors on continue. »

Elle s'élança vers lui telle une furie, pour se dérober au dernier moment, passer derrière lui et abattre son arme de toutes ses forces.

Elle fut stoppée net. Galaniel avait déjà pivoté, rapide comme l'éclair. Leurs regards se croisèrent ; les yeux glaciaux d'Alyne pénétrèrent ceux de Galaniel avec une intensité nouvelle.

Elle se dégagea, s'acharna, frappa avec une force que Galaniel n'aurait pas cru possible et qu'il peina à contenir. Ses assauts s'étaient faits impétueux, enragés, infernaux.

Un coup de genoux lui coupa la respiration ; loin de faiblir, il contre-attaqua. Alyne se baissa en arrière, laissa l'arme siffler au-dessus de ses yeux, se redressa, et riposta avec véhémence. Un cri sauvage accompagna son coup de pied fouetté.

Galaniel recula, incertain. Alyne se porta de nouveau à sa rencontre, et abattit son arme de toutes ses forces.

Le jeune homme ne contint le choc qu'à grand-peine, et tenta de riposter du poing gauche. Alyne s'écarta, lui arracha son arme par une manœuvre habile, recula d'un bond souple, pointa son bâton devant elle, s'arrêta.

Galaniel était désarmé.

Il y eut un instant de flottement. La respiration d'Alyne se calma, son visage se rasséréna, pour laisser place à une convivialité de façade.

« Pas mal. » Concéda-t-elle.

Son visage s'éclaira d'un sourire de victoire.

« Je pense que nous pouvons nous arrêter. »

Le pied de Galaniel souleva un bâton tombé tout près puis le lança en l'air. Ses doigts se refermèrent sur le manche.

« Pourquoi ? Tu en as assez, maintenant ? »

Les yeux d'Alyne se plissèrent dans une lueur de défi.

« Très bien. »

Un sourire glacial parcourut son visage.

« J'admets que tu ne te débrouilles pas mal, pour un humain... »

Les yeux de Galaniel se plissèrent, ses doigts restèrent crispés sur son arme.

« Heureux de voir que nous n'en sommes pas resté qu'à "l'échauffement", persifla-t-il.

— Mais tu ne peux espérer supplanter une elfine de mon rang, continua-t-elle, sans accorder la moindre attention à sa réplique. En outre, il n'y a pas que la magie ou les combats physiques, même si tu sembles l'avoir compris en partie, à ce que je vois. »

Le regard surpris de Galaniel l'amena à s'expliquer plus précisément.

« Cet objet dissimulé sous ton casque ; je le vois. Tu crois sans doute qu'il est en mesure de te protéger, peut-être ; tu te trompes. Il ne s'agit que d'une béquille, tout au plus. Elle ne te serait d'aucun recours contre l'intrusion mentale d'un adversaire avec un minimum de compétences.

— Ce serait ton cas, sans doute ? »

Elle lui fit un nouveau sourire, laissa tomber son bâton à terre, puis écarta les bras.

« Pas d'armes, pas de "béquille", aucun soutien ; mais je fais de toi ce que je veux. »

Galaniel tomba à genoux, porta les mains à sa tête. Alyne continuait de le regarder, fixe, de son regard glacial et intense. Il ferma les yeux.

L'attaque s'était montrée aussi soudaine qu'imprévue. Dans la panique, il dressa des barrières avec l'aide de son A.O.M., malgré son manque de familiarité avec l'appareil.

En vain. Le raz-de-marée déferla dans son crâne pour balayer ses pensées. Une armée implacable prenait le contrôle de son empire, exhumait ses souvenirs, captait ses sens, avant de lui imposer ses ordres.

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