Chapitre neuf
Je contourne le cerf d'assez loin pour le surprendre par devant; ainsi il se retournera et foncera droit vers les deux sœurs, Marécage et Blue. Celles-ci font semblant de ne pas courir assez vite pour le rattraper car la proie ne s'attendra pas à ce que je cours avec plus de vitesse qu'elles. Mes coussinets frôlent à peine l'humus humide qui tapisse le sol de la forêt. Mon cœur bat à cent à l'heure et mes pattes accélèrent dû à l'adrénaline. Très vite, je commence à doubler notre butin. Celui-ci ne m'aperçois pas, pourtant je ne suis pas très bien caché derrière les arbres et les buissons, mais il doit être bien trop occupé à regarder où il met ses pattes et à surveiller ses poursuivants. Je précipite de plus en plus mes foulées car je commence à fatiguer. Une fois avoir distancé un peu ma future prise, je me jette devant lui. Je croise son regard et y aperçois une lueur de peur. Il se retourne brusquement mais les deux chasseuses l'attendent, il se cabre dans un dernier espoir mais Marécage lui attrape la gorge pendant que Blue le distrait. Le mammifère s'écroule laissant derrière lui un nuage de poussière. Brume et Lune nous rejoignent en courant.
En hommage à cet être, mort pour nourrir la tribu; nous baissons tous la tête pendant quelques instants. Pendant ce moment, le silence plane laissant place aux gazouillis des oiseaux, au ruissellement de l'eau des ruisseaux et aux battements d'ailes des volatiles.
Puis, nous trainons le gibier jusqu'à chez nous, non sans mal, laissant une trace de sang écarlate. Chacun attrape un membre dans sa gueule et moi je le prends par l'encolure. Après quelques difficultés sur le chemin, nous le déposons au centre du camp à l'abris des précipitations car la moitié du camp est creusée dans la roche; donc à l'abris des averses.
Tout d'un coup, Polaire, qui s'était levé pour nous féliciter de notre belle prise dresse les oreilles à l'affût comme s'il avait entendu quelque chose. Je tente donc à mon tour de percevoir le bruit qu'il écoutait avec tant d'attention mais n'entend rien d'alarmant. Puis, tous les loups aux yeux ouverts entendirent le bruit; des cris à glacer le sang, des hurlements féroces, des gémissements de douleur et des appels à l'aide.
-Ils attaquent encore! crie Miel, un ainé.
Les grognements de frustration et de colère fusent en polyphonie autour de moi.
-Ils vont nous tuer maman? demande une louveteau à sa mère.
-Non, Violette, non, car je vous protègerais toi et ta sœur. lui répond Rose, une Louve-Mère.
Des bruits de pas précipités résonnent à l'entrée du camp. Tout le monde à le regard rivé vers celle-ci, le souffle coupé et l'angoisse au ventre. Les pas se rapprochent de plus en plus vite de nous. Les museaux de nos camarades apparaissent et le son de leurs respirations saccadées nous parvient. Laïka et Marty soutiennent Gaïa et Joyce qui titubent et boitent.
-Vous êtes entiers? leur demande Flamme.
-À peu près... répond Marty.
Nous allons les aider à marcher jusqu'au centre de notre domicile. Polaire, Feuille Morte, Nuit et Corbeau se jettent sur le petit groupe pour les soigner. Gaïa a un œil blessé et son poitrail saigne légèrement, Joyce, elle a le flanc parcouru d'une longue griffure profonde. De la griffure, le sang s'écoule abondamment. En utilisant beaucoup de leur énergie, les chamans parviennent à refermer la plupart des blessures. Mais, ils ont plus de difficultés à soigner l'œil de Gaïa. Une fine pellicule blanche recouvre ce dernier le rendant presque aveugle.
-Je suis borgne! s'écrie Gaïa. Je ne vois presque plus de mon œil droit!
-Qui t'a fait ça? la questionna Chêne, son compagnon.
-Lavande. répond-t-elle calmement.
-Je vais te venger Gaïa, murmure-t-il, je vais te venger.
La chef au pelage brun secoue la tête négativement.
-Ce n'est pas la peine; c'était un coup perdu. Elle ne voulait pas blesser mon œil, et puis de toute manière il m'en reste un!
°°°°°°°°°°°°°°°
Je m'approche de Lion et lui murmure à l'oreille:
-Il y a encore des problèmes de frontière!
-Oui, me répond-t-il, oui et nous allons bientôt leur montrer de quel bois nous nous chauffons.
Je pouffe à l'idée de "leur montrer de quel bois nous nous chauffons" comme le dit si bien Lion.
-Ça te fait rire? s'offusque-t-il.
Mais très vite, il se joint à moi. Que le rire est contagieux! Nos camarades nous regardent d'un air indigné.
-Bonne nuit à tous! lance Soleil à la cantonade.
Ce n'est pas réellement un ordre, mais il sous-entend que nous devons nous coucher. Lion et moi allons dormir sur l'humus dans un coin du camp.
-Bonne nuit. lui soufflé-je.
-Bonne nuit.
Je m'endors vite en pensant à la prochaine journée qui nous attend; demain.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top