Partie 1 - Chapitre 1


- Voici ta nouvelle maison, mon garçon.


Du haut de ses cinq ans, Arvel resserra sa prise sur la hanse de sa valise et releva la tête. Un petit pavillon se tenait devant lui. Ses yeux s'écarquillèrent en devinant l'immense jardin qui devait se trouvait derrière et qui apparaissait sur les côtés. Un grillage en fer forgé entourait la propriété et les briques rouges de la façade rappelaient les typiques maisons anglaises.

Arvel était émerveillé. Il tourna la tête vers ses parents d'adoption. Un homme et une femme d'une quarantaine d'années. Cherie et Wilfrid. Aucun des deux ne pouvait avoir d'enfant. Aussi, après trois ans d'essais infructueux, ils avaient décidé d'adopter. Ils étaient partis pour un orphelinat en Norvège. Ils étaient immédiatement tombés sous le charme de ce garçonnet. Ses grands yeux bleus marines – tirant presque sur le noir – et ses mèches châtains les avaient tout de suite convaincus. La procédure avait pris un peu plus d'un an avant d'être finalement acceptée. Ils étaient heureux d'avoir enfin leur enfant chez eux.

Wilfrid alla ouvrir la porte. Arvel abandonna ses affaires et couru à l'intérieur de la maison en criant de joie. Il visita toutes les pièces, un immense sourire aux lèvres. Cherie et Wilfrid regardaient leur fils faire, des étoiles dans les yeux.

Arvel fit deux fois le tour de la maison. Il s'arrêta dans le jardin où il se roulait dans l'herbe comme un fou. Il ne s'était jamais senti libre et heureux que depuis aujourd'hui. Il bondit sur ses pieds pour rejoindre ses parents qui le regardaient depuis la baie vitrée.


- On pourra acheter un chien ? demanda-t-il, surexcité.


Cherie lui caressa doucement le visage.


- Tout ce que tu veux, mon cœur. On va voir ta chambre ?


Arvel acquiesça.

Cherie et Wilfrid attrapèrent chacun l'une des mains de leur enfant. Ils se dirigèrent vers les escaliers. L'étage comportait deux salles de bains, ainsi que trois chambres : celle des parents, une pour les invités et celle d'Arvel. Au rez-de-chaussée se trouvait le hall d'entrée, débouchant immédiatement sur le grand salon-salle à manger et sur la cuisine américaine. Une mezzanine permettait une vue imprenable sur le salon. Une baie vitrée se trouvait d'ailleurs au fond, débouchant directement sur l'immense jardin qu'Arvel appréciait déjà tant.

Ce fut Arvel qui, après avoir lâché ses parents, poussa la porte de sa nouvelle chambre. C'était la seule pièce qu'il n'avait pas visité dans la maison. Ses yeux s'ouvrirent en grand sous l'émerveillement. Il s'avança de quelques pas dans la pièce, bouche bée. Il tourna sur lui-même avec lenteur à plusieurs reprises, pour être sûr de ne rien louper. Un lit en forme de voiture de course se trouvait à gauche de la pièce. En face, il y avait un bureau, une grande bibliothèque, ainsi qu'un coffre à jouets. Entre les deux, une fenêtre donnait une vue directe sur le jardin. En face du lit, une grande armoire était encastrée dans le mur. De plus, des posters étaient accrochés un peu partout.


- Tu aimes ? interrogea Wilfrid, inquiet de ne pas avoir fait plaisir à son fils.

- J'adore ! répondit Arvel, des étoiles dans les yeux.


Arvel courut jusqu'à son lit. Il s'y assit tout au bout, en faisant mine de conduire la voiture. Il s'amusa pendant quelques minutes sous le regard attendri de ses parents, avant de bondir sur ses pieds. Il rejoignit Cherie et Wilfrid pour câliner leurs jambes.


- Merci, merci ! sourit Arvel.


Il était véritablement heureux pour la première fois depuis longtemps.


***


Une fois à table, Arvel avait perdu toute sa mine joyeuse et son euphorie. Il avait posé sa tête sur son petit poing fermé. Son sourire avait disparu pour laisser place à un air triste. Cherie et Wilfrid se regardaient sans savoir quoi faire. Ils ne comprenaient pas le soudain changement d'humeur de leur fils.


- Tu ne trouves pas ça bon ? s'enquit Cherie.


Pourtant, elle avait préparé un plat constitué de poulet et de frites pour être certaine de faire plaisir à Arvel. Elle s'était sans doute trompée, car il n'avait quasiment touché à rien, ne serait-ce une ou deux frites.


- Si... murmura-t-il.

- Alors que t'arrive-t-il ?


Arvel haussa les épaules. Il releva ses grands yeux vers ses parents, à tour de rôle. Il ne mentait pas. Il ne comprenait pas ce qui lui prenait. Il avait la sensation qu'une chose importante lui manquait. Son cœur se serrait à la sensation d'avoir quitté la Norvège pour de bon, pour rejoindre l'Angleterre. Arvel ne comprenait pas encore totalement la langue de ses parents, mais heureusement ceux-ci s'était mis à apprendre le norvégien l'année dernière pour être en mesure de communiquer avec leur fils. Cela marchait plutôt bien et ils ne tarderaient pas à lui enseigner l'anglais.


- Est-ce que tu te languis de te faire de nouveaux copains à l'école ? dit Wilfrid pour changer de sujet.


Arvel hocha lentement la tête. Il offrit un maigre sourire à son père puis à sa mère, avant d'avaler un minuscule morceau de poulet, ainsi que quelques autres frites. Après quoi, il demanda la permission de sortir de table pour rejoindre sa chambre. Il enfila son pyjama Cars –que ses parents avaient acheté exprès pour son arrivée– et se glissa sous les draps.

Une boule s'était logée dans le ventre et dans la gorge d'Arvel. Il fit semblant de dormir quand ses parents passèrent lui souhaiter une bonne nuit en déposant un baiser sur son front. Arvel passa sa première nuit dans sa nouvelle maison à se tourner dans tous les sens, sans réussir à trouver le sommeil.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top