Chapitre 40




- Tu devrais lâcher le volant, conseilla Edwardo en fixant son ami qui même en portant des lunettes de soleil ne parvenait pas à masquer la dureté sur son visage.

Face au silence, Edwardo insista.

- Tu vas finir par le briser Lazaro.

Les yeux rivés sur l'entrée de l'hôtel de Suzana, l'italien serra les mâchoires en faisant craquer sa nuque. Hannah avait décidé de confronter sa mère seule, mais Lazaro était sur ses gardes, scrutant les alentours à la recherche du moindre danger.

- Ma femme est en danger Edwardo, finit-il par répondre, estime toi heureux qu'il s'agisse seulement d'un volant.

- On va régler cette affaire comme nous l'avons toujours fait, lui dit-il d'une voix censé l'apaiser

- Nous aurions dû la régler il y a bien longtemps, répliqua le mafieux d'une voix grave en lâchant le volant.

- Tu l'as mis sur écoute ?

- Non, je lui fait confiance, en revanche j'ai mis des mouchards sur ses vêtements par sécurité, dit-il sans quitter les allées et venues devant l'hôtel.

- Est-ce que tu lui as dit ?

Lazaro fronça des sourcils.

- Lui dire quoi ?

- Que tu l'aimes.

Lazaro serra les dents, s'agitant sur le siège en cuir. Edwardo était doué pour entamer des sujets aussi sensibles comme celui-ci.

- Ce n'est pas le moment Edwardo, il faut que je me concentre, répondit-il agacé.

- Il y a neuf gardes postés à chaque coin de l'hôtel et trois à l'intérieur, tu as tué deux hommes ce matin après les avoir chassé comme tu le fais si bien, rétorqua Edwardo. Je crois que la sécurité autour d'Hannah est suffisamment intense pour que tu prennes le temps de répondre à cette question.

Lazaro fit claque sa langue contre ses dents.

- Hier soir, j'aurai pu la perdre, elle aurait pu me quitter, lâcha-t-il en serrant le volant de nouveau. J'ai été horrible avec elle, je lui ai dit des choses que je regrette tant.

- Mais elle est là non ?

Lazaro émit un rire amer.

- Parce que je l'ai rattrapé à temps, poussé par un élan de lucidité mais le mal a été fait mon ami.

- Tu voulais l'éloigner pour la protéger de ce que tu es ou pour te protéger toi ?

- Les deux, répondit-il d'une voix graveleuse, remplie d'amertumes et de regrets.

Edwardo soupira et Lazaro lui, sentit au bord de sa paupière une larme glaciale qui resta figée et cachée par ses lunettes noires.

- Ils m'ont tous abandonné Edwardo, lança-t-il d'une voix vibrante d'une rage à peine contenue. Aucun membre de ma famille n'a pensé au mal que leur disparition pourrait me faire. Ma mère s'est tirée une balle dans la tête avec la conviction que j'étais assez fort pour surmonter ça comme elle l'a dit dans cette lettre d'adieux. Mon père s'est noyé dans l'alcool et j'avais beau lui dire que j'avais encore besoin de lui, il s'est tellement abîmé qu'il a fini par disparaître dans le tréfonds des mers.

Il inspira profondément avec une douleur au cœur.

- Ils m'ont tous abandonnés sans se soucier de ce que l'héritier Santi allait ressentir, conclut-il les dents serrées.

- Je suis désolé Lazaro, murmura Edwardo mal à l'aise d'entendre ce qu'il n'avait jamais réussi à dire pendant des années.

- Quand j'ai voulu Hannah, une part d'ombre en moi essayait sans cesse de se convaincre qu'un jour je me lasserai d'elle et qu'elle pourra célébrer sa liberté retrouvée tôt ou tard, mais c'est tout le contraire qui s'est passé. Plus les jours passent plus elle s'imprime en moi de plus en plus profondément.

- Alors tu pensais que...

- Je me suis dit que si je la poussais à partir maintenant je n'aurai pas à subir un autre abandon, lâcha-t-il en lâchant le volant pour se passer une main sur sa bouche dessinée en un rictus amer. Je me suis persuadé que si un jour elle devait voir les horreurs dont je suis capable, alors elle prendrait la fuite et qu'il valait mieux en finir avant d'en arriver là.

- Mais tu en es incapable, ce qui signifie que tu l'aimes beaucoup trop pour baisser les armes si vite.

- Je n'ai jamais dit ces mots à personne, je ne suis pas certain d'être en mesure de lui dire comme je ne suis pas sûr que Dieu soit certain de ce qu'il a fait en mettant cette jeune femme sur mon chemin.

- Pour apaiser ton cœur, et te montrer qu'il n'y a rien d'écrit à l'avance, déclara Edwardo. Hannah sait depuis le début où elle a mis les pieds, et elle sait qu'elle ne peut pas changer ça. C'est notre nature, on ne peut pas nous changer complètement.

Lazaro prit note de cette discussion avec le cœur plus léger d'un autre poids ôté. Il se passa les doigts sur ses paupières et essuya cette larme solitaire discrètement.

- Tu crois qu'elle a réussi à lui faire dire la vérité ?

- Je ne sais pas, mais si dans cinq minutes elle n'est pas redescendu, c'est moi qui monte, déclara-t-il en saisissant son téléphone qui vibrait dans sa poche.

Hannah était profondément déçue par sa mère qui depuis dix minutes ne faisait que lui mentir. Elle était venue jusqu'ici pour lui donner une chance de faire preuve d'honnêteté.

- Maman pour la dernière fois, je te donne une dernière chance de me dire la vérité.

- La vérité c'est que c'est cet homme qui t'a mis toutes ces fausses idées dans la tête ! Ça suffit maintenant tu vas rentrer avec moi ! Vociféra Suzana en jetant ses affaires dans la valise.

- Lazaro ne fait que me protéger, au contraire de toi.

Cette réplique cinglante la fit se redresser, l'expression outrée.

- Hannah comment tu peux dire ça ?

- Je t'ai donné une chance de te confier et d'être franche avec moi maman. Tu n'as pas saisi cette opportunité pour me dire à quel point tu es désolée de m'avoir caché que je suis la fille de James Butler.

Le choc courut sur le visage de Suzana qui se laissa tomber sur le lit, livide.

- Qu...quoi ? Bredouilla-t-elle en osant à peine la regarder dans les yeux.

- Pourquoi tu as caché ce secret maman ? Pourquoi tu m'as rien dit ?

- Parce que c'était mieux ainsi, lâcha-t-elle enfin, dévoilant au grand jour ses péchés. Je suis désolée Hannah mais je n'avais pas d'autre choix et si Lazaro est à l'origine de cette découverte je t'en supplie il faut lui dire de ne rien révéler à personne. Tu m'entends Hannah ?

Hannah étouffa un rire.

- Tu arrives trop tard maman, lui dit-elle en s'approchant du lit. Tous le monde est au courant et depuis des années. À commencer par Michael.

Suzana pâlit aussitôt en se levant du lit, l'expression inquiète.

- Quoi ? Qu'est-ce que tu dis ?

- James a essayé de te retrouver après votre nuit de passion, et il t'a retrouvé avec l'aide d'un détective quelques mois plus tard. C'est comme ça qu'il a découvert que tu étais enceinte. Il est resté dans l'ombre jusqu'à ma naissance mais quand il a voulu entrer dans ma vie Michael a tout fait pour le mettre hors circuit. Michael savait que je n'étais pas de lui. Il s'est vengé en faisant accuser James de crimes qu'il n'avait pas commis et il est resté des années en prison.

Hannah marqua une pause pour laisser sa mère avaler la dure vérité.

- James est sorti de prison et à pris des dispositions nécessaire pour rester dans l'ombre. Il a mis des années à bâtir ce qui avait été déconstruit et ce compte bloqué c'est lui qui l'a ouvert pour moi.

- Oh seigneur non ! S'exprima sa mère une main sur la bouche.

- Maintenant ton mari veut essayé de me tuer pour toucher cet argent.

Suzana se retint à la poutre du lit en fuyant le regard de sa fille, submergée de honte.

- James n'était pas assez bien pour toi ? Il n'avait pas assez d'argent ?

- Non je t'en prie ne dit pas ça ! S'écria Suzana en affrontant Hannah les larmes aux yeux. À l'époque c'était différent de maintenant. Ma mère ne voulait pas que je quitte Michael et je me suis confiée à elle quand je suis tombée enceinte. Je voulais quitter Michael et rejoindre James à Londres, mais ma mère a réussi à me convaincre que je serais rejetée par James et que je serais la honte de la famille. Oh mon dieu ce n'est pas vrai ! C'est elle qui lui a tout dit.

Hannah s'approcha de sa mère qui semblait lutter pour ne pas s'effondrer au sol.

- Tu veux dire que c'est grand-mère qui a dit à Michael que je n'étais pas de lui ?

- Comment l'aurait-il su sinon ? C'était la seule qui connaissait mon secret ! Ma propre mère m'a trahie ! Dit-elle avec dégoût une main sur la bouche.

Le cœur serré, la gorge nouée, Hannah prit les bras de sa mère pour la soutenir.

- Je me suis laissée persuader d'une chose que je ne voulais pas Hannah, et j'ai voulu oublier à quel point ce secret était horrible. En réalité tous le monde savait.

- Maman, murmura-t-elle en la prenant dans ses bras.

- Je regrette tellement, tu n'as pas idée.

- Tu aurais dû me le dire maman, jamais je n'aurai pu te rejeter.

Suzana serra sa fille dans ses bras les larmes aux yeux.

- Plus les années ont passé plus c'était inenvisageable de le dire.

Hannah s'écarta pour plonger son regard dans celui de sa mère et lut dans ses yeux une douleur et des remords sincères. En réalité sa mère avait été manipulé par sa propre mère qui avait tout fait pour la persuader de rester avec un homme qu'elle n'aimait pas.

Soudain la porte de la chambre s'ouvrit à la volée. Lazaro pénétra la pièce le regard sombre et méfiant.

- Tout va bien ne...

Il posa son index sur sa bouche pour les enjoindre à se taire et balaya la chambre d'un regard aiguisé comme celui d'un prédateur. Il semblait chercher quelque chose.

- Alors vous avez enfin dit la vérité à votre fille ? Lança-t-il en leur faisant signe de feindre une conversation alors qu'il fouillait la chambre.

- Je n'ai pas été d'une franche honnêteté au départ, répondit Suzana après avoir été encouragé à répondre.

- J'espère au moins que vous avez demandé le pardon à votre fille ? Vous n'imaginez pas à quel point cette histoire l'a fait souffrir.

- Vous n'imaginez pas à quel point je regrette monsieur Santi.

Lazaro écrivit sur son téléphone pour faire passer un message à Hannah et la mère de cette dernière puis le rangea dans sa poche intérieure.

- Je n'en doute pas, mais par votre faute j'ai perdu un temps considérable pour protéger votre fille, répondit Lazaro en prenant un ton sec. Maintenant il n'y a plus de temps à perdre. Je pense que le mieux c'est que vous partiez aujourd'hui pour New York. Le temps pour moi de mettre un terme à tout ça. Je ne peux pas vous protéger toutes les deux.

Hannah ignorait ce que Lazaro avait découvert mais cela semblait très inquiétant.

- Prévenez Peter de votre départ, il est au courant de tout, poursuivit l'italien en prenant la main de la jeune femme. Embrasse ta mère Hannah, nous devons partir.

Le cœur battant à la chamade, elle déposa un baiser sur la joue de sa mère sans trop comprendre les raisons d'une telle précipitation.

Lazaro la tira presque à l'extérieur jusqu'à l'ascenseur et attendit que les portes se referment pour saisir son téléphone.

Hannah essaya de déchiffrer l'italien du mafieux alors qu'il parlait vite et fort.

- Lazaro que se passe-t-il ? Demanda-t-elle quand il eut raccroché.

- J'ai besoin d'aller vérifier quelque chose et tout de suite.

Il lui prit la main pour l'entraîner avec lui jusqu'à la voiture. Edwardo n'était plus là et la vitesse avec laquelle Lazaro s'installa au volant lui fit craindre le pire.

- Est-ce que ma mère est en danger ?

- Ne t'inquiète pas pour elle, mes hommes vont l'installer dans un endroit sûr.

- Lazaro est-ce que tu peux me dire ce qu'il se passe ?

Il ne répondit pas, fonçant dans le trafic pour rejoindre le club.

Hannah le suivit, le ventre noué alors qu'il se précipitait à l'intérieur comme un fou. Il ouvrit les portes violemment et s'avança jusqu'au bar pour le contourner. Il n'y avait personne, ils étaient seuls à nouveau et cela lui rappela la veille.

- L'enfoiré ! Rugit-il en jetant la veste de Peter restée au club depuis qu'il lui avait enlevé de ses épaules.

- Lazaro ? Qu'est-ce que...

- C'est Peter, depuis le début c'est lui !

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