Chapitre 33




Hannah se trouvait dans le salon quand un bruit assez fort l'extirpa de sa torpeur. Il faisait froid et il était très tard. Elle avait attendu le retour de Lazaro toute la journée avec une boule à l'estomac. Ils ne s'étaient pas quitté sur de bons termes, et la froideur du mafieux l'avait glacé. Elle regrettait d'avoir pu douter de lui, même pendant une fraction de seconde. Son cœur l'avait raisonné à temps mais peut-être pas dans l'esprit du mafieux. Elle se leva du canapé quand des bruits de pas assez fort pour les redouter s'élevèrent dans le sombre silence.

Le mafieux passa les deux grandes portes ouvertes et Hannah ne pu s'empêcher de lâcher un hoquet en se reculant l'air effrayé.

Le visage de son mari se fissura aussitôt de regrets et de colère mêlés. Sans doute n'avait-il pas prévu qu'elle puisse le voir dans un tel état.

Hannah ne pouvait pas mentir sur les émotions qui étaient en train de l'assaillir alors qu'elle dévisageait ses habits couverts de sang. Ses mains l'étaient aussi, comme si le sang s'était glacé sur ses doigts.

Il se mit à respirer fort, le torse gonflé de respirations fortes.

- Qu'est-ce que tu fais ici Hannah ? Tu n'aurais pas dû te trouver là.

- Je...je t'attendais, bredouilla-t-elle en refermant les pans de son peignoir en soie. J'étais inquiète et je crois que j'avais raison de l'être.

- Tu n'aurais jamais dû me voir comme ça, dit-il avec un rictus de dégoût aux lèvres.

La peur commença lentement à disparaître et elle fit un pas en avant.

- Tu es terrifiant, glissa-t-elle d'une voix nerveuse et basse. Mais je...je suis sûre qu'il y a une raison pour que tu sois dans cet état.

Il se contenta de la regarder avec cette même respiration indomptable.

Ce moment dura plusieurs secondes dans lesquelles Hannah redouta le pire.

- L'un des voyous envoyé par ton père a eu une mort lente et douloureuse, lâcha-t-il enfin.

Hannah cessa de respirer une fraction de seconde alors qu'il se dirigeait vers le bar pour se servir un verre. Elle resta en retrait sans bouger.

- C'est lui qui est venu jusqu'à toi ou l'inverse ? Demanda-t-elle la gorge serrée.

- Je l'ai traqué à l'instant même où il a posé les pieds sur mon sol. Ton affreuse sœur avait dit vrai. Ton père a bel et bien engagé des voyous pour te récupérer.

Hannah fit un pas en avant, le ventre noué tout en croisant ses bras contre ce dernier.

- Qu'est-ce que tu vas faire ?

Il leva son verre pour boire une gorgée sans jamais cessé de la regarder.

- S'ils continuent de se présenter, ils finiront comme le premier.

Cette phrase avait été prononcée sans aucune once d'humanité. Ses yeux étaient hantés par des éclairs foudroyants, et le sang séché sur ses mains lui donnait un aspect terrifiant.

Hannah ne savait ni quoi faire ni quoi dire pour le calmer.

- Tu es fâchée contre moi ?

- Pour quelle devrait-je être fâché contre toi tesoro ? S'enquit le mafieux en posant son verre sur la table basse.

- Parce que j'ai douté de toi, admit-elle en baissant les yeux. Même si ça a été qu'une seule fraction de seconde je l'ai pensé.

Un silence glacial surplombait désormais ce grand salon. Profondément touchée par la situation, Hannah sentit sa bouche s'engourdir.

- Alors tu devrais aussi être fâché contre moi, lâcha-t-il enfin.

Hannah releva la tête aussitôt pour le dévisager les sourcils froncés.

- Qu...quoi ?

Il resta immobile, très loin d'elle, comme si lui-même était rebuté par l'image qu'il renvoyait.

- Il faut impérativement que tu prennes place sur le canapé, lui conseilla le mafieux sur un ton sombre mais calme.

Désorientée, Hannah tourna la tête vers celui-ci avant de s'y approcher pour s'installer.

- Tu me fais peur Lazaro.

- Ce n'est pas mon but, mais nous devons parler de choses très importantes et j'ai besoin d'être sûr que tout ira bien.

Le visage de l'italien était creusé par une profonde inquiétude. Hannah qui n'avait de cesse de déglutir se contenta d'acquiescer.

Il prit place sur le fauteuil en face d'elle, à bonne distance.

- Marco a fait des recherches plus approfondies afin de savoir ce que ton père te veut réellement et les raisons qui le poussent à te dresser contre moi, commença-t-il dune voix adoucie. Il se trouve qu'il a découvert qu'un compte avait été ouvert le jour de ta naissance. Un compte bloqué que seul le bénéficiaire peut le débloquer avec une signature authentique.

Hannah secoua imperceptiblement de la tête en battant des cils.

- Je ne sais pas de quoi tu parles Lazaro, je n'ai aucune connaissance sur ce compte.

- Je le sais, dit-il doucement. C'est justement pour cette raison que je suis en train de t'en faire connaissance.

- Mais...qui a ouvert ce compte ? Mes parents ?

- Je l'ignore encore, mais ce que je sais c'est qu'il contient deux millions de dollars.

Hannah reçut un tel choque que même assise elle vacilla. C'était impossible et elle osait à peine y croire. La totalité de ses pensées étaient en train de se bousculer alors que le sang quittait peu à peu son visage.

Enfin, l'expression de Lazaro devint grave.

- Ton père veut te monter contre moi afin que tu te tournes vers lui parce qu'il veut cet argent. Créer ce mensonge sur moi était une première tentative pour que tu m'échappes, mais il savait que ça ne serait peut-être pas suffisant. Alors il a payé des hommes pour faire le sale travail à sa place.

Lazaro était dans une situation terrible et ne parvenait pas à trouver les bons mots pour apporter en douceur la triste réalité.

Comment lui dire que son père, sa chair et son sang mettait tout en œuvre pour lui ôter la vie ?

- Le sale travail ? Répéta-t-elle avec amertume en se levant lentement.

Lazaro la suivit des yeux alors qu'elle regardait le sol tout en marchant vers la grande fenêtre.

Soudain fébrile, la jeune femme se mit dos à lui pour contempler la nuit froide et sans lune.

- Tu...es en train d'essayer de me dire que mon père essaye de me tuer ?

Lazaro ferma les yeux brièvement, les dents serrées.

- Seule ta signature peut ouvrir ce compte ou bien ta disparition.

Il se leva aussitôt après avoir prononcé ces mots terribles et la rejoignit pour poser ses mains sur ses épaules.

- Je ne laisserai personne te faire du mal tesoro, tu le sais n'est-ce pas ?

Elle tremblait, et dans le reflet de la fenêtre il put voir une larme tracer un sillon.

Lazaro l'obligea alors à se retourner et prit en coupe son beau visage meurtrie avec ses mains ensanglantées.

- Tu entends ce que je dis ?

- J'ai entendu que mon propre père voulait me tuer, dit-elle la bouche tremblante. Comment a-t-il pu en arriver là ?

Il posa un doux baiser sur sa bouche pour la réconforter mais rien ne pouvait enlever la peine qu'elle avait dans les yeux.

- Je vais le retrouver tesoro je te le promets, et je le tuerai ainsi que tous ceux qui seront impliqués.

Derrière le voile triste, une interrogation se souleva.

- Parce qu'il y a d'autres personnes impliquées ?

Il relâcha son visage et fit un pas en arrière.

- Je l'ignore pour l'instant mais je compte bien le découvrir très vite. Ta mère doit arriver demain.

- Ma mère ? Répéta-t-elle d'une voix choquée. Tu penses que ma mère est impliquée ? Non Lazaro c'est impossible.

- Tout est possible, essaye de ne pas l'oublier à l'avenir. Si ce compte a été ouvert à ton nom c'est que quelqu'un de ton entourage est forcément au courant.

Elle ouvrit la bouche pour entamer une longue défense mais il la coupa.

- Tu as passé les dernières années de ta vie à essayer de la faire sortir de cet hôpital. Tu as renoncé à ta vie pour elle en acceptant de devenir ma femme. Qu'as-tu reçu en échange ?

Elle se mit à réfléchir les yeux dans le vague.

- Ta mère cache des secrets que je compte bien lui faire avouer, termina-t-il en allant récupérer son verre.

- Lazaro tu ne comptes tout de même pas l'envoyer là où je pense.

- Si elle ne réponds pas à mes questions avec honnêteté si, répondit-il implacable en quittant le salon pour rejoindre l'escalier.

La jeune femme resta immobile, sans doute en état de panique absolu. Mais dès qu'il entra dans leur chambre il entendit des bruits de pas se rapprocher en catastrophe.

- Lazaro c'est ma mère ! Tu ne...

- Je me fous qu'il s'agisse de ta mère, la coupa-t-il en terminant son verre qu'il plaqua contre le marbre de la grande commode. La seule personne qui m'importe c'est toi, reprit-il en déboutonnant sa chemise. Tu sais à quel genre d'homme tu es mariée, ce n'est pas une surprise.

- Et si je ne suis pas d'accord ?

Il s'approcha d'un pas dangereux tout en essayant d'être compatissant avec le chagrin de la jeune femme.

- Je ne te donne pas le choix cara mia parce que il en va de ta vie et le reste n'a aucune importance à mes yeux. Ta mère doit simplement répondre à mes questions et tout se passera très bien. Dans le cas contraire je serais beaucoup moins gentleman qu'à notre première rencontre.

Elle agrippa sa chemise à moitié ouverte les yeux suppliants.

- Je t'en prie Lazaro, murmura-t-elle démunie et perdue.

- Tu seras présente à l'interrogatoire, sois sans craintes, ajouta-t-il en enroulant ses mains autour de ses poignets.

- Et l'inconnu ? Et si c'était lui le véritable coupable ? Lança-t-elle dans un sursaut d'amour pour sa mère mêlé au désespoir.

- Je me méfie de lui, mais jusqu'ici son petit jeu de piste était le bon. Surtout lorsqu'il a dit que tu étais le dernier recours et qu'il fallait te protéger.

La jeune femme abaissa ses yeux dans le vague et Lazaro se maudissait d'être aussi implacable mais il le devait pour la protéger. Sa peur de la perdre était si immense qu'il avait l'impression de l'avoir déjà perdu.

- Ma seule priorité c'est de te protéger, murmura-t-il en l'attirant à lui.

- Promets-moi de ne pas être trop dur avec elle Lazaro, souffla-t-elle les yeux suppliants.

N'ayant pas le cœur à lui faire plus de mal, Lazaro posa un baiser sur son front.

- Je te le promets...

Bien sur, avec cette promesse il n'avait pas le droit de fauter. Hélas il réalisa que sa décision de l'éloigner du véritable Lazaro avait été une profonde erreur. Dans cette bulle dans laquelle il l'avait enfermé, Hannah c'était constituée une image de lui plus proche de l'homme d'affaire que du mafieux.

Ce soir en témoignait avec ses yeux effrayés lorsqu'il était entré dans le salon couvert de sang.

En choisissant de l'écarter de cette vie plus sanguinaire et impitoyable Lazaro avait commis une erreur qu'il devait maintenant réparé par des promesses qui mettraient à mal son incontrôlée soif de vengeance.

Ses yeux suppliants eurent raison de lui, mais pas seulement.

Il y avait aussi cette foi qu'elle avait dans le fond de ses prunelles.

Alors il se fit la promesse de tout faire pour protéger la confiance qu'elle avait en lui et que les ennemis de l'ombre essayaient de briser...

Au risque de la perdre...

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