Chapitre 31
- Ma famille a encore invité la totalité de mon immeuble pour un grand dîner et ce n'est pas fini ! S'esclaffa Inaya à l'autre bout du fil.
Hannah sourit intérieurement.
- Tu me manques, glissa-t-elle soudain émue d'être aussi loin d'elle.
- Toi aussi tu me manques Hannah, mais je reste convaincu que cette nouvelle vie te fera du bien.
- Comment peux-tu en être aussi certaine ? Demanda Hannah en fixant l'italien qui était de l'autre côté de la piscine en pleine conversion avec Edwardo.
- Nous travaillons ensemble depuis des années et nous sommes devenus amies par la suite. J'ai eu le temps de t'observer Hannah et sans vouloir te vexer ta vie était disons...au point mort.
Hannah émit un petit rire sans joie.
- Eh bien merci de me le dire maintenant ! Lança-t-elle en faisant mine d'être vexée.
- Il n'est jamais trop tard pour dire la vérité et puis sincèrement tu avais tellement de soucis avec ton père et ta mère que je n'avais pas le cœur à te blesser.
- Ça ne m'aurait pas vexé, je sais que ma vie n'a jamais été très...passionnante.
- Et elle l'est à présent ?
Si elle était passionnante ?
La réponse était oui.
Hannah vivait des moments exaltant mais quelque chose lui manquait cruellement.
- Oui elle l'est.
- Alors je suis heureuse pour toi Hannah et j'espère te revoir d'ici la fin du mois.
- Moi aussi Inaya, murmura-t-elle avant de raccrocher.
Elle reposa son téléphone sur la table en écoutant le chant hypnotique des cigales avec un sentiment de nostalgie.
- Alors tesoro, ton amie se porte bien ?
Hannah quitta sa torpeur et fit face à son mari qui venait de reprendre place en face d'elle. Il était presque impossible de ne pas fléchir devant ce mâle viril qui adorait masquer son regard derrière une paire de lunette noire.
Elle dut s'efforcer de reprendre une respiration avant de répondre.
- Oui, elle se porte comme un charme, répondit-elle en forçant un sourire. Elle est contente de retrouver sa famille.
- Dans ce cas qu'est-ce qui te rend si émotive ? La questionna-t-il en lui servant un verre de jus d'orange.
- J'aimerai travailler Lazaro, lâcha-t-elle avant de ne plus pouvoir le dire.
Son regard masqué ne lui permettait pas de voir sa réaction mais il reposa avec lenteur la carafe comme si cela l'avait surpris.
- Je n'ai pas de boutique florale à disposition bébé, je suis malheureusement désolé.
Attendrie par ce petit mot doux glissé dans ce refus, Hannah ne perdit pourtant pas son objectif.
- Donc tu serais contre que ta femme travaille ?
- Ce n'est pas ce que j'ai dit, répliqua le mafieux sur un ton étrangement calme. J'ai dit que je n'ai pas de boutique à disposition pour combler ce vide.
- Ce n'est pas un vide Lazaro, c'est juste que je ne me vois pas rester ici à t'attendre quand tu iras travailler et me tourner les pouces.
Il se frotta la barbe mais ne dit rien, signe que cette perspective ne lui plaisait guère.
- Tu as l'impression d'être abandonnée ?
- Non ! Pas du tout ! S'empressa de dire Hannah en secouant légèrement la tête. J'aimerai faire ce que j'ai toujours voulu faire et je...
Elle s'interrompit, profondément mal à l'aise d'exprimer la suite.
- Je t'écoute tesoro, n'ai pas peur de parler.
- J'aimerai que tu m'accordes un prêt...
Il retira ses lunettes à la hâte pour lui donner un aperçu de sa réaction. Le grand patron de la mafia d'ordinaire imperturbable paraissait choqué et dérouté.
- Je te demande pardon ?
Hannah s'agita sur la chaise les mains moites et le regard fuyant.
- J'ai toujours voulu avoir un atelier pour créer mes propres bougies et tout un tas d'autres produits, mais je n'ai jamais réussi à économiser assez pour me le permettre. La boutique est très rentable mais les coûts d'un tel projet sont hors d'atteinte pour moi.
Elle releva les yeux et le regretta aussitôt.
Il avait l'air dans une colère noire.
- O...oublie ce que je viens de dire.
- Tu te rends compte de ce que tu viens de dire Hannah ? Lança-t-il d'une voix ruisselante de colère. Nous sommes mariés bon sang ! Comment tu peux me demander un prêt comme si tu étais une de mes employés !
Hannah se mordit l'intérieur de la joue.
- Je ne savais pas comment amorcer cette demande Lazaro.
- Eh bien en exprimant ton projet sans me demander de l'argent. Dois-je te rappeler que tu es ma femme ?
La fureur dans ses yeux l'empêcha de respirer mais elle répondit :
- Dois-je te rappeler que mon père t'a volé de l'argent ?
Il fit claquer sa langue.
- Je me fous de ton père ! Il s'agit de notre mariage, de ta vie à mes côtés. Tes projets sont les miens et tu n'as pas à me quémander de l'argent.
- C'est parce que je n'ai jamais oser demander à quelqu'un une telle somme d'argent et je suis mortifiée d'être assemblée à mon père.
Il écarta brusquement la chaise.
- Approche, ordonna-t-il.
Hannah se leva, les jambes tremblantes, le cœur martelant sa poitrine déjà si douloureuse.
Elle s'installa sur ses genoux et eut du mal à le regarder dans les yeux.
- Tu es ma femme, tu n'es pas ton père, je refuse de recevoir cette demande qui m'a donné cette horrible impression que tu étais réduite à l'humiliation. Est-ce que c'est compris ?
- Oui, s'entendit-elle murmurer alors qu'il tenait son menton.
Il captura ses lèvres avec une délicatesse qui l'emporta dans un moment de plénitude qui malheureusement ne dura pas.
- La villa est assez grande pour trouver une pièce qui sera spécialement pour toi, il suffit juste de me dire de quoi tu as besoin.
Hannah posa le plat de sa paume de main contre sa nuque, les yeux dans le vague.
- Eh bien j'aimerai inventer mes propres bougies parfumées et aussi des savons pour commencer, lui dit-elle alors qu'il caressait son bras. Ça demande du temps et de la concentration.
- Ah...donc je ne serais pas convié ? Au risque de te...déstabiliser...
Hannah sourit alors qu'il remontait sa main tatouée jusqu'à sa gorge.
- C'est exactement ça.
- Quel dommage, dit-il d'une voix rauque en déposant un baiser sur son épaule.
- Signore Santi, votre rendez-vous est arrivé, annonça Bianca.
Hannah se redressa sur ses genoux et les regarda tour à tour.
- Quelle rendez-vous ?
- Un détective privé qui a déjà travaillé pour moi par le passé, je lui ai demandé de venir pour lui proposer un travail qui ne va certainement pas refuser.
Hannah déglutit, forcée de se lever pour qu'il en fasse de même.
- Reste ici, je n'en ai pas pour longtemps.
Bien sûr Hannah aurait voulu être conviée mais ce détail n'eut plus aucune importance lorsque son téléphone sonna à nouveau.
En voyant le nom s'afficher sur l'écran, un mélange d'amertume et de colère la gagna.
- Quel plaisir d'apprendre que tu te souviens de moi, lança-t-elle sèchement en s'éloignant vers les vignes.
- Oh mais je pourrais te dire la même chose ma très chère petite sœur, répliqua Sandy avec sarcasme.
- Qu'est-ce que tu veux ? J'imagine que ce coup de fil a un intérêt.
- Plusieurs en effet, claironna Sandy. Comme tu le sais tu m'as volé ma place et je veux des réparations.
- Volé ta place ? Répéta Hannah avec un rire sans joie. Tu penses que j'ai voulu tout ça ? Je ne suis pas comme toi Sandy et encore moins comme papa.
- Pense ce que tu veux Hannah mais tu ne peux pas disparaître et oublier que tu as une famille. J'espère que tu réalises que tu partages le lit d'un assassin qui a tiré sur papa.
- Oh mais ça ne semblait pas te déranger qu'il soit tel que tu le décris quand tu voulais te marier avec lui, riposta Hannah.
Elle pouvait sentir sa sœur bouillir à des milliers de kilomètres.
- Papa est sorti de l'hôpital et il te cherche partout, il est fou de rage que tu sois avec Lazaro.
Hannah nota cette information cruciale avec une boule d'anxiété dans la gorge.
- Il m'a vendu à lui, c'est lui qui m'a fait signé les papiers. Il m'a piégé et tu voudrais me faire croire qu'il est en colère ?
- En tout cas, ce que je sais c'est qu'il a pris contact avec des types assez louches pour te retrouver. Il dit que tu es en danger avec Lazaro et que cet homme tu tueras bientôt.
Hannah pivota sur elle-même pour lever le regard sur les balcons de la villa.
- Ce sont des mensonges et je connais suffisamment papa pour avancer cette déclaration.
- Qui te dit que ce n'est pas la vérité, lança Sandy d'une voix presque espiègle. Après tout tu ne connais rien de lui. Les légendes racontent qu'il a tué une femme...enfin c'est papa qui me l'a dit.
Hannah poussa un rire presque silencieux, déconcertée par ce coup de fil, anéantie de réaliser que ses proches continuaient sans relâche de la blesser.
- C'est une raison supplémentaire pour ne pas y croire. J'en ai assez entendu Sandy.
- Bien, soupira-t-elle en feignant d'être lassée. En tout cas je t'aurai prévenu. Comme ça si tu meurs j'aurai au moins la satisfaction de récupérer un peu d'argent.
Des larmes de colère lui brouillèrent les yeux alors que Sandy avait déjà raccroché.
Les jambes tremblantes Hannah s'enfonça dans le vignoble à contre-sens pour rejoindre le domaine. Sandy avait réussi à lui embrouiller le cerveau à tel point qu'elle était à quelques émotions près de la croire.
Hannah monta l'escalier qui menait à son bureau, le teint livide et ne prit pas la peine de frapper.
Il tourna la tête en même temps que le détective privé et tout deux furent surpris de cette entrée fracassante.
- Je vais vous laisser, annonça l'homme aux cheveux poivre et sel.
- Merci pour tout, glissa le mafieux sans la quitter des yeux.
Quand la porte se referma Hannah se sentit pétrifiée et regrettait presque cette arrivée impromptue.
- Que se passe-t-il ? Tu es livide, tu veux que j'appelle un médecin ?
- Est-ce que oui ou non tu as tué une femme ?
Le mafieux qui avait commencé à se rapprocher se stoppa net et son regard devint noir.
- Que viens-tu de me dire ?
Hannah sentit ses lèvres trembler alors qu'elle luttait pour garder son regard dans le sien.
- Sandy vient de me téléphoner et m'a dit que papa lui avait...
- Je n'ai jamais tué une femme de ma vie ! La coupa-t-il froidement. C'est contraire aux règles de ma mafia. Ni femme ni enfant. Je t'ai dit ce qui arrivait à ces femmes quand je tenais leur traître de frères ou maris.
Elle vacilla en portant ses deux mains à son front.
- Seigneur je...
Une main ferme la rattrapa alors qu'elle vacillait sous le choc.
- Je suis désolée, murmura-t-elle alors qu'il la conduisait vers le canapé. Elle m'a dit des choses horribles.
- Tu aurais dû monter directement dans mon bureau Hannah, dit-il avec agacement.
- Elle a dit que tu allais me tuer, murmura-t-elle d'une voix altérée par le coup de poignard qu'elle avait reçu en plein cœur.
- Et tu as osé la croire ?
- Non ! Bien sûr que non !
Il saisit son visage en coupe pour que son visage soit en face du sien.
- Qu'a-t-elle dit précisément ?
- Que mon père était ivre de rage et qu'il avait engagé des types louches pour venir me chercher. Elle a dit que tu étais un assassin qui me tuera dans peu de temps et elle a dit aussi que si je mourrais elle aurait la satisfaction de toucher de l'argent. Lazaro je croyais que nous n'étions pas liés sur ce sujet quand on a parlé du contrat de mariage.
Les sourcils froncés, rictus aux lèvres, le mafieux avait l'air de réfléchir sans interruption.
- Non, tu as raison Hannah et je crois que je commence à comprendre où mène enfin ce jeu.
Le cœur battant à la chamade elle vit dans ses yeux l'enfer se peindre à l'encre noire et comprit avec douleur que la paix ne serait pas pour tout de suite.
Du moins pas tant que les ténèbres régneraient en maître.
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